Présentation générale des marais artificiels
Les marais artificiels sont généralement appelés lits à macrophytes, filtres plantés de macrophytes ou encore filtres plantés de roseaux. Le procédé d’épuration des eaux usées par marais artificiel est basé sur les connaissances scientifiques et techniques des marais naturels.
En effet, la reproduction des mécanismes épuratoires présents dans des marais naturels est mise en jeu dans les marais artificiels .
Cette partie est consacrée à la distinction des diverses architectures employées dans la filière de traitement par marais artificiels à savoir : La nature du végétal utilisé (macrophytes flottants, enracinés), Le type de flux (horizontal ou vertical), Le régime d’écoulement (bâchées, continue, en saturation ou en percolation).
Les filtres à flux horizontal : Le filtre à flux horizontal est le plus étudié et employé dans le monde. Ce type de traitement permet de répondre à de nombreuses problématiques : le traitement des eaux usées domestiques, le traitement des eaux industrielles dont la rétention des métaux lourds, la dégradation des produits xénobiotiques , le traitement des eaux usées issues de l’agriculture et de l’industrie agroalimentaire ou encore le traitement des sources non ponctuelles de pollution tels que les bassins d’orage ou le traitement du ruissellement des eaux de routes .
Deux types de structures existent : les filtres horizontaux à flux surfacique et les filtres horizontaux à flux sous surfacique.
Les filtres à flux vertical (FFV) : Cette technologie a été employée car les performances épuratoires sur la nitrification dans les filtres à flux horizontal sont faibles, généralement comprises entre 30 et 50 %. Pour remédier à cette limite de traitement, les premiers FFV non saturés ont été mis en œuvre en Europe, tout d’abord par des systèmes hybrides, puis de façon singulière .
Ces marais artificiels sont constitués de plusieurs couches de graviers dont la granulométrie est croissante suivant la profondeur du filtre. La couche surfacique (constituée de gravier oude sable) permet la bonne répartition des effluents tandis que le fond du bassin (constitué de gros graviers) permet le drainage des effluents traités. Des macrophytes sont généralement plantés en surface des FFV.
Afin d’améliorer l’abattement en DCO et DBO5, une technique d’alimentation discontinue (par bâchée) et de rotation sur plusieurs bassins a été développée. L’alimentation des FFV peut être effectuée avec un effluent secondaire ou un effluent primaire, comme dans la filière française.
Devenir des matières carbonées
Du fait de l’importance de la dégradation des matières carbonées dans les processus d’élimination de l’azote, son cycle de dégradation est d’abord présenté. La charge polluante en matière particulaire d’une eau usée domestique provient généralement de matières solides pas ou partiellement dégradées (selon le type de réseau) telles que les fèces, le papier hygiénique, etc. Entre 39 et 80 % en DCO des matières carbonées particulaires sont contenues dans les matières en suspension (MES).
L’expression de la pollution particulaire et carbonée d’un effluent domestique rejetée quotidiennement par EH s’exprime alors en fonction de l’élément considéré : 90 g MES.EH 1.j-1 ; 60 g DBO5.EH-1.j-1, 120 g DCO.EH-1.j-1. Le rapport DCO/DBO5 d’un effluent brut domestique compris entre 2 et 3 désigne un effluent dont la pollution carbonée est biodégradable.
Mécanismes physiques : Le 1er étage de la filière française dispose d’une couche de surface constituée de gravier relativement fin (Ø 2-4 mm). La filtration des particules grossières et la déposition de la matière particulaire carbonée est effectuée à la surface du 1er étage. La matière accumulée, localisée à plus de 90 % sur cet étage, augmente d’environ 15 mm par an (Groupe macrophyte et traitement des eaux, 2005). Le rôle du roseau commun, le Phragmites australis, est l’amélioration du transfert d’oxygène de l’atmosphère terrestre vers le massif de filtration par convection et diffusion moléculaire. Le facteur principal de l’élimination de la matière organique étant le degré d’oxygénation, la tige de la plante permet la création de cavités à travers la matière accumulée ce qui favorise la diffusion de l’oxygène pour le développement de microorganismes hétérotrophes dans le bassin. Mécanismes biologiques :Cette matière accumulée est un substrat de croissance pour les microorganismes hétérotrophes et macro organismes (vers, insectes, etc). Durant les périodes de repos, la biomasse microbienne permet la décomposition aérobie ou minéralisation de la matière organique accumulée . Le principal régulateur de la minéralisation est la présence d’O2, NO3-, SO42-, HCO3- . La matière partiellement minéralisée s’accumule dans les stations les plus anciennes et forme une couche de matière qui peut s’apparenter à un terreau ou un compost. Suivant le vieillissement de l’installation et l’accumulation de la matière en surface du massif, les rendements épuratoires ont tendance à augmenter .
Devenir de l’azote
L’azote présent dans les eaux usées domestiques provient essentiellement des déjections humaines. L’apport majoritaire est l’urine sous forme d’urée, d’acide urique et d’ammoniaque. La charge polluante journalière par EH d’une eau usée domestique est d’environ 10 à 15 g NTK.EH-1.j-1.
c’est-à-dire de l’azote total (NTOT) rassemblant toutes les formes d’azote jusqu’à l’azote organique ammonifiable et réfractaire (ne pouvant pas être dégradé physiquement ou biologiquement). L’azote d’un effluent domestique comprend l’azote organique (ammonifiable et réfractaire) et l’azote ammoniacal. Le regroupement de ces deux formes azotées constitue l’azote Kjeldhal (NTK). L’azote total est également employé pour désigner le regroupement de l’azote Kjeldhal et l’azote oxydé. L’azote oxydé est généralement assimilé aux nitrates (N-NO3-) et aux nitrites (N-NO2-) transformés biologiquement à partir de l’azote ammoniacal (N-NH4+) suite à l’étape de nitrification. Huit mécanismes de transformation de l’azote (physiques, biologiques ou chimiques) ont été recensés sur le 1er étage de la filière française. Les mécanismes physiques peuvent être négligés dans cette filière de traitement. Il convient de mentionner que le principal mécanisme épuratoire dans ce système est biologique et fait référence à la nitrification. La dénitrification, l’adsorption et la volatilisation de l’ammoniaque ou l’assimilation par les plantes sont inférieures à 10 %. Le mécanisme Anammox est peu étudié dans les FFV et représente un sujet de recherche à part entière .
Optimisation technologique
La dénitrification s’avère être le paramètre limitant pour un traitement optimal de l’azote sur la filière française. On distingue 3 typologies de procédés pour améliorer les performances de traitement de l’azote : l’intensification, la semi-intensification et l’extensification. Intensification :Au cours des années 2000, l’intensification des FFV a fait l’objet de nombreux travaux. Le procédé «Fill & Drain», qui consiste à mettre en charge puis à vidanger le massif de filtration de manière séquentielle, a été développé par Scott Wallace et permet une élimination de plus de 75 % en azote total. La réduction de l’emprise au sol avec l’utilisation d’un seul étage de traitement est le principal avantage de cette technique mais l’utilisation fréquente d’organes électromécaniques engendre une consommation énergétique multipliée par 7 et diminue considérablement le côté extensif de la filière roseau. Semi-intensification : La semi-intensification consiste à ajouter un dispositif de recirculation en aval d’un FFV. La technologie s’avère alors moins énergivore qu’un procédé intensif.
Des filières combinant les FFV et FHSS muni d’un système de recirculation permettent de réduire l’azote total d’un effluent domestique entre 40 % (10 cm.j-1) et 95 % (3 cm.j-1) pour un ratio de recirculation de 100 %. Dans cette configuration, l’emprise au sol de trois filtres successifs est importante.
La recirculation sur un étage d’un FFV a fait l’objet d’un suivi sur le traitement de l’azote avec un gain évident sur la nitrification et la dénitrification, avec une réduction d’environ 50% en azote total.
Extensification : L’extensification consiste à conserver la technologie actuelle. Une solution proposée consiste à mettre en charge la partie drainante d’un 1er étage vertical et permet de superposer un FFV sur un FHSS. Ce filtre « combiné » a précédemment été appliqué au système français. La faible demande énergétique et l’emprise au sol actuelle sont conservées. D’autres solutions plus conventionnelles ont été proposées en France depuis plus de dix ans, avec l’emploi de filières mixtes composées d’un FFV suivi d’un FHSS ou encore deux FFV suivi d’un FHSS. Cependant, seul un traitement partiel de l’azote a été observé sur chacune des filières dû à une carence en nitrate ou en carbone.
Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Bibliographie
1 introduction
2 Assainissement collectif en France (< 2000 EH)
2.1 Législation
2.2 Procédés de traitement
2.3 Présentation générale des marais artificiels
2.3.1 Les filtres à flux horizontal
2.3.2 Les filtres à flux vertical (FFV)
2.3.3 La filière française des marais artificiels
2.4 Conclusion
3 Elimination de l’azote sur la filière française
3.1 Devenir des matières carbonées
3.1.1 Mécanismes physiques
3.1.2 Mécanismes biologiques
3.2 Devenir de l’azote
3.2.1 Mécanismes physiques
3.2.2 Mécanismes biologiques
3.3 Optimisation technologique
3.3.1 Etude des FFV semi-intensifs et extensifs et combinaison
3.4 Conclusion
4 Elimination du phosphore par un filtre réactif
4.1 Devenir du phosphore dans un FFV
4.1.1 Mécanisme physique
4.1.2 Mécanismes physico-chimiques
4.1.3 Mécanismes biologiques
4.2 Techniques actuelles de déphosphatation
4.2.1 Utilisation des sels métalliques
4.2.2 Matériaux réactifs
4.3 Méthodes d’évaluation des matériaux
4.3.1 Batch
4.3.2 Colonne
4.3.3 Echelle pilote/Pleine échelle
4.4 Matériaux réactifs
4.4.1 Matériaux naturels
4.4.2 Produits manufacturés
4.4.3 Coproduits industriels
4.5 Présentation des différents laitiers
4.6 Généralités des mécanismes réactionnels
4.6.1 Adsorption
4.6.2 Adsorption spécifique du phosphate sur le laitier FAE
4.6.3 Précipitation
4.6.4 Précipitation du phosphate sur le laitier sidérurgique
4.7 Facteurs de contrôle : échelle laboratoire et pilote
4.7.1 Paramètres contrôlés
4.7.2 Paramètres non contrôlés
4.8 Hydrodynamique en flux saturé
4.8.1 Hydraulique
4.8.2 Traceur hydraulique et modélisation
4.8.3 Conclusion
4.9 Regénération et revalorisation des laitiers saturés en phosphore
4.9.1 Régénération
4.9.2 Revalorisation en amendement agricole
4.9.3 Revalorisation en technique routière
4.9.4 Conclusion
5 Conclusions majeures de l’étude bibliographique
Chapitre II : Optimisation du traitement de l’azote sur le 1er étage d’une filière française :
utilisation d’un média saturé et de recirculation
1 Introduction
2 Matériels et méthodes
2.1 Filtres expérimentaux
2.1.1 Site expérimental
2.1.2 Structure des FFV
2.1.3 Matériaux de garnissage
2.1.4 Alimentation/Evacuation
2.1.5 Campagne d’analyse
2.2 Analyse des solides
2.2.1 Matière accumulée en surface
2.2.2 Biomasse végétale
2.3 Suivi des performances épuratoires
2.3.1 Prélèvements
2.3.2 Paramètres physico-chimiques
2.3.3 Matière particulaire
2.3.4 Matières carbonées
2.3.5 Matières azotées
2.3.6 Calcul des rendements épuratoires
2.3.7 Bilan massique en azote
2.4 Degré d’oxygénation
3 Résultats
3.1 Caractéristique des filtres verticaux
3.2 Conditions physico-chimiques
3.3 Performances épuratoires
3.3.1 Elimination des matières particulaires et du carbone
3.3.2 Elimination de l’azote
3.3.3 Bilan massique en azote total
3.4 Profil d’oxygénation de FFV2
4 Discussion
4.1 Mécanismes d’élimination de l’azote
4.2 Influence de la couche de matière accumulée en surface
4.3 Effet de la couche saturée
4.4 Effet de la recirculation
4.5 Charge en azote traitée
5 Conclusion et recommandations techniques
Chapitre III : Utilisation de matériaux réactifs pour l’élimination du phosphore
1 Introduction
2 Matériels et méthodes
2.1 Caractérisation des matériaux
2.1.1 Matériaux
2.1.2 Composition chimique
2.1.3 Analyse granulométrique
2.1.4 Propriétés de structure
2.2 Dispositifs expérimentaux
2.2.1 Echelle laboratoire : colonne
2.2.2 Echelle pilote : filtres réactifs
2.3 Suivi des performances épuratoire
2.3.1 Prélèvements
2.3.2 Analyses physico-chimiques
2.3.3 Matières en suspension
2.3.4 Phosphore
2.3.5 Calcium réactif dissous (CaRD)
2.4 Etude des performances hydrauliques
2.4.1 Détermination des temps de séjour
2.5 Modélisation des dispositifs expérimentaux
2.6 Etude cinétique de l’enlèvement du phosphore
2.7 Etude des mécanismes épuratoires de l’enlèvement du phosphore
2.8 Etude de revalorisation en technique routière
2.8.1 Caractérisation géotechnique
2.8.2 Essais de lixiviation
3 Résultats
3.1 Caractérisation physico-chimique des matériaux
3.1.1 Composition chimique
3.1.2 Granulométrie
3.1.3 Propriétés de structure
3.2 Echelle laboratoire
3.2.1 pH
3.2.2 Performances épuratoires
3.2.3 Performances hydrauliques
3.2.4 Cinétique d’élimination du phosphore
3.2.5 Mécanismes épuratoires
3.3 Echelle pilote
3.3.1 Paramètres physico-chimiques
3.3.2 Performances épuratoires
3.3.3 Performances hydrauliques du filtre F4
3.3.4 Cinétique d’élimination du phosphore
3.3.5 Mécanismes épuratoires
4 Discussion
4.1 Matériaux réactifs
4.2 Echelle laboratoire
4.2.1 Capacité d’accumulation en phosphore
4.2.2 Effet de la nature de l’effluent traité
4.2.3 Influence du mélange des matériaux
4.2.4 Effet de l’accumulation en phosphore sur le comportement hydraulique
4.3 Echelle pilote
4.3.1 Influence de la température
4.3.2 Performances épuratoires annuelle
4.3.3 Revalorisation du laitier saturé en phosphore
4.4 Confrontation de l’échelle laboratoire et de l’échelle pilote
4.4.1 pH et calcium
4.4.2 Mécanismes épuratoires
4.4.3 Modèle hydraulique et cinétique
4.4.4 Temps de séjour
5 Conclusion et perspectives
Conclusion générale
Références
Annexes