PROPRIÉTÉS OPTIQUES DE LA CORNÉE

PROPRIÉTÉS OPTIQUES DE LA CORNÉE

Le chapitre 2 décrit les propriétés optiques de la cornée et leur lien avec la présence de pathologies et en particulier d’œdèmes. Cela a pour effet d’augmenter l’épaisseur de la cornée et de modifier sa microstructure. Ces variations désordonnent le tissu, ce qui a une incidence directe sur les propriétés de diffusion de la lumière et donc sur la transparence de la cornée. Ce phénomène est fortement dépendant de la longueur d’onde de la lumière. Les profondeurs de pénétration des lasers peuvent donc être optimisées en décalant leur spectre d’émission vers l’infrarouge. Les cornées humaines dont nous disposons pour nos expériences souffrent systématiquement de la présence d’œdèmes. Un traitement physico- chimique de déturgescence permet de contrôler leur degré d’œdèmes jusqu’à leur redonner leur épaisseur et leur transparence physiologique. Cette méthode et utilisée notamment pour redonner sa transparence à la cornée du donneur au préalable d’une intervention de greffe de cornée. Elle nous permet d’étudier en détail les liens entre les propriétés de transparence du tissu et la perturbation de leur structure8. Les expériences par diffraction de rayons X menées par Leonard et al. [70] ont permis de déterminer la fraction volumique des fibrilles de collagène dans le tissu sain et d’en déduire indirectement qu’il existe une différence d’indice de réfraction entre les fibrilles de collagène et la matrice extra-fibrillaire. Ces fibrilles ne pouvant être considérées comme isolées, il est difficile de mesurer les indices respectifs de ces éléments. Cependant, la technique utilisée donne une information sur le volume et permet d’évaluer l’indice de réfraction total par la relation de Gladstone-Dale.

Dans une cornée humaine, Leonard et al. [70] ont établi que l’indice des fibrilles est de 1,41, contre 1,36 pour la matrice extra-fibrillaire, avec une fraction volumique des fibrilles de 0,22. En appliquant la loi de Gladstone-Dale, l’indice moyen pour le stroma calculé est de 1,37, ce qui est en accord avec le résultat obtenu par Maurice dans une étude antérieure [71]. Le tissu cornéen présente deux propriétés de biréfringence : l’une est intrinsèque et l’autre est une biréfringence de forme [71,72]. La première est issue de la structure longitudinale des molécules qui composent les fibrilles de collagène. La lumière polarisée linéairement suivant l’axe des fibrilles se propage plus lentement que celle polarisée perpendiculairement à ces mêmes fibrilles. La biréfringence de forme est attribuée aux anisotropies du stroma organisé en lamelles de collagène. Chaque lamelle contribue indépendamment à un retard dont l’axe lent est orienté le long de l’axe des fibrilles qui la composent. La biréfringence globale de la cornée correspond à la contribution cumulée des lamelles sur l’intégralité du stroma. Une autre approche consiste à assimiler la cornée à un cristal biaxe incurvé dont l’axe rapide principal est perpendiculaire à la surface.

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Un grand nombre de situations cliniques en ophtalmologie (chirurgie ou diagnostic) impliquent une lumière incidente polarisée perpendiculairement à la surface. Cependant, cet axe entraîne peu de modifications de la polarisation car la biréfringence cornéenne est essentiellement influente selon les axes tangentiels à la surface. Afin de caractériser les propriétés optiques de transmission des cornées, nous avons mené une série d’expériences sur des cornées humaines fournies par la Banque française des yeux. Ces échantillons sont exclusivement réservés à un usage scientifique lorsque leur qualité les rend impropres à la greffe (mauvaise qualité endothéliale, défauts épithéliaux, aire transparente insuffisante), conformément aux directives de la déclaration d’Helsinki et à la législation française. tests microbiologiques, à l’observation de leur aspect général (anomalies du globe extérieur et signes d’opération antérieure, abrasions et défauts épithéliaux, opacités stromales et formes cornéennes anormales : kératocônes et micro- ou mégalo-cornée notamment, état de la chambre antérieure : forme, présence de sang) et à l’évaluation de leur qualité endothéliale. Généralement réalisée par microscopie en lumière transmise (contraste de phase), cette analyse nécessite de mettre en évidence les cellules endothéliales par induction du gonflement de l’espace intercellulaire à l’aide d’une solution hypotonique (NaCl 0,9%). L’utilisation d’un colorant vital (i.e. le bleu trypan) permet de mettre en évidence les cellules mortes ou nécrotiques et les parties dénudées de la membrane de Descemet. Après l’évaluation de la densité de cellules endothéliales, les cornées propres à la greffe, i.e. présentant une densité cellulaire supérieure à 2.000 cellules/mm², sont séparées des autres [76,77]. Afin de comparer le comportement en transmission d’une cornée œdémateuse avec celui d’une cornée saine en fonction de la longueur d’onde, certains échantillons sont placés dans un milieu leur permettant de retrouver une épaisseur physiologique normale et leur transparence. Ce processus est appelé déturgescence. Il est également utilisé pour les cornées destinées à la greffe, dans ce cas les greffons sont incubés dans le milieu de déturgescence 2 à 3 jours avant l’opération. Ce milieu contient des macromolécules qui augmentent la pression osmotique du milieu de base, ce qui permet d’entraîner une déshydratation du stroma [78]. Dans le cadre de nos expérimentations, les cornées sont mises en déturgescence 48 à 72 h dans une solution de Hanks, supplémentée avec un polymère glucidique de 500 kDa9, le Dextran 50010, typiquement utilisé à une concentration de 5%.

 

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