L’épiphysiolyse fémorale supérieure correspond à un glissement non traumatique de la tête fémorale par rapport au col à travers le cartilage de croissance cervico-céphalique. Décrite initialement en 1572 par A. Pare, elle reste une affection peu fréquente mais bien intrigante de l’enfant essentiellement en période pré pubertaire. Elle pose actuellement plusieurs problèmes non encore résolus d’étiopathogénie, de délai diagnostic, en plus de difficultés thérapeutiques dans les formes à grand déplacement et instables. La classification tenant compte de la stabilité de l’épiphyse est actuellement la plus utilisée en pratique clinique, elle permet de guider les indications thérapeutiques et semble la mieux corrélée au pronostic. L’épiphysiolyse est une urgence thérapeutique. Dès le diagnostic établi, l’enfant doit être adressé d’urgence dans un centre spécialisé. C’est une affection grave qui touche l’articulation coxo-fémorale qui est une articulation de charge. Cette gravité est liée aux complications que l’EFS est susceptible d’engendrer, soit par atteinte de la congruence articulaire, soit à la suite des complications iatrogènes du traitement chirurgical dont la principale est la nécrose de la tête fémorale.
Terminologie
L’épiphysiolyse fémorale supérieure correspond à un glissement de l’épiphyse fémorale supérieure par rapport au col. Reconnue d’abord sous le terme de coxa-vara essentielle ou coxa-vara des adolescents, cette affection est actuellement décrite dans la littérature francophone sous le terme d’épiphysiolyse fémorale supérieure et par les auteurs anglo-saxons sous le nom de «Slipped Capital Femoral Epiphysis».
Anatomie et Anatomie pathologique
Le cartilage de croissance cervico-céphalique est dépourvue de vaisseaux et constitue une barrière infranchissable empêchant la continuité vasculaire entre le col et la tête fémorale. Il assure 30% de la croissance en longueur de l’ensemble du fémur, par conséquent toute atteinte de ce cartilage retentira sur la morphologie de l’extrémité supérieure du fémur. [2] La capsule articulaire est attachée au bord de l’acétabulum et au milieu de la surface dorsale du col du fémur, seule la moitié du col est donc intra-capsulaire. Certaines fibres de cette capsule se réfléchissent le long du col pour former le rétinaculum. [3] La vascularisation de l’épiphyse fémorale proximale est assurée essentiellement par les branches de l’artère circonflexe postérieure (ou médiale). Ces artères sont contenues dans le rétinaculum. Plusieurs études anatomiques [4, 5, 6, 7, 8], ont montré que les deux tiers externes de la tête fémorale sont vascularisés par les artères épiphysaires postéro supérieures issues de cette artère. Ainsi toute lésion de l’artère circonflexe postérieure ou ses branches va entrainer une nécrose de la tête fémorale. Sur les sujets atteints d’épiphysiolyse, Plusieurs études histologiques ont mis en évidence la présence de fissurations, un élargissement et une désorganisation architecturale au niveau de la zone hypertrophique de la plaque physaire [4].Ces modifications provoquent une fragilité du cartilage de croissance cervico céphalique qui, sous l’effet des contraintes mécaniques, vont entrainer un glissement épiphysaire .
Ethiopathogénie
Les circonstances de survenue d’une épiphysiolyse restent inconnues. Mais différentes théories ont été proposées pour tenter d’expliquer le glissement épiphysaire en fonction de constatations cliniques, radiologiques et histologiques.
Facteurs mécaniques
Plusieurs études ont montrée une relation entre l’épiphysiolyse et plusieurs facteurs mécaniques tels l’obésité [6], la rétroversion fémorale, la verticalisation de la métaphyse et l’augmentation de la profondeur de la cotyle [6,19]. Ces différents facteurs mécaniques augmentent les contraintes sur l’épiphyse fémorale supérieure et favorisent son glissement.
Ces constatations ont peu d’intérêt lors du diagnostic mais peuvent aider à poser l’indication d’un vissage controlatéral.
Facteurs endocriniens
Plusieurs auteurs rapportent une fréquence accrue de l’épiphysiolyse lors de certains troubles endocriniens comme l’hypothyroïdie, l’hyperparathyroïdie, l’ostéodystrophie rénale, les traitements substitutifs par l’hormone de croissance (GH) et l’hypogonadisme . L’EFS survient lors de la puberté caractérisée par une croissance rapide et des changements hormonaux [6,18]. L’effet des hormones gonadotrophiques peut expliquer la fréquence accrue de l’EFS chez le garçon. En effet, la testostérone diminue la résistance de la physe alors que les œstrogènes réduisent l’épaisseur et augmentent la résistance de la physe. C’est probablement pour cette raison que la survenue d’une EFS est extrêmement rare après les règles chez la fille.
Autres facteurs
Certains auteurs rapportent un retard de l’âge osseux par rapport à l’âge chronologique, chez certains enfants atteints d’épiphysiolyse Des cas rares ont été notés après une radiothérapie locale, seule ou associée à une chimiothérapie . Certaines études sur le typage HLA ont incriminé le HLA DR4 comme facteur favorisant, alors que d’autres le HLA B12 [26]. Unsal rapporte la présence de l’antigène HLA-DR4 chez des patients ayant une arthrite juvénile idiopathique et qui ont développé une EFS. [18] Au total, le déplacement épiphysaire est la manifestation d’une maladie plus générale du cartilage de croissance aux alentours de la puberté. Elle se produit exclusivement au niveau de la hanche pour des raisons biomécaniques.
Les contraintes mécaniques augmentent le stress sur la plaque physaire fragilisée par des irrégularités et modifications architecturales d’origine endocrine ; conduisant ainsi à un glissement épiphysaire en bas et en arrière chez des enfants souvent obèses en période de puberté.
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