LES JEUNES ET LE LOGEMENT SOCIAL, DEUX NOTIONS INCOMPATIBLES ?
Dans cette première partie il s’agira dans un premier temps, d’exposer brièvement ce qu’est le logement social afin, par la suite, de comprendre la place qu’occupent les jeunes dans le parc public .
Le logement social : de quoi s’agit-il ?
Le logement social est voué à l’amélioration des conditions d’habitation des personnes les plusmodestes. Il vise également à la « mise en oeuvre du droit au logement » et à contribuer « à la nécessaire mixité sociale des villes et quartiers »1, enjeu soulevé par l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain. Mais, suite à cela, la première question que l’on peut se poser est la suivante : qu’appelle-t-on « logement social » aujourd’hui ? Plusieurs acteurs contribuent au financement du logement social. La Caisse des Dépôts et Consignations accorde aux organismes d’habitations à loyer modéré des prêts de longue durée et ce à des taux inférieurs à ceux pratiqués sur le marché. L’État prend également part au financement par le biais d’aides à la pierre, d’exonération de la taxe foncière ou bien encore en définissant une TVA à taux réduit. A ces deux acteurs s’ajoutent les collectivités locales, octroyant notamment des subventions, et Action Logement, qui participe via des prêts ou des subventions. A ce titre, ces acteurs disposent d’un droit de réservation sur les logements dont ils ont participé à la construction.
Aussi, en contrepartie de cette participation au financement de l’opération, l’organisme de logement social s’engage à attribuer les logements sous conditions de ressources (Dassonville, 2013). De plus, dès lors qu’il s’agit d’un logement locatif, les loyers pratiqués doivent nécessairement être inférieurs aux prix du marché locatif libre. Les aides fournies varient selon la nature du prêt accordé : celles-ci sont d’autant plus importantes que les loyers projetés sont faibles et que les conditions d’accès à ce type de produit sont restrictives. Il existe trois types de prêts : le PLAI, se destine aux personnes dont les ressources sont très limitées et dont les loyers sont les plus bas ; le PLUS, est le prêt le plus répandu puisque plus de 80% des logements sociaux font l’objet de ce prêt2 ; le PLS, s’adresse quant à lui aux personnes dont les ressources sont supérieures à celles requises pour prétendre à un logement financé en PLUS mais ne leur permettant pas de trouver un logement correspondant à leurs ressources dans le parc privé. Toutefois, l’attribution d’un logement locatif social n’est possible que dans le cas où une convention a été élaborée entre un organisme d’habitations à loyer modéré et l’État. Ce conventionnement permet au locataire de formuler une demande d’aides au logement, telle l’APL.
Des jeunes sous-représentés dans le parc social
La part des jeunes locataires âgés de moins de 30 ans dans le parc social est relativement modeste.
Si à peine 13 % d’entre eux sont locataires du parc social, cette proportion s’accroît avec l’âge. Mais, le logement social n’apparaît pas, pour les jeunes, comme une solution spontanée pour se loger. Celuici pêche par la faiblesse quantitative de son offre en petits logements, typologie plébiscitée par les plus jeunes. En 2015, les T1 et T2 représentaient seul un quart de l’offre de logement social existante.
A l’origine, le parc HLM avait été configuré essentiellement pour répondre à un besoin relativement standardisé et pour accueillir des jeunes familles en constitution dans de grands logements (Bugeja- Bloch, 2013).
L’univers du logement social est confronté à un vieillissement de sa population qui, à l’image des évolutions que connaissent la population française, est amené à s’accentuer (Stébé, 2016).
Les locataires sont aujourd’hui plus âgés : la proportion de jeunes de moins de 30 ans s’est considérablement réduite entre 1984 et 2013, passant ainsi de 24,6% des occupants à moins de 10% (Cf. Figure 12). Les jeunes se sont donc reportés vers le parc locatif privé. Par ailleurs, la baisse des taux de rotation, les files d’attentes et les délais d’obtention d’un logement social peuvent ne pas coïncider avec les exigences des jeunes disposant parfois de délais très courts pour accéder à un logement et pouvant changer régulièrement de logement. Pour exemple, en 2015, il fallait en moyenne douze mois pour qu’un demandeur obtienne un logement. Cependant, ce délai est, dans certains départements, très nettement supérieur : ainsi, à Paris, le délai moyen est estimé à quarante mois ; dans l’Hérault et les Bouches-du-Rhône, celui-ci est de seize mois. A l’inverse, dans d’autres départements, la demande est satisfaite plus rapidement, oscillant autour de trois mois en moyenne dans le Jura ou dans les Hautes-Pyrénées (Cf. Annexe 2, p. 83). Si au 1er janvier 2015, il y avait 607 235 demandeurs âgés de moins de 30 ans (soit 25 % de l’ensemble des demandeurs), un tiers d’entre eux ont pu obtenir un logement à la fin de l’année 2015. Toutefois, la demande est surtout à l’actif des 25-29 ans et, comme l’explique B. Casteran, « parmi les ménages à bas revenus, le parc social loge le plus souvent des jeunes (41 % des ménages de 25 à 29 ans à bas revenus) que des personnes âgées (17 % de ceux qui ont 65 ans et plus) » (B. Casteran, citée par E. Maunaye, 2013).
MONTPELLIER MÉDITERRANÉE MÉTROPOLE, PARADOXES D’UN TERRITOIRE JEUNE ET DYNAMIQUE
Il apparait désormais nécessaire de se pencher sur la situation du logement des jeunes dans la métropole montpelliéraine. Très dynamique, celle-ci se distingue par la présence d’une population jeune, qui à l’image de la population jeune française, reste très mobile. Néanmoins, celle-ci fait face aux caractéristiques du marché du logement métropolitain, particulièrement tendu. Il est également essentiel de se pencher sur la place occupée par les jeunes dans le logement social sur ce territoire.
Présentation du territoire métropolitain
Située dans la nouvelle région Occitanie et dans le département de l’Hérault, Montpellier Méditerranée Métropole s’est dotée de ce statut suite à la loi Maptam du 27 janvier 2014. Au dernier recensement, celle-ci comptait 440 921 habitants répartis dans trente et une communes autour de la ville centre, Montpellier. Cette dernière concentre près de 62 % de la population métropolitaine. Entre 2008 et 2013, le territoire a été marqué par une croissance généralisée de sa population (plus 7, 7 % en cinq ans), hormis pour trois communes qui, quant à elles, perdent des habitants (Cf. Annexe 6, p. 87-93).
En revanche, cette évolution n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire et certaines communes, comme Castelnau-le-Lez ou Juvignac, ont vu leur population bondir de plus de 20 % en l’espace de cinq années. Ceci peut notamment être mis à l’actif de projets d’aménagement comprenant une part importante de logements tel que c’est le cas à Juvignac avec la ZAC Les Constellations qui, à termes, doit accueillir près de 4 500 habitants.
Un territoire marqué par la présence d’une population jeune et mobile
Comme nous l’avons montré précédemment, Montpellier Méditerranée Métropole se caractérise par une croissance démographique particulièrement soutenue qui ne s’explique pas uniquement par un solde naturel positif. Elle doit notamment cette croissance à l’arrivée de nouveaux habitants, en particulier des jeunes, dont de nombreux étudiants.
En 2013, les personnes de 15 à 29 ans représentaient un peu plus du quart de la population.
A RETENIR
Cette première partie a permis de définir ce qu’est un logement social, à savoir un logement conventionné, accessible sous conditions de ressources et dont le loyer est
plafonné. Aujourd’hui le parc social se caractérise par le vieillissement de sa population et les jeunes ménages, très présents à l’origine, sont désormais peu représentés parmi les occupants métropolitaine. Parmi eux, les jeunes âgés de 20 à 24 ans représentent plus de 40 % des personnes ayant entre 15 et 29 ans. Cependant, cette répartition de la population est très disparate sur le territoire métropolitain. En effet, dans la ville centre, près d’un tiers de la population avait entre 15 et 29 ans en 2013 et, 14,2 % des personnes étaient, quant à elles, âgées de 20 à 24 ans (Annexe 4, p. 85). On peut également constater que les communes de Castelnau-le-Lez et de Juvignac, toutes deux desservies par le tramway, comptent, respectivement 21 et 18,3 % d’habitants âgés de 15 à 29 ans.
La surreprésentation de cette tranche d’âge dans la commune de Montpellier peut notamment s’expliquer par la concentration quasi exclusive de la population estudiantine dans cette ville. Ainsi, avec 74 329 étudiants inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur à la rentrée 2015, Montpellier capte plus de 98 % des étudiants effectuant leurs études dans la métropole. Qui plus est, en l’espace de cinq années, cette population a augmenté de plus de 17 %, soit environ 9 500 étudiants supplémentaires entre 2010 et 2015. Cette polarisation des étudiants dans la ville centre s’explique par la concentration des pôles d’enseignement (Université de Montpellier, Université Paul Valéry, École d’Agronomie, Écoles de commerce, École d’ Architecture etc.) dans cette ville, en particulier dans le nord de Montpellier ainsi que dans l’Écusson. Ceci n’est d’ailleurs pas sans incidences sur le lieu de résidence de cette population, comme en témoigne la carte ci-contre, puisque les étudiants vivent essentiellement à proximité des facultés et des différentes écoles mais également dans le centre historique.
Les jeunes, habitant dans la métropole montpelliéraine se caractérisent par leur mobilité. C’est notamment le cas des étudiants, puisqu’en 2008, 60 % d’entre eux ne résidaient pas sur ce territoire cinq ans auparavant (Audric, Tasqué, 2012). La métropole de Montpellier est marquée par l’arrivée d’une population de jeunes actifs âgés de moins de 25 ans. Le solde migratoire pour cette population était positif en 2006 puisque pour un départ, il y avait 1,3 arrivée, notamment de jeunes employés ouvriers en couple (Audric, Tasqué, 2011). Néanmoins, ce dynamisme ne concerne pas l’ensemble des jeunes. Les jeunes familles, âgées de 25 à 35 ans, ont tendance à quitter le territoire métropolitain pour s’installer en périphérie, faute de ressources financières suffisantes. Par ailleurs, les jeunes diplômés en début de vie active quittent la métropole pour décrocher un emploi, en particulier en région parisienne4.
Un contexte immobilier tendu peu favorable au logement des jeunes
A l’image de la jeunesse française, les jeunes ménages de l’agglomération montpelliéraine se caractérisent par leur petite taille. En effet, tandis que les ménages d’une seule personne représentent 43,7 % des ménages métropolitains, c’est le cas de neuf ménages sur dix parmi ceux dont la personne de référence a moins de 20 ans. Même si ce phénomène concerne avant tout les plus jeunes, au fil de l’avancée en âge, ces ménages « solo » tendent à être moins nombreux et s’agrandissent. A partir de 25 ans, seuls 50,5 % des ménages ne comptent qu’une seule personne tandis que plus d’un tiers d’entre eux sont désormais composés de deux personnes (Cf. Annexe 5, p. 86). Or, une telle composition des ménages n’est pas sans effets sur les typologies de logement recherchées. Ainsi, sur le territoire métropolitain, les petites superficies sont peu nombreuses au regard des grandes typologies (plus de 65 % des logements sont composés de plus de trois pièces).
Ce critère est également valable dans le parc social où moins de 5 % des logements n’ont qu’une seule pièce et 19 % deux pièces (Cf. Annexe 6, p. 87-93 ).
Les jeunes montpelliérains demandeurs de logements sociaux, une goutte d’eau parmi les demandeurs ?
Si l’on se penche sur l’état de la demande en logement social au sein de l’agglomération montpelliéraine, on peut constater qu’au premier janvier 2015, les demandeurs âgés de moins de 30 représentaient près du quart de l’ensemble des demandeurs de la métropole, même si l’essentiel de la demande est à mettre à l’actif des personnes de 30 à 45 ans. Chez les plus jeunes, cette demande concerne avant tout les 25-29 ans : 18 % des demandeurs ayant obtenu un logement au cours de l’année 2015 avaient entre 25 et 29 ans. Malgré leur très faible représentation, les jeunes de moins de 20 ans ayant déposé un dossier de demande de logement social ont plus de « chance » d’obtenir un logement que leurs aînés. Près de 20 % des demandeurs les plus jeunes avaient obtenu un logement dans le parc social (Cf. Figure 18).
NOUVEAU LOGIS MÉRIDIONAL, UN ACTEUR DU LOGEMENT DES JEUNES SUR LE TERRITOIRE MONTPELLIÉRAIN
Après avoir dressé un panorama de la situation du logement des jeunes dans l’agglomération montpelliéraine, il s’agit désormais de présenter l’organisme de logement social sur lequel repose les analyses exposées dans ce mémoire ainsi que ses caractéristiques.
De Toulouse à Montpellier, l’essor d’un bailleur social investi dans le logement des étudiants
Fondé en 1984 à Toulouse par la CDC avec l’appui d’acteurs tels que l’Union Régionale Pact-Arim ou bien encore la Chambre de Commerce et d’Industrie de Toulouse, Nouveau Logis Méridional connaît un essor progressif. En 2005, le Groupe SNI (Société Nationale Immobilière), opérateur immobilier d’intérêt général, filiale de la CDC, reprend les treize entreprises sociales pour l’habitat du Groupe SCIC (Société Centrale Immobilière de la Caisse des Dépôts), dont NLM. Ce dernier fait désormais partie du pôle logement social du Groupe SNI (Annexes 7 et 8, p. 94-95).
Le périmètre d’intervention de Nouveau Logis Méridional s’étend sur l’ensemble de la région Occitanie. Au-delà du découpage territorial, ce bailleur social intervient uniquement dans trois départements (sur les treize que compte la nouvelle région) : le Tarn, la Haute Garonne et l’Hérault.
Toutefois, c’est autour des métropoles de Toulouse et de Montpellier que se concentre l’essentiel du parc de logements du bailleur (Cf. Figure 19). En 2016, Nouveau Logis Méridional était propriétaire de 10 517 logements. Son offre se compose de logements locatifs, de logements en accession, de logements foyers ainsi que de logements familiaux. NLM se fixe des objectifs annuels de production de 300 à 400 logements sociaux familiaux ainsi que de 20 à 30 logements en accession sociale. Il souhaite également développer une offre de petits logements d’une à deux pièces dans les centres villes, logements prisés par les jeunes.