Le cancer de l’endomètre se définit comme étant une prolifération néoplasique maligne qui se développe à partir de la muqueuse ou des glandes endométriales du corps de l’utérus. Les principaux facteurs pronostiques sont le stade, le grade histologique et les métastases ganglionnaires. Le type histologique constitue également un facteur pronostic important. Le type I (90%) correspond aux adénocarcinomes endométrioïdes qui sont généralement de bon pronostic. Le type II (10%) correspond aux adénocarcinomes séropapillaires et à cellules claires, ils sont associés à un risque élevé de maladies extra-utérines et un pronostic plus réservé. Le traitement du cancer de l’endomètre est chirurgical. Il consiste à une inspection de la cavité abdominale, une cytologie péritonéale, une hystérectomie avec annexectomie bilatérale et un curage ganglionnaire (à adapter selon l’extension). La chirurgie traditionnelle est la laparotomie, mais la laparoscopie apparaît comme une alternative avec des résultats qui semblent au moins aussi bon (1) . La laparoscopie constitue un outil diagnostique et thérapeutique tout en étant moins invasive. Elle apporte par ailleurs , un meilleur confort postopératoire avec réduction de la durée d’hospitalisation . Pour un opérateur entrainé, la radicalité de l’intervention réalisée sous contrôle endoscopique est identique voire supérieure à celle de la laparotomie. Elle permet l’agrandissement de l’anatomie pelvienne et abdominale et la visualisation des métastases abdominales, du Cul-de-sac postérieur et du ligament large [2]. L’objectif de notre travail est d’analyser les indications, la technique chirurgicale et les complications de la laparoscopie dans la prise en charge du cancer de l’endomètre, et ce pour les patientes opérées au service, de gynécologie obstétrique à l’hôpital mère et enfant de Marrakech.
ETUDE EPIDEMIOLOGIQUE
Fréquence
Le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique pelvien le plus fréquent chez la femme dans le monde entier, il se développe chez environ 142 000 femmes par année (3, 4, 5,6). L’incidence varie selon les régions, elle ne cesse de croitre là où le niveau socioéconomique est élevé ; elle est dix fois plus élevée en Amérique du Nord et en Europe que dans les pays en voie de développement (3, 7). En 2012 aux États-Unis, on a estimé à 47130 le nombre de nouveaux cas de cancer de l’endomètre et ce dernier a été responsable de 8010 décès . En France, le cancer de l’endomètre est le 5ième cancer féminin en termes d’incidence avec 6560 nouveaux cas estimés en 2010 (8). En Europe, le cancer de l’endomètre occupe la troisième place après le cancer du sein et les cancers colorectaux, avec une incidence de 13,6 pour 100 000 habitants (9, 10, 11, 12). Les taux les plus bas sont observés en Inde et l’Asie du Sud, quoi qu’il y ait une augmentation ces dernières années (13, 14). Au Maroc, et selon les données du registre des cancers de la région du grand Casablanca, le cancer du corps de l’utérus occupe la septième position parmi les cancers chez la femme, et la quatrième position parmi les cancers gynéco mammaires après le cancer du sein, du col utérin et de l’ovaire, avec une incidence de 2,82 cas pour 100 000 habitants (15).
Age
Habituellement le cancer de l’endomètre touche la femme âgée (16, 17). D’après les différentes séries, la moyenne d’âge se situe aux alentours de 60 ans (18, 19, 20, 21,22). Le taux d’incidence augmente avec l’âge, pour atteindre un pic de fréquence entre 40 et74 ans (5).
Statut hormonal
La fréquence maximale du cancer de l’endomètre se situe à la période postménopausique (3, 13, 17, 24). Dans notre série 93,33 % des patientes étaient ménopausées. Le cancer de l’endomètre est un cancer hormonodépendant, et la plupart des facteurs de risque peuvent s’expliquer par une exposition prolongée aux œstrogènes (26, 4, 5, 6, 24, 27). Pour la plupart des auteurs, une ménopause tardive constitue un facteur de risque déterminant, alors que la précocité de la ménarche ne semble pas jouer un rôle dans le risque de survenue du cancer de l’endomètre (4, 24). Le syndrome des ovaires polykystiques ou les tumeurs oestrogénosécrètantes (tumeurs de la granulosa) sont plus délétères. La prévalence peut atteindre 20% dans ce type de population (5, 28). L’utilisation d’une contraception orale combinée réduit le risque de cancer de l’endomètre, tandis que l’utilisation d’une contraception orale séquentielle était associée à une augmentation du risque d’au moins deux fois (4, 29). Le traitement hormonal de la ménopause (TSH) augmente le risque du cancer de l’endomètre, si un progestatif n’est pas donné en moins dix jours (3, 5, 6), L’utilisation prolongée de tamoxifène était incriminée dans la survenue du cancer de l’endomètre chez les femmes traitées pour un cancer de sein .
Parité
La parité semble être un facteur protecteur du cancer de l’endomètre (3, 4, 11, 30). D’après les données de la littérature, le cancer de l’endomètre touche les femmes ayant une fécondité diminuée avec un risque relatif de survenue de 5 (31, 4, 11). Selon Yazbeck (32), 89% des femmes atteintes du cancer de l’endomètre sont nullipares.
Obésité
L’obésité par son effet de conversion des androgènes en œstrogènes dans les adipocytes constitue un facteur de risque du cancer de l’endomètre (16, 11, 30). Le risque du cancer de l’endomètre est proportionnel au surpoids (7). Il est lié à l’augmentation des œstrogènes endogènes selon 3 mécanismes:
– modification de l’utilisation périphérique des œstrogènes
– aromatisation des androgènes en œstrogènes dans la graisse périphériques
– diminution de la concentration sérique SHBG (Sex Hormone Binding Globulin) (33, 11). Selon AMANT (3), un index de masse corporelle (IMC) supérieur à 25kg/m2 double le risque d’adénocarcinome de l’endomètre et un IMC supérieur à 30kg/m2 triple le risque. Vu le manque d’information sur l’IMC des patientes de notre série, nous n’avons pas pu effectuer une comparaison avec les données de la littérature.
Diabète
Le diabète constitue également un facteur de risque, puisque l’hypercorticisme est accru par l’hyperinsulinisme, ce qui trouble le métabolisme des œstrogènes (34). Dans notre série 4 patientes étaient diabétiques soit un taux de 26, 7 %.
Hypertension artérielle
L’hypertension artérielle est considérée comme un facteur de risque du cancer de l’endomètre (35, 16). Ils étaient fréquemment associés (4, 36). En effet, dans notre série 5 patientes étaient hypertendues soit 33,33 %. Certains auteurs estiment que la fréquence de l’association du cancer de l’endomètre à l’HTA est liée de la même façon que le diabète, à l’obésité et à l’âge avancé (3, 4).
Pathologies utérines associées
Les femmes avec une hyperplasie atypique de l’endomètre ont un risque de 23% de présenter un cancer de l’endomètre (37). La progression de l’hyperplasie atypique vers le cancer est difficile à établir de façon certaine, elle est liée à l’état d’hyperoestrogénie relative (de la péri ménopause aggravé par l’obésité) ou réel (prescription d’œstrogènes seuls). Au plan biomoléculaire, plusieurs gènes sont impliqués dans la carcinogenèse endométriale, les principaux étant les deux gènes suppresseurs de tumeur PTEN et p53, les mutations de K-ras, de bétacaténine et l’instabilité des microsatellites (38, 4, 39, 11). La transformation carcinomateuse des polypes de l’endomètre a également été rapportée, surtout en post-ménopause (36, 40). Ces polypes à partir des quels naissent les cancers de l’endomètre sont appelés des « polypes cancers » (40). Le développement du cancer de l’endomètre sur des foyers d’adénomyose, quoique rare, était illustré de nombreuses fois dans la littérature, surtout chez des femmes sous traitement hormonal de la ménopause (41). Les fibromes utérins étaient rarement associés au cancer de l’endomètre (3, 42).
Hérédité
Les antécédents familiaux du cancer de l’endomètre ou de cancer ovarien étaient rapportés comme augmentant le risque du cancer de l’endomètre (4). Pour LEBOUEDEC (43), les études précédentes avaient objectivé un nombre d’association cancer du corps utérin, cancer du sein plus élevé que ne le voudrait le hasard. Le risque encouru de développer un cancer du sein après cancer de l’endomètre est multiplié par 1,2 à 2. Vice versa le risque encouru de développer un cancer de l’endomètre après un cancer du sein est multiplié par 1,4 à 2. Le syndrome de Lynch de type II identifie un groupe de patientes porteuses de cancer héréditaire colorectal sans polypose, et qui étaient à risque de développer des cancers de l’endomètre, du sein et de l’ovaire(4,24).
INTRODUCTION |