Qu’est ce que la mobilité sociale ?
Définitions
La mobilité sociale est la circulation des individus d’une société donnée entre des positions sociales dont on sait qu’elles ne sont pas toutes équivalentes, donc qu’elles sont hiérarchisées, car elles ne procurent pas toutes les mêmes avantages, économiques et symboliques.
Elle peut aussi prendre plusieurs formes :
• La mobilité intergénérationnelle désigne le changement de position sociale d’une génération à une autre. On compare la situation du fils par rapport à celle du père. Cette mobilité peut être verticale ascendante quand le mouvement se fait du bas vers le haut (ex : le fils d’un ouvrier devient cadre), verticale descendante quand le mouvement se fait du haut vers le bas (ex : un fils de cadre devient ouvrier) ou horizontale lorsqu’il n’y a ni ascension sociale, ni régression sociale.
• La mobilité intragénérationnelle désigne le changement de position sociale d’un individu au cours de sa vie active. Elle peut être verticale ascendante (un ouvrier devient technicien au cours de sa vie active), verticale descendante (un ingénieur, après une période de chômage, retrouve un emploi de technicien) ou horizontale (un ouvrier qualifié devient employé).
Du point de vue analytique, la mobilité sociale obéit à deux types de causes différentes :
– La mobilité structurelle ou contrainte est due à l’évolution de la structure de la population active. C’est la mobilité imposée par l’évolution de la structure sociale d’une époque à l’autre. (CHP 2)
– la mobilité sociale pure (nette) qui dans une hypothèse de structure professionnelle inchangée résulte de la circulation entre les positions sociales. Elle peut être ascendante ou descendante (mobilité nette = mobilité brute – mobilité structurelle).
La mobilité parfaite ou totale n’existe pas. Si elle existait, les hommes se répartirait, au hasard, aux différents niveaux indépendamment de leur origine : un fils d’ouvrier aurait autant de chances de devenir PDG que le fils du patron d’une société
Le rôle des PCS
Le repérage des positions sociales (positions de sexe et d’âge exclues) se fait en France grâce aux codes des catégories socioprofessionnelles. Il suggère une structure sociale basée sur :
– la distinction des salariés et des indépendants
– la mise à part des agriculteurs (logiquement indépendants)
– pour les salariés, différenciation entre le statut juridique de l’employeur (privé ou Etat) et les niveaux de qualifications et de responsabilité des salariés.
La profession est donc un élément fondamental de la position sociale d’un individu.
Si cette classification n’est pas une classification de classe au sens marxiste, on y retrouve néanmoins quelques uns des éléments de base de toute classe sociale : importance donnée à la place dans le système productif, représentation de la structure sociale.
Une mobilité variable selon les sociétés
En effet, toutes les sociétés ne connaissent pas ce phénomène de mobilité.
Dans les sociétés de castes, les individus sont rangés dans des catégories strictement déterminées tant politiquement qu’au plan économique. Dans ce cas le statut social est héréditaire. (Par ex en Inde, le mariage entre Brahmanes et intouchables- les parias- sont impossibles). Toutefois des assouplissements sont possibles avec l’apparition de nouvelles professions (pilotes d’avion) qui recrutent dans différentes castes (même si l’on continue à appartenir à la caste de ses ancêtres).
Dans les sociétés d’ordres comme la chrétienté médiévale les individus sont regroupés selon le degré d’estime et de dignité. Par principe ces deux types de hiérarchisation excluent que les groupes soient perméables les uns aux autres. (Clergé, Noblesse, Tiers Etat dans la France de l’ancien régime). L’hérédité est donc forte même si l’on pouvait passer du Tiers Etat à la Noblesse par l’anoblissement et la vénalité des offices (le titulaire d’un office s’arrogeait le droit de désigner son successeur moyennant un paiement en fonction de la valeur de l’office).En revanche, dans les sociétés industrielles le caractère héréditaire des positions sociales est aboli en droit. La déclaration des droits de l ‘Homme et du Citoyen en abolissant les privilèges (donc en supprimant les ordres) établit cette égalité de droit C’est l’idéal égalitaire selon lequel, chaque individu, en fonction de ses mérites, peut en théorie accéder à n’importe quel statut social. Cette notion prend ses sources dans les valeurs des sociétés modernes : la liberté (de choisir son destin), l’égalité (des chances offertes à tous), le progrès (des individus) et la rationalité (de leur distribution dans le corps social)
Nos sociétés sont-elles pour autant devenues fluides ?
Q1 : Quelle est la différence entre mobilité intra générationnelle et mobilité inter générationnelle ? Laquelle des 2 nous intéresse davantage dans ce TD ?
Q2 : Dans quel type de société, le statut social est-il transmis, dans quel type de société est-il acquis ?
Q3 : Quand la mobilité sociale est possible, cela signifie-t-il que les inégalités de positions sont supprimées ?
La mobilité structurelle, élément important, de la mobilité sociale. (doc 6 p 14)
S’interroger sur les facteurs de la mobilité, c’est bien sûr chercher à comprendre ce qui peut la favoriser ou au contraire la freiner, mais c’est aussi entrer dans un débat qui touche toute la sociologie : ces trajectoires de mobilité ou d’immobilité sont-elles plutôt le résultat de l’action des individus (des acteurs, dit-on souvent) ou plutôt le résultat des transformations de la société qui rendent nécessaires cette mobilité sociale ? C’est le débat entre une analyse de type holiste et une analyse de type individualisme méthodologique.
Q4 : Décrire les principales évolutions. Quelles sont les trois mutations sociales que cela met en évidence ?
Q5 : Montrer que l’on peut parler d’un glissement vers le haut de la structure sociale.
Q6 : Quels sont les principaux facteurs structurels de mobilité mis en évidence dans l’annexe 1 (ci-dessous)
Q7 : Quelles questions en déduisez vous quant à la mobilité sociale ?
Annexe 1 : Les décennies cinquante et soixante dix correspondent à une époque de transformations économiques rapides qui se sont traduites par de très importantes défor¬mations de la structure socioprofessionnelle. La paysannerie s’est réduite comme une peau de chagrin, tandis que les couches moyennes salariées explosaient en nombre. Il en est résulté quasi mécaniquement des transferts massifs de certaines professions en déclin vers d’autres en expansion rapide. Cette mobilité obligée ou minimale, contrainte par l’évolution des structures, est appelée mobilité structurelle. Il s’avère après calcul (on compare les effectifs des catégories sociales de la génération des fils et ceux de la génération des pères) qu’une partie importante de la mobilité observée dans les pays développés est due aux transformations des structures professionnelles. Le solde, ou mobilité nette ou encore, de circulation, est relativement stable, ce qui signifie que, pratiquement, l’augmentation des flux de mobilité est complètement imputable à la seule mobilité structurelle.
Une autre forme de mobilité structurelle tient aux différences de fécondité entre les groupes socioprofessionnels. Un groupe dont la fécondité est relativement forte ne peut, en effet, à structures professionnelles stables, conserver en son sein tous ses enfants; une partie devra obligatoirement émigrer vers d’autres groupes, ceux dont la fécondité est moins élevée. Ce phénomène a accentué la mobilité forcée des fils d’agriculteurs et d’ouvriers, catégories relativement plus prolifiques que les autres.
Dans le même ordre d’idée, l’immigration d’ouvriers non qualifiés, pendant les années d’après guerre, a favorisé l’ascension sociale d’une partie de la classe laborieuse puisque les postes les plus dévalorisés étaient occupés par les immigrés. On peut soutenir enfin que le confinement relatif des femmes actives dans les postes subalternes a permis à davantage d’hommes d’occuper des emplois moyens ou supérieurs. CHATAGNER, Les Classes sociales, Le Monde éditions, 1997.
Construction et interprétation des tables de mobilité. Doc 6 p 152 (point méthode p 439)
Mesurer la mobilité intergénérationnelle pose des problèmes techniques :
– il faut donc pouvoir disposer de chiffres comparables dans le temps, ce qui peut poser des problèmes du fait de l’évolution des métiers. (par exemple les instituteurs sont devenus professeur des écoles, donc PCS différente : PI PIS)
– il faut prendre des individus qui sont à peu près au milieu de leur carrière professionnelle (en général entre 40 et 59 ans), donc quand on parle de leurs pères, on parle de gens qui ont, ou auraient, une trentaine d’années de plus (entre 70 et 99 ans donc). Aujourd’hui se pose le problème de la moindre stabilité des emplois.
– d’autre part, très souvent, on ne prend que des individus du sexe masculin pour des raisons variées (par exemple, parce que les femmes avaient, et ont encore, moins souvent que les hommes une activité professionnelle facilement repérable car extérieure à la famille), et on parlera donc de la mobilité des fils par rapport à leurs pères.
Compte tenu de ces remarques, les sociologues construisent deux types de table de mobilité : les tables de destinée et les tables de recrutement.
Les tables de destinée (elles partent du passé et se projettent dans l’avenir) nous renseignent sur ce que deviennent les enfants (ou les fils) comparativement à ce que faisaient leurs pères. Elles se lisent en ligne de la manière suivante : que deviennent (destinée) 100 fils d’agriculteurs ? Ex) en valeur relative (%) sur 100 fils d’agriculteurs, 25 en moyenne sont agriculteurs eux-mêmes.
Les tables de recrutement nous renseignent sur d’où viennent les fils aujourd’hui dans telle ou telle CSP (dans quel milieu social ils se recrutent, c’est à dire que faisaient leurs pères). Elles se lisent en colonne de la manière suivante : quelle est l’origine sociale de 100 agriculteurs aujourd’hui (de 40 à 59 ans), autrement dit, que faisaient les pères de ces 100 agriculteurs ? On peut le lire en pourcentage. Ex : sur 100 agriculteurs en 1993, 86 en moyenne sont fils d’agriculteur
Dans les tables de mobilité, la diagonale est particulière : elle indique le degré d’« immobilité sociale » pour chaque catégorie, le poids de l’hérédité, si l’on peut dire.