Préparation de triénols par couplage de tye Heck
Introduction et état de l’art
Le motif triénol conjugué est présent dans de nombreux produits naturels comme la wortmannilactone C (antitumoral), la manumycine A (antifongique, antibactérien et antitumoral contre des cellules souches de la leucémie) 4 ou l’ansatriénine A (antitumoral)55 (Schéma 33). La présence d’un groupement hydroxyle sur la position allylique des triénols conjugués influe sur leur stabilité car des réactions d’élimination peuvent facilement avoir lieu pour conduire au tétraène correspondant. La préparation des triénols conjugués est donc délicate et la mise au point de méthodes douces pour accéder à ces motifs représente un défi pour les chimistes organiciens. Schéma 33 Pour notre part, nous avons envisagé la synthèse de triénols conjugués R1 possédant un groupement hydroxyle en position allylique grâce à un couplage de type Heck à partir d’alcools allyliques non protégés R2 (Schéma 34). Schéma 34 55 (a) Damberg, M.; Russ, P.; Zeeck, A. Tetrahedron Lett. 1982, 23, 59–62. (b) Sugita, M.; Natori, Y.; Sueda, N.; Furihata, K.; Seto, H.; Otake, N. J. Antibiot. 1982, 35, 1474–1479. Au début des années 1990, T. Jeffery avait montré qu’il était possible d’obtenir des diénols conjugués de type (E,E)-B73 et (E,Z)-B73 par un couplage de type Heck entre des iodures vinyliques (E)-B71 et (Z)-B71 et des alcools allyliques de type B72. Cette réaction est catalysée par de l’acétate de palladium(II) en présence de sels d’argent(I) (acétate ou carbonate) (Schéma 35). 56 Schéma 35 Cette méthode présente un certain nombre d’avantages comme la rétention de la stéréochimie de l’iodure vinylique, ce qui permet d’accéder sélectivement à des diénols de configuration (E,E) ou (Z,E), ainsi que la rétention de la configuration absolue de l’alcool si celui-ci est optiquement actif.56b L’utilisation d’un simple alcool allylique non protégé comme partenaire de couplage (pas d’hétéroatome tel que Sn, B, Mg…) et la non utilisation de ligand phosphoré pour réaliser la réaction de couplage, respectent le principe d’« économie d’atome » qui est l’un des douze principes de la chimie verte définis par Anastas et Warner.57 Pour notre part, nous avons voulu tester si les conditions mises au point par Jeffery, pour accéder aux diénols, pouvaient être appliquées à la préparation des triénols R1. Ceux-ci pourraient provenir soit d’un couplage entre un iodure vinylique R3 et un alcool diénique R4, soit d’un couplage entre un iodure diénique R5 et un alcool allylique R2 (Schéma 36).
Couplage entre un iodure vinylique et un alcool diénique
Préparation des iodures vinyliques R3
Trois iodures vinyliques 3a-3c, diversement protégés, ont été préparés à partir de l’hex5-yn-1-ol 1 commercial. La fonction alcool de 1 a été protégée sous la forme d’un éther de tert-butyldiphénylsilyle 2a (TBDPSCl, imidazole), d’un éther de benzyle 2b (NaH, BnBr), et d’un éther de p-méthoxybenzyle 2c (NaH, PMBBr). Les alcynes 2a-2c ainsi obtenus ont été engagés dans une séquence d’hydrozirconation/iodation à l’aide du réactif de Schwartz (Cp2ZrHCl)58 préparé in situ par la méthode développée par Negishi et Huang (Cp2ZrCl2 et DIBAL-H)30 et du N-iodosuccinimide (NIS) pour conduire aux iodures vinyliques 3a-3c avec d’excellents rendements et une totale stéréosélectivité (E). L’étape d’hydrozirconation/iodation s’effectue via l’organozirconien intermédiaire I-7 obtenu par syn-hydrométallation de l’alcyne puis par un échange métal-iode avec le NIS qui s’effectue avec rétention de configuration (Schéma 37)
Préparation de l’alcool diénique
L’alcool diénique 7 de type R4 a été préparé en trois étapes à partir de l’acide pentadiénique 4 commercial. Celui-ci a été réduit en l’alcool 5 par LiAlH4 puis réoxydé en l’aldéhyde conjugué 6 avec du PCC. L’addition du chlorure d’isopropylmagnésium sur l’aldéhyde 6 a conduit à l’alcool diénique 7 désiré (Schéma 38). Le faible rendement observé (5% sur 3 étapes) peut s’expliquer par la volatilité des intermédiaires 5 et 6 ainsi que du produit 7