Profil bactériologique et sensibilité aux antibiotiques des souches urinaires isolées
Fréquence des infections urinaires selon l’âge et le sexe
La fréquence d’IU est plus élevée chez la femme que chez l’homme. Environ un tiers des femmes ont une IU au moins une fois dans leur vie [2, 15, 27]. Chez l’homme, l’IU est rare sauf avant 1 an et augmente après 50 ans, âge à partir duquel un certain degré d’obstruction urinaire par hypertrophie bénigne de la prostate est fréquent.Chez la femme, la fréquence augmente avec l’âge d’environ 1% par décennie, avec 2 pics, l’un avec le début de l’activité sexuelle et l’autre à la période postménopausique [2, 15]. De plus le risque de récidive de l’infection est beaucoup plus important chez la femme que chez l’homme : environ 46 % des femmes font une rechute environ un mois après le premier épisode d’IU.
Incidence des infections urinaires chez la femme
Cystite aiguë simple : Elle n’affecte, par définition, que la femme jeune (15 à 65 ans) sans uropathie ni contexte particulier [15]. Elle touche chaque année entre 6 et 8 millions de femmes [36]. Elle touche 80 à 90 % des femmes au moins une fois dans leur vie et représente 10 à 20 % des infections urinaires touchant les femmes chaque année [28,36,37]. L’incidence de cette IU connait 2 pics : lorsque la femme devient sexuellement active (entre 20 et 30 ans) et chez la femme post-ménopausée [14, 28]. Pyélonéphrite aiguë : Elle représente 10 à 14% des admissions dans les services de maladies infectieuses et prédomine chez la femme (63,4%). Les récidives sont plus fréquentes chez la femme avec 22,2% versus 11,4% pour l’homme [12]. 17
Incidence des infections urinaires chez l’homme
La prostatite toute forme confondue affecterait 20 à 50 % des hommes au cours de leur vie, exclusivement après la puberté et représenterait 10 à 30 % des infections génitales urinaires masculines [19]. Le risque d’IU augmente avec l’âge chez l’homme [38]. On estime à 50 % les hommes qui vont présenter à un moment de leur vie une affection prostatique
Les bactéries responsables d’infections urinaires
Un groupe de travail de la Société Européenne de microbiologie a proposé un classement des différentes espèces bactériennes isolées dans les urines (Tableau I). On distingue les pathogènes primaires, les pathogènes secondaires (isolés chez les patients avec facteurs favorisants: ils concernent les infections nosocomiales) et les pathogènes dits « douteux » qui nécessitent une bactériurie > 105 UFC/ml.
Ensuite, ce sont P. mirabilis et K. pneumoniae qui sont en deuxième position [5,40]. Elles sont isolées dans des proportions variables (5 à 12 %). Selon les études P. aeruginosa est plus souvent isolé lorsqu’il s’agit d’infections nosocomiales. Chez l’enfant il représente 3,6 à 13,8 % des isolements. Chez l’adulte, il est rarement isolé s’il n’y a pas d’antécédents d’hospitalisation, ni d’antibiothérapie (< 5 %). Les cocci à Gram positif sont représentés par les staphylocoques mais surtout par les entérocoques, dont la fréquence d’isolement augmente nettement lorsqu’il y a eu une hospitalisation antérieure (16,8% contre 3,3 %), un sondage urinaire (12% contre 7%) ou une antibiothérapie préalable (9 à 10 %)
La sensibilité aux antibiotiques
D’après les publications en année 2000 de l’observatoire national de l’épidémiologie de la résistance aux antibiotiques (ONERBA) en France, la résistance d’E. coli aux amino-pénicillines (ampicilline et amoxicilline) dépasse largement 40 % des souches et peut même atteindre 35 % pour l’association amoxicilline-acide clavulanique [7]. La résistance aux quinolones simples peut atteindre 10 % et se situe autour de 7 % pour les fluoroquinolones [7]. Quinze à 35 % des souches seraient résistantes au cotrimoxazole[43]. La fréquence de résistance est très basse pour la fosfomycine et les céphalosporines injectables de 3ème génération (céfotaxime, ceftriaxone) : inférieure à 3 %, mais atteint presque 10 % pour le céfixime [43]. En ce qui concerne les aminosides, environ 5 % des souches sont résistantes à l’amikacine et 15 % à la gentamicine [43]. Pour Proteus mirabilis, naturellement résistant à la nitrofurantoïne, la résistance acquise est comprise entre 15 et 20 % pour les amino-pénicillines et le cotrimoxazole, et reste inférieure à 5 % pour les autres antibiotiques. Les résultats sont du même ordre pour Klebsiella spp, naturellement résistante aux amino-pénicillines sans inhibiteur [43]. 19 S. saprophyticus naturellement résistant au mécillinam, à l’acide nalidixique et à la fosfomycine montre des fréquences de résistance acquise inférieures à 5 % pour les autres antibiotiques actifs [43]. Ces données sont évolutives et nécessitent une mise à jour nationale et locale régulière. Chez les entérobactéries, des résistances nouvelles et d’importance clinique, concernant les bêta-lactamines, sont apparues. Cette famille regroupe des antibiotiques de spectre large et extrêmement utilisés à l’hôpital comme en pratique de ville [46]. Les résistances aux bêta-lactamines sont dominées par les BLSE [47]. Ils ont une activité qui est inhibée par l’acide clavulanique et leur spectre d’activité inclut toutes les bêta-lactamines à l’exception des carbapénèmes et des céphamycines. Ces BLSE ont été largement décrites depuis 25 ans, elles sont le plus souvent à l’origine d’épidémies d’infections nosocomiales à K. pneumoniae dans les unités de soins intensifs [47]. L’implication de ces bactéries multi-résistantes dans les infections urinaires, tant communautaires que nosocomiales, constitue un réel problème de santé publique. Actuellement, partout dans le monde, plus de 90% des souches de S. aureus produisent une pénicillinase capable de détruire la pénicilline G et l’amoxicilline. Par contre, cette enzyme ne détruit pas les pénicillines M (méticilline) et les carbapénèmes et elle est inhibée par les inhibiteurs des bêtalactamases. Chez les staphylocoques, la résistance à la méticilline se fait par modification de la cible : production d’une nouvelle protéine liant les pénicillines (PLP2a) qui est codée par le gène mec A. Cette résistance est croisée pour toutes les bêta-lactamines [48]. P. aeruginosa est naturellement résistante à de nombreux antibiotiques, du fait de l’imperméabilité de sa paroi et de la production d’une céphalosporinase 20 chromosomique. Ainsi, les aminopénicillines, les céphalosporines de 1ère -2ème et certaines de 3ème génération tel que la céfotaxime, les tétracyclines, le chloramphénicol ne sont pas actifs [49] Le rôle de P.aeruginosa en tant que pathogène opportuniste responsable d’épidémies nosocomiales a été largement décrit. En effet, ce germe étant largement répandu dans l’environnement hospitalier, son manuportage par les patients et le personnel soignant favorise sa dissémination [50]. L’acquisition de nouvelles résistances est facile et rapide, favorisée en milieu hospitalier par une forte concentration bactérienne et une pression de sélection par les antibiotiques, notamment ceux à large spectre. Cette résistance acquise peut toucher toutes les molécules y compris l’imipénème, antibiotique largement utilisé en réanimation dans le traitement des infections graves à germes multirésistants [50].
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