Notions de base concernant les milieux poreux saturés et non saturés
Le milieu poreux est un ensemble constitué par une matrice de sol et de pores qui peuvent être remplis de différents fluides ( Fredlund et Morgenstern, 1976; Fredlund et Rahardjo, 1993b; Hillel, 1998). La matrice détermine les caractéristiques géométriques des pores dans lesquels l’eau et l’air peuvent circuler ou être retenus. L’ensemble des pores sont interconnectés et forment un réseau d’écoulement dans lequel les fluides circulent principalement par advection et dispersion (Calvet, 2003). Lorsque la pression porale est positive, les pores sont intégralement remplis par l’eau, le milieu est dit saturé. A l’inverse, lorsque la pression porale est négative, on catégorise automatiquement le sol comme non saturé ( Fredlund et al., 2012a). Dans ce cas, le système peut être bi-phasique sous la frange capillaire et tri-phasique au-dessus de la frange capillaire (Figure 2- 1). La distinction entre ces deux états résulte du degré de saturation du sol ( Fredlund et Rahardjo, 1993a). Figure 2-1: Eau dans un milieu non saturé, tiré et adapté de (Hillel, 2013). On présente en figure 2-2, l’évolution de la pression interstitielle et du degré de saturation pour un profil de sol en condition hydrostatique. En dessous du niveau de la nappe, la totalité de la matrice poreuse est remplie d’eau et la teneur en eau θ est équivalente à la porosité n.
La pression du fluide p est supérieure à la pression atmosphérique. Le potentiel de pression de l’eau est donc positif et dépend uniquement de la pression hydrostatique qui est proportionnelle à la hauteur de la colonne d’eau au-dessus du point considéré plus la pression atmosphérique Pour un point au-dessus de la nappe, le potentiel de pression est négatif, soit inférieur à la pression atmosphérique. Cet état de pression résulte des effets capillaires et d’adsorption dû à la matrice solide. L’eau est naturellement attirée puis liée au sol au point de faire chuter son potentiel de pression en dessous de celui de l’eau gravitaire (Delage et Cui, 2000; Fredlund et Rahardjo, 2012b; Gras et al., 2013; Lu et Likos, 2004; Musy et Soutter, 1991; Richefeu et al., 2007; Siemens, 2017). Les effets capillaires se produisent lorsque de l’eau circule à travers les chenaux interstitiels d’un sol en présence d’air. Ils sont attribuables au phénomène de tension de surface. Les molécules d’eau sont soumises à des forces d’interaction non équilibrées sous l’action combinée de l’air et de l’eau. A l’interface, les molécules d’eau sont attirées vers la masse d’eau et la surface de la pellicule d’eau est soumise à une force perpendiculaire à cette même surface. C’est la résultante entre ces forces que l’on appelle la tension de surface (Delage et Cui, 2000). Ainsi, on parlera plus communément de succion matricielle comme le terme définissant la pression négative s’exerçant dans un sol. La succion matricielle est définie comme la différence entre la pression de l’air (ua) et de l’eau (uw) (Équation 2.1) , Aubertin et al., 2003; Delage et Cui, 2000; Fredlund et Morgenstern, 1976).
Modèles descriptifs
Les diverses méthodes utilisées pour évaluer la courbe de rétention d’eau en laboratoire ou sur le terrain permettent d’obtenir un ensemble de points expérimentaux représentés sur l’ensemble du repère ψ-θ. Des modèles mathématiques de corrélation, ou modèles descriptifs, ont été développés pour obtenir une courbe de rétention d’eau complète à partir de ces points expérimentaux. Les principaux modèles utilisés sont ceux développés par Brooks et Corey (1964), van Genuchten (1980), Gardner (1958) et Fredlund et Xing (1994). Les équations mathématiques de ces modèles descriptifs sont présentées dans le tableau 2-1. Les quatre modèles sont généralement ceux qui décrivent au mieux les résultats expérimentaux d’essais de rétention d’eau. Toutefois, dans la littérature, Rossi et Nimmo (1994) apportent un ajustement aux modèles de van Genuchten (1980) et Brooks et Corey (1964) dans la partie résiduelle afin de fournir une description plus réaliste de la courbe. De plus, l’étude de variabilité menée par Lamara et Derriche (2009) sur un sable et un silt montre que parmi les trois premiers modèles présentés en tableau 2-1, le modèle de van Genuchten (1980) est celui qui possède la meilleure performance avec une variabilité maximale inférieure à 2% de la valeur de pression dans la zone d’entrée d’air. À noter qu’il existe dans la littérature une multitude de modèles descriptifs (Bruce et Luxmoore, 1986; Brutsaert, 1967; Bumb, Murphy, et Everett, 1992; G. Campbell et Shiozawa, 1992; G. S. Campbell, 1974; King, 1965; Laliberte, 1969; McKee et Bumb, 1984, 1987; Hung Quang Pham, 2005; Rogowski, 1971; Rossi et Nimmo, 1994; Russo, 1988; Tani, 1982), toutefois ces derniers ne seront pas explicités ici.
Équations d’infiltration
Plusieurs modèles mathématiques 1D ont été développés pour calculer l’infiltration (i), pour le cas d’un sol homogène, en fonction du temps (t) et de la capacité d’infiltration (ic). Les principaux modèles d’infiltration sont présentés dans le tableau 2-3. La plupart d’entre eux considèrent qu’une hauteur d’eau initiale est appliquée au début du processus d’infiltration (lame d’eau) et que l’infiltration progresse de manière constante et homogène selon un front et ce à longue durée (Hillel, 2012). Il existe trois classes de modèle d’infiltration : (1) physique, (D5126) empirique et (D3385) semiempirique. Les modèles physiques sont développés à partir de la loi de Darcy, intégrée à la loi de la conservation de la masse et selon les propriétés physiques des sols. Les modèles semi-empiriques utilisent la forme de l’équation de continuité en plus des hypothèses faites sur le taux d’infiltration et l’infiltration totale. Les modèles semi-empiriques sont quant à eux principalement basés sur un système d’approche employé pour l’hydrologie de surface (Parhi, 2014). D’autres modèles semiempiriques et empiriques ne sont pas présentés dans cette partie mais peuvent être retrouvés dans la littérature. Il est également possible de retrouver une autre classification des modèles d’infiltration dans Mishra et al., (1999). Les modèles empiriques, comme ceux employés pour déterminer la fonction de perméabilité, sont des modèles élaborés à partir de données expérimentales obtenues au laboratoire ou sur le terrain. Aujourd’hui, la difficulté à établir certaines hypothèses simplificatrices et à déterminer certains paramètres limite l’utilisation des modèles empiriques. A l’inverse, les modèles physique de Green et Ampt (1911) et Philip (1957), proposent des solutions analytiques intégrant directement les paramètres hydrogéotechniques du sol comme la conductivité hydraulique et la variation de teneur en eau, facilitant ainsi leur utilisation. En raison de sa validation dans le passé et du fait qu’il semble approprié dans le cadre de notre étude, le modèle de Green et Ampt (1911) est présenté plus en détails dans ce qui suit.
Généralités sur les effets de barrière capillaire pendant l’infiltration Alway et McDole (1917) ont établit les premières constatations sur la réduction du mouvement de l’eau via l’utilisation combinée d’un matériau fin et grossier. Cette méthode a d’abord suscité de l’intérêt pour le domaine de l’irrigation agricole. Par la suite, Corey et Horton (1969) montrent dans leur étude qu’il est possible de limiter l’infiltration verticale de l’eau dans un milieu poreux non saturé en utilisant le contraste de propriétés entre deux matériaux. Ils constatent que l’eau circule principalement à l’interface des deux couches. Ce phénomène d’abord baptisé « wick effect », est aujourd’hui exploité à des fins environnementales comme barrière visant à limiter l’infiltration de contaminants et même dans certains cas à inhiber certaines réactions chimiques responsables du DMA sous certaines conditions. Le phénomène de barrière capillaire est largement décrit dans la littérature ( Bussière, 1999; Bussière et al., 2001; Morel-Seytoux, 1992; Nicholson et al., 1989). Dans ces ouvrages, il est décrit qu’entre deux couches juxtaposées, mais plus précisement, entre une couche de granulométrie fine (couche de rétention) et une couche de matériau plus grossier (couche drainante), la différence des propriétés hydrauliques de ces dernieres génère des effets de barrières capillaires à l’interface et ce, dès qu’un écoulement vertical se produit dans un milieu non saturé (Aubertin et al., 1999; Bussière et al., 2001; Parent et Cabral, 2006). Les forces de tensions capillaires, plus importantes dans le matériau le plus fin peuvent retenir l’infiltration en jouant le rôle d’éponge (Aubertin et al., 2009; Bussière, 2003). L’infiltration vers la couche grossière débute quand la succion à l’interface du côté de cette dernière est égale à la WEV(obtenue en mouillage). Plus clairement, l’effet de barrière capillaire disparait lorsque le potentiel de tension capillaire du matériau fin est quasi nul et que la couche sous-jacente n’est plus capable de supporter la pression exercée par la colonne d’eau développée dans la couche de matériaux fins (Aubertin et al., 2003).
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