Pour une formation à l’interculturel

Pour une formation à l’interculturel

Les enjeux d’une sensibilisation

Il est des mots qui veulent tout dire et rien dire. Interculturel est un de ceux-là. D’un côté il désigne un enjeu et une réalité contemporaine fondamentale : nulle part les cultures ne sont isolées, coupées de l’influence des autres, pas plus qu’elles ne sont désormais homogènes (l’ont-elles jamais été ?) ; toutes nos sociétés sont devenues pluriculturelles. Les flux croissants de migration et la mondialisation font par ailleurs que, par choix ou par obligation, un nombre croissant de professionnels vivent et travaillent aujourd’hui dans un milieu géo-culturel qui n’est pas le leur, ou, sans même être expatriés, se trouvent plongés humainement et professionnellement dans un milieu fortement pluriculturel, avec ses richesses et ses difficultés. Dans les deux cas se pose la question du dialogue interculturel et du traitement de la diversité culturelle.

D’un autre côté, le mot interculturel permet toutes les impostures, notamment celle de l’« alibi » interculturel. Qu’un problème survienne entre deux individus et deux groupes, et l’on allègue un peu vite : « on est dans l’interculturel ». Quant à l’idée toute faite qu’un Chinois et un Français ont forcément plus de difficulté à se comprendre que deux Français entre eux, elle peut être contredite par la réalité des situations socioprofessionnelles en présence. Il y a probablement beaucoup moins de différence culturelle entre un neuropsychiatre italien et un neuropsychiatre thaïlandais qu’entre un scientifique français et un commerçant français ou qu’entre un haut fonctionnaire allemand et un ouvrier agricole allemand. Pour ne pas tout mélanger, il est bon de distinguer les différents niveaux auxquels les questions interculturelles se posent aujourd’hui :

Dans les trois cas, la difficulté est toujours de distinguer, dans les relations dites « interculturelles », ce qui ressortit fondamentalement de différences civilisationnelles et ce qui ressortit de rapports sociaux. La fameuse question de la « gestion des minorités » dans la ville, par exemple, est loin de n’être qu’affaire de respect ou non respect des coutumes, de compréhension des modes de vie des uns et des autres, d’exploration des cosmogonies de chacun. Elle est indissociable des tensions économiques et sociales qui existent entre les différents groupes. Ceci ne veut pas dire que, dans le programme de travail esquissé dans cette note, nous ayons les moyens et la compétence d’aborder l’aspect économique et sociologique des relations interculturelles, au moins dans un premier temps. Mais l’ignorer serait dangereux.

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Le premier, c’est qu’il y a chez beaucoup de professionnels qui s’en vont travailler sur d’autres continents ou que leur métier immerge dans un milieu interculturel un déficit de curiosité sur les fondements et les logiques de la culture de l’autre, un défaut de vigilance et une faible propension au doute. Chacun se lance dans sa « mission » avec sa panoplie de certitudes, de méthodes, d’évidences, de prétention parfois, de générosité souvent, sans se poser suffisamment la question de savoir si ces évidences sont aussi celles des gens chez qui il s’installe, et si cette générosité, souvent assortie d’une extrême impatience, est bien celle qu’on lui demande d’avoir. Cette observation, faite mille fois dans les milieux de la coopération technique, des institutions internationales, des ONG, de la diplomatie ou des milieux d’affaires, n’est nullement un jugement de valeur, car le plus souvent ces professionnels, inévitablement formatés par leur culture d’origine et leur éducation, ne sont pas, ou sont trop peu, sensibilisés aux défis de l’interculturel. Et manquent souvent des données et des outils d’analyse qui leur permettraient d’être plus pertinents dans leurs pratiques, dans leurs comportements et dans leur éthique professionnelle lorsqu’il sont en contact avec une culture qui n’est pas la leur. Pas de généralités excessives sur ce point cependant : les briefings interculturels (préparation au départ, formation à la pédagogie en milieu pluriculturel…) existent tout de même dans certaines ONG, dans beaucoup de grands groupes industriels, et peut être surtout chez les professionnels qui ont à gérer, dans leur propre pays, la question des minorités, notamment dans le secteur sanitaire et social et dans celui de l’éducation nationale. Dans ce domaine d’ailleurs, la littérature disponible sur la communication et la gestion interculturelle est plus abondante que dans les autres.

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