PRATIQUES D’ELEVAGE ET D’EQUARRISSAGE DANS LES GRANDS CAUSSES

PRATIQUES D’ELEVAGE ET D’EQUARRISSAGE DANS LES GRANDS
CAUSSES

Les activités pastorales incluent la gestion de la mort animale (Brisebarre, 1999), et il existe une relation traditionnelle entre l’élevage et le vautour. Selon le vieil adage romain « Ubi pecora, ubi vultures », « là où il y a des bergers, il y a des vautours » (Lamblard, 2001). Dans les Grands Causses, des campagnes de sensibilisation ont été menées préalablement aux opérations de réintroduction du Vautour fauve par le Fond d’Intervention pour les Rapaces (aujourd’hui LPO) et le Parc National des Cévennes (Crosnier, 2006) « Hier déprécié et persécuté, le vautour est aujourd’hui exhibé aux visiteurs » (Crosnier, 2006). Autrement dit les vautours font aujourd’hui parti du paysage caussenard. Leur maintien étant conditionné par les modes d’élevage et les pratiques d’équarrissage des éleveurs, nous allons les évoquer dans ce chapitre.

Nous avons mené, avec Sophie Bobbé, des entretiens semi-directifs en automne 2008, en hiver et en été 2009. Pour ce faire, nous nous sommes appuyés sur l’étude ethnologique réalisée au cours de DIVA 1 (2003-2006) (Sarrazin et al., 2006) : les résultats de l’étude ethnologique précédemment évoquée ont identifié des pratiques d’équarrissage des éleveurs et des motivations qui sous-tendent leurs choix. La grande majorité des éleveurs utilisent un double système, souvent une placette et une collecte (Bobbé, 2006). L’utilisation d’un lieu de dépôt de carcasses à destination des vautours peut être motivée par une sensibilité écologique ou peut revêtir un caractère plus opportuniste (Bobbé, 2006). Dans le premier cas, la motivation est traduite par l’officialisation du lieu en placette individuelle d’alimentation. Dans le second cas, les dépôts restent illégaux et nous parlerons de « placette officieuse » (Bobbé, 2006).

. Les pratiques pastorales caussenardes

La diversité des exploitations

L’élevage de brebis laitières s’est développé depuis le début du siècle autour de la production fromagère, en particulier de roquefort. L’élevage s’est intensifié au cours du siècle dernier avec la modernisation des techniques d’élevage (la traite mécanique, les aliments concentrés) (Bobbé, 2006), une nette augmentation des tailles de troupeaux et la sélection de brebis plus productives (Puech, 1929). Dans les années 50, les troupeaux comptaient 100 à 150 bêtes, aujourd’hui, ils avoisinent les 400 bêtes en moyenne, allant jusqu’à 900 bêtes pour les plus grandes exploitations. Parallèlement à l’augmentation des troupeaux, la production laitière a triplé en un demi-siècle : une brebis qui produisait, en 1950, 50 à 60 litres de lait par an, en produit, dans les années 90, 150-180 litres par an.

Aujourd’hui, ce chiffre atteint 290 litres de lait par an pour une brebis de race Lacaune (CNBL, 2008), race couramment utilisée pour la production fromagère locale. L’économie de la région a toujours été basée sur l’agriculture, mais l’agropastoralisme a souffert de la mondialisation des échanges commerciaux (Bobbé, 2006). La stagnation du prix du lait a engendré le développement de la production de viande dans les années 50-60. La production de lait reste dominante dans la région, toutefois, les exploitations qui pratiquent à la fois la production de lait et de viande ne sont pas rares sur les plateaux des Causses.

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Si les pratiques des éleveurs sont des réponses aux injonctions économiques, elles le sont aussi, et particulièrement sur les plateaux que sont les Grands Causses, aux contraintes biophysiques du territoire (Lhuillier and Osty, 2009). Les caractéristiques pédologiques et notamment la nature du sol font de l’écosystème caussenard un terrain peu propice aux grandes cultures. Si les pluies sont relativement abondantes, l’eau s’infiltre dans la roche, et des épisodes de sécheresse estivale sont fréquents. Face aux effets de la mondialisation des échanges commerciaux sur les prix des produits (i.e. la concurrence de l’agneau de Nouvelle Zélande), et le faible prix d’achat du lait par Société, conserver la viabilité économique des exploitations nécessite toujours des investissements (aménagements, intrants).

De plus, tandis que le prix du pétrole, comme celui des céréales augmente, les sécheresses représentent des risques de plus en plus importants pour les éleveurs. En effet, aujourd’hui, les éleveurs élèvent une brebis par hectare de leur production fourragère. Et beaucoup d’éleveurs sont arrivés à un seuil de production : « On est toujours sur le fil du rasoir […] on est arrivé au maximum des  aménagements techniques qui puissent permettre une amélioration de la production » (éleveur, causse Méjean, comm. pers. 2008),

« On serait au RMI que ce serait pareil sauf que l’on travaille 70-80 heures par semaine […] les charges augmentent, tout augmente, on peut plus augmenter la taille des troupeaux indéfiniment pour la surface que l’on a » (éleveur, causse Méjean, comm. pers. 2009). Des alternatives telles que les circuits courts de commercialisation (vente directe), les associations d’exploitations en coopérative, sont développées par les éleveurs des Causses pour tenter de limiter la pression des marchés et sécuriser leurs systèmes de production (Lhuillier and Osty, 2009). De plus, des activités liées au tourisme en particulier l’hébergement en gîte, viennent compléter les activités agricoles. En 2006, la pluriactivité concerne 20% des exploitations caussenardes (Bobbé, 2006)

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