Questions et méthodologie de recherche
À partir de l’étude de la littérature à la transition Lycée-Université dans le Chapitre 2, nous avons identifié des problématiques dans le domaine de l’Analyse et quelques difficultés que peuvent rencontrer les élèves lors de l’étude de suites récurrentes. Ici, la difficulté de ne pas amalgamer le type de travail engagé dans l’étude
de suites avec celui des fonctions, constitue une difficulté nouvelle (Praslon, 2000), située justement à la transition L-U. Cela est à additionner à un manque de contrôle de la part des élèves lors de la résolution de tâches mathématiques dans ce domaine de l’Analyse (Bloch, 2000 ; Praslon, 2000 ; Ghedamsi, 2008). Dans le Chapitre 3 nous avons présenté deux théories qui permettent d’étudier d’une part l’activité mathématique (TADM) et d’autre part, le travail mathématique (ETM). Dans le Chapitre 4 nous avons montré que ces théories se complètent de façon réciproque. De plus, le Networking de théories TADM-ETM permet une sensibilité aux analyses complexes à réaliser pour étudier le phénomène de la transition L-U, mais il permet aussi de définir et d’étudier la notion de contrôle mathématique essentiel dans cette transition.
Dans ce chapitre nous formulerons théoriquement les questions de recherche que nous nous posons. Celles-ci guideront ce travail de thèse en termes théoriques et nous permettront de définir les objectifs qui en découlent. Nous présenterons successivement la méthodologie générale de ce travail et les périodes de la recherche qu’elle implique.
Questions et objectifs de recherche
La recherche montre que la charge la plus importante des enjeux de la transition L-U repose sur les élèves (Corriveau & Bednarz, 2016). En effet, ce sont les élèves qui vivent le passage d’une institution à l’autre et ils seraient les plus affectés par les ruptures que l’on peut y trouver. Ici, les spécificités du domaine de l’Analyse se rapportent au problème de confronter les élèves : aux idées intuitives avec les définitions plus formelles (qui créent des difficultés cognitives) ; et au réseau de difficultés qu’ont les élèves entre les notions de suite, de fonction, de nombres réels et de limite, qu’il est difficile de démêler (Artigue, 2003). Par ailleurs, un autre des enjeux à la transition L-U est l’apprentissage de la preuve. On trouve qu’à l’université la manière de construire et de contrôler la validité de ces preuves n’est pas explicitée (Dreyfus, 1999). De plus, la conjecture joue une place importante dans l’apprentissage de la preuve qui est vraisemblablement prise en compte au niveau du lycée, mais que se passe-t-il au niveau de l’université ?
Pour étudier le domaine de l’analyse à la transition L-U nous avons choisi les suites définies par récurrence en tant qu’objet d’étude. En effet, les suites sont un objet riche pour l’apprentissage de l’analyse (Weigand, 2014, 2015) qui comporte un domaine d’intérêt mathématique (voir chapitre 1) ; et elles sont présentes dans le contexte français à la transition L-U (Bloch et al., 2017). Néanmoins, des difficultés dans leur apprentissage ont été constatées (Weigand 1991, Rousse, 2018), et le manque de contrôle mathématique des élèves dans la résolution de tâches du domaine de l’Analyse (Bloch, 2000 ; Praslon, 2000 ; Ghedamsi, 2008) n’aiderait pas. De plus, le problème du contrôle mathématique ne semble pas pris en charge par l’enseignement actuel alors que le contrôle mathématique est essentiel à l’entrée de l’université (voir chapitre 2 et 4). Ainsi, l’étude bibliographique nous a conduit à la question suivante.
Par ailleurs, les recherches à la transition L-U montrent que la conjecture joue un rôle important dans l’apprentissage de la preuve, et que la calculatrice aiderait à les élaborer. Nous nous demandons ainsi si les compétences en outils numériques et le travail sur les conjectures fait au lycée sont exploités à l’université. De cette façon la QR1 répond à l’objectif d’une caractérisation du terrain à étudier en termes théoriques : l’identification de l’ETM de référence concernant les paradigmes de l’Analyse travaillés, le travail mathématique attendu par chacune des institutions à travers l’analyse detâches. Cela va nous permettre de savoir quels éléments épistémologiques et cognitifs sont ou non considérés dans les deux institutions, pour en déduire ensuite les ruptures et les continuités. Pour répondre à la question QR1, il est nécessaire d’analyser théoriquement les tâches en contexte, ce qui implique la prise en compte de l’environnement (papiercrayon ou technologique), l’analyse de programmes d’étude en vigueur, l’analyse des manuels de lycée et les feuilles de TD de l’université. Il importe aussi d’analyser les tâches d’évaluation que l’on peut y trouver, ce qui permettra de caractériser l’ETM de référence attendu à la fin du lycée et au début de l’université. Objectif de la QR 1 : caractériser les ETM de référence et l’ETM attendu à la transition L-U concernant les suites définies par récurrence �! »# = �(�!), en identifiant des ruptures et des continuités en termes de sous-activités de contrôle sémiotique, discursive et instrumentale, et leur éventuel encouragement avec une dialectique entre les paradigmes de l’analyse [A1] et [A2].
Deuxième question de recherche
Pour pouvoir savoir quel type de contrôle il faut promouvoir à la transition L-U, comme conséquence de la QR1, il est nécessaire d’identifier comment les élèves s’emparent des différents contrôles et des paradigmes de l’Analyse que chacune des institutions cherche à développer. Cela implique aussi l’identification des difficultés que rencontrent les élèves en termes de sous-activités mathématiques et de travail mathématique. Ces dernières sont spécifiques à l’étude des suites définies par récurrence. C’est ainsi que l’on formule notre deuxième question de recherche comme suit.
Première question de recherche
Avant d’identifier quel type de contrôle promouvoir chez les élèves dans l’étude des suites récurrentes, il faut tout d’abord s’interroger sur la place du contrôle dans les programmes d’étude et les documents utilisés dans les deux institutions. Ensuite, pour étudier la transition il ne suffit pas d’étudier chaque institution de façon isolée mais il importe aussi de connaître quelles sont ses ruptures et quelles sont ses continuités (Gueudet, 2008). En conséquence, notre première question de recherche est.