PROBLEMATIQUE DE L’ETALEMENT URBAIN ET
AMENAGEMENT DES ZONES D’EXTENSION PERIPHERIQUE
Le paysage urbain de la ville : les conditions de formation
L’influence du site sur le processus d’occupation de l’espace
Un nombre important de villes en Afrique subsaharienne à l’instar de celle de Joal ont connu une évolution qui a subi les contraintes physiques du milieu. Ainsi, on peut penser avec VENNETIER, P. (1991) « que l’origine des villes ait été antérieure ou consécutive à la colonisation, l’évolution qu’elles ont connue a subi les contraintes d’un site qui n’était pas toujours adapté au développement d’une agglomération » . Dans cet ordre d’idées, nous remarquons avec lui que ces villes ont du s’adapter à cette situation du milieu physique dont les défauts peu manifestes à l’origine sont devenus très apparents et contraignants. Dans ce contexte la ville de Joal s’est implantée sur un site où les conditions physiques constituent une contrainte majeure dans son extension spatiale. En effet, l’espace urbain de joal est érigé sur une flèche sableuse dont la configuration spatiale est déterminée par la présence de l’océan atlantique au sud et à l’ouest, et un bras de mer qui encadre sa partie est. Compte tenu de cette situation, l’extension spatiale de la ville ne peut se développer que vers le nord débordant sur l’arrière pays et contournant la lagune dans un secteur déprimé, inondable en saison des pluies. Dans cette dynamique spatiale relative à l’urbanisation rapide de la ville, il convient de signaler les habitations construites dans ce secteur inondable en saison des pluies. Ce secteur constitue un espace vulnérable en raison de la forte concentration démographique et l’implantation des constructions qui s’est faite sans mécanismes d’aménagement appropriés aux conditions physiques du site. Ainsi, en toute saison, les zones marécageuses occupent de grandes superficies et imposent des contraintes physiques qui pèsent sur l’étalement urbain de la ville. En considération de tous ces paramètres, l’étalement urbain de la ville de Joal est entièrement conditionné par les conditions physiques du milieu qui impactent sur l’occupation de l’espace urbain comme l’illustre la carte 2, page 28.
La géodynamique du trait des côtes sur la configuration de l’espace urbain
La nature même de la côte africaine, en maints endroits, se prête assez mal à l’expansion des établissements urbains dans la mesure où celle-ci est constituée de dépôts alluviaux et marins disposés en cordons parallèles séparant des dépressions humides, isolant des lagunes digitées envahies par la mangrove ou des herbes aquatiques. A cet égard, le site urbain de Joal connait des contraintes particulières en rapport avec la géodynamique du trait des côtes comme. En effet, entourée par l’océan, une vasière et une forêt privée la dynamique de la ville est soumise aux conditions du milieu naturel. Le substrat fragile et instable est soumis à une dynamique littorale rapide dont l’incidence induit parfois une occupation irrégulière par la population. En outre, l’érosion marine constitue un problème de grande ampleur qui touche l’ensemble de la zone de la petite côte à l’instar de la ville de Joal. Cette avancée marine dont les impacts se traduisent par l’effet ravageur du trait des côtes sur les infrastructures portuaires et les habitations constitue une contrainte dans ce processus d’extension spatiale de la ville. Nous pouvons admettre à la lumière de ce qui précède que cette avancée de la mer impacte sur la disposition des constructions le long de la côte et constitue une sérieuse menace sur les équipements, les infrastructures le long du littoral et les quartiers proches de l’océan. Cette avancée marine a contraint un certain nombre d’habitants de la ville qui vivaient le long du littoral à se déplacer. Ce déplacement de ces habitants sous l’effet de l’avancée de la mer a eu un impact sur le processus d’étalement urbain notamment dans les zones d’extension périphérique.
L’influence du droit foncier sur le processus d’occupation de l’espace
Pour mieux décrypter les aspects des structures urbaines en Afrique, il importe de prendre en compte l’existence d’un droit coutumier qui constitue un élément déterminant dans la configuration de l’espace urbain. En effet, les autorités coutumières disposant du pouvoir de premiers occupants du sol ont été à l’origine de la création des premiers quartiers dits traditionnels dans la ville de Joal. Cette promotion du droit foncier coutumier à l’origine a crée des états de fait complexes qui aboutissent aujourd’hui à des situations parfois inextricables. Cet héritage du droit coutumier imprime sa marque sur la morphologie de l’espace urbain. D’une part, on distingue des quartiers dits traditionnels dépourvus de projet de lotissement et caractérisés par une physionomie du bâti assez particulière reflétant les premiers modèles de construction. D’autre part, les quartiers d’extension qui ont émergé avec la promotion du droit foncier administré par les autorités publiques locales à travers des 31 projets de lotissement et des mécanismes d’aménagement de l’espace. Mais, du fait de l’impact de l’urbanisation accélérée on distingue des quartiers d’extension périphérique crées d’une manière spontanée avec une typologie d’habitats précaires par des populations notamment défavorisée. Ainsi nous ne pouvons pas parler de la formation de l’espace urbain de la ville en occultant l’influence de ces droits fonciers. Dans ce sillage, sur le plan historique, le descendant du premier occupant n’était pas considéré comme propriétaire terrien, mais comme prêtre de la terre, le lamane. Il était le chef de la communauté, de la famille ou du lignage chargé d’administrer et de gérer la terre. A cet effet, le droit coutumier était mis en œuvre en dépit de la tentative des colonisateurs de transformer ces droits fonciers traditionnels en droit de propriété absolue. Ces droits fonciers traditionnels ont façonné les premières structures urbaines de l’espace de la ville et ont eu des effets importants sur la croissance spatiale. Même si, Aujourd’hui, la gestion des terres reviennent à l’Etat et à ses démembrements (services déconcentrés et collectivités locales : loi 97-07 su 22 mars 1996 portant transferts de compétences), l’accès à la terre dans la commune de Joal-Fadiouth est précédé de concertation entre les chefs coutumiers et la Mairie. Cependant, l’accès aux terres agricoles s’effectue par l’intermédiaire des lignages maternels (Sarr, 2011). Toutefois, les autorités publiques locales sont parvenues en dépit de l’existence du droit coutumier à renforcer leur mainmise sur l’organisation et la rationalisation de l’occupation du sol. Cette influence de la puissance publique a permis l’établissement d’un premier schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme pour une gestion prévisionnelle et efficace de la croissance de la ville. C’est dans cette optique que la société nationale HLM (habitations à loyer modéré) y a construit des logements sociaux au niveau du quartier santhie
LA DYNAMIQUE URBAINE DE LA VILLE
A la lumière de ce qui précède, nous remarquons que les villes d’une manière générale s’ancrent dans des territoires qui se singularisent par des spécificités naturelles (cadre physique), culturelles, historiques, des conditions sociales et culturelles déteignant sur les modalités des dynamiques urbaines. Ainsi, l’urbanisation de la ville de Joal reste inhérente au niveau de son développement économique porté en l’occurrence par le dynamisme du secteur de la pêche et son impact sur la croissance urbaine et le processus d’extension spatiale. De surcroit, d’autres facteurs notamment conjoncturels, géographiques et sociologiques interférent dans la dynamique urbaine de la ville. I – Structure et croissance urbaine Les mutations urbaines dans la ville de Joal ont commencé vers les années 70. Cette période coïncidait à la fois à la réduction des rendements des produits agricoles notamment celui de l’arachide et à l’évolution du secteur de la pêche avec l’apparition de la senne tournante et le moteur hors bord. La ville de Joal est divisé en deux grandes entités regroupant des sous quartiers : Joal 1(village traditionnel) et Joal 2(zones d’extension). Le quartier de Joal 1 constitue le noyau central de la ville et regroupe la majeure partie des équipements. Le quartier de Joal 2 comptant quinze sous quartiers identifiés par le nom de leur délégué, constituent les zones d’extension périphérique. A cela s’ajoutent les tanns où se trouvent les zones de transformation des produits halieutiques. La zone de Joal II reste très défavorisée en matière d’équipements administratifs et d’équipements sociaux de base notamment des structures de loisirs pour les jeunes. En outre, le phénomène de l’étalement urbain a entrainé une recomposition de l’organisation spatiale de la ville. Après une phase de concentration, l’espace urbain s’étale et débouche sur le développement de surfaces urbanisées à la périphérie de la ville. Cette extension spatiale s’est accompagnée de mouvements centrifuges de population et d’une redistribution des dynamiques démographiques. En effet, la population de Joal II correspondant aux zones d’extension périphérique représente 78,33% contre 21,66% pour les quartiers péricentraux, dits traditionnels (Joal I). Dans cette optique, la population au centre ville diminue tandis qu’elle connait une forte croissance dans les quartiers périphériques caractérisés par une importante présence de migrants. La densité moyenne de la ville est de 655habitants/km2 . 33 En plus, l’accroissement de la population urbaine résulte d’une part d’un solde naturel positif et d’autre part d’un afflux massif de migrants attirés par les commodités liées aux potentialités d’attractivité de la ville. En effet, de 6546 habitants en 1961, la population est passée à 11 200 en 1976 et à 19 046 habitants au RGPH de 1988, soit un taux d’accroissement de 2,9 %. Aujourd’hui, ce taux est à 4,51% (PDU -2007). Selon l’ANDS, le taux de croissance démographique de la population de la ville de Joal est aujourd’hui de 4,51%. Il est passé de 4,5 % sur la période 1976 – 1988 à 4 % entre 1988 et 2003. Cette croissance urbaine reste étroitement liée au support productif de la ville constitué en particulier de la pêche qui joue un rôle prépondérant dans l’attractivité de la ville. La pêche occupe les 30% du secteur primaire et parmi les activités, il y a la transformation qui absorbe 45% des mises à terre soit 44 100 tonnes /an avec une moyenne de 1137 artisans, le mareyage qui consomme 61,30 % de la production soit 81 943 tonnes/an avec 524 membres, et les autres activités liées à la pêche. L’importance des potentialités halieutiques que recèle la zone fait que la ville attire de nombreux migrants (Sarr, 2011). En outre, cette influence de la pêche sur le système de production économique de la ville s’exprime notamment par un essor important des activités de transformation des produits halieutiques. II-Les facteurs de l’extension spatiale de la ville Pour expliquer le phénomène de l’étalement urbain, l’analyse peut être centrée sur des données telles que la démographie, les potentialités d’attractivité de la ville ou les coûts fonciers. Pour être plus exhaustive, elle peut tenir compte de variables plus fines comme les préférences des ménages ou encore les formes de régulation découlant de la gestion de l’espace urbain par les pouvoirs publics locaux (les autorités municipales). En effet, les facteurs liés à l’étalement urbain de la ville sont multiples, mais ont tous pour origine les 34 dynamiques démographiques. La croissance démographique a entrainé la densification de l’espace urbain et soutenu le processus d’extension spatiale de la ville. Ainsi, cet accroissement de la population urbaine a accentué les besoins de logements : il faut plus de logements pour répondre adéquatement à la forte demande de la population. Cette demande sociale en logements a imprimé sa marque sur le processus d’extension spatiale de la ville. Par ailleurs, le dynamisme de la pêche et ses effets d’entraînement sur les activités économiques de la ville constitue un élément déterminant dans l’affluence massive de migrants venus de l’arrière pays ou de la sous région qui constitue un facteur déterminant dans l’extension spatiale de la ville. Dans cette optique, l’arrivée des vagues migratoires fut amplifiée par la péjoration des conditions climatiques des années 70-80. En effet, face à la crise du monde rurale accentué par l’accès limité aux services sociaux de base, une majeure partie des ruraux de son arrière pays immigrent en ville. Cet accroissement soutenu de la population urbaine a influé sur l’extension spatiale de la ville et s’est traduit par une vague massive d’opérations de lotissement comme l’illustre le tableau 3. En outre, l’installation des ménages à la périphérie des villes procède également de disponibilités foncières. En effet, dans les parties centrales de la ville, le portage foncier a atteint ses valeurs les plus élevées, le gradient décroissant se traduit par des niveaux en baisse vers l’extérieur en raison inverse de la distance au centre. En plus, la spéculation foncière dans la promotion du marché immobilier se traduit par la cherté du loyer qui a poussé beaucoup de ménages à porter leurs choix sur les terrains attribués au niveau des zones d’extension périphérique. Ce choix interfère avec le niveau de revenu des ménages, mais également le désir d’avoir son propre logement. Mais l’installation en milieu périphérique n’est pas forcément un choix. La plupart des propriétaires dans les quartiers périphériques souhaiteraient habiter au centre. Ainsi, la principale motivation des ménages qui se sont installés dans les zones d’extension périphérique est d’échapper au coût élevé, parfois prohibitif du logement au centre urbain. Au regard de toutes ces considérations, à partir des années 1989-1990, la production foncière sur le sol urbain de Joal a connu une montée fulgurante. Ce mouvement d’extension spatiale, soutenu par les besoins sans cesse croissants de logements consécutifs à la croissance urbaine, s’est traduit par une évolution rapide des surfaces bâties comme l’illustre la carte 4 et le graphique 1.
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