Procédés de fabrication du charbon actif

Activation

La seconde étape est l’activation du produit. Ce traitement sert à améliorer la porosité du matériau en augmentant son volume poreux et en élargissant le diamètre des pores formés lors de la carbonisation, mais également en créant de nouveaux pores. Ces pores sont créés par élimination sélective d’atomes de carbone ce qui permet ainsi d’accéder à la structure interne du charbon actif [2, 8].
La structure et la distribution des pores sont déterminées par le précurseur lui-même et l’étape de carbonisation.
L’activation sert également à accroître le nombre de sites actifs nécessaires à l’adsorption [3].
Les atomes de carbone qui sont à la périphérie des cycles aromatiques possèdent des électrons non appariés. Ils sont donc très réactifs et, lors de l’activation, ont tendance à former des fonctions oxydées en surface.
D’une manière générale, le mécanisme de l’activation peut se résumer en deux étapes.
Dans la première, la structure du squelette carboné est désorganisée, ce qui entraîne l’ouverture des pores et permet ainsi d’optimiser les capacités d’adsorption.
Dans la seconde, l’activation est un peu plus poussée et permet l’oxydation des atomes de carbone des cycles aromatiques produisant des sites actifs et des pores de diamètres plus importants.
L’activation peut être influencée par la présence d’impuretés métalliques faisant partiede la composition élémentaire du précurseur, ceux-ci peuvent jouer le rôle de catalyseur et activer le processus ou au contraire inhiber la gazéification du charbon actif.
L’étape d’activation apparaît donc comme primordiale pour optimiser les performances d’adsorption et de catalyse des charbons actifs car ces propriétés sont conditionnées par la structure poreuse et la chimie de surface du matériau [8, 9].
Il existe deux types d’activation : l’activation dite physique et l’activation dite chimique :
• Activation physique : Elle peut s’effectuer, entre 650 et 900°C [2] ou entre 800 et 1000°C [8] selon les procédés de fabrication, sur un matériau déjà carbonisé, sous atmosphère inerte, par des agents oxydants tels que la vapeur d’eau, le dioxyde de carbone, l’air ou un mélange de gaz. L’agent activant oxyde les parties les plus réactives de carbone sous forme de CO ou de CO2.
La réaction se développant plus facilement suivant des directions où le carbone est moins dense, elle crée des « tunnels » ce qui développe la microporosité.
• Activation chimique : Contrairement à l’activation physique, l’activation chimique s’effectue en même temps que la carbonisation. Un traitement thermique entre 400 et 600°C [8], sous gaz inerte, du carbone imprégné d’un ou plusieurs composés chimiques est effectué.
L’agent activant est ajouté au précurseur avant sa carbonisation, il est ensuite éliminé par lavage grâce à un solvant approprié.
Ces agents activants sont en général l’acide phosphorique H3PO4 ou le chlorure de zincZnCl2 (ce dernier est interdit pour les applications agro-alimentaires). Ces agents
interviennent comme catalyseurs d’oxydation et permettent à la fois le développement de la microporosité et de la mésoporosité par élargissement du diamètre des pores.

Propriétés physico-chimiques

Les caractéristiques physiques

Le charbon actif est disponible sous deux formes différentes: en poudre ou en granulé.
 Charbon actif en poudre (CAP)
Le charbon actif en poudre ou CAP prend la forme de grains de taille comprise entre 10 et 50 μm et il est généralement utilisé en combinaison avec un traitement clarificateur. Le CAP est ajouté continuellement dans l’eau à traiter avec des agents floculants. Il est recommandé d’utiliser des clarificateurs pour augmenter le temps de contact entre le charbon et l’eau [10].
Le charbon actif en poudre présente des avantages par rapport au charbon actif en granulé.

La surface spécifique

La surface spécifique représente la surface totale par unité de masse du produit accessible aux atomes et aux molécules, y compris la surface des pores ouverts.
Elle est la caractéristique essentielle pour permettre l’adsorption des solutés.
Selon le procédé de fabrication et le matériau d’origine, la porosité sera différente et la surface spécifique peut varier de 400 à 2000 m2/g [15].
Notons que ce sont essentiellement les micro et mésopores qui créent la surface. La surface spécifique est calculée en mesurant la quantité d’un gaz adsorbé à basse température (généralement l’azote à 77 K) et en supposant que la surface est recouverte par une monocouche de molécules. Connaissant le diamètre d’une molécule et donc sa surface, on en déduit la surface d’adsorption [11].
La surface spécifique varie notamment en fonction du temps passé par le charbon dans le four d’activation. Plus ce temps est important, plus le charbon est activé en profondeur. En d’autres termes, ses pores sont plus nombreux et plus profonds [16].
La surface spécifique dépend directement de la porosité : plus la microporosité est grande et plus la surface spécifique est importante.

Détermination de la surface spécifique selon la théorie de Brunauer, Emmett et Teller (B.E.T.)

La surface spécifique peut être déterminée expérimentalement par adsorption physique d’un gaz à basse température. Ce type de procédé repose sur les travaux de BRUNAUER, EMMETT et TELLER [17] qui ont proposé une théorie sur l’adsorption physique reposant sur plusieurs hypothèses :
– La surface est homogène, tous les sites possédant la même énergie, une molécule s’adsorbe par site et il n’y a aucune interaction entre elles.
– L’adsorption se fait en plusieurs couches, les molécules de la première couche servant de site d’adsorption pour celles de la deuxième.
– Existence d’un équilibre permanent entre l’adsorption et la désorption.
L’équation qui en découle (équation B.E.T.) est la suivante :

Les fonctions de surface

Bien que les propriétés précédemment citées (surface spécifique et porosité) jouent un rôle primordial dans les capacités d’adsorption et de catalyse du charbon actif, ce sont les groupements fonctionnels présents à la surface du charbon qui influencent majoritairement ces capacités.
L’importante réactivité de surface est liée aux atomes de carbone délocalisés qui ont des valences résiduelles et qui constituent par conséquent des sites très réactifs. Ces atomes de carbone montrent de grandes tendances de chimisorption vis à vis d’hétéroatomes tels que l’oxygène, l’hydrogène ou l’azote [6, 12, 19].
Des recherches ont été faites pour identifier la nature de ces sites actifs qui sont à l’origine du pouvoir catalytique et d’adsorption du charbon actif.
Les groupements fonctionnels présents en surface les plus couramment identifiés sont des fonctions oxygénées. Parmi celles-ci les groupements acides sont les plus fréquents [19]. Les groupes fonctionnels basiques de surface sont à ce jour très peu connus.
La nature des groupements fonctionnels ainsi que les propriétés qui en découlent (acidité, basicité, polarité) sont dépendantes de la composition du précurseur et du processus de fabrication (carbonisation / activation). Ces groupements fonctionnels peuvent cependant être modifiés en post-production par l’utilisation de différents réactifs chimiques [20].
A titre d’exemples, une nitrogénation entraîne la formation de groupements basiques, une chloration celle de groupements polaires et une oxydation permet la formation de groupes acides [21, 22].
Une étude faite par POLANIA-L et coll. [20] montre qu’il est possible de modifier sensiblement la teneur en groupements oxygénés de surface des carbones activés. Cela peut se faire par un traitement thermique sous gaz N2, un traitement acide, une estérification avec du méthanol ou une oxydation. Ces traitements entraînent l’augmentation ou la diminution du nombre des groupes acides ou basiques.
Ces changements de groupements de surface entraînent des modifications des propriétés d’adsorption du carbone activé.

Utilisation et critères de choix du charbon actif

Utilisation du charbon actif

Les charbons actifs sont utilisés dans l’industrie pour de nombreuses applications, traitement ou récupération de polluants, piégeage de composés volatils, traitement des eaux, purifications gazeuses (sous entendu élimination d’impuretés, tri sélectif de composés, ou adsorption cryogénique), séparation moléculaire pour la pharmacie, rétention d’impuretés, stockage de gaz, catalyse, etc.
Le traitement de l’eau potable représente 20 % du marché mondial. En 1991, 56 000 t de charbon actif en grain sont utilisées en Amérique du Nord, Japon et l’Union Européenne dans des usines de traitement de l’eau potable.
L’usine de traitement de l’eau du Syndicat des Eaux d’Ile de France, à Choisy le Roi (800 000 m3/jour, la plus importante de France) utilise un charbon actif qui en fixant des bactéries présentes dans l’eau à traiter permet à celles-ci de dégrader les matières organiques. Après ozonation, l’eau traverse une couche de 2,5 m de charbon actif avec un temps de contact de 10 min. Le débit par unité de traitement est de 1800 m3/h [23].

Régénération du charbon actif

Pour des raisons économiques, le charbon actif est souvent régénéré.
Il existe trois méthodes de régénération [10] :

Régénération à la vapeur

Cette méthode est réservée à la régénération des charbons actifs qui ont simplement adsorbés des produits très volatils. (Par exemple pour un nettoyage en profondeur dans le cas de charbon chargé en COV, on utilise la vapeur. Les COV évaporés sont récupérés par condensation).
Cependant, le traitement à la vapeur peut être utile pour déboucher la surface des grains de charbons.

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Régénération thermique

Cette opération est réalisée par pyrolyse ou en brûlant les matières organiques absorbées par les charbons actifs. Dans le but d’éviter d’enflammer les charbons, ils sont chauffés aux alentours de 800°C au sein d’une atmosphère contrôlée. C’est la méthode de régénération la plus largement utilisée et régénère parfaitement les charbons actifs. Cependant elle a quelques désavantages : très coûteuse avec l’achat de plusieurs fours, il y a une perte de charbon de l’ordre de 7-10 %.

L’utilisation de fours électriques réduit ces pertes

Dans le cas de traitement d’eau, on procède à un lavage à l’eau ou à l’acide, puis à une désorption à chaud. Un charbon régénéré est mélangé à du charbon neuf à 10-20 % (procédé du make-up), afin que ses caractéristiques soient proches de ce qu’elles étaient initialement.
Le nombre de régénérations doit être limité à moins de 5, car baisse de qualité.

Régénération chimique

Procédé utilisant un solvant utilisé à une température de 100°C et avec un pH élevé.
L’avantage de cette méthode réside dans la minimisation des pertes de charbons (environ 1%). Les polluants sont ensuite détruits par incinération [10].

Adsorption – Désorption

Le phénomène de l’adsorption [27] est le résultat de l’interaction d’une molécule ou d’atomes libres (l’adsorbat) avec une surface (l’adsorbant).
Dans la plupart des cas, le phénomène d’adsorption a lieu entre un gaz et la surface d’un solide.

Principe de l’adsorption gazeuse sur une surface solide

On parle d’adsorption d’un gaz sur une surface solide lorsqu’il y a rétention demolécules du gaz sur la surface. La paroi du solide étant composée de la totalité de la surface géométrique externe et interne lorsqu’il y a des pores de la dimension des atomes du gaz.
Il y a deux types d’adsorption, une adsorption physique (ou physisorption) si les atomes du solide et ceux du gaz sont liés par des forces d’interaction physique faibles de type forces de Van der Waals ou électrostatiques (~ 20 kJ/mole) ; une adsorption chimique (ou chimisorption) lorsque les molécules se lient au substrat par des liaisons fortes de type liaisons covalentes (~ 200 kJ/mole) [29].
L’adsorption peut se faire en monocouche, comme dans la théorie de Langmuir, si tous les sites sont équivalents, que la surface est uniforme et qu’il n’y a pas d’interaction entre les molécules adsorbées. Elle peut également suivre la théorie de Brunauer, Emmet et Teller qui tient compte d’un modèle multicouche dans lequel il y a des interactions entre les molécules adsorbées et où chaque molécule peut devenir un site d’adsorption supplémentaire.
Les surfaces peuvent donc être saturées par une monocouche ou par plusieurs couches formant une phase liquide. Cette dernière situation intervient surtout dans les micropores des charbons actifs qui permettent de fixer une grande quantité de gaz sur un faible volume (figure 3).

Isotherme d’adsorption

Les isothermes d’adsorption [30] représentent la quantité d’un composé gazeux adsorbé sur une surface à la pression d’équilibre et à température constante.
Il s’agit d’un équilibre thermodynamique entre la phase solide et la phase gazeuse.
L’isotherme d’adsorption, d’équation Vads= f (p/p0), est obtenu en mesurant les quantités volumiques de gaz adsorbé (Vads) pour des valeurs croissantes de la pression relative représentée par p/p0, p étant la pression d’équilibre et p0 la pression de vapeur saturante du gaz à la température considérée.
Le phénomène d’adsorption résulte de l’attraction des molécules de gaz à la surface du solide.
Dans la plupart des cas, le gaz étudié est l’azote, et la température est celle d’ébullition de l’azote liquide (77 K).
Les isothermes d’adsorption physique d’un gaz sur un solide peuvent être classées en cinq catégories selon la « classification de Brunauer, L. Deming, W. Deming et Teller » appeléecouramment « classification BDDT » [31]. (Figure 4)
Ces différentes formes d’isothermes sont caractéristiques de la texture du solide examiné, et l’allure de ces courbes permet de définir le type de porosité présente au niveau de l’échantillon analysé.

Modèles d’isothermes d’adsorption

Il existe de nombreux modèles permettant d’expliquer ou d’interpréter les isothermes entre autres le modèle de Langmuir et le modèle de Brunauer, Emmet et Teller (B.E.T.).

Modèle de Langmuir

Langmuir [33 – 34] fut le premier à proposer une relation entre la quantité d’un gaz adsorbé et sa pression d’équilibre. Langmuir définit l’équilibre d’adsorption comme un processus dynamique entre les molécules arrivant à la surface et celles quittant la surface. On écrit les équations de la variation du taux de recouvrement des sites d’adsorption en fonction du temps lors de l’adsorption (éq.4) et lors de la désorption (éq.5)

Isotherme de désorption

Après avoir atteint la saturation (p/p0=1), en déterminant les quantités de vapeur restant adsorbée sur le solide pour les valeurs de pressions relatives (p/p0) décroissantes, onpeut obtenir l’isotherme de désorption.
La désorption est le mouvement des molécules de gaz s’éloignant de la surface du solide, donc la diminution de la concentration des molécules de gaz à la surface par rapport à la concentration totale du gaz.
Souvent l’isotherme de désorption ne coïncide pas avec l’isotherme d’adsorption. Il y a alors apparition d’un phénomène d’hystérésis : la quantité de vapeur restant adsorbée lors de la désorption pour une valeur p/p0 donnée est supérieure à celle retenue lors de l’adsorption à la même pression.
Ce phénomène est toujours observé dans le cas des isothermes IV et V, et quelquefois pour les isothermes II et III [18].
L’existence d’une hystérèse entre l’équilibre d’adsorption ou de désorption peut être expliqué par l’existence de mésopores où l’adsorbat se trouve sous forme condensée ; ou encore par l’existence de pores en forme de bouteille impliquant une barrière énergétique plus grande pour le phénomène de désorption que pour celui de l’adsorption [ 32].
Les différents types d’hystérésis classiquement obtenus ont été classés par DeBOER [36] et sont représentés sur la figure 5.
En fonction du type d’hystérésis obtenu, on peut déterminer la forme des pores du solide analysé.

Purification

La purification est une étape importante dans la production du charbon actif. Elle permet d’éliminer les impuretés et d’avoir un charbon prêt à l’emploi.
− Activation par ZnCl2
Pour la purification des charbons activés par ZnCl2, nous avons utilisé de l’acide chlorhydrique (1- 2% ). Le charbon actif est immergé dans l’acide pendant 2 heures.
La purification permet de libérer certains sites poreux occupés par des impuretés telles que les métaux lourds, les cendres etc.

Etude de la porosité

La porosité est une caractéristique très importante pour une pastille à pâte de carbone.
Elle mesure le degré d’imprégnation de l’électrode par l’électrolyte et se définit comme la quantité d’électrolyte retenue par gramme d’électrode sèche.
La masse Mo de la pastille sèche est déterminée puis plongée pendant 48 heures dans une solution électrolytique de LiClO4 de concentration donnée. Elle est ensuite retirée et pesée de nouveau (nous avons pris soin de nettoyer la couche d’électrolyte déposée sur ses faces avec du papier filtre). Si M est la masse de la pastille imprégnée, la porosité est obtenue par l’expression suivante :

Discussions

Les courbes d’isothermes d’adsorption et de désorption obtenues (figures 11, 12, 13 et 14) sont des isothermes du type II de la classification de BDDT [31], type caractéristique d’adsorbants dont la structure poreuse est plus dispersée.
La condensation dans les pores (condensation capillaire) intervient avant saturation de l’adsorbant, ce qui est explicable par une adsorption multicouche.
En outre, les isothermes de désorption ne coïncident pas avec celles d’adsorption ; il y a apparition du phénomène d’hystérésis : la quantité de vapeur restant adsorbée lors de la désorption pour une valeur p/p0 est supérieure à celle retenue lors de l’adsorption à la même pression.
On pourrait expliquer ce phénomène par :
– l’existence de mésopores où l’adsorbat se trouve condensée ; ou par l’existence de pores en forme de bouteille impliquant une barrière énergétique plus grande pour le phénomène de désorption que celui de l’adsorption [32];
– la présence de groupements fonctionnels à la surface des pores. Groupements qui pourraient réagir avec les molécules d’azote empêchant ainsi une désorption complète;
– la présence de substances résiduelles restées dans les pores. Lesquelles empêchent la réversibilité du processus d’adsorption- désorption.
La comparaison des courbes d’adsorption et de désorption des figures 11, 12, 13 et 14 montre que le phénomène d’hystérésis est moins accentué dans le cas des charbons activés par H3PO4 que ceux activés par ZnCl2. Ce qui est en accord avec les résultats analytiques.
En effet, les charbons activés par H3PO4, ont des diamètres de pores plus élevés ce qui entraîne une désorption plus facile.

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