Projet de l’école en forêt

Projet de l’école en forêt

Les motivations 

Mener le projet de l’école en forêt n’est pas imposé aux enseignants dans le programme scolaire. Cependant, un certain nombre le font. Cette partie met en regard les motivations des différentes enseignantes le pratiquent. D’une manière générale, comme dans toute réalisation d’un nouveau projet, il en ressort des données qu’il est nécessaire d’être convaincu et motivé par ce que l’on entreprend. Les propos de Dolorès expriment bien cela. « il faut vraiment être convaincu pour le faire… sinon ça ne marche pas ». (Dolorès) Parmi les enseignantes interrogées, toutes possèdent une forte motivation et conviction à pratiquer ce projet mais les raisons qui ont nourri leurs investigations divergent d’une enseignante à l’autre. Pour trois d’entre elles, ce sont des échanges entre collègues et/ou professionnels ainsi que leur curiosité à l’expérimenter qui les ont amenés à le pratiquer. « J’en avais entendu parler, […] j’ai suivi une dame qui est venue en parler aussi. Après, ma collègue et moi, on s’est renseignées puis, on a commencé à en parler autour de nous. On s’est dit que c’est quelque chose qui nous intéressait beaucoup ». (Annabelle) 28 En ce qui concerne Marie, il s’agit plutôt d’une envie qui remonte au temps de son enfance. Ses souvenirs de scolarité passés dans la nature lui ont transmis le désir de le reproduire elle-même dans sa pratique professionnelle. « Lors de ma scolarité, j’avais une enseignante qui nous faisait toujours sortir, les activités on les faisait dehors. Elle nous a même fait acheter un livre sur ce sujet. J’ai beaucoup apprécié et je me suis toujours dit que je voudrais faire la même chose avec mes élèves ». (Marie) Quant à Célia, le projet ne relevait pas d’une évidence. L’opportunité de rejoindre le train du projet déjà mis en place s’est offerte à elle. Elle est partie avec beaucoup d’appréhensions mais à présent elle ne regrette pas un instant et est satisfaite de cette découverte. « En fait, on m’a proposé cette place et on m’a dit : c’est cette place avec la forêt ou rien. Je me suis dit bon de toute façon je veux du travail donc je vais y aller mais j’avoue que je ne savais pas trop à quoi m’attendre. J’étais un peu stressée tout l’été, j’ai lu des livres, je me suis renseignée, j’ai préparé des trucs pis finalement tout va bien ! Ça me plaît beaucoup ». (Célia) Il faut bien remarquer que pour se lancer dans ce projet il faut, en plus d’être motivé et avoir un état d’esprit ouvert, avoir une certaine sensibilité pour la nature. Parmi les enseignantes interrogées toutes relèvent une véritable passion pour la nature qu’elles ont envie de transmettre. Cette constatation ressort dans les deux extraits significatifs suivants : « J’ai toujours été un peu scout dans l’âme, j’aime la nature et j’ai envie de transmettre ça aux élèves ». (Katy) « J’ai toujours eu une fibre pour la nature ». (Dolorès) Les dires de ces enseignantes entrent dans la philosophie des personnes citées dans la première partie telles que Rousseau, Freinet et Espinassous. En effet, on peut constater qu’elles sont convaincues que la nature peut apporter un plus aux apprentissages. De plus, elles veulent rétablir un lien avec l’extérieur et prendre la nature comme un réel terrain d’exploitation et d’expériences. 

Contact et collaboration avec les divers acteurs

Cette partie montre que pour organiser un tel projet, il est indispensable de s’entourer de personnes qui nous soutiennent dans sa réalisation. En premier lieu, les directions sont des partenaires non négligeables avant et pendant son déroulement. Puis, les collègues et les parents Contact et collaboration avec les divers acteurs 29 sont également importants. Pour terminer, la question de la relation avec les enfants durant les sorties est abordée.

La direction 

La direction est un acteur externe important à convaincre pour l’élaboration de ce projet. En effet, lorsque les enseignantes l’ont présenté, les directions y ont répondu positivement et prennent la peine de s’impliquer dans la démarche. Celles-ci sont plutôt favorables et l’apprécient. Célia appuie sur l’importance du soutien apporté par le directeur lors de la présentation du projet lors d’une des séances de parents. Néanmoins, même si elles apportent un regard positif et soutiennent son élaboration, elles ne sont pas forcément prêtes à donner un budget supplémentaire chaque année, étant donné qu’il s’agit d’un dispositif assez nouveau qui n’a pas encore fait toutes ses preuves. Ainsi, les directions n’ont pas encore assez de recul pour le financer convenablement. De cette manière, Marie et Dolorès ont eu l’idée de gagner de l’argent en vendant des calendriers avec des photos des élèves prises au canapé pour les parents et familles. Elles relèvent l’importance de montrer l’engagement envers les autorités et faire comprendre qu’elles ne comptent pas que sur elles (les autorités). « Ça nous a fait 200 francs, c’est toujours ça. Et je pense que c’est important de montrer qu’on est motivé et qu’on n’attend pas que tout l’argent vienne d’en haut ». (Marie)

 Les collègues

 La question concernant la réflexion sur le travail de groupe était une évidence pour chacune d’entre elles. Selon les propos des enseignantes, comme il s’agit d’un concept assez nouveau, toutes relèvent l’importance de collaborer et de pouvoir partager ses expériences. Il en ressort que ces rencontres sont des apports essentiels tant sur le plan de la mise en œuvre que sur celui de l’exécution. Il faut bien remarquer qu’il existe deux niveaux d’échanges. Le premier reste plus interne et concerne le travail entre collègues proches. Ainsi, on comprend que de fonctionner par partenariat réduit considérablement la charge de travail que demande la sortie. Pour illustrer ces propos, Annabelle et Célia, qui regagnent ensemble la forêt avec leur classe respective, soulignent indubitablement l’importance d’être deux. 30 « La collaboration de deux personnes, surtout sur des choses comme ça où on est pas tellement formé, est très importante. Chacune amène des sensibilités et puis des idées différentes ». (Annabelle) « Pour la préparation oui je pense que c’est important parce que là comme avec ma collègue, elle prévoit une activité et j’en prévois une donc ça partage le travail ». (Célia) Le deuxième niveau d’échange comprend plutôt le partage d’expériences entre celles et ceux qui pratiquent le projet. Ce type de communication se déroule plutôt lors de cours de formation continue animés par des professionnels. Les discours de Katy et Marie font référence à ces moments vécus. Elles en parlent comme quelque chose qui les aident et les réconfortent dans le travail qu’elles effectuent. « J’ai participé à plusieurs cours […]. Les professionnels partagent leurs expériences, transmettent leur passion et c’est vraiment de la motivation en retour ». (Katy) « Durant mes cours, j’ai rencontré d’autres enseignants et on a pu échanger les idées et l’animatrice était très enthousiaste. C’est vraiment une richesse ». (Marie) 

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Les parents

 Même si parfois la relation entre enseignants-parents face au projet n’est pas toujours facile, les parents restent des acteurs fondamentaux tout au long du projet. Pour Katy, Marie et Dolorès les parents sont mêmes indispensables pour la réalisation de ce projet puisqu’il amène les enfants au rendez-vous pour se trouver plus près de la forêt. « Il s’engagent à les amener à la lisière de la forêt. Sans eux, sans leur participation, le projet serait difficilement réalisable ». (Katy) Comme dans tout projet, il y a toujours ceux qui sont partie prenante et ceux qui le sont moins. De manière générale, les parents soutiennent le projet et contribuent à son bon déroulement. En effet, certains d’entre eux s’investissent et se sentent vraiment concernés par le projet. Selon les dires des enseignantes, certains parents soutiennent pratiquement et matériellement le projet. Par ailleurs, il faut remarquer que toutes les enseignantes font en sorte d’inclure les parents dans le projet en les invitant à plusieurs évènements se déroulant au « Canapé Forestier », comme par exemple, des journées portes ouvertes, de petites organisations telles que la rénovation du canapé, des rituels de fêtes ou encore un pique-nique. Ces journées peuvent permettre aux parents de se rendre compte de ce qu’implique ces sorties. 31 Toutefois, il faut toujours rester prudent car les parents peuvent également être un frein. Les différentes craintes de leur part, malgré toutes les informations qui ont pu être données, peuvent être envahissantes et décourageantes. La majorité des enseignantes interrogées avouent que le contact avec quelques parents restent une difficulté. En effet, leur réticence et leur incompréhension concernant la mise en œuvre de ce projet est difficile à gérer. Certains parents sont surpris et ne comprennent pas l’intention de sortir en forêt. D’autres craignent que leur enfant soit mouillé et qu’il tombe malade. Durant l’entretien, Annabelle énonce l’une des remarques émise par un parent d’élève : « j’ai eu des remarques du genre : mais vous avez des murs de classe pourquoi sortez-vous à l’extérieur, mon enfant rentre mouillé ». (Annabelle) Dans cette perspective, Marie rend attentif les enseignants sur la manière d’informer les parents lors de la présentation du projet. Dans ces propos, elle relève l’importance de bien connaître le sujet et d’être bien au clair afin de prendre avec soi le plus possible de parents dans la démarche. En effet, si le message n’est pas bien perçu de la part des parents cela peut engendrer de nombreuses complications et des situations pas toujours agréables à vivre. Célia explique une expérience vécue face à des parents très inquiets et perplexes par rapport aux objectifs à atteindre puisqu’il s’agit d’un degré scolaire plus élevé, ceci malgré maintes explications de ce qui se faisait en forêt. Alors, à la suite d’une discussion avec les parents lors d’une réunion, une maman a proposé de faire un cahier. L’enseignante a trouvé l’idée intéressante et l’a mis en place. Il s’agit d’un « cahier du canapé forestier » où les enfants collent et gardent une trace de ce qu’ils font et découvrent en forêt (voir annexe 9.3.3). Dans l’extrait suivant, Célia fait part d’un exemple d’une de ces dernières exploitations du « cahier du canapé forestier ». « Ce matin, on a fait les feuilles. On peut leur demander aux douze je pense qu’il y a neuf qui peuvent citer les huit feuilles qu’on a vues. En plus, on a fait ça sous forme de jeu avec des étiquettes, ils devaient se déplacer, courir donc ils n’ont pas eu froid. J’avais beau expliquer plusieurs fois ce que nous faisions en forêt, ils ne se rendaient pas compte. Mais, je crois que maintenant ils le voient avec ce cahier ». (Célia) 

Les élèves

 De manière générale, durant les sorties, les enseignantes expriment le désir d’essayer de garder la même relation qu’en classe ainsi que les mêmes règles de vie. Dans ses propos, Katy admet encore parfois être plus vigilante et stricte pour des questions relatives à la sécurité. 32 « J’adopte les mêmes règles mais, je suis aussi très stricte, par peur, c’est vraiment pour la sécurité… » (Katy) Cependant, toutes ont relevé que durant ces sorties leurs élèves venaient plus facilement se confier. Les propos suivants de Célia appuient ce constat. « vu qu’il y a des moments un peu plus libres, là des enfants viennent discuter et on a plus le temps de prendre le temps de discuter avec eux mais à part ça j’essaye de rester dans la même relation ». (Célia) Enfin, plusieurs d’entre elles dont Annabelle avouent être plus rassurantes et plus maternantes en forêt qu’en classe. « Je garde une relation d’enseignante et puis aussi, il faut un peu plus les materner quand ils ont mal au pied, quand ils ont froid ». (Annabelle

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