PERSPECTIVE DYNAMIQUE DE L’ENTITE COMPTABLE

PERSPECTIVE DYNAMIQUE DE L’ENTITE COMPTABLE

MOBILITE DES FRONTIERES SPATIO-TEMPORELLES

Comme il a été vu plus haut, deux conventions fondamentales sont à l’origine du découpage spatial et temporel de l’entité comptable, la convention de patrimonialité (§ 1) et la convention d’annualité (§ 2)357 . § 1 – Dynamique de la convention de patrimonialité Nous savons maintenant que la convention de patrimonialité apporte une réponse à l’incertitude relative au bornage de l’entité ; où commence l’objet à compter, où s’arrête-t-il ? Même s’il n’est pas consciemment perçu, un tri est réalisé permettant de circonscrire l’espace de la mesure. Aussi, la convention sur laquelle repose ce tri n’est en rien figée, sa structure pouvant évoluer en fonction des pressions auxquelles elle est soumise. 

L’alternative

La patrimonialité (recension de droits de propriété, de droits de créances et d’obligation envers les tiers) n’est pas le seul critère permettant de sélectionner les éléments à inclure dans les contours de l’entité comptable. D’autres critères sont envisageables comme le contrôle (ou la dépendance) économique par exemple ; à l’évidence, leur adoption ne serait pas sans effet sur les frontières spatiales de l’entité comptable.

Différents faits et objets, aujourd’hui exclus, y trouveraient un droit de cité : les biens financés par crédit-bail, les « satellites » en état de totale dépendance économique, mais aussi les éléments, qui pour des raisons stratégiques, ont été logés dans des « véhicules » indépendants dont on garde en réalité la maîtrise. Plusieurs facteurs pourraient contribuer à promouvoir ce type conventions rivales, apportant parlà, une solution partielle aux dysfonctionnements décrits dans la première partie. 

Facteur d’émergence : le contact

Le rapprochement de deux populations est un facteur certain d’évolution, notamment dans le domaine des pratiques comptables. Il est clair qu’en allant se financer sur des marchés étrangers, anglo-saxons en l’occurrence, les entreprises françaises sont invitées à adopter de nouvelles conventions qui constituent autant d’alternatives lorsqu’elles en rapatrient les discours sur leur territoire d’origine. L’enregistrement du contrat de crédit-bail en est un exemple frappant ; le fait que nos voisins anglo-saxons procèdent à un enregistrement « économique » de l’opération tend à légitimer, et partant à renforcer ce qui pour nous représente une alternative.

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Au niveau des comptes consolidés, la convention a d’ailleurs réagi en autorisant de façon optionnelle ce type d’enregistrement. Pour ce qui est des comptes individuels, la convention établie résiste encore359. Mais jusqu’à quand ? C’est encore le contact avec les normes américaines qui peut contribuer à faire émerger une alternative à l’égard du traitement comptable de certaines opérations d’ingénierie financière (portage, titrisation et autre lease-back)

Facteur d’émergence : la réglementation publique

Est-il utile de le rappeler, la réglementation publique n’est, dans bien des cas, (qui plus est, dans le domaine de la comptabilité), qu’un paravent qui occulte différentes sources de contribution. Toutefois, son rôle est important, puisqu’en prenant le relais d’autres facteurs d’émergence comme la dissidence ou l’intention stratégique : – elle contribue au renforcement de la conviction d’une adoption généralisée, – elle participe à la diffusion du nouveau discours, – et fige ce qui devient progressivement une pratique généralisée.

Concernant la convention de patrimonialité, une intervention de la réglementation publique spécifiant un autre critère d’inclusion dans les frontières de l’entité, aurait un effet hautement déstabilisant pour la vieille convention ; toutefois, rien n’assure à l’alternative ainsi proposée une adoption garantie. La pratique comptable est un long convoi qu’on ne saurait dévier de sa trajectoire par simple décret… Il faut aussi signaler que la pratique comptable n’évolue pas dans un univers d’information unidirectionnelle et parfaite.

Pour véhiculer les messages de la convention, nous avons vu précédemment, que les textes qui réglementent la comptabilité, ne représentent qu’un des moyens de transmission parmi d’autres. De surcroît, ceux-ci ne sont pas forcément portés à la connaissance des praticiens ; ainsi, lorsque les professionnels que nous avons interrogés, ont, dans leur plus grande majorité (89 %)360, reconnu que la propriété juridique était le critère qui permettait d’activer les éléments dans le bilan, ils n’ont été que 38 % à penser qu’un texte le précisant figurait dans la loi comptable, et encore moins à connaître ce texte (4 %)361 .

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