Production d’acide phosphorique
L’acide phosphorique, ou plus correctement acide orthophosphorique H3PO4, est une importante composante chimique de l’industrie des engrais (intermédiaire entre la roche phosphatée et les principaux produits tels que le phosphate diammonique DAP, le phosphate monoammonique MAP ou encore le superphosphate triple TSP, utilisés en agriculture). Il est utilisé dans la fabrication des détergents, le traitement de l’eau et comme supplément alimentaire.
Acide phosphorique est une désignation imprécise, dans le sens où huit acides de phosphore sont connus, parmi lesquels quatre sont phosphoriques : hypophosphorique H4P2O6, pyrophosphorique H4P2O7, métaphosphorique HPO3 et orthophosphorique H3PO4. Bien que le terme acide phosphorique soit inapproprié, il est néanmoins celui utilisé tant par les producteurs que par les distributeurs pour désigner l’acide orthophoshorique.
Pour une plus grande confusion dans l’industrie des engrais, le terme d’acide phosphorique est présenté comme un synonyme de pentoxyde de phosphore P2O5. Dans toutes ces désignations imprécises, il existe pourtant un consensus universel : l’unité P2O5 est le dénominateur commun pour exprimer la teneur en phosphore tant dans l’acide phosphorique que dans la roche phosphatée (Waggaman [1969]). Des huit acides de phosphore, cinq résultent de la combinaison d’anhydrides phosphoreux et phosphoriques.
Fabrication industrielle
Deux voies, à savoir la voie humide et la voie thermique, sont envisageables pour produire de l’acide phosphorique à partir de la roche phosphatée. Le procédé voie humide, de loin le plus répandu, sera explicité plus en détail au cours de ce chapitre.
Voie thermique
L’acide phosphorique destiné à la fabrication de phosphates alimentaires ou techniques peut être élaboré par voie thermique par réduction de phosphate naturel, en présence de coke ou de silice, au four électrique à 2000°C. Le phosphore obtenu est oxydé en P2O5 puis hydraté en acide. 2Ca3(PO4)2 + 6SiO2 + 10C → P4 + 10CO + 6CaSiO3 P4 + 5O2 → P4O10 P4O10 + 6H2O → 4H3PO4 (2) (3) (1) Dans la réaction (1),
on obtient du phosphore blanc P4 qui est l’une des formes allotropiques du phosphore bien qu’à la température de réaction, la dissociation en P2 soit déjà effective. On condense les vapeurs de phosphore (refroidissement par eau) et le produit final de la réaction est la molécule P4 peu stable car les angles de valence du tétraèdre correspondent à des « tensions internes ».
La réaction (2) s’effectue par combustion à 60°C du phosphore blanc liquide, dans un courant d’air sec (30°C) en grand excès (30 à 35%), afin d’éviter la formation d’anhydride phosphoreux P4O6. La réaction est fortement exothermique et la température atteint 1300°C. L’acide « thermique », obtenu lors de la réaction (3), représente de 5 à 10% de la production totale d’acide phosphorique.
Cette voie qui donne un acide de très haute pureté est peu à peu abandonnée au profit de la voie humide suivie d’une purification par extraction liquide-liquide. Sa part dans l’industrie 31 des phosphates (hors engrais) est passée entre 1989 et 1993 de 89% à 80% en Amérique du Nord et de 20 à 13% en Europe de l’Ouest (Habashi [1985]). Le procédé Prayon suit la chaîne d’opération suivante : Gisement de phosphates Elément phosphore Oxydation Acide phosphorique (55 à 60% de P2O5)
Voie humide
Figure II-1 – Voie thermique pour la production d’acide phosphorique (Habashi [1985]) Le phosphate de calcium étant insoluble dans l’eau, les phosphates naturels doivent être traités pour que les plantes puissent absorber le phosphore contenu. Il est su, depuis longtemps, que l’acide phosphorique résulte de l’attaque des phosphates naturels par un acide fort (en général acide sulfurique,
mais acides nitriques ou chlorhydriques peuvent également être utilisés) (Slack [1968], Waggaman [1969]). Avec ces deux derniers acides, il y a formation de sels solubles pouvant rendre la séparation de l’acide phosphorique difficile ou économiquement impraticable (Weber [1969]). La teneur en acide phosphorique est exprimée en pourcentage de P2O5.