La maladie de Parkinson
La maladie de Parkinson est une maladie neurodégénérative idiopathique décrite en 1817 par James Parkinson, s’exprimant principalement par des symptômes moteurs (mouvements ralentis, tremblements, rigidité). Des troubles cognitifs peuvent ensuite survenir et compliquer voire masquer le diagnostic et la prise en charge d’un épisode dépressif .
Au cours de l’histoire, de nombreux symptômes présents dans la maladie de Parkinson ont été mentionnés : en Egypte, dans des traités ayurvédiques, dans la Bible ou encore par Galien. Jean-Martin Charcot nommera cette pathologie en l’honneur de James Parkinson. Selon le référentiel de neurologie de 2015, la maladie de Parkinson est une pathologie neurologique chronique liée à la dégénérescence bilatérale de la voie nigro-striée, de causes mal connues (Danziger & Alamowitch, 2015). Elle débute habituellement entre 55 et 65 ans avec, dans les pays occidentaux, une prévalence de 0.3 % en population générale (Lau LM, Breteler MM, 2006). Elle est la deuxième cause de handicap majeur après les accidents vasculaires cérébraux chez la personne âgée. Si l’espérance de vie n’est pas réduite, la mortalité elle est doublée .
Cette pathologie affecte de nombreux systèmes de neurotransmetteurs dans les noyaux gris centraux, l’atteinte du système dopaminergique dans la pars compacta du locus niger (dégénérescence des cellules pigmentées) étant responsable des principaux symptômes moteurs. On observe une dégénérescence de la voie nigro-striée avec une diminution des terminaisons dopaminergiques du striatum et une diminution de la dopamine . Différents mécanismes biologiques, génétiques et environnementaux sont suspectés dans la destruction de ces neurones, notamment par l’accumulation anormale d’une protéine : l’alpha-synucléine .
La dépression dans la maladie de Parkinson
La proportion de personnes atteintes de dépression est beaucoup plus élevée dans la maladie de Parkinson que la population générale selon les résultats d’une étude de 2017 sur 55 patients. La dépression pourrait aussi bien être une résultante des changements de vie dus à la maladie de Parkinson qu’un facteur diminuant l’âge d’apparition de celle-ci. Cela semble compréhensible du fait des difficultés liées aux symptômes, de la modification des rapports avec l’entourage et de l’appréhension de l’évolution.
Mais il faut distinguer la dépression en tant que trouble psychologique symptôme de la maladie de Parkinson, de la dépression provoquée par l’annonce du diagnostic et la crainte de l’évolution. La première est souvent présente avant les symptômes moteurs car la dopamine joue un rôle dans la régulation de l’humeur. La dépression est donc un symptôme qui peut révéler une maladie de Parkinson. Il peut être difficile de diagnostiquer un état dépressif dans la maladie de Parkinson idiopathique de par le recoupement de certains des symptômes dans ces deux pathologies différentes, mais également par une mauvaise compréhension de la maladie et une stigmatisation parfois de la maladie mentale .
Une étude de 2017 comprenant 40 patients parkinsoniens montre une corrélation statistique entre l’aggravation de la démence et l’entrée dans un épisode dépressif. L’apathie présente dans la maladie de Parkinson (déficit persistant de la motivation rapporté par le sujet lui-même ou par l’entourage, associée à des symptômes cognitifs plus avancés) et l’état dépressif se chevauchent souvent, les rendant difficilement différentiables .
La dépression
La dépression est selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) un trouble mental courant se caractérisant par une tristesse, une perte d’intérêt ou de plaisir, des sentiments de culpabilité ou de dévalorisation de soi, un sommeil ou un appétit perturbé, une certaine fatigue et des problèmes de concentration.
La dépression peut perdurer ou devenir récurrente, entravant ainsi de façon substantielle l’aptitude d’un individu à fonctionner au travail ou à l’école ou à faire face à sa vie quotidienne. À son paroxysme, elle peut conduire au suicide. Lorsqu’elle est légère, on peut traiter les patients sans médicaments, mais une dépression modérée ou sévère peut nécessiter une médication et une psychothérapie menée par un professionnel compétent.
La Haute Autorité de Santé (HAS) spécifie que, chez le sujet âgé, le diagnostic d’un épisode dépressif caractérisé est souvent difficile en raison de plaintes somatiques ou de troubles cognitifs au premier plan. Devant tout trouble cognitif chez une personne âgée, il est recommandé de se poser la question d’un état dépressif sous-jacent responsable de la symptomatologie. Un épisode dépressif caractérisé peut également inaugurer ou être secondaire à une maladie neuro-dégénérative (maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson, etc.). Tout épisode dépressif caractérisé chez le sujet âgé comporte un risque suicidaire élevé.
Diagnostic de la dépression dans la maladie de Parkinson
Un article de 2016 montre que la difficulté de détection d’un état dépressif chez le patient atteint de la maladie de Parkinson peut limiter les réponses aux traitements et l’aide pouvant lui être apportée. Des symptômes identiques peuvent être retrouvés dans ces deux pathologies : apathie, apragmatisme, asthénie, ralentissement psychomoteur, troubles de la motivation et de la concentration. Pour pallier cette difficulté, plusieurs échelles peuvent être utiles : la 15-item Geriatric Depression Scale (GDS 15), le Beck Depression Inventory, la Montgomery-Asberg Depression Rating Scale (MADRS) ou la Unified Parkinson’s Disease Rating Scale (UPDRS). Selon ces auteurs, il revient à chacun de choisir l’échelle qui s’adapte le mieux à sa pratique. Différentes études seront détaillées afin de permettre au praticien un choix éclairé d’un outil de diagnostic de la dépression chez le patient atteint de la maladie de Parkinson. Elles apparaîtront dans un ordre chronologique autant que faire se peut. Une étude de 2006 portait sur 100 patients parkinsoniens. Deux échelles d’évaluation de la dépression avaient été utilisées : le questionnaire de Beck et la “Centers for Epidemiologic Studies-Depression Scale”. Les patients avec une maladie de Parkinson ont montré de façon significative une apathie de plus grande fréquence ainsi que d’une plus grande sévérité comparés aux patients ayant une dystonie. Cette apathie peut être une caractéristique essentielle de la maladie de Parkinson avec dépression mais peut également se manifester en l’absence de dépression (Kirsch-Darrow et al., 2006). Dans une étude de 2010, 150 patients parkinsoniens ont été évalués sur le plan thymique (échelle de Beck), mnésique (Mini Mental State Examination), apathique (Starkstein’s Apathy Scale) et sur leur qualité de vie. Une UPDRS (Unified Parkinson Disiease Rating Scale) était également réalisée. L’apathie était corrélée avec le score UPDRS ainsi qu’avec la dépression. L’apathie et la dépression étaient corrélées négativement avec la qualité de vie. Ces deux entités seraient distinctes dans la maladie de Parkinson et associées à la qualité de vie . Selon une étude de 2017 recrutant 57 patients, les apprentissages testés et les temps de réponse sont ralentis dans la dépression et dans la maladie de Parkinson. Dans cette étude les patients atteints à la fois de la maladie de Parkinson et d’un état dépressif présentaient des traits cognitifs mixtes communs (apathie, apragmatisme, asthénie, ralentissement psychomoteur, troubles de la motivation et de la concentration) aux deux pathologies.
Antidépresseurs tricycliques
Selon un essai clinique de 2009, la nortriptyline (débutée à 25mg/jour jusqu’à 75mg/jour), un antidépresseur tricyclique, serait efficace dans la dépression du patient atteint de la maladie de Parkinson contrairement à la paroxetine (débutée à 12.5mg/jour jusqu’à 37.5mg/jour) dans cet essai contrôlé randomisé de 2009 sur 52 patients. L’évaluation était faite par l’échelle de dépression d’Hamilton après huit semaines de traitement. Une méta-analyse de 2017 déjà citée, viendra plus récemment invalider ces résultats.
Dans une étude de cohorte de 2016 sur 647 patients parkinsoniens, on retrouve que l’utilisation d’antidépresseurs est indépendamment associée aux chutes dans la maladie de Parkinson, cette dernière augmentant le risque de chutes. Outre les effets secondaires propres à chaque traitement, on note également les risques hypertensifs avec les IRSNa (par exemple les accidents cérébraux vasculaires) ou tous les risques des effets anticholinergiques liés à l’utilisation des antidépresseurs tricycliques : sécheresse buccale, constipation, dysurie, mydriase et troubles de l’accommodation, confusion, délire, hallucinations et troubles mnésiques .
Une revue de la littérature de 2018 montre qu’un surdosage avec des antidépresseurs de nouvelle génération (ISRS, IRSNa) a moins d’effets secondaires qu’avec les antidépresseurs tricycliques. Ces derniers sont associés à des taux d’abandon plus élevés, à une tolérance plus faible et à des effets secondaires cardiaques plus élevés. Certains autres effets secondaires tels que la dysfonction sexuelle, les saignements et l’hyponatrémie seraient plus importants avec les ISRS ou les IRSN .
Table des matières
I. Introduction
II. Généralités
A. Définitions
1) La maladie de Parkinson
2) La dépression
3) La dépression dans la maladie de Parkinson
B. Epidémiologie
C. Critères diagnostiques (DSM 5 et CIM-10)
III. Méthode
IV. Résultats
A. Diagnostic de la dépression dans la maladie de Parkinson
1) Résultats
2) Synthèse
B. Thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses
1) Inhibiteurs Sélectifs de la Recapture de la Sérotonine et Inhibiteurs de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline
2) Antidépresseurs tricycliques
3) Spécificité de la lamotrigine
a. Lamotrigine et dépression
b. Lamotrigine et maladie de Parkinson
4) Autres traitements
5) Synthèse
V. Algorithme décisionnel de prise en charge de la dépression dans la maladie de Parkinson
VI. Discussion
VII. Conclusion
VIII. Bibliographie
IX. Annexes
A. 15-item Geriatric Depression Scale (GDS 15)
B. 30-item Geriatric Depression Scale (GDS 30)
C. Beck Depression Inventory
D. Montgomery-Asberg Depression Rating Scale (MADRS)
E. Unified Parkinson’s Disease Rating Scale (UPDRS)
F. Hamilton Depression Rating Scale (HDRS)
G. Critères diagnostiques (DSM 5 et CIM-10)