Les différents types d’élevages
Il existe deux types d’élevages avicoles au Sénégal : l’aviculture moderne et l’aviculture traditionnelle. Cette dernière fait de plus en plus place à l’aviculture moderne à cause des problèmes d’ordre sanitaire, alimentaire et génétique auxquels elle reste confrontée [6]. L’aviculture moderne est localisée essentiellement dans les régions de Dakar et de Thiès qui présentent des conditions climatiques mieux adaptées au développement et à la survie des races améliorées. Elle est de type semiindustriel et utilise des races améliorées qui reçoivent un aliment complet et en quantités précises, bénéficient d’une protection sanitaire et médicale, et sont logées dans des conditions contrôlées [14]. L’effectif varie de 100 à 2000 t êtes pour les petits producteurs et de 2000 à 10000 têtes pour les grands producteurs.
Malheureusement, la promiscuité des élevages en zone urbaine et péri-urbaine, la concentration des animaux dans un s eul endroit et l’utilisation des souches sélectionnées plus productives mais plus sensibles facilitent le développement de nombreuses pathologies qui portent ainsi atteinte à la rentabilité des élevages.
Les dominantes pathologiques des poulets de chair
Avant 1998, les dominantes pathologiques étaient la maladie de Newcastle, la maladie de Gumboro, les maladies respiratoires chroniques, les colibacilloses, les salmonelloses et les coccidioses. A présent, cette situation épidémiologique a évolué, car selon le RESESAV (Réseau Sénégalais d’Epidémiosurveillance Aviaire), des programmes de vaccination adéquats ont limité l’impact des maladies virales.
Cependant, les maladies bactériennes restent plus fréquentes : les colibacilloses représentaient 45% et les salmonelloses 15% en 2001[7]. Ces maladies bactériennes jouent un rôle important en santé animale mais aussi en hygiène alimentaire. En santé animale, la colibacillose est la cause la plus fréquente de salpingite et Production de la viande de poulet de chair dans la région de Dakar
Pour satisfaire les besoins en pr otéines animales d’une démographie sans cesse croissante, et dans des conditions de sécurité alimentaire de plus en plus strictes, l’aviculture moderne s’est développée autour des zones urbaines et péri-urbaines de la région de Dakar. L’amélioration de la productivité a permis de réduire les coûts de production et aujourd’hui le poulet de chair fournit la viande la moins chère aux consommateurs.
En 2003, la production nationale de volaille industrielle était de 5982 tonnes, avec un prix de vente au kilogramme de 1423 FCFA. Le prix connaît ainsi une baisse par rapport aux années 2001 et 2002, contrairement à la viande bovine qui a connu une hausse [32]. d’ovarite, tandis que la pullorose, infection due à Salmonella pullorum gallinarum , est devenue rare grâce à l’efficacité des contrôles. D’autres sérotypes de Salmonella sont régulièrement isolés chez les poussins, ils sont moins pathogènes m ais leur éradication est plus difficile [22]. Leur importance en hygiène alimentaire est liée aux toxi-infections alimentaires collectives (T.I.A.C.). Les T.I.A.C. sont des accidents aigus d’allure toxique consécutifs à l’ingestion d’aliments contaminés par des bactéries ou par les produits de leur métabolisme [5].
Les mesures de lutte contre les maladies aviaires
En aviculture, la productivité, la rentabilité et la qualité des produits sont conditionnées par l’état sanitaire du cheptel. Pour préserver la santé des oiseaux c’est plus que la thérapeutique, la prophylaxie médicale et surtout sanitaire qu’il convient d’appliquer [11].
La prophylaxie sanitaire
La prophylaxie a pour but de prévenir l’apparition et le développement de tout germe dans l’élevage, afin de diminuer la pression microbienne.
L’hygiène est un maillon indispensable au même titre que la vaccination et la nutrition à la contribution d’une meilleure gestion de la prophylaxie sanitaire. C’est un ensemble de moyens et pratiques qui, à travers la désinfection, visent à abaisser une charge contaminante (vecteurs de maladies), de l’environnement des animaux [2].
Les mesures de sécurité sanitaire concernent toute la production et elles se font dans le temps et dans l’espace [11].
Les barrières sanitaires dans le temps permettent de limiter le développement des germes et elles reposent sur trois notions : l’élevage en bande unique , le nettoyage et la désinfection en fin de bande, le maintien de bonnes conditions d’élevage (propreté, ambiance, alimentation, abreuvement).
Les barrières sanitaires dans l’espace sont les mesures d’isolement afin d’empêcher l’introduction de contaminants par les vecteurs animés ou inanimés.
L’utilisation des antibiotiques
Généralités sur les antibiotiques
Les antibiotiques sont des substances naturelles produites par des bactéries du sol et certains champignons, qui à faible concentration, agissent sur d’autres bactéries, sans être toxiques pour l’homme. Ils peuvent aussi être obtenus par synthèse.
L’importance des antibiotiques est considérable en raison de leur efficacité en médecine humaine et animale. Ils ont contribué à l’essor de l’élevage et constituent la première classe de médicaments vétérinaires dans le monde avec une part de marché de 30% environ [28]. Leur importance tient également à l’apparition des antibiorésistances bactériennes directement liées à leur utilisation massive.
L’activité antibactérienne n’est pas identique sur toutes les espèces b actériennes.
Selon la sensibilité des germes à l’antibiotique, on pa rle de germes sensibles, intermédiaires ou résistants.
Une souche bactérienne est dite sensible lorsqu’elle est inhibée ou détruite par l’antibiotique à des concentrations thérapeutiques normales. Elle est dite intermédiaire lorsqu’elle est inhibée ou détruite par l’antibiotique à d es concentrations thérapeutiques élevées. Elle est qu alifiée de résistante lorsque les concentrations nécessaires pour l’inhiber ou la détruire ne peuvent être atteintes dans l’organisme.
La liste des antibiotiques actifs sur une espèce bactérienne définit l’antibiogramme.
L’antibiogramme consiste à tester un panel d’antibiotiques vis à vis de chaque bactérie isolée, afin de déterminer pour chaque antibiotique si la bactérie y est sensible , intermédiaire ou résistante. Il sert également à la surveillance épidémiologique de la résistance bactérienne. Les techniques de mesure de sensibilité aux antibiotiques comprennent les méthodes de dilution en milieu liquide ou solide, et celles de diffusion en milieu solide.
Objectifs d’utilisation
Les antibiotiques sont administrés aux animaux d’élevage pour t rois raisons : la première, thérapeutique, c’est à d ire pour traiter les maladies ; la deuxième, pour prévenir les infections. La troisième raison est pour stimuler la croissance des animaux et améliorer le rendement de production.
Sur le plan thérapeutique, les antibiotiques doivent autant que possible être utilisés seuls, c’est la règle de la mono-antibiothérapie. Toutefois on est souvent conduit en thérapeutique anti-infectieuse à associer des antibiotiques [28] pour :
● élargir le spectre d’activité lors d’infections polybactériennes ou lorsque l’on ignore la nature du germe en cause.
● obtenir un effet synergique
● réduire les risques de développement des résistances bactériennes
● limiter les risques de toxicité de certains antibiotiques en réduisant les doses de chacun.
A titre préventif ou d’antibiosupplémentation, les antibiotiques sont ajoutés de manière routinière, à petites doses et pendant des périodes prolongées, dans les aliments.
Nature des antibiotiques utilisés
En tant que médicament vétérinaire, les antibiotiques destinés aux animaux doivent être soumis à une autorisation de mise sur le marché qui est délivrée après évaluation de la qualité, de la sécurité et de l’efficacité de ces produits [30]. Mais au Sénégal, comme dans la plupart des pays africains, les réglementations concernant la détention, la distribution et l’utilisation des médicaments vétérinaires connaissent un grand retard [3]. Dans les élevages avicoles, peu d’éleveurs sont encadrés par un vétérinaire, et l’aviculteur manipule lui-même les antibiotiques. Ce sont surtout les antibiotiques à large spectre qui sont utilisés. Ils sont administrés aussi bien par voie orale que par voie parentérale. Les principales familles d’antibiotiques utilisées à l’heure actuelle sont : β-lactamines, Aminosides, T étracyclines, Quinolones, Nitrofuranes, Sulfonamides, Diaminopyrimidines , Antibiotiques pol ypeptidiques [3].
Ces antibiotiques, lorsqu’ils sont utilisés judicieusement, permettent de combattre les maladies dues à plusieurs germes pathogènes.
Tout produit alimentaire, transformé ou non que l’homme consomme peut être contaminé par des microorganismes [24]. La viande de poulet de chair, à l’instar des autres denrées alimentaires n’est pas sans risque pour la santé du consommateur. Elle peut contenir des germes pathogènes (Staphylocoques, Campylobacter, Salmonelles, Clostridies), ou i ndicateurs d’hygiène (Coliformes), qui vont entraîner des troubles plus ou moins graves. Nous traiterons uniquement de Salmonella spp et Escherichia coli, qui font l’objet de notre étude.
Le genre Salmonella
La contamination des volailles par Salmonella est à prendre en compte en fonction de son incidence chez l’homme, non seulement en raison des risques de toxi-infections alimentaires mais aussi et surtout à cause de la dissémination de ces microorganismes dans le milieu extérieur [20].
Les Salmonella sont des bacilles à G ram négatif appartenant à l a famille des entérobactéries. Avec ces dernières elles ont en commun de fermenter le glucose, de réduire les nitrates en nitrites, et d’être dépourvues d’oxydase. Leur identification différentielle repose sur leur capacité à p roduire du H2S (sulfure d’hydrogène ), la possession d’une lysine-décarboxylase et l’absence d’uréase et de tryptophane désaminase. Le genre Salmonella comprend une seule espèce Salmonella enterica. Plus de 2200 sérovars ont été isolés et ils se différencient par leurs antigènes de paroi (O) et leurs antigènes flagellaires (H). A l’exception de quelques sérovars ayant acquis une spécificité d’espèce, il faut considérer tous les sérovars comme potentiellement dangereux [12]. Les salmonelloses sont classées en deux catégories:
-les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes dues à des sérovars strictement humains, S. Typhi, S. Paratyphi A.
-les toxi-infections alimentaires et gastro-entérites du nourrisson, dues à des sérovars ubiquitaires, donc pouvant transiter chez l’homme et l’animal. Les aliments incriminés sont les viandes et les produits carnés, volailles et produits dérivés, œufs et ovoproduits.
L’espéce Escherichia coli
Les bactéries de l’espéce Escherichia coli sont des entérobactéries considérés comme des hôtes normaux du tube digestif de l’homme et de la plupart des animaux à sang chaud [22]. Leur présence est un indicateur de contamination fécale. Elles se caractérisent par leur capacité de produire une entérotoxine dont l’action sur les entérocytes perturbe les fonctions d’absorption normalement assurées au niveau de la muqueuse intestinale [26]. Ces microorganismes peuvent être présents dans certains aliments comme le bœuf haché, le lait et les produits laitiers et dans l’eau.
Les sources de contamination
La contamination des carcasses de volaille se fait par l’eau, le sol, l’air, les poussières, l’homme, les animaux et le produit lui-même [12], [24]. Les contaminations d’origine endogène se produisent soit directement par le sang, soit au moment de l’abattage à partir de la flore des muqueuses, de la peau, et de l’intestin [25].
Les facteurs de risque de contamination
Les enquêtes menées aux différents points de la filière de production (couvoirs, élevages, moyens de transport, chaînes d’abattage, ateliers de transformation…) ont permis de mettre l’accent sur le rôle possible des différentes étapes sur la contamination finale [19].
Les couvoirs peuvent devenir des sources de contamination si les conditions d’hygiène sont défectueuses dans les éclosoirs et dans les incubateurs. Les élevages sont des sites privilégiés d’intercontamination lorsque plusieurs paramètres peuvent apparaître potentiellement favorables (salmonelles résidentes, vecteurs animés, aliment,…) [10]. Les opérations ultérieures d’abattage et de transformation constituent aussi des étapes à risque pour l’introduction ou la diffusion des germes, notamment ceux résistants aux antibiotiques [18] [8].
La résistance des bactéries aux antibiotiques et conséquences
L’usage croissant des antibiotiques en pathologie animale s’est traduit comme en pathologie humaine par une augmentation progressive du nombre de bactéries antibiorésistantes. L’évolution de la résistance aux antibiotiques est décrite pour les espèces bactériennes majeures en pathologie animale que sont les Salmonelles et les Escherichia coli. Certains des facteurs responsables de cette évolution, pression de sélection par les antibiotiques, supports génétiques de la résistance, aspects épidémiologiques sont envisagés afin de tirer des conséquences pratiques pour l’antibiothérapie actuelle et future.
Définition de l’antibiorésistance
L’antibiorésistance ou la résistance aux antibiotiques correspond à l’absence ou la diminution de sensibilité d’une souche bactérienne à un antibiotique [28].
On distingue deux types de résistance : la résistance naturelle qui est une caractéristique propre à u ne espèce bactérienne définissant le caractère « sauvage » ou sensible de cette espèce, et la résistance acquise qui caractérise certaines souches au sein d’une espèce bactérienne. Cette résistance est le résultat d’une modification génétique liée soit à une mutation, soit à une acquisition de matériel étranger [29]. Ce type de résistance constitue le problème majeur de l’antibiothérapie et explique l’usure des antibiotiques au cours du temps.
Supports génétiques de la résistance
Les gènes de résistance aux antibiotiques se situent soit sur le chromosome bactérien, soit sur des éléments extrachromosomiques appelés plasmides [13] .
Résistance chromosomique
La résistance chromosomique résulte d’une mutation chromosomique qui confère à la bactérie la possibilité de résister à un antibiotique. La mutation est un événement rare qui affecte une bactérie sur 107 à 109 . Elle est spontanée c’est à dire que l’antibiotique n’intervient que comme agent de sélection en éliminant les populations sensibles et en laissant subsister et croître les mutants résistants.
La mutation est un événement stable et héréditaire, car les bactéries filles ont les mêmes caractères de résistance que la bactérie parentale. Elle est spécifique, elle n’affecte qu’un seul antibiotique [21]. La rareté du phénomène explique sa f aible importance en thérapeutique, puisqu’elle ne représente que 10 à 20 % des résistances observées. Ce mécanisme de résistance est observé vis à vis des quinolones, des antibiotiques polypeptidiques, des furanes.