LA VARIATION DE L’IONOGRAMME SANGUIN (Na,K,Cl) AU COURS DES DIX HUIT PREMIERS MOIS DE TRAITEMENT
GENERALITES SUR LA TUBERCULOSE
La tuberculose est une maladie très ancienne, touchant aussi bien les hommes que les animaux. Elle est une maladie infectieuse transmissible et non immunisante, avec des signes cliniques variables, due à une mycobactérie du complexe tuberculosis correspondant à différents germes et principalement le Mycobacterium tuberculosis ou bacille de Koch. Elle est dite : – multi-résistante (TB-MDR) si la souche bactérienne est résistante à l’Isoniazide et la Rifampicine. – ultra-résistante (TB-XDR) si la souche bactérienne est résistante à l’Isoniazide, à la Rifampicine et aux molécules de seconde ligne telles que les fluoroquinolones et les aminosides.
Aspects épidémiologiques
Epidémiologie de la tuberculose dans le monde
En 2015, on estimait à 10,4 millions le nombre de nouveaux cas (incidents) de tuberculose dans le monde, dont 59 millions (56%) chez les hommes, 3.5 millions (34%) chez les femmes et 1 million (10%) chez les enfants. Les personnes vivant avec le VIH représentaient 1.2 million (11%) sur l’ensemble des nouveaux cas de tuberculose. Six pays représentaient 60% des nouveaux cas : l’Inde, l’Indonésie, la Chine, le Nigéria, le Pakistan et l’Afrique du sud [3]. En 2015, environ 480 000 personnes ont développé une tuberculose multi résistante et 100 000 autres ont développé une tuberculose résistante à la Rifampicine et ces dernières étaient également de nouvelles personnes remplissant les conditions pour un traitement de la TB-MR .L’Inde, la Chine et la fédération de Russie représentaient 45% du total de 580 000 cas [4]. I.2.2. Epidémiologie de la tuberculose au Sénégal Selon l’OMS, L’incidence estimée est de 138 cas de tuberculose toutes formes confondues pour 100 000 habitants avec un taux de détection de 66% (59-75) [3]. La proportion des cas de TB chez les jeunes de 15 à 34 ans est en constante augmentation [5] Ce qui évoque une transmission toujours intense de cette maladie dans la population sénégalaise. 5 Au Sénégal, la tuberculose touche plus les hommes que les femmes soit respectivement 71% et 29% des nouveaux cas TPM+ en 2015. Cette prédominance ne semble pas s’expliquer par un accès différencié aux soins de santé selon le sexe. La maladie sévit principalement dans la population active avec 85% des cas de TB survenant chez les personnes âgées de 15 à 44 ans [6]. Une enquête de la résistance TB-MR, conduite en 2006, indique que la proportion des formes multi-résistantes de la tuberculose est de 2.1% chez les nouveaux cas et de 17% chez les cas déjà traités. Au cours de l’année 2015 un total de 77 cas de résistance à la Rifampicine a été détecté et 53 malades parmi eux ont été mis sous traitement de deuxième ligne
Diagnostic de la tuberculose multirésistante
Diagnostic Clinique
Afin de diagnostiquer plus efficacement les personnes atteintes de tuberculose multirésistante, l’OMS a établi une liste des groupes de patients potentiellement exposés au risque de TB-MR (Tableau I). Le diagnostic de la TB-MR reposera dans tous les cas sur un interrogatoire minutieux qui précisera les antécédents de tuberculose et de traitement antituberculeux et les autres antécédents, ainsi qu’un examen physique complet [7]. 6 Tableau I : Groupes à risque de tuberculose multirésistante [8] Groupes à risque pour les quels le test de sensibilité est indiqué Infection par le VIH Lésions radiologiques évocatrices de tuberculose ancienne Personnes immunodéprimés Fumeurs, éthyliques toxicomnes Personnes dénutries, silicotiques Catégories sociales vulnérables Personnel soignant exposé Groupes exposés au risque de tuberculose multirésistante Echecs de traitement Rechutes et les interruptions de traitement, dont le frottis est positif 2mois/3mois après la reprise du traitement Contacts étroits de patients atteints de TB-MR et qui ont une tuberculose active Contacts symptomatiques et / ou ayant des anomalies radiologiques d’un cas d TB-MR connu Personnes vivant dans des environnements à haute prévalence de TB-MR (prisons…) Personnes séropositives au VIH Personnes ayant reçu des médicaments antituberculeux de mauvaise qualité ou de qualité inconnue Rupture de stock de médicaments Tuberculeux ayant une diarrhée chronique à une malabsorption ou à une accélération du transit
Diagnostic biologique
Examens bactériologiques
Les échantillons proviennent le plus souvent du tractus respiratoire. Mais ils peuvent être effectués aussi sur des urines, du contenu gastrique par aspiration, du liquide d’épanchement, du LCR, des biopsies, du liquide de ponctions, etc.…). L’OMS et l’ISTC (International Standards for Tuberculosis Care) recommandent le prélèvement d’au moins deux expectorations pour le diagnostic. Le recueil d’une troisième expectoration permettrait une augmentation du taux diagnostic de 2 à 3 % [9]. Il donne le diagnostic de certitude de la maladie avec identification du bacille. 7 La microscopie : Elle permet la mise en évidence de bacilles tuberculeux après coloration de Ziehl-Neelsen ou par l’utilisation de l’Auramine en microscopie à fluorescence [10] Cet examen peu coûteux et rapide permet une approximation quantitative du nombre de germes excrétés (en nombre de BAAR par champ). Elle constitue l’examen le plus utilisé pour le diagnostic dans les pays en voie de développement. Figure 1 : M. tuberculosis au microscope après coloration de Ziehl-Neelsen (1000x) [11] La culture La culture permet de faire l’identification de la mycobactérie isolée et de mesurer sa sensibilité aux antituberculeux. Plusieurs milieux de culture sont utilisés : – En milieu solide : Sur le milieu spécifique de Löwenstein-Jensen qui est la technique de référence. La durée nécessaire pour la croissance bactérienne est de 5 à 7 semaines pour l’obtention d’un résultat définitif. – En milieu liquide : il s’agit de technologies récentes automatisées développées afin de réduire la durée de culture [22]. Parmi ces méthodes on peut citer : LA METHODE RADIOMETRIQUE « BACTEC 460 TB », « BACT/ALERT 3D», « BACTEC MGIT 960 »
Techniques de biologie moléculaire
De nombreuses techniques moléculaires sont utilisées pour le diagnostic de la tuberculose : – La Polymerase Chain Reaction (PCR) pour la détection de mutations nucléotidiques spécifiques; 8 – Le séquençage, qui permet l’analyse de fragments polymorphiques spécifiques d’espèces. – L’hybridation d’ADN tuberculeux sur sondes spécifiques. Ces méthodes s’effectuent sur les cultures bactériennes pour une meilleure sensibilité. Plus récemment la technique moléculaire MTB-RIF GeneXpert® est utlisée pour la détection du M. tuberculosis complex en moins de 2 heures, avec une sensibilité beaucoup plus élevée que l’examen direct en microscopie des expectorations [7].
Diagnostic de la TB-MDR
L’OMS recommande la réalisation de l’antibiogramme standard en concomitance avec le test MTB-RIF GeneXpert® [13]. Le test de sensibilité aux antibiotiques basé sur l’observation microscopique (MicroscopicObservation Drug Susceptibility ou MODS) est une nouvelle technique de laboratoire utilisée pour le diagnostic rapide de la tuberculose active dans les pays à forte prévalence. Elle permet d’obtenir un résultat en une dizaine de jours, avec une indication d’éventuelles résistances à l’isoniazide et à la rifampicine [14]
RESISTANCE AUX ANTITUBERCULEUX
Il existe deux formes de résistance aux antibiotiques chez M. tuberculosis: une résistance primitive qui correspond à des mécanismes de défense naturels de la bactérie et une résistance acquise, causée par des mutations spontanées qui modifient le génome. II.1. La résistance naturelle : L’enveloppe cellulaire constitue une barrière de protection imperméable à la plupart des molécules chimiques et contient des pompes à efflux qui permettent une résistance naturelle à certaines molécules telles que les tétracyclines, les fluoroquinolones et les aminoglycosides . Le M. tuberculosis produit certaines enzymes comme les β-lactamases qui annihilent le pouvoir bactéricide des β-lactamines.
La résistance acquise
On distingue différents niveaux de résistance acquise chez M. tuberculosis : La multi-résistance ou MDR-TB (pour Multi Drug Resistant Tuberculosis) est causée par des souches du bacille tuberculeux résistantes à au moins deux des antibiotiques principaux de première ligne, la RIF et l’INH. 9 L’ultra-résistance ou XDR-TB (pour Extensively Drug Resistant Tuberculosis) est une forme de TB MDR qui en plus est résistante à des traitements de seconde ligne tels que les fluoroquinolones et les aminosides. [15-16-17] Cette résistance acquise est due à des mutations spontanées. Elles se produisent avec une fréquence variable pour chaque antibiotique, de façon aléatoire au cours des cycles cellulaires. Elles sont de deux types : Les mutations de gènes qui codent pour les protéines cibles de l’antibiotique, entraînant une diminution de l’affinité de la cible pour l’antibiotique. Les mutations de gènes qui codent pour des enzymes impliquées dans l’activation de l’antibiotique.
PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE DE LA TUBERCULOSE MULTIRESISTANTE
Les bacilles tuberculeux sont caractérisés par une croissance lente et hétérogène, notamment dans les cavernes où elle est plus lente. Le traitement doit donc être prolongé et actif aussi bien sur les bacilles extracellulaires que intracellulaires. Pour éviter l’émergence de bacilles résistants, il est nécessaire d’associer plusieurs antibiotiques actifs de façon simultanée.
Classification et principes de base du traitement
Le schéma thérapeutique proposé actuellement repose sur l’association de cinq médicaments sélectionnés parmi les médicaments potentiellement efficaces [19]. Tableau II : Classification des médicaments disponibles pour le traitement de la TB-MR [13]. Groupe de médicaments Médicaments et abréviation Groupe1 : Antituberculeux oraux de première ligne Ethambutol(E) Pyrazinamide(Z) Rifabutine (Rb) Groupe 2 : Antituberculeux injectables Kanamycine (Km) Amikacine(Am) Capréomycine(Cm) Groupe 3 : Fluoroquinolones Ofloxacine (Ofx) Lévofloxacine (Lfx) Moxifloxacine (Mfx) Groupe 4 : Antituberculeux oraux bactériostatiques de deuxième ligne Ethionamide (Eto) Prothionamide (Pto) Cyclosérine (Cs) T érizidone (Trd) Acide Paraaminosalicylique (PAS) Groupe 5 : Antituberculeux dont l’efficacité ou le rôle dans le traitement de la TB—MR n’est pas clair (L’OMS ne recommande pas leur utilisation systématique chez les patients atteints de TB- MR Clofazimine (Cfz) Amoxicilline/Clavulanate (Amx/Clv) Clarithromycine (Clr) Linézolide (Lzd) Imipénème/Cilastatine (Imp/Cln) Isoniazide à forte dose * *Forte dose d’isoniazide :16 -20 mg / kg /j De nouveaux médicaments, tels que le bédaquiline (déjà utilisée) ou d’autres sont actuellement à l’étude. Les résultats de ces traitements semblent être très prometteurs [20]. Le traitement de la tuberculose multirésistante n’est pas standardisé, chaque pays devrait concevoir une stratégie thérapeutique appropriée en fonction des données disponibles de la surveillance de la pharmacorésistance et de la fréquence d’utilisation d’un agent injectable et d’une fluoroquinolone qui constitue la base du schéma thérapeutique [2]. Le schéma thérapeutique va dépendre dans tous les cas des antécédents de tuberculose des patients, pour les nouveaux cas de TB-MR, le traitement comprendra deux phases..
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