Dans le système MMR (MisMatch Repair)
MSH2 est un gène impliqué dans le système MMR en intervenant en post-réplication. Une équipe [Worrillow LJ, 2003] rapporte que chez les patients traités par cyclophosphamide et procarbazine développant une t-LAM, le polymorphisme avec l’allèle variant (C) hMSH2 est très représenté avec un grand risque de MSI (Micro Satellite Instability). Cette MSI peut de plus survenir sur les gènes RAD51 et BCR2 [Worrillow LJ, 2006].
Polymorphisme des gènes de détoxification
Le métabolisme des agents génotoxiques et donc des produits de chimiothérapie peut être divisé en 2 phases. La phase I implique l’activation de substrats en intermédiaires électrophiles, grâce principalement à la famille enzymatique du cytochrome p450 (CYP). Les produits obtenus par les réactions catalysées via le CYP sont très réactifs et peuvent être responsables de dommages intra cellulaires et notamment endommager l’ADN.
La phase II (conjugaison) fonctionne avec des enzymes qui inactivent les substrats génotoxiques (provenant ou non de la phase I). Les molécules intervenant dans cette phase sont la famille des glutathione S-transférases (GST) et des N-acétyltransférases (NAT) telle que la NAD(P)H:quinone oxidoréductase 1 (NQO1).
L’équilibre entre ces 2 phases est capital pour la réponse cellulaire aux xénobiotiques.
Un très grand nombre de polymorphismes a été trouvé parmi les gènes de détoxification. Certains de ces polymorphismes aboutissent en une protéine défaillante. Quelques uns ont été étudiés dans les t-LAM.
Cytochrome p450 (CYP)
Les substrats xénobiotiques du CYP sont aussi bien, par exemple, des hydrocarbones polycycliques, que des médicaments anticancéreux. Le système CYP transfère une molécule d’oxygène sur le substrat créant une molécule intermédiaire hautement réactive qui, si elle n’est pas prise en charge par la phase II de détoxification devient très toxique pour l’ADN [Park JY, 1996]. Le polymorphisme et les différents niveaux d’activité des enzymes médiés par leurs inhibiteurs et inducteurs sont responsables d’une grande variabilité d’expression de l’ensemble de ces enzymes.
Bien qu’il y ait un grand nombre de polymorphisme, seulement quelques uns ont été étudiés parmi les cas de t-LAM [Seedhouse C, 2007]. L’auteur en relève 13. En outre, aucune conclusion ne peut être aisément portée car les résultats sont dans l’ensemble peu significatifs et laissent suggérer plusieurs hypothèses qui sont sans réponse. Un médicament n’est pas catalysé par une seule isoenzyme dans le système, il existe une synergie qui n’explique pas si elle favorise l’augmentation ou la réduction du risque de développer une t-LAM. A l’inverse, si les cellules restent viables, celles-ci devraient contenir une concentration élevée d’ADN lésé et augmenter le risque de développer une t-LAM. Pour répondre à cette dernière question, le nombre de cas étudiés doit être plus grand [Seedhouse C, 2007].
Conjugaison (phase II)
Glutathione S transférase GST
Les GSTs sont une famille multigénique d’isoenzymes. Elles hydrolysent les électrophiles réactifs via la conjugaison afin de réduire le glutathion et ainsi prévient les dommages de l’ADN. Le polymorphisme porte sur trois des sous familles de GSTs : GSTM (µ), GSTP (), GSTT (). Ces trois dernières détoxifient notamment des mutagènes environnementaux et de nombreux médicaments anticancéreux [Hayes JD, 1995].
Ici encore Seedhouse reste très critique quant à l’implication significative de ces polymorphismes dans les t-LAM [Seedhouse C, 2007]. Cependant il existe plusieurs articles qui font le constat de l’existence de différents types de cancers qui pourraient être associés avec GSTT1 [Skjelbred CF, 2007; Sreeja L, 2008 ; Suzen HS, 2007].
NAD(P)H:Quinone oxidoréductase 1 NQO1
NQO1 est une flavoenzyme intracytoplasmique qui a un rôle capital dans la protection de la cellule contre des éléments endogènes et exogènes contenant des quinones et leurs dérivés métaboliques. La réduction de ces substrats utilise les cofacteurs NADP ou NADPH pour catalyser les substrats : ainsi, il y a moins d’hydroquinones produits dans la cellule.
NQO1 prévient la génération de molécules oxygénées et de radicaux libres qui peuvent conduire
à des dommages oxydatifs de différents éléments cellulaires [Seedhouse C, 2007]. Il semblerait que certains polymorphismes pourraient être impliqués dans une susceptibilité plus grande de développer une t-LAM, notamment à l’état homozygote pour NQO1-187Ser [Larson RA, 1999 ; Naoe T, 2000].
PRINCIPES DE LA CGH ARRAY
Le caryotype morphologique classique questionne la totalité du génome. Les chromosomes sont étudiés cellule par cellule au stade de métaphase. Idéalement, on observe 20 métaphases pour rechercher une anomalie et de savoir si elle est homogène. L’anomalie clonale peut être de nombre, de structure, d’échange de matériel équilibré ou non. C’est un examen consommateur de temps et peu automatisable. Son niveau de résolution est limité de l’ordre de 4 à 5 mégabases (Mb) et des anomalies cryptiques, non décelables par les bandes, sont courantes.
La technique de FISH (Fluorescence In Situ Hybridization) peut être utilisée à toutes les étapes du cycle cellulaire. Elle est complémentaire du caryotype. La mise en évidence de remaniement chromosomique passe donc en dessous de 4 Mb. La mesure du nombre de copies d’une séquence du génome humain est fiable permettant le diagnostic de monosomies ou de trisomies dans des noyaux interphasiques complets. Les translocations sont efficacement visualisées par cette technique. Cependant, il faut disposer des sondes adéquates. Sans orientation clinique ou cytogénétique préalable, la FISH est peu informative. C’est une technique ciblée.
La Comparative Genomic Hybridization (CGH) est mise au point en 1992 [Kallioniemi A, 1992] par l’équipe de D. Pinkel. C’est une technique de cytogénétique pan génomique qui consiste à co-hybrider la même quantité d’ADN contrôle et d’ADN du malade sur les chromosomes d’un sujet normal. Ces sondes d’ADN sont marquées chacun par un fluorochrome différent. Par la suite, une numérisation des signaux générés par les fluorochromes est effectuée. L’intensité de chaque signal sur les bandes chromosomiques est le reflet du rapport entre l’hybridation des sondes d’ADN témoins et celle des sondes de l’ADN pathologique. Son niveau de résolution est de l’ordre de 5 à 10 Mb.
Six ans plus tard cette même équipe [Pinkel D, 1998] améliore cette technique en utilisant des lames sur lesquelles sont posés des milliers de fragments d’ADN ou oligonucléotides en spots homogènes : c’est l’array CGH. La plupart des micro-matrices d’ADN utilisent désormais des oligonucléotides de 20 à 60 bases, environ qui sont synthétisés in situ. Selon la fréquence d’échantillonnage, la résolution est plus ou moins grande. Jusqu’en 2007 des BACs étaient surtout utilisés (3000 é 6000 spots). Des micro-matrices pangénome, disponibles dans le commerce, comprennent de l’ordre de 100 000 à 1 000 000 de spots (et au delà), et offrent une résolution d’1 Mb [Redon R, 2006]. Ainsi la CGH permet de quantifier l’ADN tumoral en tout point des chromosomes au cours de la même analyse.
Il existe 2 types de fabrication de puces selon la méthode de synthèse des oligonucléotides sur les lames de verre:
par photolithographie (société Affimetrix®) déposant des oligonucléotides de 25 mers environ
par impression en jet d’encre (société Agilent®) déposant des oligonucléotides de 50 mers .
Les oligonucléotides sont répartis sur l’ensemble de la puce et sont de taille de quelques dizaines de mers. Le niveau de résolution de ces puces n’a de cesse de s’élever permettant d’atteindre une résolution de quelques kilobases. Des micro-matrices d’oligonuléotides sont désormais disponibles, avec la possibilité de corréler les données CGH avec celle du transcriptome. Les séquences d’oligonucléotides sont répétées (réplicats et triplicats) et dispersées in situ sur la surface d’une lame en verre (on parle de face active). La technique de la CGH sur micro-matrices ou CGH array (ou aCGH) a déjà permis de discerner plusieurs zones amplifiées dans un amplicon qui apparaissait unique, et de voir des petites duplications ou délétions chromosomiques.
Cette technique très performante permet de détecter les variations du nombre de copies d’ADN appelées CNA (Copy Number Abnormalities) telles que les amplifications et les délétions de régions chromosomiques associées à des pathologies du développement ou à des cancers, en tout point du génome (sous réserve d’une densité suffisante en matériel tumoral > 50% de cellules pathologiques dans le tissu). Les chromosomes peuvent être considérés comme des « micropuces » naturelles avec un très haut niveau d’intégration.
Les polymorphismes physiologiques (duplications fréquentes dans le génome entre autres, (Copy Number Variation, CNV) sont visibles par une aCGH à très haute résolution telles que celles utilisées dans ce projet (244 K soit près de 244 000 oligonucléotides et 400 K soit une lame contenant 400 000 oligonucléotides en deux exemplaires pour le traitement simultané de 2 patients différents). (Voir figure 4).
Ces outils toujours plus performants ont générés de nouveaux travaux pour la détection d’anomalies cryptiques dans les LAM et les SMD. En utilisant la CGH, des gains ou des pertes chromosomiques de 5 à 10 Mb ont été détectées. [Kim MH, 2001; Casas S, 2004; Gross M, 2009]. Ces résultats ont été affinés et améliorés en utilisant la CGH array permettant de détecter des CNA de moins de 5 Mb [Martinez-Ramerez A, 2003].
De plus, le développement d’algorithmes de bioinformatique de plus en plus performants, permettent l’utilisation de SNP (Single Nucleotide Polymorphism) array pour rechercher des CNA et d’identifier des LOH (Loss Of Heterozygosity, perte de l’hétérozygotie). La perte d’un allèle laisse l’autre allèle hemizygote ou homozygote selon le mécanisme de perte. Dans les deux cas il s’agit d’une perte d’hétérozygotie. En répétant ce test tout le long du génome on peut détecter des pertes d’hétérozygotie de tailles extrêmement variées. On observe des LOH sans anomalie du nombre de copie : on parle alors de CN-LOH (Copy Neutral LOH). Les premières observations, dans un cadre constitutionnel, impliquaient des chromosomes entiers et ont été dénommés UPD (Uni Parental Disomy). Il s’agissait de mal-ségrégations avec perte d’un chromosome suivi d’une duplication de l’autre, ou vice versa, très précoces. Puis on a constaté l’existence d’UPD segmentaires qui ne pouvait s’expliquer que par recombinaison équilibrée entre les deux chromosomes homologues. Dans les cellules malignes on a pendant longtemps recherché des LOH ciblées puis l’on a utilisé les SNP. On a observé de nombreuses UPD complètes ou segmentaires. Beaucoup ont été reliées à des pertes de nombre de copies par les techniques classiques mais aussi par utilisation des SNP pour l’évaluation du nombre de copies [Heinrichs S, Blood, 2010]. On observe des UPD dans les LAM à caryotype normal [Gorletta TA, 2005]. Dans son travail Parkin retrouve au sein des pertes environ 9% d’UPD parmi différents types de LAM (t-LAM comprises) [Parkin B, 2010].
Comme on le verra dans le développement de la thèse, la CGH array et le SNP array ont identifié dans les LAM un panel récurrent de CNA [Eklund EA, 2010].