Les phénomènes physiques mis en jeu en résonance magnétique nucléaire (RMN) passionnent les physiciens depuis près d’un siècle. Cette technique a vu le jour dans les années 1930. Elle a donné plus d’un prix Nobel et a produit une modalité d’imagerie, qui est une source précieuse d’informations pour les médecins. Elle continue à intéresser les physiciens et c’est ce que nous montrons à travers cette thèse.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une modalité d’imagerie non invasive, donnant accès à des informations très variées allant de la nature à la texture du tissu. Elle permet, par exemple, l’étude des phénomènes de relaxation de l’aimantation des tissus, des processus de diffusion et même l’analyse de la composition de zones particulières d’un organe. Ces informations acquises à l’aide de différentes séquences IRM sont mises au service du diagnostic clinique. En médecine la plupart des pathologies coexistent avec des modifications physiologiques. Une famille de facteurs physiques associée à ces altérations, et qui va influencer le comportement du signal observé en IRM, est l’ensemble d’interactions que subissent les aimantations. L’une de ces interactions sera au coeur de ce travail de recherche. En fonction de la nature du tissu ou du matériau, elle a une influence plus ou moins forte sur la dynamique du signal reçu. Elle s’exprime plus intensément dans les tissus les plus rigides. Cette interaction est appelée l’interaction dipolaire.
Une séquence utilisant cette interaction pour réaliser de l’imagerie est centrale dans cette thèse. Elle s’appelle séquence de contraste dipolaire. Elle a été élaborée au départ dans un contexte de résonance magnétique nucléaire (RMN) puis adaptée pour l’imagerie, en répondant à un critère d’utilisation clinique : la rendre plus rapide. Cette implémentation, particulière à notre laboratoire, nécessite d’être apprivoisée et mieux comprise, pour pouvoir être utilisée dans un contexte médical. Dans cette thèse nous allons étudier différents aspects qui vont nous aider à comprendre les atouts et les limites de ce type de séquence.
Le phénomène de résonance magnétique nucléaire (RMN) est certainement connu d’un lecteur averti, néanmoins nous avons pu remarquer au cours de cette thèse qu’il était souvent utile de revenir sur certains concepts de base pour dégager un lexique commun. En effet, en imagerie par résonance magnétique, les divers acteurs qu’ils soient spécialistes en traitement du signal, biologistes ou médecins, ne sont pas tous à l’aise avec le langage des physiciens. Bien que l’IRM découle de la RMN, certains problèmes sont très spécifiques à l’imagerie, il en résulte donc un langage spécifique à chaque branche.
Le but de cette thèse est de mettre en oeuvre une séquence IRM, appelée séquence de contraste dipolaire, de l’améliorer et d’évaluer les données quantitatives auxquelles elle donne accès. Une des pistes pour utiliser cette séquence est, comme souvent en IRM, de « regarder » la relaxation. Au cours de ce travail, nous avons voulu comparer les résultats expérimentaux avec des résultats théoriques, obtenus par simulation, afin d’interpréter les effets observés. L’objectif de ce premier chapitre est de proposer un langage commun aux différents lecteurs et d’aborder les points théoriques nécessaires à la compréhension de l’exposé qui suit. Le point de vue choisi étant celui du physicien, cette partie théorique permettra de définir les mots clés et d’introduire les concepts fondamentaux de l’étude.
Le lecteur trouvera notamment dans une première partie la présentation des bases physiques de l’IRM, et la description de ce qu’est une séquence IRM. Nous utiliserons dans un premier temps un formalisme classique qui servira de socle pour la troisième partie dans laquelle nous aborderons le problème d’un point de vue quantique. Cette approche (quantique) se révèlera nécessaire à la compréhension de la suite de l’exposé, car certains phénomènes étudiés au cours de cette thèse sont à l’échelle nucléaire et nécessitent l’introduction de ce formalisme. La deuxième partie quant à elle traite du phénomène de relaxation, de son origine à son exploitation. Cette description sera faite d’un point de vue classique avec les équations de Bloch et ensuite d’un point de vue semi-quantique.
Résonance magnétique nucléaire et séquence IRM
Pour comprendre une expérience d’imagerie par résonance magnétique, il faut connaître les phénomènes physiques mis en jeu lors de la résonance, mais également discerner la succession des étapes qui ont permis d’aboutir à une image. Cet enchaînement d’étapes est appelé séquence. Le signal qui donne naissance à une image IRM, est généré par l’application de champs magnétiques radiofréquences (RF), qui vont influencer la création et l’évolution du signal RMN et aussi permettre de le coder spatialement. Nous nous intéresserons tout d’abord aux phénomènes physiques qui sont responsables de la création d’un signal de résonance magnétique. Nous nous contenterons dans cette partie d’une description classique du phénomène de RMN. Nous aborderons ensuite la phase d’acquisition du signal et d’encodage de celui-ci. Pour finir nous nous intéresserons à quelques exemples de séries d’excitations que nous utiliserons au cours de cette thèse dans des simulations et des expériences.
Le phénomène de RMN
Les premières expériences qui donnèrent naissance à celles de résonance magnétique datent des années 1920. Elles ont été réalisées par Stern et Gerlach, pour démontrer l’existence d’un moment magnétique pour les noyaux de « spins » (§ 1.3) non nuls. Ces expériences ont été prolongées par I. I. Rabi, qui reçut en 1944 un prix Nobel pour la mise en évidence de phénomènes de résonance magnétique sur des jets moléculaires [32]. Les premières expériences de résonance magnétique dans la matière condensée furent récompensées pour la première fois en 1952 par un prix Nobel attribué à F. Bloch [7] et E. Purcell [87]. De nombreux autres prix Nobel ont ensuite suivi dans différentes disciplines associées à la RMN.
Obtention d’une image à l’aide d’une séquence d’imagerie
La phase d’acquisition en imagerie est très spécifique. En effet, en RMN cette phase consiste uniquement en l’acquisition d’un signal brut. En revanche, en imagerie elle est réalisée par deux processus imbriqués. D’une part, l’acquisition permet de capter le signal dans le plan transverse à B0, à l’aide d’une antenne (processus identique à l’acquisition RMN). D’autre part, l’exécution des gradients de lecture et de phase encode le signal dans l’espace de Fourier, ce qui permettra ensuite d’obtenir une image. La présence de ces gradients implique des contraintes importantes du point de vue de l’électronique, et est un point fondamental dans l’implémentation de la séquence étudiée dans cette thèse.
Le codage de l’image dans l’espace de Fourier
Les gradients d’encodage spatial de l’image que nous venons d’évoquer, sont au nombre de trois : sélection de coupe (C), sélection de phase (P) et lecture (L). Ils sont appliqués dans trois dimensions différentes et permettent de coder l’espace. Les isochromats évoluent alors avec des fréquences différentes pendant un temps dt donné, en fonction de leur position spatiale. Ceci induit des déphasages fonction de la position de l’isochromat. Plusieurs solutions sont envisageables pour acquérir et mémoriser ces informations. La zeugmatographie décrite par P.C. Lauterbur [64] permettait d’acquérir l’information de déphasage par projection dans différents plans. La méthode qui est utilisée de nos jours consiste à faire des pas de phases dans les trois directions et d’acquérir le signal après chaque nouvelle incrémentation de phases. Le signal ainsi encodé dans l’espace de Fourier, est décodé à l’aide d’une transformée de Fourier 2D inverse, qui donne lieu à une image, qui s’interprète en niveaux de gris différents . Ces niveaux de gris sont les témoins de la quantité relative de signal reçu à l’instant de l’observation. Cette quantité de signal détectée dans chaque isochromat est sensible à certaines interactions physiques qui vont la moduler. En utilisant l’approche de Fourier, nous observons que les plus hautes fréquences présentes dans le signal, qui définissent détails de l’image, sont situées essentiellement en périphérie de l’espace des k . Tandis que l’information sur le contraste est contenue au centre de l’espace de Fourier . Notre travail de thèse est en partie centré sur la notion de contraste. Dans notre contexte, le centre de l’espace des k sera donc plus important pour nous que sa périphérie.
Introduction |
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