Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de dérive en fréquence observée lors d’une modulation
Les relations de « Kramers-Kronig »
Dans les conditions de régime stationnaire, la réponse d’un milieu solide lors de l’application d’un champ électrique E est gouvernée par la susceptibilité complexe c définie par : P = e 0c n )( E (1.19) où ε0 est la permittivité dans le vide et P est la polarisation électrique du milieu qui représente phénoménologiquement les effets des transitions optiques des porteurs à une fréquence donnée. Les relations de « Kramers-Kronig » relient les parties réelle et imaginaire de la susceptibilité diélectrique complexe d’un milieu. La susceptibilité complexe c est généralement dépendante de la fréquence n et est exprimée par [34]: La partie réelle c ’ (n) et imaginaire c » (n) sont reliées de la manière suivante: Ú • – (1.22) Les équations (1.21) et (1.22) forment les relations de « Kramers-Kronig » où Ã désigne la valeur principale de Cauchy de l’intégrale. Les relations montrent que la connaissance du comportement de l’une des quantités sur tout le spectre permet la détermination de l’autre. Le vecteur d’onde complexe s’écrit par: ‘ » K = K + jK (1.23) avec c n K w ‘ ‘ = (1.24) et c n K w » » = (1.25) 1.4. Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de déviation en fréquence 37 où ω représente la fréquence angulaire, c est la célérité de la lumière et ~ ‘ » n = n – jn est l’indice de réfraction complexe. Le champ optique qui se propage dans le milieu solide est donné par (1.26) L’équation (1.26) devient alors: (1.27) Durant la propagation le module du terme ‘ exp est constant tandis que l’expression réelle ˜ ˜ ¯ ˆ Á Á Ë Ê – z c n w » exp décrit le gain ou l’absorption du système selon le signe de » n . En effet, l’intensité lumineuse i qui se propage dans le milieu solide est exprimée par : exp(( ) ) 2 exp 0 » 0 2 z i g z c n i E i = – × ˜ ˜ ¯ ˆ Á Á Ë Ê ª = – a w (1.28) avec g et α sont respectivement le coefficient de gain et de perte du milieu en intensité. A partir des équations de Maxwell, l’équation de propagation de l’onde pour le champ électrique E pour un milieu permanent, infini et homogène est donnée par [34]: ( ) 0 2 2 2 ‘ = ˙ ˙ ˚ ˘ Í Í Î È ˜ ¯ ˆ Á Ë Ê — + + E c E n w c (1.29) dont les solutions canoniques sont des ondes planes telles que décrit par l’équation (1.26). En remplaçant l’équation (1.26) dans (1.29), l’expression du vecteur d’onde K(ω) complexe devient [34]: ( ) ‘2 ( ) ‘2 ‘ ( ) c w c w w w m cn e j c cn n K = + ¬ + £ (1.30) A partir de cette équation, nous observons que la susceptibilité électrique du milieu est équivalente à un changement d’indice de réfraction Δn’ et d’amplification (ou d’absorption) : ‘ ‘2 1 ( ) ‘2 1 ‘ c c n e n Dn = ¬ = (1.31) » ‘ c w a cn g – = – (1.32)
Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de déviation en fréquence
D’après les relations de « Kramers-Kronig » (équations (1.21) et (1.22)), les parties réelle et imaginaire de l’indice de réfraction sont donc interconnectées. Précisément, un petit changement de la partie imaginaire peut entraîner un changement dans la partie réelle de l’indice.
Cas des lasers à semi-conducteurs
Au dessus du seuil, le couplage de l’émission spontanée au mode laser entraîne des fluctuations d’amplitude de l’onde émise induisant des fluctuations additionnelles de phase. Ceci est dû au couplage de gain et de l’indice de réfraction optique à travers la densité de porteurs. Cet effet non linéaire affecte les propriétés dynamiques des lasers à semiconducteurs. Pour quantifier cet effet particulier, Henry introduit le facteur de couplage phase-amplitude d’un matériau semi-conducteur en régime petit-signal [35]: représentent la dépendance à la densité de porteurs des parties réelle et imaginaire de la susceptibilité diélectrique à l’endroit considéré. De même façon, ‘ ¶n et » ¶n désigne la dépendance à la densité de porteurs des parties réelle et imaginaire de l’indice de réfraction, g est le gain par unité de longueur, λ est la longueur d’onde d’émission, N est la densité de porteurs et ω est la fréquence angulaire de la porteuse. Le signe « – » dans l’équation (1.35) permet de s’assurer que le facteur de couplage phase-amplitude est toujours positif étant donné que l’indice de réfraction diminue avec l’augmentation de la densité de porteurs pour un laser FP. Pour le cas des lasers DFB, l’inhomogénéité de la densité de photons dans la cavité entraîne une variation longitudinale des porteurs et du couplage entre la phase et l’amplitude de l’onde. Cette variation locale du couplage du matériau (αH(z))) est souvent modélisée par la définition d’un facteur de couplage phase-amplitude effectif «αeff» pour l’ensemble du laser 1.4. Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de déviation en fréquence 39 qui tient compte aussi des effets de la déviation de la longueur d’onde du mode laser par rapport à la longueur d’onde de Bragg. Pour le cas d’une modulation petit-signal, l’introduction du facteur de couplage phaseamplitude est nécessaire pour modéliser les phénomènes suivants: les non-linéarités spatiales ou le spatial hole burning (SHB), la dérive en fréquence (chirp), la sensibilité à la rétroaction optique externe et la largeur de raie du laser. Le régime grand-signal sera étudié par le moyen d’une méthode numérique qui sera présentée dans le deuxième chapitre pour modéliser le comportement du laser dans le temps et l’espace.
Cas des modulateurs EAM
Le changement de l’indice de réfraction Δn’ en fonction de la longueur d’onde du signal à l’entrée du modulateur λsignal et de la tension appliquée V est calculé à l’aide des relations de « Kramers-Kronig » (équation (1.33)): ‘ 0 2 2’ ‘ 2 2 ‘ ( , ) 2 ( , ) l l l a l p l l d V n V signal signal signal Ú • – D D = Ã (1.36) avec ),( ),( ,( ) ‘ ‘ ‘ Da l V =a l V -a l V +dV (1.37) Le profil spécifique du spectre d’électro-absorption pour plusieurs tensions de polarisation en conjonction avec différentes longueurs d’onde d’opération gouverne le signe et l’amplitude du changement de l’indice de réfraction Δn’. Ceci est illustré dans la figure 1.18. Dans la figure 1.18, λAB représente la longueur d’onde à laquelle Δα(λAB,V) = 0 (équation (1.37)) et λsignal est la longueur d’onde d’opération. Les régions A, B et C représentent les valeurs de l’intégrale de Kramers-Kronig (équation (1.36)) dans différents intervalles de longueurs d’onde ([0 λAB] pour A, [λAB λsignal] pour B et [λsignal +∞] pour C). Les régions A et C (rouge) contribuent par des valeurs négatives dans l’intégrale de KramersKronig alors que la région B (verte) amène une contribution positive. Le changement de l’indice de réfraction avec la longueur d’onde d’opération λSignal est proportionnel à la somme des contributions issues des trois régions A, B et C. La contribution des changements d’absorption qui se produisent loin du bord de la bande devient de plus en plus négligeable
Relation entre la modulation d’intensité et la modulation de fréquence
Dans le paragraphe précédent, la définition du facteur de couplage phase-amplitude αH a été introduite. La définition est toujours valable quelles que soient les propriétés du matériau semi-conducteur à savoir le changement de l’indice de réfraction complexe de la région active. Cependant, dans un dispositif fabriqué, nous observons les effets de ces changements en termes de quantités mesurables. Le changement de la partie réelle de l’indice se traduit par un changement de phase aboutissant finalement à une dérive en fréquence. Le changement de la partie imaginaire se traduit par une variation finie de la puissance émise. 1.4. Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de déviation en fréquence 42 1.4.2.a. Cas des lasers à semi-conducteurs Pour déduire la relation entre la modulation d’amplitude et la modulation de fréquence dans un laser à semi-conducteurs modulé directement par son courant de polarisation, on commence, dans un premier temps, par un modèle simple mono-section d’un laser de type Fabry Perot (FP) considéré comme spatialement homogène suivant l’axe longitudinal du guidage optique. Notons alors S et N les densités moyennes de photons et de porteurs dans la cavité. L’équation de conservation de la densité de photons moyenne S du mode laser est donnée par [8]: g g S Rsp v t S = G – + ¶ ¶ ( g ) (1.40) où Γ, vg, g, γ et Rsp sont respectivement le facteur de confinement, la vitesse de groupe, le gain matériau, les pertes optiques de la cavité et le taux d’émission spontanée couplé au mode laser. Bien que l’équation (1.40) soit appropriée pour décrire la variation temporelle de l’intensité optique, elle n’est pas adaptée pour décrire la phase optique. Afin d’analyser les caractéristiques du laser liées à la phase optique, une autre équation est nécessaire pour décrire la variation temporelle de la phase. Notant que le champ optique E dans le laser est une fonction complexe d’amplitude A et de phasef donnée par : jf E Ae- = (1.41) La variation de la fréquence angulaire ω du champ E est alors donnée par : w =w0 +dw (1.42) avec ω0 est la fréquence angulaire d’oscillation laser en un état stationnaire pris comme référence et δω est une très petite variation par rapport à ω0 donnée par: dt df dw = 2pdn = (1.43) La fréquence d’oscillation laser ω est déterminée à partir du vecteur d’onde complexe K(ω) et la condition de résonance d’un laser FP de longueur L donnée par [34]: rr 21 exp(2 jK(w L)) =1 (1.44) avec r1,2 sont les réflectivités en amplitude du laser. La condition de résonance sur la phase du champ s’écrit alors : 1.4. Origines phénoménologiques et physiques du phénomène de déviation en fréquence 43 2¬e(K(w))L = 2mp (m entier) (1.45) Dans un laser à semi-conducteurs, le champ guidé n’est pas seulement distribué dans la région active mais également dans les couches de confinement. Les valeurs efficaces de la variation d’indice et de gain pour le mode guidé sont réduites par le facteur Γ par rapport à celles déterminés par la couche active (équation (1.30)). Le vecteur d’onde complexe devient alors: ( ) 2 1 ( ) 0 ‘ a w w w = + G Dn + j G- g + c c n K (1.46) où n0 est l’indice à l’état stationnaire de référence et ‘ Dn représente le changement d’indice du mode laser par rapport à n0. En utilisant les deux équations (1.23) et (1.46), l’équation (1.45) devient : p w w n L m c c n 2 ‘ 2 0 ˜ = ¯ ˆ Á Ë Ê + G D (m entier) (1.47) Généralement ‘ Dn varie en fonction du temps dont l’expression est donnée par : Dn = Dn0 +dn ‘ (1.48) où ∆n0 la valeur de ‘ Dn à l’état stationnaire de référence. En injectant les deux équations (1.42) et (1.48) dans (1.47), nous obtenons alors: L m n c c n w w p + G D 0 = 0 0 0 (1.49) n e K n n c g d w w w w d dw 0 0 ( ( ( ))) = G- ¶ ¬ ¶ = G- (1.50) où ng = c ¶¥ (¬e(K(w))) ¶w est l’indice de groupe. En utilisant la définition du facteur de couplage phase-amplitude dans l’équation (1.35), et en injectant g g n = vc , nous obtenons : g n v g c n H gg H a d w a d w d 2 2 = – = – (1.51) En utilisant les équations (1.43), (1.50) et (1.51), la déviation en fréquence instantanée (chirp) est alors donnée par: vg g H d p a dw p dn = = G 2 4 1