Place du médecin généraliste dans le parcours de soins d’enfants en difficultés scolaires
Les troubles spécifiques des apprentissages
Selon un rapport « Scolariser les enfants présentant des troubles des apprentissages » publié en 2012 par le Ministère de l’Education Nationale, les troubles des apprentissages sont définis comme suit (5) : « Les troubles des apprentissages correspondent à une atteinte durable et persistante affectant une ou plusieurs fonctions cognitives. Ces troubles cognitifs neurodéveloppementaux perturbent l’acquisition, la compréhension, l’utilisation et le traitement de l’information verbale ou non verbale. Ils ne s’expliquent pas par des facteurs externes. Ils surviennent chez un enfant d’intelligence normale, et normalement scolarisé. Les troubles des apprentissages ne résultent pas : d’une mauvaise formation scolaire, ni d’un contexte familial défaillant ni d’un manque de volonté d’apprendre. Ils doivent être distingués de la « simple » difficulté. » En France, la prévalence des troubles spécifiques des apprentissages est comprise entre 2 % et 10 %, selon les modalités d’évaluation et les définitions employées. Ces troubles doivent être différenciés des variations de la norme concernant les réalisations scolaires et de difficultés scolaires dues à l’absence des conditions nécessaires au travail, à un mauvais enseignement ou à des facteurs culturels. (6) Pour les professionnels de santé, l’enjeu est de détecter le plus précocement possible ces troubles. De réels progrès dans le diagnostic des enfants ont été observés depuis 15 ans.
✓ Le trouble spécifique du langage écrit ou dyslexie
Parmi les troubles spécifiques des apprentissages, le trouble de la lecture ou dyslexie est de loin le mieux exploré ; il a donné lieu au plus grand nombre de travaux et de définitions. D’une façon générale, la dyslexie est définie comme un trouble de l’identification des mots écrits. Rutter écrivait en 1978 que « la dyslexie est un trouble manifesté par une difficulté à apprendre à lire, malgré un enseignement conventionnel, une intelligence adéquate et un bon environnement socioculturel. » Il existe deux « voies de lecture » que le normo-lecteur utiliserait simultanément. La première, dite « voie phonologique » (ou d’assemblage), est celle que l’on utilise lors du déchiffrage syllabique. La seconde voie de lecture est dite « voie lexicale » (ou d’adressage). Elle est utilisée lorsqu’un mot est reconnu instantanément par son aspect visuel, cet aspect étant 5 censé être fixé et stocké dans un lexique orthographique interne. On décrit actuellement plusieurs types de dyslexies selon que l’une et/ou l’autre des deux voies de lecture est atteinte. Ainsi, schématiquement, on parle de dyslexie phonologique, de dyslexie de surface et de dyslexie mixte. Il s’agit du trouble spécifique des apprentissages le plus fréquent. (7) Entre 3 et 5 % des enfants seraient concernés. Il fait souvent suite à un trouble du langage oral et est très souvent associé à la dysorthographie.
✓ Le trouble spécifique du langage oral ou dysphasie
Ces troubles sont définis par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme « troubles dans lesquels les modalités normales d’acquisition du langage sont altérées dès les premiers stades du développement. Ces troubles ne sont pas directement attribuables à des anomalies neurologiques, des anomalies anatomiques de l’appareil phonatoire, des altérations sensorielles, un retard mental ou des facteurs de l’environnement. Les troubles spécifiques du développement de la parole et du langage s’accompagnent souvent de problèmes associés, tels des difficultés de la lecture et de l’orthographe, une perturbation des relations interpersonnelles, des troubles émotionnels et des troubles du comportement. » Le terme de «dysphasie » est apparu vers 1960 (8), terme qui permet de mieux cerner le fait que ce trouble ne se caractérise pas par une absence de langage, mais par son utilisation déficitaire. Il fait suite au terme d’« aphasie acquise ». (9) La dysphasie est à différencier d’une lésion cérébrale acquise, comme dans l’aphasie de l’adulte. Cela va amener certains auteurs à utiliser le terme de « dysphasie de développement». Il s’agit ainsi d’un trouble grave et persistant du langage oral. Actuellement, la terminologie « dysphasie » n’est plus guère utilisée dans la littérature anglosaxonne. Elle a été remplacée par l’appellation « trouble spécifique du langage » ou « specific language impairment » (SLI). Chez le jeune enfant avec un trouble du langage oral se pose initialement le problème des diagnostics différentiels : surdité, retard simple de langage, déficience mentale, trouble envahissant du développement. Il existe des liens importants entre troubles du langage oral et troubles du langage écrit : un peu plus de la moitié des troubles spécifiques du langage oral évoluent vers des troubles du langage écrit. De même, un peu plus de la moitié des dyslexiques présentent aussi des troubles résiduels du langage oral. (10) 6 Les difficultés du langage oral sont également souvent associées, à des degrés divers, à des difficultés praxiques.
✓ Dyspraxie ou Trouble de l’Acquisition et de la Coordination (TAC)
L’OMS a répertorié, dans la dixième révision de la Classification Internationale des Maladies (CIM 10) le « trouble spécifique du développement moteur ». Il comprend la « débilité motrice de l’enfant », la « dyspraxie de développement » et le « trouble de l’acquisition de la coordination ». Ce trouble est défini comme une « altération sévère du développement de la coordination motrice, non imputable exclusivement à un retard mental global ou à une affection neurologique spécifique, congénitale ou acquise ». (11) Sur le plan scolaire, la dyspraxie est directement responsable : (12) – D’anomalies graphiques (écriture, dessins) ; – De difficultés d’utilisation des « outils » scolaires (règle, ciseaux, compas, rapporteur, etc) ; – De troubles d’organisation spatiale : analyse, copie, réalisation et comparaison de signes orientés, de tableaux à double entrée, de schémas ou graphiques, de cartes, plans et figures géométriques, d’algorithmes spatiaux liés à la numération de position (pose et résolution des opérations) générant une dyscalculie spatiale ; – De difficultés transversales d’organisation (disposition, rangement, classement, présentation) dans la page, la feuille, la trousse, le classeur ou le cartable. La dyspraxie peut également être indirectement responsable à moyen terme d’un échec scolaire global, car elle génère en permanence une situation délétère dite de « double tâche ». En effet, l’enfant ne peut pas automatiser les tâches practo-spatiales (dessin des lettres lors de l’écriture par exemple) ; il les réalise alors en mobilisant ses ressources attentionnelles de façon excessive pour tenter de contrôler (lentement et maladroitement) son geste ; de ce fait, il est en situation de « surcharge cognitive » et ne dispose plus de ressources suffisantes pour effectuer simultanément les tâches dites « de haut niveau » (écoute de l’enseignant, compréhension, mémorisation, attention à l’orthographe, planification des idées et des phrases lors de l’expression écrite…), qui sont pourtant l’essence même des objectifs scolaires.
✓ Le trouble spécifique d’apprentissage du calcul ou dyscalculie
En général, le terme de dyscalculie développementale se réfère à un trouble des compétences en mathématiques présent chez des enfants avec une intelligence normale.
I. Introduction |