Politique monétaire et stabilité, croissance, performance

Introduction 

Si l’on juge par l’expérience des dernières décennies, la croissance économique est le fruit d’une alchimie que tous les gouvernements cherchent à maîtriser sans toujours y parvenir. Un pays ne peut se développer que dans la mesure où il dispose de capitaux suffisants et les affectent à bon escient. L’ampleur des besoins des capitaux de l’économie suppose un système adapté aux exigences d’un nouveau contexte.
Face à une structure caractérisée par une augmentation de l’épargne, une insuffisance de la structure financière des entreprises et un déséquilibre des finances publiques, apparaît plus que jamais la nécessité d’un marché financier moderne qui soit le lieu de rencontre d’une offre de capitaux à long terme et d’une demande solvable. C’est à cet effet qu’il s’est avéré impératif pour les pays maghrébins de se doter d’un marché monétaire efficace. Ainsi, les politiques de réformes institutionnelles de ces pays ont placé la croissance au centre des préoccupations, afin de développer un marché financier atrophié et de permettre aux entreprises d’accéder à de nouvelles formes de financement, comme c’est un moyen adéquat pour favoriser les privatisations, que pour drainer les conditions de transparence. En effet, le marché financier représente un instrument de libéralisation économique, de mobilisation de l’épargne et de désengagement de l’Etat.

La relation selon la revue de la littérature entre croissance et politique monétaire

Croissance économique et Stabilité macroéconomique et performance économique

Avant de présenter les principaux travaux et conclusions sur la relation entre la stabilité macroéconomique et la croissance, il faut définir la notion de stabilité macroéconomique.
En effet, un cadre macroéconomique est considéré comme stable s’il s’agit d’une politique monétaire stable caractérisée par une inflation faible et stable.
Dans certains travaux, la stabilité macroéconomique englobe la stabilité de la politique fiscale en plus de celle de la politique monétaire.
Turovsky (1993) a étudié la relation entre la politique macroéconomique et la croissance économique. Sa recherche avait deux objectifs : le premier était de déterminer le lien entre le taux d’accumulation du capital et l’inflation, et le second de s’intéresser à la relation entre la politique macroéconomique et le bien-être économique.
Politique monétaire et stabilité, croissance, performance économique.

Efficacité et performance économique de la politique monétaire

Il a défini un modèle caractérisé par un environnement macroéconomique stochastique. Son modèle consiste à présenter la structure de l’économie selon le comportement des consommateurs à travers leur fonction d’utilité, le comportement des firmes par leur fonction de production et enfin la contrainte budgétaire gouvernementale.
La détermination de l’équilibre macroéconomique de ce modèle, en résolvant les différentes équations, a permis à Turovsky (1993) d’évaluer la nature des relations décrites ci-dessus.
En premier point, Turovsky (1993) a testé l’effet d’instabilité de la politique monétaire.
Cette instabilité est modélisée par un changement au niveau du taux de croissance monétaire.
Les résultats montrent qu’une hausse de la moyenne du taux de croissance monétaire réduit le taux d’accumulation du capital et engendre une hausse d’inflation. Ceci peut s’expliquer par le fait que la hausse des anticipations du taux de croissance monétaire engendre une augmentation du taux d’intérêt, ce qui conduit à une baisse du ratio d’équilibre outputconsommation. Au cas où la proportion de la production dévouée à la dépense gouvernementale reste fixe, les anticipations de la croissance du capital augmentent (c’est l’effet de Tobin). Cependant, cette hausse est relativement faible par rapport à celle de l’offre de la monnaie, ce qui exige une hausse dans les anticipations d’inflation pour que le portefeuille d’équilibre soit maintenu. Ainsi, la hausse du niveau de croissance monétaire ayant pour but d’avoir une croissance économique plus élevée, va être accompagnée d’une hausse d’inflation. Donc, il est utile d’avoir une politique monétaire stable pour avoir une bonne performance économique caractérisée par une inflation faible et une croissance soutenable.
Turovsky (1993) va appuyer empiriquement la conclusion selon laquelle l’instabilité de la politique monétaire engendre une détérioration des performances économiques.
En effet, il mesure la stabilité de l’environnement de la politique monétaire par un faible degré d’incertitude. Cette dernière est mesurée à son tour par la variance de la croissance monétaire. Plus la croissance monétaire est élevée, plus le degré d’incertitude est élevé et par conséquent l’environnement de la politique monétaire est considéré comme instable. Les résultats montrent que l’augmentation de la variance de la croissance monétaire engendre une mauvaise performance économique.

L’effet de l’instabilité de l’environnement de la politique monétaire sur la croissance économique

De nombreuses recherches se sont intéressées à l’effet d’un niveau d’inflation instable et volatile sur l’économie réelle et plus particulièrement sur les déterminants de la croissance pour pouvoir juger les implications de cette instabilité monétaire sur les performances économiques. Quelques contributions théoriques sont en faveur d’une relation positive entre l’inflation et la croissance de long terme. Cette relation est basée sur la hausse de l’accumulation du capital due au changement du capital réel à travers la monnaie dans le portefeuille d’investissement. D’autres études ont prouvé qu’une inflation élevée peut engendrer une baisse de l’accumulation du capital et par la suite une réduction de la participation à l’emploi. En effet, une inflation élevée engendre une hausse du taux d’intérêt.
Ceci pousse les agents à accroître leur épargne. Dans le cas où le taux d’intérêt augmente proportionnellement à l’inflation, le taux d’intérêt réel reste constant. Une inflation élevée peut affecter le niveau du capital désiré et d’autres facteurs de production.
Les résultats théoriques dépendent fondamentalement de la manière dont la fonction de la monnaie est introduite. Pour voir plus en détail l’impact de l’inflation sur la croissance économique et ses déterminants, nous devons faire intervenir la notion de monnaie. Cette dernière est l’un des actifs détenus par les agents économiques dans leurs portefeuilles où figurent d’autres actifs, tels que les dépôts de l’épargne, le capital physique, les actions…Une inflation élevée réduit le pouvoir d’achat d’un stock de monnaie, et par conséquent réduit les incitations à détenir la monnaie. Dans le cas où les agents économiques voudraient continuer à investir le même montant, leur comportement d’investissement va se modifier. En effet, ils n’investissent plus dans la détention de monnaie en raison de cette inflation élevée mais ils vont se trouver dans la situation où ils augmentent leurs avoirs dans les autres actifs tels que le capital au détriment de la détention monétaire. On conclut selon ce raisonnement qu’une inflation élevée peut conduire les agents économiques à accumuler plus de capital dans leur portefeuille d’investissement. Ce phénomène est connu sous le nom de l’effet de Tobin. Selon ce raisonnement, on déduit qu’une inflation élevée augmente l’accumulation du capital.
Cet effet de la monnaie dans la théorie de croissance a été introduit dans différentes recherches basées sur des modèles néoclassiques (Tobin, 1965, Levhari et Patinkin, 1968 ; Stockman, 1981…) ce qui a aboutit au raisonnement expliqué cidessus.
Par exemple, Tobin (1965) considère un problème d’allocation de portefeuille entre capital et monnaie. Etant donné une baisse de la productivité marginale du capital, les individus ajustent leurs portefeuilles jusqu’au moment où les taux de rendement marginaux du capital égalisent celui de la monnaie. Ceci implique une substitution du portefeuille résultant d’une augmentation du stock du capital et une baisse de la quantité d’encaisse réelle.
Nous avons montré les mécanismes selon lesquels une inflation élevée engendre une hausse dans l’accumulation du capital. Dans ce qui suit, nous allons montrer qu’une inflation élevée peut conduire aussi à une baisse de l’accumulation du capital.

Effet d’instabilité de la politique monétaire sur la performance économique.

La question de l’effet de l’instabilité de la politique monétaire sur la performance économique a fait l’objet de différentes recherches empiriques. Parmi les recherches récentes, nous citons celle de Beaudry et al. (2001). Ils ont observé l’effet de l’instabilité de l’environnement de la politique monétaire sur le taux de distribution d’investissement. Leur idée est que le taux de distribution d’investissement, l’un des principaux déterminants de la croissance, est influencé négativement par l’instabilité de l’environnement de la politique monétaire. En effet, dans le cas où la distribution des investissements est très faible et ne touche pas une large proportion des firmes, ceci va affecter la croissance économique et le développement en général. Par conséquent, nous aurons une mauvaise performance économique. Dans le but de tester empiriquement cette intuition, les auteurs ont présenté un modèle qui leur a permis de voir l’effet de cette instabilité monétaire sur le contenu informationnel des prix sur l’allocation d’investissement. Beaudry et al. (2001) ont mesuré l’instabilité de la politique monétaire par le degré d’incertitude relatif à celle-ci. Empiriquement, l’incertitude relative à l’environnement de la politique monétaire est mesurée par la volatilité d’inflation. Ils utilisent des donnés de panel pour construire deux tests afin d’évaluer l’hypothèse selon laquelle l’incertitude affecte la distribution en coupe transversale de l’investissement, à travers son effet sur le contenu informationnel des prix. Beaudry et al. (2001) ont testé cette hypothèse sur des firmes anglaises durant la période de 1961 à 1990. Le premier test consiste à examiner si l’incertitude de l’inflation peut expliquer les variations en coupe transversale de la distribution de l’investissement. Le deuxième test consiste à identifier une relation négative entre la variance d’investissement et la variation du taux de profit.
Pour illustrer comment l’incertitude de la politique monétaire affecte l’allocation des investissements à travers son effet sur le contenu informationnel des prix, les auteurs se sont intéressés aux variations dans la prévisibilité de la politique monétaire comme source de changement du contenu informationnel du signal de marché. Ils ont représenté un modèle similaire à celui de Lucas (1973) en mettant l’accent sur l’investissement au lieu du facteur  » travail « . Nous allons expliciter le modèle de cette étude pour mieux voir l’effet de l’instabilité de la politique monétaire.

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