Propositions de protocoles pour transporter des conteneurs dans des réseaux de distribution interconnectés
Hypothèses pour la simulation
Le modèle de simulation utilisé ici est basé sur un système multi-agents. Il repose sur la mise en uvre de modèles de comportements théoriques, dans le cadre de l’Internet Physique. A ce titre, nous considérons ici des hypothèses simplificatrices pour la modélisation. Nous avons proposé, par transposition des concepts de l’internet digital, que l’Internet Physique ait une structure hiérarchisée sous formes de plusieurs niveaux de systèmes autonomes, que le routage soit « adaptatif » lui permettant de s’adapter aux évolutions des réseaux, et qu’il soit « de source » calculant ainsi la totalité du chemin des conteneurs au nud de départ, sans que ceci ne soit une raison pour ne pas le remettre en cause lors de l’acheminement. L’ensemble de ces considérations qui relève des caractéristiques du routage dans le réseau Internet, ne suffit pas à définir correctement les typologies du routage des conteneurs dans le réseau PI. En effet, une différence majeure entre ces deux réseaux est la notion des prestations de transports qui ne se pose pas pour les réseaux informatiques. C’est ainsi que nous avons introduit une nouvelle dimension qui concerne les modélisations possibles du réseau de prestations de transports. En effet, nous avons distingué un réseau « permanent », dans lequel Chap. 5 : Protocoles pour transporter des conteneurs dans des réseaux de distribution interconnectés 142 on ne parle plus de prestations de transports mais de schéma logistiques avec des métriques standardisées et un réseau « ad-hoc » plus réaliste. Nous avons développé des algorithmes de routage pour ces deux types de réseau et nous avons constaté la complexité du routage dans un réseau « ad-hoc ». De plus, le fonctionnement de cet algorithme nécessite de connaitre l’ensemble des états des prestations de transport en temps réel ainsi que leurs prévisions de parcours (en termes d’horaires, de disponibilités, de prix, etc.,). Ces données étant très difficiles à obtenir, et considérant qu’une première implémentation de l’Internet Physique pourrait se faire dans le cadre d’un réseau « permanent », nous avons décidé de retenir cette hypothèse pour l’évaluation de la potentialité de l’Internet Physique. Il est à noter qu’une telle hypothèse ne peut qu’atténuer les résultats attendus car nous sous-optimisons l’utilisation des moyens vu que l’on ne considère pas la dynamique réelle des besoins. On note cependant que ce fonctionnement est cohérent avec les schémas logistiques des grandes entreprises de produits de grande consommation qui utilisent des prestations récurrentes avec une flexibilité en volume. De plus, toujours dans le cadre de la simulation des performances de l’Internet Physique, nous avons aussi choisi de considérer un unique système autonome. En effet, notre simulation porte sur des données réelles concernant des commandes entre des usines, des entrepôts et des centres de distributions, pour deux grands distributeurs français, et nous considérons que ces réseaux constitués par différents acteurs logistiques peuvent être vu comme un unique système autonome géré par un seul prestataire. Ne pas prendre cette hypothèse reviendrait à travailler sur plusieurs prestataires, et nécessiterait donc de différencier des politiques d’échange de flux internes et externes et considérer les modèles d’affaires de chacun et les accords de partage de trafic. Ce qui n’est l’objet de cette première étude. C’est ainsi, que dans un cadre de simplification de notre modèle de simulation, nous considérons un unique système autonome et un réseau « permanent » de prestations. De plus compte tenu des volumes traités à chacun des points (usine, entrepôt et centre de distribution) nous ne considérons ici que des prestations de transport en trace directe. Les tournées, plus adaptées à de faibles volumes, sont ici non traitées. Enfin, les hubs sont considérés ici comme un ensemble de files d’attentes avant le départ avec la prestation sélectionnée et avec des délais constants de traitement pour le déchargement d’un moyen, de tri des conteneurs et de rechargement. Cette hypothèse revient à considérer une capacité infinie des opérations de traitement sur hub. Cette hypothèse pourrait facilement être Chap. 5 : Protocoles pour transporter des conteneurs dans des réseaux de distribution interconnectés 143 levée en ajoutant des fonctions de durée de traitement de la charge en lien avec une conception et un dimensionnement de hub. Cependant au-delà de ces hypothèses « sélectives », il convient de noter qu’aucune exigence de synchronisation des expéditions n’est posée aux flux actuels. Chaque expédition de chaque acteur est traitée de manière indépendante lors de sa conteneurisation et du choix d’acheminement. On peut donc considérer que les expéditions sont réalisées de manière asynchrone par l’ensemble des acteurs.
Conteneurisation des marchandises
Pour simuler le fonctionnement de l’Internet Physique, il faut conditionner les commandes en conteneurs qui encapsuleront les marchandises correspondantes durant tout leur cheminement. A la différence d’Internet où le paquet de données est de taille unique et standardisé, la logistique nécessite différentes tailles de conteneurs car les produits peuvent être de tailles très variées. La question qui se pose est donc de définir le protocole d’encapsulation, qui comprend la définition des différents jeux de conteneurs que l’on utilisera et la façon avec laquelle la marchandise y sera affectée. 5.2.1 Définition des conteneurs La définition d’un ensemble de conteneurs pour l’Internet physique avec différentes tailles et répondant à différents cahiers des charges est une tâche ardue qui n’est pas encore finalisée. La problématique générale de l’adéquation des tailles des conteneurs aux tailles des produits et à leur conditionnement est un sujet très vaste qui dépasse le cadre de ce mémoire. Les travaux menés aux Etats-Unis par l’équipe de Russell D. Meller (Meller et al. 2012) montrent que, par rapport à la manière actuelle de conditionner les produits et ensuite d’empiler ces conditionnements sur une palette, un gain global de l’ordre de 10% est possible en volume en passant à un ensemble de conteneurs. En effet dans un premier temps si le passage par un nombre limité de conteneurs modulaires peut réduire leur remplissage individuel, l’agencement de ces conteneurs permet un gain net car il n’y aurait plus de vide. Chap. 5 : Protocoles pour transporter des conteneurs dans des réseaux de distribution interconnectés 144 La conteneurisation peut s’entendre à différents niveaux d’échelle. L’échelle du conteneur maritime ou de la semi-remorque, celle de la palette, ou celle du colis. Chaque échelle correspondant respectivement à un ordre de grandeur particulier : de la dizaine de m3 (30 à 90m3 ), puis (1 à 2 m3 ) et enfin au centième de m3 (0,4×0,4×0,2 = 0,032m3 ). Dans le cadre de ce modèle où l’on se focalise sur le transport et où la préparation des commandes n’est pas changée, seule la première échelle de taille de conteneur est abordée. Dans notre simulation, nous avons choisi des dimensions pour les PI-conteneurs, que nous considérons ensuite comme hypothèse. Ces choix ne sont pas aléatoires mais découlent d’un raisonnement d’exploration se basant sur des constats réels. En effet, nous avons vu dans le chapitre 3, lors de l’étude de l’hétérogénéité des unités de chargements, que le chargement des conteneurs maritimes par des palettes standards européennes se traduisait par des pertes systématiques d’espaces. C’est d’ailleurs ainsi que sont apparues les caisses mobiles dont les dimensions utiles intérieures permettent un chargement optimal en palettes européennes. L’inconvénient majeur de ces caisses mobiles est qu’elles ne peuvent utiliser le réseau maritime car non empilables. Ainsi, il n’est pas possible d’avoir des unités de chargements, et par conséquent des PI-conteneurs, adaptés à la fois aux dimensions des palettes et à celles des conteneurs maritimes ISO. Notre terrain d’étude, le secteur de la grande distribution, a la spécificité de ne pas (ou très peu) utiliser le transport maritime pour les produits alimentaires. C’est d’ailleurs le cas de nos flux, dont les points sources et destinations sont majoritairement en France, ou à défaut dans un pays limitrophe. A ce titre, les données de la simulation portent sur des commandes réelles qui ont été transportées quasi exclusivement par la route. Ainsi, pour le choix de nos PI-conteneurs, nous nous concentrons uniquement sur une nécessité d’harmonisation avec les dimensions des palettes et des camions. Renvoyant ainsi à des études ultérieures l’ajustement entre les conteneurs de taille proche d’une palette et ceux de la taille d’un conteneur maritime ou d’un wagon.