Prévalence des infections chez les hémodialysés chroniques au sein de l’unité d’hémodialyse

Prévalence des infections chez les hémodialysés
chroniques au sein de l’unité d’hémodialyse

Rappels sur l’insuffisance rénale chronique, l’hémodialyse et la dysrégulation du système immunitaire 

L’insuffisance rénale chronique

L’insuffisance rénale chronique est définie par une diminution de la filtration glomérulaire en rapport avec une réduction permanente du nombre de néphrons fonctionnels. L’évolution clinique est habituellement progressive avec une perte régulière et inexorable du nombre de néphrons fonctionnels, aboutissant à l’insuffisance rénale dite « terminale » (terme maladroit mais consacré par l’usage, synonyme de « mort rénale » mais pas celle du patient). A la suite des recommandations nationales (ANAES 2002) et internationales (KDOQI, KDIGO), l’IRC est définie par une réduction chronique (> 3 mois) du DFG estimé < 60 ml/min, selon la formule de Cockcroft ou < 60 ml/min/1,73m2 selon la formule MDRD simplifiée. Le terme « maladie rénale chronique » (MRC) concerne l’ensemble des individus ayant soit une IRC (DFG < 60), soit une anomalie rénale chronique, biologique (protéinurie, anomalie du sédiment urinaire ou des fonctions tabulaires), radiologique ou histologique. Le délai entre le début de la maladie et l’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) varie considérablement non seulement entre les différentes formes d’atteintes rénales, mais aussi chez des patients ayant une même forme de maladie rénale [86]. L’IRCT est le stade final de la maladie rénale chronique, classée en 5 stades évolutifs (Tableau I). Tableau I: Classification de la maladie rénale chronique Stades DFG ml/min/1,73m² Définitions Stade 1 ≥ 90 MRC* avec DFG normal ou augmenté Stade 2 60-89 MRC* avec DFG légèrement diminué Stade 3 30-59 IRC modérée Stade 4 15-29 IRC sévère Stade 5 <15 IRC Terminale 5D Dialyse 5T Transplantation 21 *Avec marqueurs d’atteinte rénale : protéinurie clinique, hématurie, leucocyturie, ou anomalies morphologiques ou histologiques, ou marqueurs de dysfonction tubulaire, persistant plus de 3 mois. NB : Un patient dialysé est classé D sans stade. Selon son DFG, un patient transplanté rénal est décrit : 1T, 2T, 3T, 4T, 5T.

 L’hémodialyse

 L’hémodialyse est une technique d’épuration extra-rénale (EER) qui utilise un circuit extracorporel (CEC) pour mettre le sang en contact avec un liquide de dialyse ou dialysat à travers une membrane semi-perméable ou dialyseur, permettant ainsi une épuration . Elle permet, de remplacer la fonction rénale déficiente, soit de manière définitive (hémodialyse chronique) soit de manière transitoire, dans l’attente d’une récupération de la fonction rénale (hémodialyse aigue) [72]. L’hémodialyse est un traitement palliatif des insuffisances rénales majeures. L’hémodialyse est la technique d’EER la plus utilisée à travers le monde avec une prévalence et une incidence de près de 90% dans la plupart des pays [72]. Le transfert de masse des solutés et de l’eau au cours de l’HD se fait principalement selon 2 principes : la diffusion et la convection ou ultrafiltration. Elle se pratique dans un centre spécialisé à raison de 10 à 12 heures par semaine (généralement 3 séances de 4 heures par semaine). Certains proposent des séances prolongées ou plus fréquentes. L’HD nécessite certains paramètres à savoir : un abord vasculaire (fistule artério-veineuse, pontages synthétiques artério-veineux, ou cathéters centraux), le matériel de dialyse notamment un générateur, le dialyseur ou rein artificiel, le dialysat, les lignes artérielle et veineuse, les circuits de dialyse tels le circuit du sang et celui du dialysat et autres (pompe artérielle, détecteur d’air, ect…). Il existe différents types d’hémodialyse : l’hémodialyse conventionnelle, l’hémofitltration et l’hémodiafiltration. 22 Image I : image d’une machine dialyse Image II : image d’une fistule artério-veineuse radiale 

 Dysrégulation du système immunitaire 

Les infections constituent toujours une cause importante de morbidité et de mortalité chez les patients hémodialysés. Elles sont la conséquence de l’état de déficit immunitaire provoqué par l’urémie. Outre la susceptibilité accrue aux infections bactériennes, cette immunodéficience se manifeste, chez les patients urémiques, par une durée anormalement prolongée des autogreffes de peau, une incidence élevée des tumeurs malignes, une anergie cutanée du type de l’hypersensibilité retardée et d’une réponse déficiente aux antigènes dépendants des cellules T. Au cours des dernières années, il est apparu que cet état d’immunodéficience coexiste avec un état d’immunoactivation dû à la préactivation de la plupart des cellules immunocompétentes (Tableau II). Cette double anomalie du système immunitaire se manifeste dès le stade débutant de l’insuffisance rénale. Elle se majore au fur et mesure de la progression de l’insuffisance rénale et, bien loin d’être corrigée par la dialyse, elle s’accentue encore chez l’hémodialysé du fait que la bio-incompatibilité ajoute ses effets à ceux de l’état urémique. Tableau II : Dysrégulation immunitaire chez l’hémodialysé Immunodéficience Immun-activation – Déficit d’activité phagocytaire des PNN (susceptibilité aux infections bactériennes) – Défaut de fonction des lymphocytes T et B (faible réponse aux vaccinations, susceptibilité à la tuberculose) – Production de cytokines proinflammatoires – Etat inflammatoire chronique – Production de ROL, d’AGE et AOPP – Peroxydation lipidique – Stress oxydant persistant 

 Immunodéficience

 L’atteinte porte sur l’immunité tant humorale que cellulaire. Tous les types de cellules immunocompétentes sont atteints. En dehors d’une lymphopénie modérée, il n’est pas observé de modification significative du rapport CD4/CD8, mais la réponse proliférative aux antigènes et aux mitogènes des lymphocytes T est diminuée ainsi que la production d’interleukine-2 (IL-2) et d’interféron gamma (INFᵧ), ce qui suggère un déficit de la fonction des cellules T auxiliaires de type 1 (ou cellules Th-1). La réponse des lymphocytes aux 24 anticorps spécifiques est également déficiente, ce fait pouvant résulter de l’altération de leur coopération avec les cellules Th-2. Les monocytes montrent des signes indirects d’altération de leurs propriétés de présentation des antigènes, expliquant la faible réponse des patients urémiques aux vaccins contre le pneumocoque, le virus de l’influenza ou le virus de l’hépatite B. L’activité phagocytaire et bactéricide des polynucléaires neutrophiles est considérablement diminuée, entraînant une diminution des défenses contre les pathogènes. Enfin, l’activité des cellules tueuses naturelles (NK) est également déprimée, contribuant à l’incidence élevée de tumeurs malignes chez les hémodialysés. Les facteurs contribuant au déficit immunitaire des patients hémodialysés sont résumés dans le tableau III. Tableau III : Facteurs d’immunodéficience dans l’urémie Toxines urémiques Malnutrition protéique Déficit en zinc et en sélénium Déficit en pyridoxine Anémie Surcharge en fer Transfusions sanguines multiples 

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Immunoactivation 

Outre les conséquences de l’état urémique par lui-même, le passage du sang au contact des tubulures et des membranes de dialyse entraîne une activation cellulaire et la libération de fragments activés du complément, tandis que la rétrofiltration d’endotoxines d’origine bactérienne à partir d’un dialysat contaminé provoque une stimulation antigénique persistante. Une production massive de radicaux oxygénés libres et d’enzymes protéolytiques par les polynucléaires neutrophiles coïncide avec le pic de la neutropénie. Les radicaux oxygénés libres et les oxydants à vie longue tels que les chloramines, en association avec les protéases, favorisent la formation de produits avancés de la glycosylation (Advanced Glycation Endproducts ou AGE), de produits d’oxydation avancés des protéines (Advanced Oxidation Proteins Products ou AOPP) et de la peroxydation des LDL. Ces modifications structurelles des protéines et des apoprotéines favorisent le développement de l’athérosclérose, et les 25 modifications oxydatives de la β2-microglobuline contribuent à la formation des fibrilles amyloïdes. La production de cytokines pro-inflammatoires, notamment d’IL-1, de TNF-α et d’lL-6 par les monocytes activés augmente davantage que celle de leurs inhibiteurs naturels, entraînant ainsi une rupture de l’équilibre entre ces cytokines et leurs inhibiteurs. L’augmentation d’expression et de libération du récepteur soluble de l’IL-2 diminue la biodisponibilité de cette cytokine, participant ainsi la faible réponse des urémiques à la vaccination contre l’hépatite B. Enfin, la production accrue de CD23 soluble par les lymphocytes B stimulés augmente encore l’activation des lymphocytes T. L’activation des cellules immunocompétentes secondaire à l’urémie, périodiquement exacerbée au cours des séances d’hémodialyse, entraîne un état micro-inflammatoire chronique qui contribue à la survenue de complications tardives de l’hémodialyse, au premier rang desquelles figurent l’arthropathie amyloïde, l’athérosclérose accélérée et la malnutrition. La présence et le degré de l’état inflammatoire chronique sont reflétés par l’élévation de la concentration plasmatique de la protéine C-réactive (CRP), du fibrinogène et de la thyrocalcitonine. Le dosage du taux circulant de la CRP par méthode ultrasensible (usCRP) fait désormais partie des examens régulièrement pratiqués chez les patients hémodialysés. Les conséquences cliniques de l’immuno-activation et de l’état inflammatoire chronique sont résumées dans le tableau IV.

Table des matières

Introduction
Première partie : Revue de la littérature
A. Rappels sur l’insuffisance rénale chronique, l’hémodialyse et la dysrégulation du système immunitaire
1. L’insuffisance rénale chronique
2. L’hémodialyse
3. Dysrégulation du système immunitaire
3.1. Immunodéficience
3.2. Immunoactivation
4. Infections bactériennes
4.1. Infections staphylococciques
4.2. Infections à germes Gram-négatif
4.3. Infections à germes rares
5. Infections virales
5.1.Hépatite B
5.2.Hépatite C
5.3.Infection à VIH
6. Facteurs de risque infectieux en dialyse
6.1.Facteurs liés au patient
6.2.Facteurs liés à la technique
7. Infections selon le site
7.1.Septicémies
7.2.Infections broncho-pulmonaires
7.3.Infections ORL et dentaires
7.4.Infections génito-urinaires
7.5.Infections cutanées et des parties molles
7.6.Infections ostéo-articulaires
7.7.Tuberculose
Deuxième partie : TRAVAIL PERSONNEL
I. Matériel et méthodes
1. Cadre d’étude
2. Période et Type d’étude
3. Population d’étude
3.1. Critères d’inclusion
3.2. Critères de non inclusion
4. Méthodologie
5. Analyse des données
II. RESULTATS
1. Épidémiologie
1.1.Age
1.2.Genre
1.3.Origine géographique
1.4.La néphropathie causale
1.5.Durée d’hémodialyse
1.6.Nombre de séances par semaine
2. Les infections virales
2.1.Hépatite virale B
2.2.Hépatite virale C
2.3.Virus d’immunodéficience humaine (VIH)
3. Infections bactériennes
3.1.Infections d’abord vasculaire
a- Infection des cathéters simples
b- Infections de la FAV
c- Infections des cathéters tunnélisés
3.2. Infections broncho-pulmonaires
3.3.Infections ORL
3.4.Infections génito-urinaires
3.5.Le sepsis
3.6.Infections ostéo-articulaires
3.7.Infections spécifiques : La tuberculose
4. Infections parasitaires
5. Infections mycosiques
6. Autres infections
III. Discussion
1. Aspect épidémiologique
1.1. Age
1.2. Genre
1.3. Durée d’hémodialyse
1.4. La néphropathie causale
2. Infections en hémodialyse
2.1. Infections virales
2.1.1. HVB
2.1.2. VHC
2.1.3. VIH
2.2. Infections bactériennes
2.2.1. Infections des abords vasculaires
2.2.2. Infections broncho-pulmonaires non spécifiques
2.2.3. Infections génito-urinaires
2.2.4. Le sepsis
2.2.5. Infections ostéo-articulaires
2.2.6. Infections spécifiques : La tuberculose
Conclusion et Recommandations
Références bibliographiques
Annexe

 

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