PSEUDO-FOLLICULITE DE LA BARBE

PSEUDO-FOLLICULITE DE LA BARBE

 Spécificités de la région de la barbe 

La pilosité faciale terminale apparaît chez le garçon durant la puberté en même temps que les poils axillaires. Les androgènes stimulent la transformation des poils duveteux en poils terminaux, plus longs, plus épais et pigmentés [1]. Les poils de la barbe se distinguent des cheveux du cuir chevelu par: • Le nombre de poils au niveau de la barbe: varie entre 6000 et 25 000 poils. • La vitesse de pousse des poils: est de 0,27 mm/jour en moyenne. Chez l’homme, la croissance des poils de barbe est corrélée au taux plasmatique de 5 alpha-dihydrotestostérone (DHT) alors que la densité pilaire est corrélée aux taux de testostérone. • La direction de pousse des poils: est pluridirectionnelle. • Les fibres: ont plus de couches de cuticule, sont plus épais et ont une forme plus variable. • La peau environnante: est riche en aspérités, rendant la surface irrégulière et est également richement innervée. L’irrégularité de la peau est due notamment à des petites surélévations au niveau du cou, qui la rendent plus pourvoyeuse en irritation et coupures .

Particularités des poils crépus

  • Forme: hélicoïdale ou spiralée dont la caractéristique morphologique majeure est l’enroulement serré sur lui-même qui se produit autour du petit axe de section de l’ellipse (figure 1). La forme enroulée est en fait déterminée, à la partie basse du follicule, par une asymétrie de développement de la gaine épithéliale externe qui est génétiquement programmée [8]. 5 • Implantation des follicules: dermique profonde, incurvée et oblique presque horizontale (figure 2) [9]. Figure 1: Morphologie crépue du poil africain [8] Figure 2: Implantation horizontale du poil crépu (HES × 50) [9] • Trajet des tiges pilaires : en hélice serrée dont la spirale s’amorce avec l’émergence du cheveu à la surface cutanée. (Le trajet est rectiligne chez les « Caucasiens », les « Asiatiques » et les « Mélanésiens » [8]. • Section des tiges pilaires: elliptique ou aplatie avec une concavité dirigée vers l’épiderme qui favorise l’incarnation du poil, à l’opposé du cheveu raide qui a une section plus ronde ou légèrement ovale. Plus le cheveu est frisé et plus la section de la tige pilaire est aplatie [10]. 6 • Sébum : certains auteurs estiment que le poil africain est moins recouvert de sébum, parce que celui-ci serait sécrété en quantité insuffisante et s’écoulerait plus difficilement le long de la tige pilaire spiralée et comportant des nœuds [10]. II.Historique La PFB a été rapportée pour la première fois par Fox en 1908 [6]. En 1956, Strauss et Kligman lui ont attribué le nom de « pseudo-folliculite de la barbe » et l’ont associée au rasage [2]. La PFB a connu plusieurs dénominations : comme sycosis de la barbe, sycosis vulgaire, poils incarnés, folliculite traumatique de la barbe et boutons de rasage ou du rasoir [3]. La PFB est devenue un problème social entre les années 1960 et 1970 en raison de l’afflux important de militaires noirs dans les forces armées américaines où les règlements internes exigeaient des visages rasés de près. Ces derniers l’avaient communément surnommée « bosses de rasage » [2]. Actuellement, il est admis que la PFB fait partie au même titre que la folliculite fibreuse de la nuque anciennement appelée « acné chéloïdienne de la nuque » d’un même cadre nosologique des pathologies d’incarnation des poils.

 Epidémiologie – Prévalence

 La prévalence exacte de la PFB est inconnue. Elle serait comprise entre 45% et 83% selon les différentes études menées aux Etats-Unis au sein de la population afro-américaine [2]. La plus grande étude portant sur la prévalence de la PFB, effectuée par l’armée américaine et ayant inclut 234 militaires, avait retrouvé une prévalence de près de 80% dans ce sous-groupe [2]. 7 Une étude descriptive menée en 2004 par des dermatologues exerçant en région parisienne (hôpitaux publics et cabinets privés) incluant 836 patients de phototype V ou VI (africains ou antillais), avait noté que la PFB était la dermatose la plus fréquente dans cette population [11]. Elle représentait 2,6% de l’ensemble des consultations en dermatologie, suivie de la folliculite fibreuse de la nuque, ainsi que des cellulites disséquantes du cuir chevelu et les alopécies mécaniques [11]. En effet, Mclean [12] avait estimé que son incidence était de 94 % chez les patients Afro-américains contre 16 % chez les personnes d’origine européenne .

 Ethnie

 La PFB concerne surtout les sujets d’origine africaine [13]. Cependant, elle a été aussi rapportée dans toutes les autres ethnies, en particulier chez les hommes à barbe dense et dure, ne faisant pas d’elle une pathologie spécifique de la peau noire [14]. Par ailleurs, elle est plus grave avec un potentiel évolutif sévère chez les AfroAntillais

 Sexe

 La PFB peut se produire chez les deux sexes avec un sex ratio H/F=20/1 [9]. Elle touche essentiellement les hommes sur les zones rasées de la barbe mais aussi les femmes après épilation des poils au niveau du visage, du pubis, des creux axillaires et plus rarement des jambes .

.Age 

La PFB survient essentiellement chez les hommes jeunes après la puberté avec une prédominance entre 14 et 25 ans [2]. La moyenne d’âge des patients atteints de PFB était de 22 ans dans une étude américaine incluant 71 patients dont 41 femmes et 30 hommes . Les femmes sont généralement affectées pendant la période de la péri ménopause en raison des variations hormonales qui peuvent engendrer une croissance des poils dans la zone de la barbe [2]. Par contre, les femmes hirsutes peuvent être affectées à un âge plus précoce [2]. IV. Aspects étiopathogéniques  Mécanisme de l’incarnation pilaire Comme son nom l’indique, la PFB n’est pas une vraie folliculite car la topographie de l’inflammation est juxta-folliculaire plutôt qu’intra-folliculaire ( figure 3) et au départ il n’y a pas de micro-organisme en cause [7]. La forme, la direction et la nature de croissance du poil crépu favorisent l’incarnation des poils qui engendre une réaction inflammatoire [16]. Figure 3: Mécanisme d’incarnation pilaire au cours de la PFB [3] Une fois rasée, la tige pilaire présente un bord tranchant et croît de façon courbe, conduisant à sa réentrée dans l’épiderme (pénétration extra-folliculaire) ou au percement du mur du follicule pilaire lors de sa croissance (pénétration transfolliculaire) (figure 4). Dans les deux cas, on note une réaction inflammatoire granulomateuse responsable des lésions cliniques [3]. 9 Figure 4: Schéma du mécanisme impliqué dans la PFB [3] A : La pénétration extra-folliculaire d’un poil B : La pénétration trans-folliculaire d’un poil  Facteurs liés au rasage Le procédé de rasage fait intervenir 3 acteurs qui favorisent le phénomène d’incarnation pilaire [17] :  le type de rasoir : Les techniques permettant un rasage « de près », comme les rasoirs à double ou triple lame, augmentent la tension de la peau pendant le rasage et aggravent ce phénomène, en produisant une rétraction de la tige pilaire en dessous de la surface de l’épiderme, favorisant la pénétration trans-folliculaire [7].  la peau : Le phénomène est plus important aux endroits où le poil pousse tangentiellement à la peau, comme les faces latérales du cou, où le rasage provoque une section oblique de la tige pilaire, plus acérée qui a tendance à pénétrer dans la peau facilement [7]. En outre, la xérose de la peau due aux cornéocytes qui desquament constitue un obstacle pour le rasoir et peut être responsable de microtraumatismes cutanés et une altération de la fonction barrière de la peau [1].  le poil : L’orientation variée des poils impose parfois un rasage anarchique contre le sens de la pousse du poil (d’arrière en avant) qui favorise également l’incarnation pilaire. De plus, l’absence d’utilisation de topiques 10 avant le rasage (mousse, crème…) rend les poils plus durs, secs et tranchants, ce qui augmente la force nécessaire à la coupe du poil et par conséquent favorise son incarnation [1].  Facteurs génétiques On ignore si les facteurs héréditaires jouent un rôle important dans la pathogenèse de ces troubles [16]. Mais il semble que les sujets de phototype V et VI développent plus de PFB que les autres. Ce qui suggère une possible prédisposition intrinsèque des cheveux crépus à pénétrer dans le derme contrairement aux cheveux raides et ondulés .

LIRE AUSSI :  Détermination de sous-classes phénotypiques de lupus systématique par une analyse en cluster

Table des matières

INTRODUCTION
REVUE DE LA LITTERATURE
I.RAPPELS
I.1. Spécificités de la région de la barbe
I.2. Particularités des poils crépus
II. Historique
III. Epidémiologie
III.1. Prévalence
III.2. Ethnie
III.3. Sexe
III.4. Age
IV. Aspects étiopathogéniques
V. Aspects cliniques
VI. Aspects histopathologiques
VII. Diagnostic différentiel
VIII. Traitement
VIII.1. Traitement curatif
VIII.1.1. Buts
VIII.1.2. Moyens
VIII.1.3. Indications
VIII.2.Traitement préventif
DEUXIEME PARTIE NOTRE ETUDE
II.1. CADRE D’ETUDE
II.2 TYPE ET PERIODE D’ETUDE
II.3. POPULATION D’ETUDE
II.3.1. Critères d’inclusion
II.3.2. Critères d’exclusion
II.4. METHODE DE COLLECTE DES DONNEES ET DEROULEMENT DE L’ETUDE
II.5. Traitement et analyse des données
III. RESULTATS
III.1. ETUDE DESCRIPTIVE GLOBALE
III.1.1. Aspects épidémiologiques
III.1.2. Terrain
III.1.3. Données étiologiques
III.2. ETUDE DESCRIPTIVE DE LA POPULATION AYANT UNE PFB
III.2.1. Aspects épidémiologiques
III.2.1.1. Répartition selon le sexe
III.2.1.2. Répartition des patients selon l’âge
III.2.1.3. Répartition des patients selon l’origine géographique
III.2.2. Antécédents et terrains
III.2.2.1. Antécédents personnels
III.2.2.2. Antécédents familiaux
III.2.2.3. Répartition selon la présence de cas similaires de PFB au sein de la famille
III.2.2.4. Les autres pathologies pilaires associées à la PFB chez les patients
III.2.2.5. Répartition selon l’existence d’une peau à tendance chéloïdienne chez les patients
III.2.2.6. Répartition des cas selon l’itinéraire thérapeutique
III.2.3. Données étiologiques
III.2.3.1. Méthode d’épilation utilisée
III.2.3.2. Méthode de rasage
III.2.3.3.Types de rasoir
III.2.3.4. Utilisation de produits avant le rasage
III.2.3.5. Utilisation de produits après le rasage
III.2.3.6. Direction du rasage
III.2.4. Données cliniques
III.2.4.1. Age de début de la maladie
III.2.4.2. Signes fonctionnels
III.2.4.3. Signes physiques
III.2.4.4. Topographie des lésions
III.2.4.5. Complications
III.2.4.6. Retentissement psychologique
III.2.5. Traitement
III.2.6. Evolution
III.2.6.1.Evolution à l’arrêt du rasage (durant les congés)
III.2.6.2.Evolution sous traitement et après conseils
III.2.7. Particularités chez les femmes
III.3. ETUDE ANALYTIQUE
III.3.1. Analyse de l’association entre la PFB et les cas similaires dans la famille
III.3.2. Analyse de l’association entre la PFB et la peau
à tendance chéloïdienne
III.3.3. Analyse de l’association entre la PFB et folliculite fibreuse de la nuque
III.3.4. Analyse de l’association entre la PFB et le type d’épilation
III.3.6. Analyse de l’association entre la PFB et l’utilisation de produits avant et après rasage
III.3.7. Analyse de l’association entre la PFB et le type de rasoir
DISCUSSION
II. Limites
III. Discussion
III.1. Données épidémiologiques
III.3 Itinéraire thérapeutique
III.4. Données étiologiques et facteurs de risque
III.5. Données cliniques
III.6. Complications et retentissement psychologique
III.7. Traitement
III.8. Evolution
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

 

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