Quel est l’apport de l’information radar pour la modélisation semidistribuée pluie-débit
Introduction
Dans le Chapitre 6, nous avons mis en évidence l’impact de la spatialisation des données d’entrée de précipitation sur la simulation des débits. Nous souhaitons dans ce chapitre, analyser l’apport des mesures radar de précipitation pour la modélisation pluie-débit. En effet, comme nous l’avons discuté dans le premier chapitre, les radars météorologiques permettent d’accéder à une observation spatiale des champs de précipitations (Marshall et al. 1947; Delrieu et al. 2009a; Berne and Krajewski 2013) de manière beaucoup plus complète que les mesures ponctuelles des pluviomètres. Il est cependant difficile de comparer directement les estimations ponctuelles et spatialisées des précipitations. En effet, d’une part les mesures de précipitations ponctuelles ne représentent jamais véritablement les précipitations réelles en un point et, d’autre part, les mesures de précipitation radar sont incertaines et dépendent généralement du réseau pluviométrique utilisé pour étalonner et corriger la mesure (Wilson and Brandes 1979; Krajewski et al. 2010). C’est pourquoi il est courant d’avoir recours à la modélisation hydrologique pluie-débit pour évaluer la qualité des estimations des précipitations (Dawdy and Bergmann 1969; Sun et al. 2000; Biggs and Atkinson 2011) en utilisant une référence mesurée généralement plus facile à observer, qui intègre ce qui se passe à l’échelle du bassin : le débit observé à l’exutoire des bassins versants. Dans le cadre de cette thèse, nous disposons de deux bases de données de précipitation établies par Météo-France. La première est issue du réseau de mesure pluviométrique uniquement, dont les données ponctuelles sont spatialisées par un krigeage des pluviomètres horaires et journaliers (KGP). La deuxième est la réanalyse des lames d’eau (REA) qui utilise les images radar de précipitation pour spatialiser les données ponctuelles pluviométriques (cf. Chapitre 2). Nous allons chercher à valider et quantifier l’utilité de l’information radar dans la réanalyse des lames d’eau par rapport à une utilisation exclusive des pluviomètres. Pour cela, nous allons comparer les modélisations pluiedébit semi-distribuées en réponse aux estimations des précipitations de chaque base de données (KGP et REA). Dans ce chapitre, la première partie présente la stratégie de modélisation pluie-débit appliquée sur un échantillon de 181 bassins versants et la méthodologie utilisée pour comparer les estimations des champs de précipitations entre les deux bases de données (KGP et REA).
Modélisation pluie-débit semi-distribuée
Modèle conceptuel semi-distribué
Pour comparer la qualité des bases de données de précipitations à travers la simulation pluie-débit, nous avons choisi le modèle semi-distribué que nous avons établi et validé dans le Chapitre 5. Il s’agit de la version semi-distribuée M2 du modèle global GR5H, présentant les caractéristiques suivantes : • Le bassin est décomposé en un ensemble de sous-bassins et une simulation pluie-débit globale GR5H est appliquée sur chaque sous-bassin. • Un modèle de propagation (délai pur) est utilisé pour router vers l’aval les débits calculés à l’exutoire de chaque sous-bassin, jusqu’à l’exutoire du bassin versant. • Les données d’entrée de précipitations sont spatialisées sur chaque sous-bassin. • Les paramètres du modèle sont uniformes sur les bassins, sauf le paramètre X4 (temps de base de l’hydrogramme unitaire) qui est distribué sur les sous-bassins. Ils sont estimés par optimisation des débits simulés par rapport au débit observé à l’exutoire des bassins versants (cf. Chapitre 5). Puisque nous avons constaté que les performances du modèle semi-distribué sont peu sensibles à l’échelle de discrétisation du bassin (cf. Chapitres 5 et 6), les simulations de débit semi-distribuées sont effectuées pour un seul maillage. Nous choisissons d’utiliser le maillage le plus fin étudié dans cette thèse : le bassin versant est décomposé en un ensemble de sous-bassins avec des tailles équivalentes de 4 km².
Données d’entrée de précipitation
Afin d’analyser l’apport des données radar de précipitations dans la réanalyse, les simulations semidistribuées de débit sont calculés à l’exutoire et aux points intérieurs de notre échantillon de 181 bassins versant (cf. Chapitre 3) pour chacune des deux bases de données de précipitation suivantes : (i) KGP : il s’agit d’une base de données horaires de précipitations établie par Météo-France et utilisant uniquement les mesures pluviométriques. Les mêmes traitements que la réanalyse ont été opérés pour spatialiser les données pluviométriques horaires et journalières sans utiliser l’information radar : les cumuls pluviométriques quotidiens sont spatialisés par krigeage, puis désagrégés au pas de temps horaire à partir du krigeage des données pluviométriques horaires (cf. Chapitre 2).