Place des prothèses transcordales dans la prise en charge des sténoses laryngo trachéales bénignes
Les sténoses trachéales bénignes sont d’étiologies multiples : post-intubation endotrachéale ou post-trachéotomie dans 90% des cas, post-chirurgicale, caustique, post-radique, traumatique ou idiopathique . La prise en charge des sténoses trachéales sous-glottiques (sous le cartilage cricoïde) bénignes symptomatiques repose en première intention sur une prise en charge chirurgicale définitive, par résection en manchon trachéo-trachéale ou crico-trachéale si la longueur de la sténose le permet. Le taux de succès rapporté est de l’ordre de 70 à 94%, associé à une mortalité périopératoire de 1,5 à 9% [2-7]. Au-delà d’une certaine longueur, un remplacement trachéal s’impose mais ces techniques ne sont pas encore bien codifiées, ni suffisamment répandues. La place de l’endoscopie reste donc incontournable car elle représente la première ligne de traitement, avant la chirurgie, en cas de détresse respiratoire aigüe. Elle est aussi, dans la grande majorité des cas, le traitement définitif des sténoses simples (sans atteinte des cartilages trachéaux) [8, 9] et elle s’avère un traitement efficace dans près de 70% des cas des sténoses complexes (avec atteinte des anneaux cartilagineux) [8, 10-14] pour les patients dont la prise en charge chirurgicale a été contre-indiquée, le plus souvent en raison de comorbidités sévères. Cette prise en charge endoscopique associe une dilatation mécanique (tubes rigides, ballons) suivi de la pose d’une endoprothèse retirable, silicone ou métalliques auto-expansibles toutes couvertes [15]. Le défaut principal des prothèses est leur taux relativement élevé de migration dans cette indication [10,12,14], a fortiori lorsque la sténose est très proche des cordes vocales. La recommandation est de laisser une marge de trachée libre de 10 mm entre la haut d’une prothèse et les cordes vocales en raison du risque de douleur et d’œdème laryngés pouvant entrainer une détresse respiratoire aigüe gravissime car l’intubation ou la trachéotomie pourraient s’avérer impossibles en raison de la présence de la prothèse. La spécificité et la complexité des sténoses trachéales très haut situées (moins de 20 mm des cordes vocales), englobant le cartilage cricoïde, est qu’il est impossible de placer une prothèse en raison de l’absence de marge de sécurité entre prothèse et cordes vocales. Il en résulte que le traitement endoscopique se limite le plus souvent à une simple dilatation avec un taux élevé de récidive. Il en est de même pour les sténoses glottiques associées à une atteinte sous glottique, dont la prise en charge repose souvent sur la réalisation d’une trachéotomie définitive, pour court-circuiter la sténose. La pose de prothèses en silicone entre les cordes vocales a déjà été décrite [16-18]. Les deux principales indications résident dans les troubles de déglutition ou dans le calibrage laryngé au décours d’une intervention chirurgicale du larynx. Très peu de patients ont été traités de la sorte pour des sténoses laryngotrachéales bénignes (SLTB) [16-18]. L’objet de cette étude rétrospective est de rapporter l’expérience de deux centres français dans la mise en place de prothèses transcordales (PTC) en silicone dans la prise en charge de sténoses bénignes de la région glottique, d’en évaluer leur tolérance, leur efficacité ainsi que de préciser le devenir des patients traités.
Matériel et méthodes
Nous avons réalisé une étude rétrospective, observationnelle, sur dossiers, dans deux centres médicaux français, après accord des comités d’éthiques locaux respectifs : – Service d’ORL du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Strasbourg (France) – Service d’Oncologie Thoracique, Maladies de la Plèvre et Pneumologie Interventionnelle du Centre Hospitalo-Universitaire de Marseille (France). Ont été inclus tous les patients majeurs ayant bénéficié de la pose d’une PTC en silicone de type Dumon droite (Novatech GSS TD®, Novatech SA, La Ciotat France) ou en sablier (Novatech GSS ST®, Novatech SA, La Ciotat France) ou d’un tube en T de Montgomery (Montgomery SafeT-Tube®, Boston Medical Products, Shrewsbury, MA, USA) (figure 1) pour la prise en charge d’une SLTB de Janvier 2001 à Juin 2017.
Les critères d’exclusions étaient représentés par le caractère malin de la sténose, les patients traités par PTC pour fausses routes et tout patient traité par prothèse en silicone dont l’extrémité supérieure ne dépassait pas les cordes vocales. Le recueil des données a été effectué sur dossier médical et s’est concentré essentiellement sur plusieurs points : – les caractéristiques de la sténose (longueur, localisation, degré d’obstruction), – les spécificités de la prise en charge endoscopique et notamment les caractéristiques des prothèses placées, – la tolérance clinique des prothèses : -absence ou présence de douleur ? -absence ou présence de toux ? Matériels et méthodes : 7 -existence de troubles de la déglutition ? -existence de granulomes ? -obstruction prothétique par sécrétions ? -migration de la prothèse ? – le devenir des patients avec notamment les possibilités de retrait définitif de la prothèse, La technique de mise en place des prothèses diffère dans les deux centres : – A Strasbourg, la mise en place de la prothèse est effectuée sous anesthésie générale, lors d’une laryngoscopie en suspension. La prothèse (en sablier ou tube en T) est placée, à l’aide d’une pince à corps étranger, au travers de la lumière laryngée, de sorte que sa partie médiane (plus petit diamètre) soit positionné au niveau du cartilage cricoïde et que son extrémité supérieure soit située au minimum en regard du plan des aryténoïdes (figure 2). L’idéal étant de le positionner légèrement au-dessus de ce plan. Un fil de rappel est inséré sur la prothèse, à sa partie proximale, afin de pouvoir la retirer rapidement en cas de problème et permettre une ré-intubation aisée. Le fil est enlevé en fin d’intervention. En cas de difficultés de positionnement, une trachéotomie temporaire est réalisée pour faciliter la pose puis est fermée en fin d’intervention .
1) Résumé |