PRODUCTION, STOCKAGE ET UTILISATION DE L’HYDROGENE

PRODUCTION, STOCKAGE ET UTILISATION DE L’HYDROGENE

L’hydrogène présente certaines caractéristiques physico-chimiques avantageuses d’un point de vue énergétique. C’est un gaz très léger (masse volumique = 0,09 kg/m3 , à 0°C) qui possède un pouvoir calorifique très élevé (33,3 kWh/kg, contre environ 14 kWh/kg pour le méthane ; données PCI). Il est inodore, incolore, non polluant. Dans le contexte énergétique actuel, les propriétés physique et environnementale de l’hydrogène font de lui un vecteur énergétique de qualité en association avec l’électricité. Le XXIe siècle pourrait voir la naissance d’une économie « électricité-hydrogène ». Bien qu’il soit très abondant sur Terre (via la ressource en eau planétaire), l’hydrogène n’existe pas à l’état naturel. Actuellement, sa production est essentiellement effectuée par reformage catalytique d’hydrocarbures (principalement gaz naturel). Une très faible proportion d’hydrogène est produite par électrolyse de l’eau (≤1% de la production mondiale). Cette voie de production est envisagée lorsqu’une très grande pureté d’hydrogène est souhaitée ou pour la synthèse de petites quantités. Elle constitue, en outre, une réponse environnementale propre à la problématique énergétique mondiale. La production mondiale d’hydrogène était estimée par l’Agence Internationale de l’Energie à 500 milliards de Nm3 en 2001 dont 589,9 millions de Nm3 pour la France [III-8]. La quasitotalité de l’hydrogène produit est utilisée dans l’industrie chimique et pétrochimique (synthèse de l’ammoniac et du méthanol, désulfuration des hydrocarbures). Seulement 1% de la production d’hydrogène est utilisée comme vecteur énergétique principalement dans le cadre des applications spatiales. Ce chapitre a pour objet de détailler les principaux procédés de production de l’hydrogène et les différentes utilisations de ce gaz, en insistant sur les applications énergétiques.

Production par électrolyse de l’eau 

Nicholson et Carlisle sont les premiers à produire de l’hydrogène et de l’oxygène par électrolyse de l’eau en 1800. En 1832, Faraday établit les lois quantitatives de l’électrolyse. Cependant, le premier électrolyseur n’est commercialisé qu’un siècle plus tard, en 1902 par la société Oerlikon Engineering Company [III-7]. En 1939, le premier électrolyseur dédié à la production d’oxygène à grande échelle (production des gaz > 104 m3 /h) est installé au Canada. Il est de technologie alcaline à plaques monopolaires. Il sera ensuite reconverti pour produire de l’hydrogène pour la fabrication d’engrais. En 1948, le fabricant Lurgi apporte une innovation majeure en développant le procédé d’électrolyse sous pression, ce qui permettait de s’affranchir d’une unité de compression pour le stockage des gaz produits et de fonctionner à plus haute température. La première installation de ce type est mise en place au Pérou à Cuzco en 1958. Le Tableau III-1 cidessous résume les caractéristiques de ces différents électrolyseurs. Depuis les années 60, le champ d’application de l’électrolyse s’est élargi, incitant les industriels et la recherche à développer des technologies innovantes.

Principe général de l’électrolyse de l’eau 

L’électrolyse de l’eau est une réaction électrochimique de décomposition de l’eau en hydrogène et en oxygène. Elle est rendue possible par le passage d’un courant continu à travers deux électrodes immergées dans un électrolyte liquide ou solide. 

Tension de cellule

 H2Oliq →H2+ O ∆H°(298K)=286kJ /mol ∆G°(298K)=237kJ /mol équation III-1

Tension réversible et tension thermoneutre

La tension minimale ou réversible Erev [III-8] d’une cellule d’électrolyseur correspond à l’énergie libre (∆G) nécessaire pour décomposer la molécule d’eau. Ces deux grandeurs sont reliées par la formule suivante : nF Erev ∆G° = Erev : voltage réversible pour électrolyser l’eau (V) ∆G : énergie libre de la réaction d’électrolyse (J/mol) F : constante de Faraday ; F = 96487 C/mol n : nombre d’électrons échangés lors de la réaction (ici n=2) Erev = 1,23 V à 298K La tension thermoneutre (Eth) correspond au fonctionnement isotherme de l’électrolyseur. Cette tension ne dépend que faiblement de la température. Elle est donnée par la formule suivante : nF Eth ∆H° = Eth : tension thermoneutre (V) ∆H : enthalpie libre de la réaction d’électrolyse (J/mol) F : constante de Faraday (C/mol) n : nombre d’électrons échangés lors de la réaction Eth = 1,48 V à 298K On constate que deux types de fonctionnement sont possibles en fonction de la tension de l’électrolyseur : • Erev < U < Eth : un apport extérieur de chaleur est nécessaire aux cellules d’électrolyse. • U > Eth : la chaleur est alors produite par la réaction.

Tension pratique 

Pratiquement, la tension d’électrolyse est toujours supérieure à la tension réversible à cause de l’ensemble des irréversibilités présentes dans le procédé. La Figure III-1 présente de manière schématique l’ensemble de ces irréversibilités. O. Ulleberg propose de représenter la tension pratique d’un électrolyseur de la manière suivante [III-31] : U = Erev + ηa + ηc + RoI avec : Erev : tension réversible (V) ; ηc : surtension cathodique (V) ; ηa : surtension anodique (V) ; Ro : résistance électronique et ionique de l’ensemble électrodes-membranes-électrolyte (Ω) ; I : intensité de cellules (A). Le détail de la tension de l’électrolyseur ainsi que les équations électrochimiques seront présentés dans le chapitre de modélisation de l’électrolyseur (chapitre IV).

Effet de la température sur la tension d’électrolyse

 Des études expérimentales menées sur l’électrolyse montrent que l’ensemble des irréversibilités présentes dans une cellule d’électrolyse diminue lorsque la température de fonctionnement de l’électrolyseur augmente. La résistance ionique, qui est prépondérante, diminue alors, permettant de diminuer la tension pratique de l’électrolyseur et donc sa consommation énergétique. En outre les réactions comme l’oxydation de l’eau en oxygène nécessitant d’être catalysées en raison de leur forte irréversibilité sont de même favorisées par un accroissement de la température. L’augmentation de température est limitée par la tenue des matériaux de l’électrolyseur. Audelà d’une certaine température, il est nécessaire d’opérer l’électrolyse sous pression afin de réduire les pertes d’eau par évaporation. On peut observer sur cette figure la possibilité d’obtenir des rendements élevés, voire supérieurs à 100 % (à faible intensité) dans le cas où la chaleur serait apportée à la réaction de manière externe (voir paragraphe III.2.1.a.i). 

Effet de la pression sur la tension d’électrolyse

 Bien que pour des raisons thermodynamiques, une augmentation de la pression tende à augmenter la tension de l’électrolyseur et donc à diminuer son rendement énergétique, en pratique, l’influence de la pression sur la tension de cellule à densité de courant et température constantes dépend de la technologie de l’électrolyseur. Pour la technologie dite « zero gap » (plaques bipolaires), on n’observe aucune influence de la pression et ce, dans une large gamme. Cette constatation pousse les industriels à développer des électrolyseurs à plaques bipolaires dont la pression de fonctionnement est supérieure à 30 bar. Ils peuvent ainsi s’affranchir d’un étage de compression, très énergivore, pour conditionner les gaz produits à 200 bar.  

Effet de la pression sur la pureté des gaz produits

La pureté des gaz (principalement l’oxygène) dépend à la fois de l’intensité et de la pression. La Figure III-4 nous montre que la concentration de l’hydrogène dans l’oxygène augmente avec la pression. A faible intensité et à pression constante, le débit d’hydrogène produit est faible. Du fait de la petite taille des molécules d’H2, ce gaz diffuse à travers la membrane pour se rendre du côté anodique où est produit l’oxygène. Ce phénomène est constant quelle que soit l’intensité. L’oxygène produit est donc moins pur lorsque l’intensité est faible. Cette diffusion peut entraîner un risque d’explosion (si la concentration d’hydrogène dans l’oxygène atteint la valeur critique de 4% en volume). C’est pourquoi on équipe habituellement les électrolyseurs de capteurs pour mesurer la concentration d’hydrogène dans l’oxygène produit. Enfin, on limite généralement le fonctionnement de l’électrolyseur à une intensité minimale et donc à une puissance minimale pour éviter la production d’un mélange explosif. Ce régime minimal augmente lui aussi avec la pression. Bien que l’augmentation de la pression de fonctionnement de l’électrolyseur soit favorable d’un point de vue énergétique (on peut s’affranchir d’une unité de compression pour le stockage des gaz produits, réduisant ainsi la consommation électrique du système), elle pénalise la qualité des gaz produits, à faible régime.

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