PRESSION VECTORIELLE CHEZ LES PETITS RUMINANTS HÔTES DE LA FIEVRE
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
La Fièvre de la Vallée du Rift (FVR) est une anthropozoonose présentant un impact aussi bien économique qu’en santé humaine en Afrique. Chez l’animal, l’infection provoque des avortements et tue les jeunes et les nouveau-nés. Chez l’homme, d’un syndrome pseudo-grippal, elle peut évoluer vers des formes graves d’issue souvent fatale. Une maladie cliniquement similaire à l’actuelle FVR, décimant les troupeaux, a été décrite pour la première fois en 1912-1913, près du lac Naivasha dans la région du Rift au Kenya (PREHAUD & BOULOY, 1997). L’agent pathogène responsable a été isolé chez un mouton en 1931 par DAUBNEY et al, au cours d’une épizootie atteignant les petits ruminants. En 1951, la maladie fut identifiée pour la première fois en Afrique du Sud, à partir de cas humains, les complications oculaires étant observées pour la première fois. Ce sont les moutons qui furent les plus touchés (environ 100 000 morts (LEFEVRE, 1989) et 500 000 avortements (DUBROCA, 2001). L’année 1976 marque un tournant dans l’évolution de la maladie. En effet, localisé jusque là aux pays d’Afrique orientale et australe (Kenya, Zimbabwe, Zambie, Mozambique, Afrique du Sud), le virus traverse le désert de Nubie et gagne le Nord du Soudan. L’année suivante, une épizootie particulièrement meurtrière touche l’Egypte, affectant les dromadaires, les bovins, les moutons et les chèvres (PREHAUD & BOULOY, 1997). En 1979, une douzaine de souches du virus de la FVR a été isolée à partir de moustiques dans la forêt de Périnet, à l’Ouest d’Antananarivo (PETERS, 1997). En 1974, la présence du virus est signalée au Sénégal (MEEGAN et al, 1983). En Mauritanie, la région de Rosso a été frappée par une épidémie humaine en fin 1987 (DIGOUTTE &PETERS, 1989b). En septembre 2000, la maladie s’est déclarée pour la première fois en dehors du continent africain et de Madagascar, touchant l’Arabie Saoudite et le Yémen (AHMAD, 2000 ; SHAWKHY, 2000). Des épizooties ont été signalées en Afrique de l’Ouest (Mauritanie, Sénégal et Gambie) en 2002 et 2003 (DIALLO, 2008). En 2008, les autorités malgaches ont notifié 5 foyers d’épizootie chez des bovins avec une dizaine morts de FVR. Deux cas humains (dont 1 décès) ont été confirmés biologiquement (SISSOKO et al., 2009). Des cas ont été rapportés aux Comores en 2007 et à Mayotte de septembre 2007 à mai 2008 (SISSOKO et al., 2009)
Le virus
Le virus de la FVR appartient au genre Phlebovirus et son génome est composé de trois segments d’ARN simple brin de polarité négative : le segment L (large), le segment M (medium) et le segment S (small). Le potentiel évolutif du virus de la FVR repose sur des changements intramoléculaires (mutations) et des phénomènes d’échange de matériel génétique (réassortiments). Trois groupes géographiques de variants viraux ont été définis : l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique Centrale/l’Afrique de l’Est et l’Egypte.
Les hôtes vertébrés
Il s’agit aussi bien de vertébrés domestiques que sauvages. Le virus de la FVR est fortement pathogène pour les moutons. Les chèvres, les bovins et les chameaux tout comme les ruminants sauvages (buffles, antilopes, bubales, gnous) sont également des hôtes importants. Les ânes, les chevaux, les chiens, et les chauves-souris ont été trouvés infectés pendant des manifestations de la maladie. Au Sénégal des enquêtes sérologiques ont montré que les rongeurs sauvages présentaient des anticorps du VFVR (DIOP et al., 2000) Les singes d’Afrique et les porcs présentent une virémie passagère.
Les principaux vecteurs de FVR
À partir des isolements du virus FVR durant ou après des périodes épidémiques et/ou épizootiques de nombreuses espèces d’arthropodes appartenant à des familles et genres différents ont été suspectés d’être les vecteurs du virus. MEEGAN & BAILEY (1988) avaient déjà répertorié une trentaine d’espèces de moustiques et autres diptères (Culicoides, Simulies) infectés par le virus FVR dans la nature, ce qui peut expliquer la capacité du virus à apparaître dans un grand nombre de biotopes. Au Sénégal, le virus a d’abord été isolé à partir de femelles d’Ae. dalzieli en 1974 puis en 1983, il était alors appelé virus Zinga (MEEGAN et al, 1983). En 1993, le virus a été isolé à Barkedji à partir d’Ae. ochraceus et d’Ae. vexans (FONTENILLE et al, 1995a). Le virus a été trouvé chez Cx. poicilipes en 1998 (DIALLO et al, 2000a). Par la suite le virus a été isolé de Cx. poicilipes, Ae. vexans, Ma. africana et Ae. fowleri à Barkedji en 2002 et 2003 (BA et al., en révision).
MATERIELS ET METHODES
Zone d’étude
Notre étude a été conduite dans la zone de Barkedji (15o 17′ N, 14o 53′ W) située dans la région éco- géographique et sylvopastorale du Ferlo au Sénégal (Figure I). Plus de la moitié du cheptel national se trouve dans cette partie nord du pays. Elle est localisée dans le département de Linguère. Elle se trouve dans une zone écologique de savane arbustive ( Photo 1) soumise à un climat sahélien avec une mousson d’été (saison des pluies) allant de juillet à octobre. La pluviométrie moyenne annuelle est faible et irrégulière (300 à 500 mm). Une pluviométrie exceptionnelle a été enregistrée cette année. La zone présente un réseau de mares temporaires qui sont mises en eau dès les premières pluies. Ces mares sont généralement en eau durant toute la saison pluvieuse et les plus grandes persistent 2 à 3 mois après l’hivernage. En plus d’être la source d’eau où se rencontrent la population et le bétail, les mares sont les habitats naturels de nombreux oiseaux, reptiles, amphibiens et rongeurs sauvages. Les Peulhs constituent la majorité de la population. Ils effectuent des migrations saisonnières, avec leur cheptel à la recherche de pâturages à l’intérieur du pays. Ces migrations saisonnières entraînent une augmentation considérable de la population et du bétail dans la région juste au début de la saison pluvieuse lors de leur retour. Le bétail est constitué principalement de bovins, d’ovins (Photo 2) et de caprins et dans une moindre importance d’équins. Les villages sont de taille variable et peuvent être constitués d’une seule famille avec quelques cases en pailles (photo 3).
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