Qualité microbiologique et chimique de la viande porcine
LA DECHARGE ET SES IMPACTS SUR LES PRODUCTIONS ANIMALES I- CONDITIONS GENERALES DE CREATION D’UNE DECHARGE CONTROLEE
Définition d’une décharge contrôlée
La décharge contrôlée est une méthode d’élimination des ordures ménagères basée sur l’enfouissement des déchets et effectuée de façon rationnelle afin d’éviter tout risque de nuisance. C’est un procédé de traitement à part entière qui constitue aussi un moyen nécessaire d’élimination des résidus ou refus qui résultent des usines d’incinération ou de compostage. Son principal avantage est son coût relativement faible, mais en outre elle exige une mise en œuvre très soignée (FRANCE/MECV, 1981).
Conditions de création
La mise en place d’une décharge contrôlée est régie par un ensemble de lois et de règlements établis par les autorités administratives. Des études préalables doivent être menées. Pour une bonne implantation de la décharge ; il faut : – un choix judicieux du site en fonction des impératifs suivants : • la quantité de déchets à éliminer ; • la capacité de stockage du site : c’est-à-dire sa durée de vie ; • la perméabilité du terrain ; elle dépend de la nature des sols sous la décharge. Ce dernier facteur fait intervenir non seulement l’épaisseur et la nature des différentes couches de sol sous la décharge, mais aussi leurs propriétés physiques, chimiques et biologiques. La distance minimale entre le fond de la 20 décharge et la première nappe aquifère souterraine est également un facteur à ne pas négliger sauf si la nappe est inexploitable. • la décharge doit se situer loin de la source de captage et autres points d’alimentation en eau de consommation ; • l’existence de matériaux de couverture : l’établissement de la couverture est l’élément essentiel d’une décharge contrôlée. Elle a pour but d’éviter les odeurs nauséabondes, l’invasion par les rats, la prolifération d’insectes et la dispersion d’éléments légers. C’est pourquoi il est important de l’exécuter au fur et à mesure de l’établissement des couches de déchets. Pour cela, on peut utiliser le sable, la terre végétale et les cendres refroidies. • les conditions climatiques et géographiques : les dépôts d’ordures doivent être installés de préférence dans les zones les moins exposées aux précipitations. Il faut tenir compte de l’orientation et de la force des vents à cause des risques d’envol des éléments légers et de propagation d’odeurs nauséabondes. Il convient aussi de les implanter loin des cours d’eau et hors des régions inondables afin d’éviter le lessivage du dépôt et l’entraînement des déchets. – réaliser des études d’impact afin : • de définir l’état initial du site et de son environnement ; • d’étudier les effets du projet sur l’environnement ; • de trouver des mesures compensatoires destinées à remédier aux impacts négatifs sur l’environnement. – définir les techniques de mise en décharge : c’est-à-dire le mode d’exploitation. On peut procéder : • à la mise en décharge sans broyage préalable des déchets. Dans ce cas les déchets peuvent être : 21 + soit répartis en couches successives d’épaisseur modérée et suffisamment tassées ; avec nécessité de couverture ; + soit compactés par des engins spéciaux en couches minces ce qui évite le dépôt d’une couverture journalière. • à la mise en décharge avec broyage préalable qui ne requiert pas une couverture quotidienne avec des matériaux inertes. – les équipements et matériels nécessaires pour la mise en décharge : ainsi pour une bonne exploitation d’une décharge il faut un matériel, des équipements et des aménagements nécessaires (clôture, routes, etc.), adéquats et adaptés à la technique d’exploitation, à la quantité et à la nature des déchets. – effectuer des contrôles réguliers à savoir : • contrôle de la quantité et de la nature des déchets entrants ; • contrôle de l’évolution de la décharge ; • contrôle de la qualité des eaux de la nappe de ruissellement et de percolation. Pour cela il faut absolument installer à proximité de la décharge des puits appelés piézomètres. • contrôle des dégagements gazeux dus à la fermentation des matières organiques pouvant conduire à des risques de nuisance ; • contrôle des incendies. – valoriser les déchets et réaménager la décharge : les ordures ménagères contiennent certaines quantités de matériaux qui peuvent être récupérés et il est intéressant de valoriser ces matériaux par un tri des déchets sur le site même. On peut aussi procéder à une valorisation énergétique des déchets grâce à la récupération du méthane résultant des phénomènes de fermentation et qui peut être utilisé comme combustible. Une fois son 22 exploitation terminée, la décharge contrôlée doit être réintégré dans son milieu naturel (espace vert, mise en culture etc.). II- LA DECHARGE PUBLIQUE DE MBEUBEUSS Créée en 1968 pour éliminer les refus de broyage et le compost non valorisé de l’usine de Bel Air installé la même année, la décharge de Mbeubeuss n’était au départ qu’un dépôt destiné à surélever le terrain pour créer la route de Malika. Avec la fermeture de la décharge de Dakar située à Hann en 1970, la décharge de Mbeubeuss est naturellement devenue la décharge de la région de Dakar (SENEGAL/MTPN, 1991). Elle est située à Malika sur le lit d’un ancien lac asséché et sur les flancs de la grande dépression humide des Niayes : principale zone maraîchère au Sénégal (IAGU, 2006). L’entrée de la décharge est embranchée sur la route de Malika desservant d’un coté Keur Massar, Dakar, Rufisque et de l’autre Malika, Pikine, Thiaroye et Dakar. La décharge de Mbeubeuss est limitée à l’Ouest par Malika, Keur Massar au Sud, à l’Est par Tivouane peulh, et au Sud-est par Niakoul Rap. La décharge de Mbeubeuss accueille la quasi-totalité des déchets produits dans la région de Dakar soit environ 3100 m3 de déchet par jour. Ces déchets sont constitués de 92% d’ordures ménagères, 6% de déchets industriels et 2% de déchets d’hôpitaux (SENEGAL/MTPN, 1991). De plus, Mbeubeuss reçoit une partie (10 à 20%) des eaux usées domestiques récoltées dans les fosses septiques et issues du curage des caniveaux car elle représente le seul point de vidange autorisé dans la région de Dakar. La hauteur des déchets varie entre 3 et 8 m. La décharge ne cesse d’avancer vers le lac Mbeubeuss, car de 1970 à 1980, elle a envahi le lac sur une superficie de 45 ha et 9 ans plus tard 10 ha supplémentaires sont venus s’ajouter. Aujourd’hui, la décharge occupe 175 ha des 250 du lac (IAGU, 2006). Déjà en 1989 on estimait à 3,5 millions de mètre cubes le volume de la décharge. 23 Il n’existe pas de prescription d’exploitation, ni de contrôle relatif au dépôt en bonne et due forme des déchets. La seule forme d’exploitation que connaît la décharge depuis son ouverture demeure le simple terrassement des déchets déposés par les camions après leur pesage au pont bascule. Aucune autre opération n’est réalisée : pas de recouvrement des déchets par de la terre ou une substance inerte, pas de broyage ni compactage. De temps en temps, les déchets sont brûlés afin de gagner de l’espace bien qu’il soit interdit de mettre feu aux déchets sur les décharges. A l’instar de la plupart des décharges dans les grandes villes Ouest africaines, l’ouverture de la décharge de Mbeubeuss ne fut précédée d’aucun aménagement préalable et d’aucune étude d’implantation destinée à apprécier l’aptitude du site à l’exploitation d’une décharge. Pendant la saison des pluies, lorsque certaines zones de la décharge sont rendues inaccessibles, les déchets sont souvent amassés dans la zone d’entrée de la décharge. Lors de la monté du niveau des eaux souterraines après l’hivernage, une partie de la base de la décharge est inondée ; ce qui occasionne une infiltration de ces eaux (SENEGAL/ MTPN, 1990). Le sous-sol de la décharge est constitué de sable quaternaire et à environ 50 m de profondeur on trouve des marnes imperméables. Les huit essais d’infiltration réalisés à différents points du site pour se rendre compte de la perméabilité des différents types de sol en surface montrent des perméabilités variant de 10-8 à 10-4 m/s. Ces valeurs qui sont élevées autorisent une infiltration directe dans le sol; et donc ne peuvent constituer le fond d’une décharge. La décharge n’est pas clôturée et elle fait l’objet d’une fréquentation incontrôlée d’animaux errants et d’enfants récupérateurs ce qui est source d’une recirculation des produits usagés dans les circuits de consommation des quartiers environnants. L’élimination des déchets peut constituer un facteur économique non négligeable pour la plupart des populations dans les pays en voie de développement. En effet, sont installés au pied des déchets deux villages de 24 récupérateurs à savoir le village Gouigui situé à environ 500 m de l’entrée de la décharge, et le village Baol situé encore plus loin près de la montagne d’ordures. Une fois les ordures déchargées, commence le travail des récupérateurs qui trient et revendent en partie les déchets. Ils travaillent dans des filières relativement spécialisées. D’après les résultats d’enquêtes (DIOP et WAAS, 1990), cinq filières ont été repérées : – les chiffons (40,8%) – les plastiques (15,7%) – les métaux (14,5%) – les cartons et papiers (14,5%) – les verres creux (14,5%). Le secteur, souvent qualifié d’économie de subsistance draine une quantité non négligeable de ressources. III- IMPACTS POSSIBLES D’UNE DECHARGE SUR LES PRODUCTIONS ANIMALES III.1- Impacts négatifs La décharge accueille essentiellement des ordures ménagères; donc la pollution du site devrait être comparée aux pollutions connues des grandes décharges d’ordures ménagères. Mais il faut tenir compte des déchets industriels, hospitaliers et liquides car même si leur présence est moindre que celle des ordures ménagères, leur pouvoir polluant est extrêmement plus important et ils entraînent des pollutions diffuses graves (DIOP, 1996). Une des plus importantes questions liées à la gestion des décharges demeure la gestion des lixiviats qui sont générés par les liquides présents dans les déchets, et l’eau d’origine externe, qui percolent à travers les déchets. Les lixiviats contiennent divers contaminants à des niveaux de contamination qui peuvent avoir des impacts environnementaux sur les eaux souterraines et de surface et peuvent donc constituer une menace pour la santé humaine 25 (JOHANNESSEN et LARS, 1999) et pour les populations animales de la région d’où pour la santé publique vétérinaire. Outre la pollution des eaux souterraines et de surface, les décharges brutes entraînent des dommages sur la végétation, polluent l’air et participent au réchauffement climatique (Jong Scok LIM et PAUL MISSIO, 2003) et ont donc ainsi une incidence sur les productions animales, quand on sait surtout que dans le cas de la décharge de Mbeubeuss la quasi-totalité de l’alimentation des porcs est issue des restes de ménage provenant de la décharge. Les animaux sont également soumis à d’autres facteurs de stress représentés par le bruit, la poussière et la fumée du fait de l’augmentation du trafic incessant des camions d’ordures et du brûlage des ordures (malgré que cela soit interdit) qui constitue en dehors du terrassement le seul mode de traitement des ordures. On note également dans la région la prolifération des mouches (IAGU, 2006), d’autres insectes et arthropodes, de même que des rongeurs qui sont de possibles vecteurs de diverses maladies. Poussière, fumée et substances volatiles issues du corps de la décharge sont à l’origine de diverses pathologies, en l’occurrence celles respiratoires. Le risque le plus critique sur la santé des populations en situation de cohabitation avec la décharge demeure celui lié aux malformations congénitales des nouveaux nés que des études épidémiologiques réalisées dans les pays développés ont permis d’éclairer (FIELDER et al., 2000 ; ELLIOT et al., 2001). La littérature fait aussi état de la prévalence élevée de symptômes non spécifiques chez les populations riveraines tels que la fatigue, les maux de tête, la somnolence, l’irritation de la gorge, les difficultés respiratoires, les affections dermatologiques et d’un risque potentiel d’hypofertilité, hypotrophie fœtale et d’effets tératogène (COMITE DE QUARTIER DE LA BALME, 2003). On y fait aussi référence à des risques de développer dans le voisinage des décharges des cancers variés (foie, rein, poumon, estomac, etc.) et des désordres psychiatriques attribués à l’environnement défavorable. Les potentielles 26 pathologies que la littérature a identifiées dans les nations développées seraient amplifiées chez les populations vivant au voisinage de la décharge de Mbeubeuss ; et ceci en raison de son mode d’exploitation qui est caractérisé par une absence de recouvrement par les matériaux inertes, de récupération et de traitement des gaz et lixiviats, par un rejet des déchets ménagers mélangés aux déchets industriels et biomédicaux (IAGU, 2006). Ces divers impacts sanitaires observés chez les humains pourraient également sans nul doute se retrouver chez les animaux vu les interrelations existantes entre ces derniers et la décharge (eau de boisson polluée par la décharge, alimentation provenant de la décharge, etc.). Le risque de contamination de l’élevage en lui-même par la décharge de Mbeubeuss a été observé par CISSE (2004) qui a noté dans le cadre de sa thèse une intense activité de récupération de déchets alimentaires au niveau de la décharge de Mbeubeuss. Cette activité est pratiquée par les femmes qui s’adonnent à l’élevage de porcs. Ces dernières ont observé dans le passé des mortalités brutales dans leur élevage qu’elles ont lié à la récupération des déchets alimentaires (le riz en l’occurrence). Ces risques sur l’élevage sont confirmés par l’étude sur la contamination des œufs de poule par les dioxines, les Biphényles Polychlorés (PCB) et l’Hexachlorobenzene (HCB) aux environs de la décharge de Mbeubess, réalisée par Pesticide Action Network (PAN) Africa en 2005. La décharge de Mbeubeuss a aussi été une hécatombe pour les troupeaux de bovins et ovins de la zone, car ayant consommé des sachets plastiques enveloppant les déchets alimentaires (corps étrangers). III.2- Impacts positifs (IAGU, 2006) La décharge de Mbeubeuss n’a pas que des impacts négatifs car elle constitue une importante source de revenus pour les populations riveraines qui sont pour la majorité, défavorisées. Ainsi, nonobstant la production de ressource, particulièrement le gaz et le terreau, la décharge fait l’objet d’une intense activité de récupération dont celle des déchets alimentaires (le riz) qui constitue 27 la principale source d’alimentation utilisée par les éleveurs de porc de la région (les femmes en majorité) dans leur élevage. Ceci constitue un important facteur de diminution des coûts de productions et donc un gain substantiel pour ces éleveurs de porc.
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