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Traitement en cours de développement
Il s’agit de médicaments en phase de développement relativement avancée dont l’intérêt thérapeutique est présumé mais pour lesquels les preuves d’efficacité et de sécurité ne sont pas complètes.
Pour ces traitements, la mise à disposition précoce était extrêmement rare.
En effet, avant 1988, l’accès aux médicaments expérimentaux était réservé aux patients inclus dans les essais cliniques ou de manière très exceptionnelle à certains patients qui n’étaient pas dans le service d’investigation après accord entre le médecin demandeur, l’expert chargé des essais cliniques et le fabricant.
C’est dans le contexte de pandémie du SIDA dans les années 1980 que la mise à disposition de nouveaux principes actifs s’est révélée cruciale pour les patients. En effet, le développement d’un traitement prometteur demande au minimum 10 ans avant une mise sur le marché. Mais devant cette urgence sanitaire, ce délai se serait révélé catastrophique en termes de perte de chance vitale pour la population atteinte du Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH). C’est pourquoi, les malades regroupés au sein d’associations de patients, sensibilisés à l’information médicale par le biais de médias grand public ou spécialisés ont exercé une pression sur les pouvoirs publics pour que les traitements, même ceux dont le développement n’était pas achevé, puissent être mis à la disposition des patients. Ils
s’agissaient d’une urgence thérapeutique sans précédent (2).
Ainsi, en 1988 la Loi Huriet (6) qui encadrait les essais cliniques est votée et il est prévu dans son décret d’application du 27 septembre 1990, qu’à titre dérogatoire et dans la situation particulière décrite dans l’article R 5126 du Code de la Santé Publique, le promoteur puisse vendre le médicament pour traiter des patients ne pouvant être inclus dans des essais cliniques :
« En cas de nécessité impérieuse pour la santé publique, le promoteur peut être autorisé à fournir à titre onéreux à des établissements de soins un médicament dans des conditions fixées par les ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. Cette autorisation ne peut être accordée qu’après avis de la Commission mentionnée à l’article R. 5140 et lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :
– le médicament concerné est destiné à traiter une maladie grave, – il ne peut être remplacé par aucun traitement,
– il existe des preuves d’efficacité et de sécurité suffisantes pour permettre son utilisation dans des conditions approuvées par le ministre de la Santé,
– le promoteur s’engage à poursuivre les essais nécessaires pour la constitution du dossier d’autorisation de mise sur le marché.
L’autorisation mentionnée au 2e alinéa du présent article est accordée pour une durée
maximale d’un an. » (7)
Cette volonté de permettre la mise à disposition précoces des produits de santé, s’exprime de manière plus large dans la Loi numéro 92-1279 du 8 décembre 1992. Celle-ci, prévoit une autorisation d’utilisation de médicaments sans AMM, importés, ou en cours d’expérimentation, afin de compléter l’arsenal thérapeutique disponible en cas de maladie grave. L’efficacité des traitements doit évidemment être prometteuse et l’ensemble des études disponibles (fin de phase II le plus souvent) ne doit pas indiquer de risques déraisonnables pour les patients.
Ainsi, l’article L. 601-2 du Code de Santé Publique retrouvé dans la loi du 8 décembre 1992, prévoit que :
« L’utilisation à titre exceptionnel de certains médicaments est permise lorsque ceux-ci :
– sont destinés à traiter des pathologies graves, alors qu’il n’existe pas d’alternative thérapeutique dès lors que leur efficacité est fortement présumée au vu des résultats d’essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue d’une demande d’autorisation de mise sur le marché
– sont destinés à des patients atteints de maladies rares, et dès lors qu’il n’existe aucun médicament autorisé au sens de l’article L 601.
– sont importés en vue de leur prescription pour un malade nommément désigné, sous la responsabilité de leur médecin traitant dès lors qu’ils sont autorisés à l’étranger. » (7)
En 1993, le Docteur Luc MONTAGNIER, biologiste virologue, spécialiste du VIH, dresse, à la demande du ministre de la santé, dans un rapport, l’état des lieux de l’épidémie du SIDA en France, et propose d’adapter les nouvelles dispositions réglementaires du Code de Santé Publique pour permettre aux patients, un accès plus large et plus rapide aux médicaments n’ayant pas encore reçu l’AMM. Il propose aussi d’améliorer les procédures de mise à disposition des médicaments du SIDA en pré- AMM. Dans cette optique, Il suggère d’utiliser la Loi de 1992 pour permettre une mise à disposition précoce des traitements, au profit de cohortes bien définies de malades, selon un protocole thérapeutique (et non un protocole d’essais) fixant les conditions d’inclusion des malades et de suivi thérapeutique. Il propose que cette mise à disposition s’effectue en parallèle des études en cours destinées à obtenir l’AMM, que le promoteur s’engage à poursuivre activement. Cet accès précoce serait octroyé par les autorités compétentes, pour une durée limitée, et les traitements seraient mis à disposition par les laboratoires exploitants à titre gracieux ou onéreux mais dans ce dernier cas, le prix facturé doit être non commercial et proche du prix coûtant afin d’inciter la recherche d’AMM. (8)
Ces propositions seront reprises en 1994 dans le décret d’application de la loi du 8 décembre 1992 : le décret n° 94-568 du 8 Juillet 1994 relatif aux autorisations temporaires d’utilisation de certains médicaments à usage humain et modifiant le code de la santé publique.
C’est ainsi qu’apparait la notion d’Autorisation Temporaire d’Utilisation nominative et de cohorte qui permet en accès précoce aux médicaments sans AMM en France tout en assurant une qualité pharmaceutique et un rapport bénéfices/risques satisfaisant pour le patient.
Cette même année 1994, une unité ATU est créée au sein de l’Agence Française de Sécurité SAnitaire des Produits de Santé (AFSSAPS), elle est composée de médecins et de pharmaciens chargés de l’évaluation et de l’octroi des ATU (2).
Enfin, la loi du 28 mai 1996 (9) précise la loi de 1992 en définissant de manière plus détaillée les ATUn et ATUc et donne aux médicaments ne disposant pas d’une AMM en France, le cadre règlementaire que nous connaissons aujourd’hui, elle sera mise en application grâce au décret
n° 98-578 du 8 juillet 1998 (10).
Table des matières
Liste des abréviations
Liste des annexes
Liste des tableaux
Liste des figures
Introduction
I. 2. Traitement en cours de développement
A. Historique
1. Traitement disposant d’une AMM à l’étranger
2. Traitement en cours de développement
B. Les dispositifs contemporains d’accès précoce à l’innovation thérapeutique
1. Modèle d’accès précoce aux traitements innovants en France
a) Législation et cadre réglementaire
b) Prise en charge des ATU en France
2. Modèles d’accès précoce aux traitements innovants dans le monde
C. Utilisation actuelle de l’ATU de Cohorte : dérives et évolutions
II. Analyse d’une demande d’ATU de cohorte au sein de l’ANSM : Exemple
l’emicizumab
A. Hémophilie A
1. Historique
2. Etiologie
3. Symptomatologie et diagnostic
4. Prise en charge thérapeutique de l’hémophilie A chez des patients présentant
inhibiteurs anti-FVIII
B. Evaluation clinique par l’ANSM du dossier de demande d’ATU de cohorte
l’emicizumab
1. Emicizumab
a) Substance active
b) Mécanisme d’action
c) Forme et propriétés
d) Posologie
2. Les étapes de l’évaluation
a) Méthode d’évaluation selon le rapport bénéfice/risque
b) Informations règlementaires figurant dans le dossier de demande d’ATUc
l’emicizumab
c) Résumé des données cliniques disponibles en support de la demande
d) Résultats
3. Evaluation du rapport bénéfice/risque :
Discussion
Conclusion
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