Questions de recherche, corpus et méthodologie
Dans ce chapitre, nous allons présenter nos questions de recherche, notre corpus ainsi que les méthodes déployées pour son analyse. Dans un premier temps, nous expliciterons les questions de recherche définies en fonction de notre revue de la littérature (section 1). Ensuite, nous presénterons les choix sous-tendant la constitution du corpus (section 2), avant de présenter plus en détail les enfants et situations d’enregistrement dans les deux sous-ensembles constituant le corpus de la thèse : le corpus francophone et le corpus germanophone (section 3). Nous exposerons en section 4 nos axes d’analyse, et présenterons les outils et méthodes déployées en section 5. Nous allons, pour répondre à cette question, décrire l’ensemble des expressions potentiellement référentielles ainsi que les expressions dans des usages référentiels, et nous allons croiser différents facteurs formels, tels que la fonction syntaxique et la linéarisation des expressions dans l’énoncé. Nous analyserons notamment quelques relations et régularités entre catégories d’expressions référentielles, fonction syntaxique et position dans l’énoncé. Plus spécifiquement, nous souhaitons contribuer à la description des formes et fréquences des dislocations, en décrivant leurs distributions dans les productions des enfants, mais aussi des mères, en français et notamment en allemand, où la fréquence des dislocations n’a pas encore été suffisamment examiné empiriquement. Pour le français, nous nous interrogerons sur la fréquence des dislocations et sur des indices formels d’un emploi spécifique aux jeunes enfants et/ou dans le discours qui leur est adressé. Dans ce sens, nous nous intéresserons particulièrement au taux des dislocations, au ratio entre dislocation à gauche et à droite ainsi qu’à leur possible association à des schèmes lexico-syntaxiques.
Comme nous l’avons dit dans notre introduction, nous souhaitons également étudier l’influence de différents facteurs liés à la gestion de l’information sur l’usage des expressions référentielles : Outre la dimension informationnelle, nous souhaitons également interroger nos données à la lumière de la gestion de l’interaction. Nous nous demanderons alors quels phénomènes décrits dans la littérature sont également pertinents pour décrire notre corpus, et nous examinerons les questions suivantes : Nous l’avons montré, la dislocation est une ressource disponible dans les deux langues français et allemand. Or, nous savons qu’elle n’est pas exploitée au même degré dans les deux langues. Des différences importantes sont également à noter quant à l’emploi des noms en fonction sujet, les systèmes des pronoms personnels et démonstratifs et leurs usages, ainsi que les possibilités structurelles de non-verbalisation des référents. Nous nous interrogerons alors systématiquement sur l’influence de la langue dans l’expression de la structuration de l’information et notamment du topic : In fine, à travers ces réflexions croisées, nous espérons pouvoir contribuer à répondre à la question suivante : les schémas d’usage observés, en français et en allemand, des dislocations et des autres moyens d’expression référentielle fournissent-ils des arguments en faveur de l’hypothèse de la primauté des fonctions ? Autrement dit, est-ce que nos analyses suggèrent que les enfants, qu’ils soient francophones ou germanophones, montrent des compétences discursives, pragmatiques et interactionnelles précoces, dont l’expression s’approche progressivement au modèle adulte, venant ainsi renforcer les théories acquisitionnistes basées sur l’usage et l’interaction ?
Afin de pouvoir étudier l’effet de l’interaction entre l’adulte et l’enfant sur l’acquisition du langage, nous avons besoin de données qui nous permettent d’observer autant que possible les modalités de cette interaction. Pour cette raison, les enfants du corpus transversal ont été enregistrés dans un contexte aussi naturel que possible. Les enregistrements se déroulent au domicile de l’enfant, majoritairement avec la mère. Pour certaines familles, des frères ou sœurs sont présents également et participent à l’interaction. Nous avons considéré que la présence de la fratrie fait partie du quotidien de l’enfant, et que ce sera en conséquence moins naturel de les exclure artificiellement. Plus encore, dans une famille l’enfant cible est le cadet dans une fratrie de trois enfants. La mère affirme que ce sont le plus souvent les ainées qui jouent avec l’enfant, plutôt qu’elle-même. Pour cette raison, nous avons filmé cette enfant en interaction avec sa sœur aînée.