Quelques réflexions sur la dissertation de culture générale et l’étude de texte au probatoire à l’inspectorat de l’enseignement élémentaire.
DU DEVELOPPEMENT
Réussir un bon développement repose essentiellement sur la maîtrise de l’argumentation. Un bon discours, un bon texte, se vérifie à ce qu’il contient de logique, de cohérent tant du point de vue du sens que de la forme. Savoir argumenter, connaître les piliers qui fondent une bonne argumentation est plus qu’indispensable dans l’apprentissage de la dissertation.
Qu’est-ce qu’argumenter ?
Dans n’importe quel échange d’opinion ou discours destiné à convaincre, il apparaît que l’argumentation est organisée selon trois (3) étapes :
– une idée directrice ou idée de prise de position ;
– des arguments ou idées-arguments ;
– des preuves ou idées-exemples.
Dans une dissertation, le nombre de questions soulevées dans l’introduction est égal au nombre de parties que l’on va développer. Autrement dit, chaque question (ou partie) est une idée directrice, et donc, de prise de position. Ces idées de prise de position ne doivent pas être très nombreuses ; tout au plus trois (3).
Expliciter l’idée directrice qui sous-tend ma thèse ou mon antithèse (dans les textes à orientation critique), c’est aller plus en avant, c’est-à-dire aller à la recherche d’idées–arguments pour mieux étoffer mon point de vue. Si je me limitais seulement à la recherche d’arguments, ma démonstration aurait un goût d’inachevé, car elle relèverait de l’abstraction. Les idées et les arguments ne peuvent à eux seuls convaincre. Pour que ma démonstration soit pertinente et se passe de commentaires, il faut que les arguments soient suivis d’exemples (preuves) qui peuvent être des citations ou exemples généraux. Ainsi la cohérence, la logique de l’argumentation se jaugent à ces trois aspects : idée directrice, arguments, exemples. Ils sont indissociables et chaque élément révèle l’autre. L’absence de l’un ou de l’autre entraîne la gratuité. Les preuves (exemples) doivent toucher le concret. Il nous est loisible de puiser dans les œuvres, les traités, les lectures, les personnages, les situations pratiques,…Pour ce genre de concours une même idée peut faire appel à différents domaines du savoir (apports de la philosophie, de la linguistique, de la psychologie, de la pédagogie, de la sociologie,…)
Premier exemple possible
Sujet : « Le savoir n’existe pas à l’état individuel ; il est partagé, il est donc culturel. » Qu’en pensez-vous ?
Idée de prise de position : La médiation du social est nécessaire à la construction du savoir.
Arguments | Exemples |
a) Ce sont les processus interpersonnels qui fondent ceux intrapersonnels.
b) Les aspects socioculturels déterminent, orientent grandement le savoir individuel.
c) Les compétences cognitives se construisent plus aisément par l’inter- action entre pairs en situation. |
→ « Toute fonction humaine
apparaît d’abord au niveau social, entre les personnes (interpsychologie), ensuite à l’intérieur de l’enfant (intra psychologie)».Schneuwly, B, (1986), Les capacités humaines sont des constructions sociales. Essai sur la théorie de Vygotsky.
→ Une même forêt apparaît différem- ment à un botaniste, à un bûcheron, à un peintre réaliste ou à un cubiste.
→ La co-résolution d’un problème, par l’interaction « individu tache alter » (Moscovici, (1984), Le domaine de la psychologie sociale, PUF), assure une meilleure appropriation d’un savoir partagé, validé en commun et par conséquent plus significatif. |
Deuxième exemple possible
Sujet : Un sociologue écrivait récemment : « Le sport contemporain, qu’on a souvent présenté comme une école de civilisation, est devenu presque universellement le spectacle de la bêtise et de la barbarie ». Qu’en pensez-vous ?Prenons une idée de prise de position possible : Le sport comme spectacle de la bêtise et de la barbarie
Arguments | Exemples |
a) Bêtise
-La recherche effrénée de la performance provoque une hyper spécialisation de la pratique sportive. -La santé des sportifs s’en ressent. -Le sport nourrit le corps et non l’esprit : intelligence sacrifiée, limitée. b) Barbarie -Les termes employés dans le sport ont une connotation péjorative et renvoient au duel. -Le chauvinisme -La transposition des conflits entre nations sur le terrain. |
+Les entraînements intensifs des haltérophiles obèses qui donnent finalement l’air de véritables monstres.
+L’usage de stupéfiants (dopage) qui accélère le vieillissement des tissus de l’organisme.
+Un sportif de compétition n’a que l’intelligence de son entraîneur auquel il s’identifie.
+Le champ lexical pour désigner les moments d’une rencontre (affrontements, renforcer la défense, écraser l’adversaire, passer à l’offensive, etc.)
+Conflits sanglants dans les stades ou en dehors (coupe d’Afrique junior au Bénin : gardien de but tué.)
+L’importance des mesures de précaution pour les matchs à tension. |
NB : La taille des arguments empruntés à ces deux exemples est à titre illustratif. Le candidat est libre de chercher autant d’arguments qu’il jugera nécessaires pour mieux expliciter sa prise de position.
Conclusion partielle
L’argumentation de chaque partie nous mène directement à la notion de conclusion partielle. Chaque partie d’une dissertation, bâtie sur la base d’une bonne argumentation avec des arguments et des exemples qui accrochent, a besoin d’être conclue. Cette conclusion doit être concise avec l’emploi d’expressions qui agrémentent le style : « Il apparaît donc que… » ; « Il ne serait donc pas superflu de dire… » ; « On a pu constater que… » ; « Tout compte fait… », etc.Une conclusion partielle est une ouverture sur la partie suivante. Il faut donc qu’elle annonce cette partie qui sera développée. Là également on pourrait employer des expressions du genre : « Toutefois il convient de considérer… » ; « On peut cependant s’interroger sur… » ; « Même si les avantages…, il n’en demeure pas moins que… ».
Liens logiques et transitions
Une bonne argumentation ne va pas sans un emploi judicieux et correct des termes-outils appropriés. L’exploitation sémantique des mots selon l’intention qu’on veut émettre (qu’il s’agisse d’une affirmation, d’une négation, d’une déduction, d’une illustration, d’une progression, d’une association, etc.) est incontournable. Trouver une transition juste et qui sonne bien reste un problème pour de nombreux candidats. Elle est importante non seulement pour passer, dans le cours du développement, d’une idée à une autre, mais aussi pour passer d’une partie à une autre. Disons simplement que les transitions peuvent être comparées à un lubrifiant. Nous proposons ici un tableau qui ne saurait être exhaustif, afin de mieux aider à faire un raisonnement logique. Il ne faut pas, par conséquent, abuser de telles « recettes »; il s’agit surtout de savoir les utiliser à bon escient tout en évitant la redondance.