Planification de mouvement pour tiges élastiques
Planification de mouvement pour le prototypage virtuel
Le prototypage virtuel est à présent couramment utilisé dans des domaines comme l’automobile et l’aéronautique et il permet de concevoir et de dimensionner à moindre coˆut des systèmes complexes. Grˆace à l’apparition de la Conception Assistée par Ordinateur (CAO), l’industriel dispose de maquettes numériques de systèmes telles que des avions composés de plusieurs dizaines de milliers de pièces et de plusieurs centaines kilomètres de tiges flexibles. Cependant, malgré de tels outils, les études d’assemblage de tels systèmes (cf. figure 1) ne peuvent plus ˆetre entièrement effectuées par un opérateur humain. Les méthodes de planification de mouvement constituent alors un outil capable d’aider l’homme à répondre aux questions suivantes : — Est-il possible d’assembler ou désassembler de tels systèmes ? — Quelles sont les séquences de mouvement à appliquer sur les différentes pièces pour réaliser l’opération d’assemblage ou de désassemblage ?Or, les méthodes de planification actuelles ne permettent que de considérer les pièces rigides. Jusqu’à présent, les composants de type tiges flexibles étaient assimilés à des pièces rigides ou ignorés. Le projet Flecto, financé par l’Agence Nationale de la Recherche, a pour objectif de répondre à ce besoin (cf. [Roussel 15c]). Le consortium du projet est composé du CEA-LIST, de Siemens-Kineo et du LAAS-CNRS. Le CEA-LIST dispose du simulateur physique eXtended Dynamic Engine (XDE) capable de simuler des tiges flexibles en temps réel. D’un autre coté, la société Siemens- xix Kineo a développé une solution logicielle implémentant les méthodes de planification de mouvement. Un des objectifs de cette thèse, dans le cadre du projet Flecto, consiste à étudier les possibilités d’intégration du simulateur XDE avec ces méthodes de planification. Plus particulièrement, nous nous intéressons au cas d’assemblage ou de désassemblage d’une tige flexible dans un environnement composé de pièces rigides. Ce projet a permis au groupe Gepetto de démarrer cette nouvelle activité de recherche. Dans de telles applications, il est généralement nécessaire que les pièces ne soient pas endommagées durant l’opération. Pour des pièces déformables, nous nous limitons aux déformations réversibles, c’est à dire au domaine de l’élasticité. La problématique traitée dans cette thèse consiste à étendre les méthodes de planification de mouvement à des tiges élastiques manipulées à leurs extrémités par des pinces robotiques (cf. figure 2).
Planification de mouvement
Le problème de la planification de mouvement a été étudié par de nombreuses communautés sous différents aspects. Il est à présent clairement formulé et est le sujet de plusieurs ouvrages de référence dans le domaine [Choset 05, LaValle 06, Latombe 91]. L’exemple le plus classique est connu sous le nom du Problème du déménageur de piano : peut-on déplacer un piano (un objet géométrique rigide) d’une position et orientation initiale (appelée situation initiale) à une position et orientation finale (situation finale) sans collision avec l’environnement ? Cette problématique s’étend aux systèmes mécaniques articulés (e.g. bras manipulateurs, robots humano¨ıdes), rigides ou déformables ou encore multi-systèmes (e.g. une flotte de robot mobiles). De fa¸con plus générale, pour un système mécanique quelconque appelé robot, le problème de planification de trajectoires entre une situation initiale et finale du robot dans un environnement contenant des obstacles consiste à trouver une séquence continue de situations sans collision permettant de relier les deux situations. Il a été montré dans [Reif 79] que ce problème est NPdifficile. Bien souvent, le système mécanique est soumis à des contraintes et nous recherchons alors une séquence continue valide, c’est à dire respectant les contraintes du systèmes et sans collision avec l’environnement. Alors que la définition initiale du problème restreint la recherche de solution à un espace reflétant la géométrie du problème, nous pouvons étendre la recherche à l’espace représentant l’ensemble des états que peut prendre le système, que nous nommerons espace d’états de fa¸con générale. Dans cette section, nous allons introduire les notions de base ainsi que les principales méthodes utilisées en planification de mouvement.
Les transformations rigides
Les transformations rigides, i.e. qui préservent les distances entre les points, sont un élément essentiel de l’étude du mouvement d’objets rigides. Nous verrons que ces transformations apparaissent régulièrement pour la représentation des situations des robots et que les outils mathématiques utilisés pour l’étude du mouvement de corps rigides s’étendent aux corps déformables. Parmi eux, les groupes de Lie spécial orthogonal SO(n) et spécial euclidien SE(n) constituent un outil sur lequel nous nous appuierons tout au long de cette thèse. Le lecteur intéressé pourra consulter [Murray 94] pour plus de détails sur l’ensemble du formalisme mathématique utilisé. Par la suite, les transformations rigides dans R 3 , qui peuvent ˆetre représentées par une orientation et translation dans R 3 , et qui sont des éléments du groupe de Lie SE(3) seront nommées position 6D. A défaut, le terme position employé seul désigne uniquement la partie en translation.
L’espace des configurations
Un concept essentiel qui a permis un développement majeur des recherches en planification de mouvement est celui d’espace des configurations [Lozano-Perez 83], noté C. Celui-ci consiste en l’ensemble des configurations d’un système, o`u chaque configuration décrit de fa¸con unique la géométrie du système. Une configuration est décrite par un vecteur q contenant ses n degrés de liberté indépendants. L’espace des configurations est alors généralement une variété de dimension n. Il permet une abstraction du problème, indépendante du système et de l’environnement considérés, grˆace à un formalisme général. Nous pouvons en voir un exemple sur la Figure 1.1. Notons que les espaces des configurations peuvent ˆetre composés entre eux grˆace au produit cartésien, e.g. un espace des configurations égal à un tore de dimension 2 est définit par T 2 = S 1 × S 1 . L’ensemble des configurations libres de collisions forme un ouvert noté Cfree. La notion de configuration en collision concerne typiquement la collision avec l’environnement mais peut aussi inclure selon le contexte l’auto-collision. Par définition, le complément de Cfree, noté Cobs, est un fermé et consiste alors en l’ensemble des configurations en collision (cf. Figure 1.2). Notons qu’une configuration libre de collision n’autorise pas le contact.
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