Proposition d’amélioration du système de gestion des déchets solides

Identification des différents acteurs intervenant dans la gestion des déchets a Thiès

Les acteurs institutionnels décentralisés

La mairie est le principal acteur de la gestion des déchets au niveau urbain. Dans le code de l’environnement du Sénégal, il est stipulé dans L’ARTICLE L 31 que « les collectivités locales et les regroupements constitués assurent l’élimination des déchets des ménages, éventuellement en liaison avec les services régionaux et les services nationaux de l’Etat, conformément à la réglementation en vigueur ». Ce secteur est l’une des compétences transférées à la localité par les lois sur décentralisation. Cependant, à l’instar des autres communes du pays, la commune de Thiès ne dispose pas d’assez de moyens. Pendant l’année budgétaire 2011-2012 le budget de fonctionnement de la commune de Thiès était de 1.309.844.312 frs CFA. La Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) collecté étaitde 19.515.341 frs CFA les dépenses cumulées pour la collecte et le balayage étaient estimées à 180.720.873 frs CFA (rapport budgétaire ville de Thiès 2011-2012). Ces chiffres montrent un écart considérable entre la TEOM collectée et les besoins réels en matière de gestion des déchets. Il faudrait une importante hausse de la TEOM pour couvrir l’essentiel des besoins actuels en matière de gestion des ordures ménagère. Or la ville rencontre d’énormes difficultés pour faire respecter cette taxe. Lors de nos enquêtes ménages, une grande partie des personnes interrogées ignore même l’existence de cette taxe et n’est pas disposées à la payée. Cette situation devrait s’aggravée en 2013 avec une augmentation du montant du budget prévu pourla gestion des déchets qui passe de 180.720.873 frs CFA à 250.909.278 frs CFA soit une hausse de 72,02% (rapport budgétaire ville de Thiès 2011-2012).
Il existe de nombreux autres services régionaux installés à Thiès et qui interviennent sur les questions liées à la gestion des déchets solides. Ces structures ont pour mission d’appuyer les municipalités dans la prise en charge de l’assainissement. C’est le cas du service régional de l’hygiène principale institution décentralisée s’activant sur les questions d’hygiène (lutte contre la prolifération des déchets solides et liquides) qui organise régulièrement des opérations d’enlèvement des ordures au niveau de la ville. On peut aussi noter l’action de la Division Régionale de l’Environnement et Des Etablissements Classés (DREEC) ou encore du service régional de l’aménagement du territoire sont des acteurs clé de l’assainissement urbain.

Les organisations communautaires de base

La ville de Thiès est la première au Sénégal à expérimenter les comités de salubrité. Ces comités étaient formés au niveau des quartiers et intervenaient dans les opérations de nettoiement mais aussi dans la collecte des ordures ménagères.
L’une des plus actives était le groupement « Sett Settal » qui s’activait dans la construction de latrines. Ils se sont ensuite intéressés, avec l’appui de la mairie, à la gestion des déchets particulièrement à la collecte des ordures ménagères. On peut aussi donner l’exemple de l’AVD (l’Association des Volontaires du Développement) ou de l’UCOSAVIT (Union des Comités de Salubrité de la Ville de Thiès) qui étaient aussi très actives au niveau de la ville.
Ces trois associations étaient membre d’une fédération qui s’impliquait beaucoup dans l’assainissement de la ville (collecte des ordures, désensablement, curage des caniveaux…) et dans des opérations de sensibilisation au niveau des quartiers.
Aujourd’hui, avec l’option de la mairie pour une gestion en régie, un grand nombre de ces associations ont disparu ou ne sont plus actives. Selon le responsable de l’AVD, il y’avait 37 GIE qui étaient impliqué dans la gestion des déchets. Cependant une grande partie d’entre eux a renoncé. Il estime en outre que la ville était beaucoup plus propre quand ils étaient en activité et les charretiers bien régulés.
Il existe néanmoins quelques associations qui continuent à fonctionner normalement. C’est le cas de l’association « Niou Bokk Gal Gui » qui a plus de vingt ans d’activité et qui s’occupe de la collecte et du transport des déchets. Cette association réunie plusieurs charretiers provenant de divers quartiers de Thiès. C’est aussi l’exemple de la fédération « And Defar Ceess » qui réunit 55 comités de gestion répartis dans tous les quartiers de Thiès et qui avait était mise sur pied par l’ONG TOSTAN.
La totalité des responsables de ces associations affirme que la situation de la ville est désastreuse et qu’il faudrait plus d’implication des OCB pour résoudre le problème.

Proposition d’un schéma d’organisation concerte de la gestion des déchets solides à Thiès

Le problème essentiel est le manque d’actions coordonnées entre la mairie, les acteurs privés et les populations afin de maîtriser toutes les étapes de la gestion des déchets ménagers, depuis la productions jusqu’à la mise en décharge finale en passant par le traitement, le recyclage et la valorisation. Ainsi le schéma proposé vise à établir une coordination des différentes opérations depuis la production jusqu’à la mise en décharge ainsi que celle des principaux intervenants.

La production et le conditionnement des déchets

La sensibilisation autour de la gestion des déchets

L’un des problèmes majeurs de la gestion des déchets solides à Thiès réside dans le comportement des populations. Les résultats de nos enquêtes ménage montrent que la moitié des ménages enquêtés affirme que le comportement incivique des populations par rapport à la prise en charge quotidienne de la propreté est dû au déficit d’éducation civique. Par conséquent l’un des points sur lesquels devrait se baser tout projet de gestion des déchets est la sensibilisation. Elle constitue une étape importante de la mise en place d’un bon système de gestion des déchets; ceci pour permettre aux populations de s’approprier la démarche mais aussi pallier les problèmes d’insuffisance d’informations par rapport au secteur de la gestion des déchets. La sensibilisation de la population permettra d’informer sur le lien qui existe entre la problématique de la prise en charge des déchets et celle de la santé d’une part et d’autre part sur les bénéfices économiques, sociaux et environnementaux d’une bonne gestiondes ordures et la nécessité de l’instauration d’un système de tri sélective.
Les opérations à mener devront l’être avec l’implication des OCB. Selon les enquêtés que nous avons effectuées, les informations sur la gestion des déchets pourraient être véhiculées par plusieurs sources comme le montre la figure 10 ci- après. D’après le graphique ci-dessous, les sujets de recherches qui proposent les OCB comme source d’information sur la gestion des déchets représentent 39%. Ceci peut d’abord s’expliquer par le fait que ces organisations (Comités de salubrité, ASC, GIE etc.) sont plus proches des ménages car on les trouve dans chaque quartier. L’autre élément qui semble expliquer cet état de fait provient de l’engagement des jeunes dans ces organisations qui permettrait, selon les enquêtés, de bien véhiculer l’information.
De l’autre côté, il y’a 31% d’enquêtés qui soutiennent que les services de la mairie pourraient s’acquitter de cette mission pour la simple raison que c’est une tâche qui leur est dévolue. Ceci n’est pas l’avis des autres 30% qui pensent que l’information pourrait bien circuler via le bouche à oreille.

L’instauration d’un système de tri

Les visites effectuées sur les décharges de la ville ont permis d’avoir un aperçu sur la composition des déchets qui y sont déversés. Les tas d’ordures sont composés de différents types de déchets (organiques, inertes …). Ce qui pose le problème de l’efficacité du système de gestion des déchets quand on sait le recyclage pourrait permettre de tirer profit de certaines matières. Le triage des déchets au niveau des ménages s’avère donc être indispensable pour que la matière organique utilisée pour le compostage ne soit pas souillé par d’autres matières.
La séparation des matières organiques et inertes se fera par l’utilisation de deux poubelles distinctes. La première servira à accueillir les déchets pouvant servir au compostage tels que les restes alimentaires ou encore les épluchures et la seconde les matières inertes comme le verre, le plastique ou le fer. Ce système est en train d’être expérimenter à Joal où les populations ont été équipées de deux poubelles ; l’une pour le bio et l’autre pour le non bio. Ce système de tri doit aussi être instauré au niveau des lieux à forte production de déchets.
Les marchés et les abattoirs sont caractérisés par l’importance des déchets organiques qui y sont produits (fruits et légumes avariés, viscères de poissons, déchets issus de l’abattage…). Cependant il faut noter que la réussite d’un tel système dépend entièrement de la collaboration des ménages et des différents acteurs des lieux à forte production d’où la nécessité d’une bonne campagne de sensibilisation mais aussi de l’adoption de poubelles règlementaires plus adaptées.

Une organisation intégrée et participative de la collecte

Actuellement il existe deux types de collecte : celle effectuée par la mairie et celle faisant intervenir des charretiers privés. Ces deux systèmes coexistent sans aucune forme de coordination ce qui favorise la création et l’aggravation de certain dépôts sauvages causés principalement par le déversement effectué par les charretiers. Le schéma proposé vise àpalier ce problème en associant les différents acteurs de la collecte dans un système intégré où chacun aura son rôle à jouer.

L’intervention des charretiers pour la pré-collecte des ordures ménagères

Les charretiers occuperont une place centrale dans le système de collecte à mettre en place. Ils seront chargés du ramassage porte à porte au niveau des quartiers souvent difficiles d’accès pour les véhicules de la mairie.
L’avantage d’utiliser les charretiers réside dans leur disponibilité. Les expériences menées dans ce domaine ont favorisé l’adoption de ce moyen de ramassage des ordures ménagères.  Aujourd’hui les charretiers couvrent l’ensemble des quartiers de Thiès. Ils sont les principaux collecteurs de déchets dans la commune de Thiès. Ils interviennent dans 98% des ménages enquêtés. Cependant leur travail se fait dans le plus total désordre. C’est pourquoi il est nécessaire de les organisés en GIE regroupant des charretiers qui travaillent dans une même zone de pré-collecte.
Chaque GIE aura en charge la collecte des ordures dans sa zone et leur transport jusqu’au dépôt intermédiaire mais aura aussi la mission d’instaurer et de faire respecter une règlementation de la collecte hippomobile et d’assurer la formation et la professionnalisation des collecteurs. A ce sujet, la totalité des charretiers interrogés disent être favorables à leur intégration dans un dispositif professionnalisé et officiel.
Les déchets qu’ils collecteront feront, préalablement, l’objet d’un tri sommaire séparant les déchets organiques des autres. La fréquence de collecte sera différente selon le type de déchet. Ceux dits organiques, susceptibles de se dégrader plus rapidement et d’occasionner des désagréments auprès des ménages seront ramassés plus fréquemment que ceux dits inertes. Afin de raccourcir les distances que les charrettes sont obligées de parcourir pour décharger, des points de dépôts intermédiaires seront mises en place et serons le lien entre la pré-collecte et la collecte finale qui sera assurée par les camions de la municipalité.

La pré-collecte dans les lieux à forte production

Le système adopté par la maire qui consiste à mettre des bacs métalliques dans ces lieux afin de recueillir la production de déchets a montré de bons résultats permettant d’éviter la création de dépôts sauvages dans certains marchés. Cependant l’insuffisance des moyens de collecte occasionne une irrégularité du ramassage et par conséquent une surcharge des bacs. Selon le responsable de la voirie de Thiès, la solution serait l’acquisition d’un autre tracteur pour la collecte des bacs métalliques car la ville ne dispose que d’un seul tracteur en mauvais état. Toujours selon ce dernier la ville possédait un camion qui était destiné au ramassage des déchets organiques produits au marché aux poissons et à l’abattoir et qui est actuellement en panne. Sa réhabilitation permettrait une meilleure prise en charge de ce type de déchet.
Les déchets collectés dans les lieux à forte production transiteront aussi aux dépôts intermédiaires afin d’y être tries.

La collecte finale assurée par les services municipaux

La commune de Thiès aura aussi son rôle à jouer. Elle sera chargée de la collecte des déchets déposés par les acteurs de la pré-collecte dans les dépôts intermédiaires pour les transportés au centre de tri et ensuite, pour une partie des déchets, à la décharge finale, le centre d’enfouissement technique.
Les dépôts intermédiaires n’ont pas une grande capacité ce qui fait que les déchets ne peuvent pas y être stockés très longtemps. La régularité des passages est donc indispensable afin d’éviter leur transformation en décharges sauvages. L’enlèvement des ordures a cependant, un coût trop élevé pour les maigres ressources dont disposent les villes du Sénégal. La perception de la TEOM est quasi nulle.

Une implication des OCB pour le balayage

La mairie avait établi un programme de balayage basé sur l’implication des comités de la salubrité de la ville dans les opérations à mener. Pour ce faire elle avait recruté une trentaine de contractuels hommes et femmes provenant des différentes associations. Ce type de procédé doit être appuyé car il permet à la fois une participation des comités de salubrité à la gestion des déchets mais aussi la création d’emplois au niveau local. Ainsi le système à mettre en place doit encourager la revitalisation de ces comités de salubrité qui, depuis quelques années fonctionnent au ralenti.

La mise en décharge

La mise en décharge se fera progressivement et va nécessiter la mise sur pied de différentes infrastructures.

Les dépôts intermédiaires

Ces dépôts intermédiaires auront pour principal objectif de diminuer les distances parcourues par les charretiers afin de décharger.
La ville de Thiès n’ayant pratiquement plus de réserve foncière, les autorités municipales rencontrées nous ont suggéré d’opter pour la transformation des dépôts sauvages actuels afin d’y implanter les sites de dépôts intermédiaires. Ces sites présentent de nombreux avantages ; outre la disposition d’espace, ils permettraient aux charretiers de continuer à déverser les ordures aux mêmes endroits et ainsi d’acquérir plus facilement leur adhésion.
Les déchets collectés à l’intérieur de la ville vont transiter dans des déchetteries avant d’être transportés et entreposés à la décharge municipale. Située sur la route de Mbour, cette décharge pourra être transformée afin d’accueillir le Centre de Transfert et de Tri (CTT).
Le CTT, une structure de plus petite taille comparé à un Centre d’Enfouissement Technique (CET), va jouer un rôle d’intermédiaire entre la collecte des déchets et leur transport vers un CET. Les déchets y seront momentanément stockés afin d’y être triés et éventuellement recyclés pour une bonne partie. Les reste sera envoyé au CET situé dans la communauté rurale de Mont-Rolland.
L’implantation des dépôts intermédiaires va avoir un impact important sur le plan socioéconomique. Au niveau des centres de transfert et de tri, l’objectif visé est d’arrivé à une intégration des récupérateurs dans les différentes activités à mener. Cela va passer par leur formation aux méthodes utilisées pour le triage. Dans les différents sites de dépôts intermédiaires il est prévu de recruter des jeunes qui vont se charger de la surveillance.
L’ONG Italienne LVIA a travaillé sur la conception de dépôts intermédiaires à Mbour et Kaolack. A Mbour, il est prévu des dépôts intermédiaires comprenant 6 bennes et une rampe pour permettre que les charretiers puissent y déverser les ordures. Le coût d’implantation est estimé à environ 4,6 millions F CFA. Ce genre d’installation correspondent mieux aux réalités économiques de nos villes car elles ne nécessitent pas beaucoup d’espace et d’équipements et donc occasionnent peu de dépenses. L’emplacement et le fonctionnement des dépôts doit, toutes fois, faire l’objet d’une concertation entre autorités municipales, associations de charretiers et les différentes OCB intervenant dans la gestion des déchets.

La décharge finale : le Centre d’Enfouissement Technique (CET)

Les déchets qui ne pourront pas être récupérés au centre de triage vont être acheminés au centre d’enfouissement technique pour y être définitivement enterrés. Le CET fait partie des moyens les plus sûrs pour l’élimination des déchets. Il permet de les enfouir sans que cela ne puisse constituer un danger pour la nappe phréatique. Un CET est en construction sur les carrières de Mont Rolland, à environ 10 kilomètres de la ville de Thiès, dans la communauté rurale de Mont Rolland sur un terrain nu de 39ha. Il pourra accueillir les déchets en provenance de Thiès et d’autres villes des environs en vue de leur élimination définitive.
Cette option du site de Mont Rolland pour l’installation du CET a été favorisée par l’élévation du contexte topographique et la présence d’excavas résultants de l’exploitation des carrières.
Ce site n’est pas exposé à un drainage de surface et les nappes d’eau sont très profondes dans la périphérie immédiate de la zone. Ainsi, les effets de la décharge sur la qualité de l’eau souterraine seront mineurs et localisés.
L’implantation de ce CET permettra de parvenir à une élimination plus efficace des déchets.
Cependant, il est indispensable d’assurer un respect stricte de certaines normes techniques afin d’éviter toute pollution des nappes phréatiques par des lixiviat et des eaux de ruissellement chargées.
C’est une structure qui, pour des raisons de rentabilisation et d’optimisation, doit polariser plusieurs localités. D’où la nécessité d’arriver à une gestion intercommunale des déchets afin de mieux gérer ce genre d’infrastructures.

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