Propriétés des matériaux
Réflexion sur l’Histoire des Sciences
Afin de donner de l’ « épaisseur » à la physique, il peut être intéressant d’opter pour une introduction d’histoire des sciences et c’est possible ici pour traiter du « problème » historique de la nature de la chaleur. Néanmoins, les textes historiques ne sont pas toujours facilement « compréhensibles » par les élèves du point de vue du français employé (vocabulaire désuet, tournures de phrases plus lourdes…). La solution pourrait être de sélectionner des extraits relativement courts.
La chaleur : substance ou vibration ?
Duquesne résume ainsi la question « En ce qui concerne la chaleur, deux hypothèses étaient avancées pour rendre compte de l’échauffement par suite de frottement ou par suite de la conduction d’un corps chaud vers un corps froid. La première hypothèse était la chaleur-agitation désordonnée, la seconde était la chaleur substance. En 1700, l’expérience ne permettait pas de choisir entre ces deux hypothèses. Plus tard, la distinction fut faite entre chaleur et température. […]
Carnot(1824) comprit que la chaleur ne pouvait être totalement convertie en travail. Joule montra qu’une relation existait entre chaleur et travail (1843) et Mayer énonce le principe d’équivalence (1842) »
Avec l’équivalence entre la chaleur et le travail, l’unité initialement introduite la calorie (Le nom de calorie introduit en 1760 était lié au modèle du calorique) ne se justifiait plus, la quantité de chaleur devait s’exprimer avec la même unité que le travail soit le joule.
Emilio Segré tient des propos comparables et consacre un chapitre à la question historique de la chaleur, chapitre intitulé : « La chaleur, substance, vibration et mouvement ». Il écrit : « La question centrale à laquelle les physiciens se trouvaient confrontés était la suivante : Qu’est-ce que la chaleur ? Peut-elle se réduire à quelque chose de plus primitif ? Deux doctrines s’affrontaient. D’après l’une, la chaleur était une substance, avec ou sans masse ; d’après l’autre, la chaleur était un type de mouvement, peut être une vibration… ».
Emilio Segré donne de courts extraits de textes historiques et les commente : cela peut être une façon de ne pas « rebuter » les élèves tout en leur permettant de s’approprier une réflexion historique.
On peut aussi extraire soi-même de très courts paragraphes des textes historiques originaux et les proposer aux apprenants avec l’idée de leur faire retrouver cette double approche du concept de chaleur dans l’histoire (substance ou mouvement). Ce travail peut être l’occasion d’une collaboration avec le professeur de français.
Texte original : « Mémoire sur la chaleur » de Lavoisier et Laplace. Dans ce texte, deux modes de description de la chaleur sont donnés par les auteurs :
– une chaleur comme « fluide » qui appartient au corps (on a là la conception du « calorique »)
– une chaleur « agitation » qui est une description mécaniste
Les auteurs ne se déterminent pas pour l’une ou l’autre description.
Des réponses d’élèves
Ces quelques réponses retranscrites sans modification de tournure ou de vocabulaire sont données à titre d’exemples et permettent, non seulement, de se persuader de la nécessité de cerner les représentations des apprenants avant d’aborder l’acquisition de nouvelles notions mais aussi de prendre en compte les connaissances déjà en leur « possession ».
A propos de chaleur et température :
– « Le froid, c’est juste un manque de chaleur » ; « La chaleur fait partie de la température, la température peut être positive ou négative »
– « Température et chaleur : ça n’a rien à voir. C’est pas parce qu’il fait 20° qu’il fait chaud » ; « Si on tient un objet chaud, quand il va se refroidir il servira à rien »
– « La température n’est pas directement liée avec la chaleur, plus la température est élevée plus la source de chaleur est haute »
– « La température est pareil que la chaleur : plus elle est haute, plus il fait chaud, plus elle est basse, plus il fait froid »
– «La chaleur c’est un air chaud qui se dégage d’un objet, d’un humain, d’un liquide alors que la température c’est la concentration de la chaleur, c’est la chaleur de l’air qu’on mesure »
Sur les modes de transmission de la chaleur :
– « Il y a plusieurs sources de chaleur, cette chaleur se transmet soit par l’air ambiant soit par contact direct avec la source »
– « par le contact d’un point chaud »
Mais aussi : « Je ne crois pas que les calories ont un rôle dans la chaleur » ; « suggestion : habits secs (pas mouillés) » ; « Fermer les rideaux ne sert à rien » ; « il y a plus d’épaisseurs, ce qui bloque le froid » ; « Isoler au maximum est le meilleur moyen de contenir la chaleur »
Toutes les recommandations de l’agent sont-elles nécessaires ?
|
oui ! il faut se protéger des courants d’air, diront certains élèves mais « tirer les rideaux » est jugé inutile par une majorité des sujets interrogés.
Les fenêtres et les baies constituent une des principales sources de perte de chaleur dans les maisons plus que pour les caravanes (baies de petites dimensions). On peut néanmoins extrapoler le raisonnement. La couche d’air située de chaque côté de la fenêtre joue le rôle d’un isolant et c’est là qu’a lieu l’essentiel de la baisse de la température entre l’extérieur et l’intérieur d’une habitation. Ainsi, des rideaux placés devant des fenêtres réduisent les pertes de chaleur. |
Intérêt éventuel du double vitrage ?
|
Le « vitrage » des caravanes n’est certes pas constitué de verre mais le principe du double vitrage reste le même : piéger une quantité d’air Il est préférable d’augmenter la largeur de la couche d’air plutôt que de placer des panneaux plus épais.
Si les élèves semblent savoir que le double vitrage « isole du froid », ils ont des difficultés à l’expliquer. |
Votre choix de « vêtements[1] chauds » dans la liste proposée. Avez-vous des suggestions ? | Les élèves sont amenés à s’interroger sur le rôle des vêtements et à choisir ceux qui sont adaptés à la situation. Ce n’est pas le tissu qui protège du froid mais à nouveau l’air qui s’y trouve enfermé. Les habits tiennent chaud car ils empêchent l’air de circuler librement. Ainsi, le duvet constitue un bon isolant car en se gonflant, il emprisonne beaucoup d’air.
Certains élèves indiquent que les vêtements doivent être secs et que les tissus techniques sont de « bons isolants ». |
Intérêt de s’installer près du chauffage au gaz ?
|
La chaleur est émise par convection et rayonnement dans la caravane.
Le terme rayonnement a seulement été employé par les élèves lorsqu’on évoque une exposition au soleil : « le rayonnement UV ». Ceux d’ondes électromagnétiques ou de longueur d’onde n’ont été mentionnés à aucun moment. Le rayonnement thermique n’exige pas de support matériel, ce qui ne ressort pas pour l’exemple choisi. En parlant du rayonnement solaire, on pourra faire remarquer que le transfert par rayonnement peut se produire dans le vide. |
La bouteille thermos de l’agent : indiquez quel est son rôle et donnez une description même très simple de sa constitution. | Les « tas d’air » : ça isole ! c’est encore l’idée ici. Si on ne peut pas empêcher que la température de la boisson initialement chaude baisse, on ralentira son refroidissement. Le thermos[2] est une bouteille avec 2 parois séparées par très peu d’air (vide partiel) le rayonnement est le mécanisme dominant entre l’extérieur et l’intérieur de la bouteille (intérêt du métal, si le plastique a du succès c’est à cause de sa légèreté).
Les élèves n’expliquent pas le fonctionnement mais répondent qu’il est en aluminium. |
Une « histoire de bols » : Comment Mme Excentric va-t-elle s’y prendre :
pour se réchauffer les mains ? pour se réchauffer le visage ? |
Les élèves répondent qu’elle va appliquer ses mains sur le bol et placer son visage au dessus du récipient. Ils ne fournissent pas spontanément plus d’explications.
Quitte à donner un coup de pouce, on peut amener les élèves à indiquer que la conduction (les mains appliquées sur le bol) se produit uniquement s’il y a un écart de température et que ce processus repose sur un contact direct. La chaleur « s’écoule[3] » de la zone de haute température vers la zone de température inférieure. Il n’y a pas de déplacement de matière. Pour la convection, la chaleur se propage par un mouvement de matière, l’air chaud monte car il est moins dense que l’air froid (l’air se dilate en se réchauffant d’où une diminution de la masse volumique donc son élévation) |
L’agent reçoit un appel téléphonique et ne peut donc boire immédiatement. Quel bol conseillera t- on à l’agent ? | L’agent risque fort de boire un chocolat qui n’est plus chaud, des élèves indiquent « tiède », « froid ». On peut alors demander aux élèves d’indiquer la température de la boisson au bout d’une demi-heure si la température à l’intérieur de la caravane est stabilisée à 18°C. On établira qu’un objet se trouve en équilibre thermique avec le milieu extérieur lorsque tous 2 parviennent à la même température.
Concernant le matériau à choisir, la question est de trouver celui pour lequel la température a le moins chuté au bout d’un quart d’heure : les élèves ont des difficultés à faire un choix. Une expérimentation relativement simple peut être mise en œuvre (fournir des récipients de différents matériaux, eau chaude, thermomètres, chronomètres). On peut également revenir sur la situation précédente (qui a pu troubler les élèves): Mme Excentric a-t-elle raison de choisir le bol en aluminium ? La chaleur est mieux (ou beaucoup plus vite[4]) conduite dans le bol en aluminium que dans celui en verre et dans le verre plus vite que dans le plastique. On aborde alors la conductivité[5] thermique des matériaux. |
La chaleur humaine : juste une « affaire de sentiments » ?
|
L’énergie dont nous disposons nous permet de fournir de la chaleur pour réguler notre température et du travail (une activité plus ou moins appréciée selon les individus…)
Un être humain dégage environ une puissance de 140W, il peut être perçu comme un petit radiateur ! Aussi, 5 personnes dans une petite caravane constituent une « chaleur humaine » appréciable ! Avec cette question, on revient sur le rayonnement: à cause de la chaleur de notre corps, nous émettons[6] des ondes électromagnétiques infrarouges (IR) invisibles pour nos yeux mais observables avec une caméra IR. |