Niveau de production et de consommation de la viande de Volailles
La production nationale de viande de volailles industrielles a été de 726 7 tonnes en 2004. Cette production a connu une hausse en valeur absolue de 966 tonnes soit 15 % en valeur relative par rapport à l’année 2003. Le poulet de chair produit est la viande la moins chère avec un pri x moyen de 1416 f C FA le kg. Toutefois, le niveau de consommation de la viande de volailles au Sénégal est estimé à 2,5 Kg /an/ habitant en 2003 [26].
Cependant, cette filière si dynamique est en train d’être menacée par des contraintes pathologiques qui limitent le développement et les performances du secteur avicole.
Les contraintes pathologiques
En aviculture, les pathologies aviaires peuvent être regroupées en maladies virales, bactériennes, parasitaires et métaboliques [16]. Actuellement, de véritables dominantes pathologiques caractérisent la détérioration de l’état de santé que l’on rencontre dans les élevages de v olailles. Parmi celles-ci, les maladies bactériennes notamment les salmonelloses et les colibacilloses demeurent les plus fréquentes avec respectivement 15 et 45 % de cas en 2001 [5].
Par conséquent, les risques pathologiques rendent nécessaires la mise en place des mesures prophylactiques à c aractère sanitaire et médical pour préserver l’état sanitaire des animaux.
Prophylaxie sanitaire
Elle a pour but de limiter l’action des différents vecteurs de germes pathogènes ou de parasites dans l’élevage. En effet, la prophylaxie sanitaire se base sur trois notions essentielles, l’élevage à b ande unique, le nettoyage- désinfection et le vide sanitaire [12].
Prophylaxie médicale
Il s’agit de la vaccination contre les maladies infectieuses mais aussi du traitement préventif des maladies parasitaires et du stress.
En aviculture semi-industrielle, l’exploitation des souches exotiques plus productives mais moins résistantes doublée d’une forte pression sanitaire, ont pour conséquences l’utilisation abusive et inappropriée des antibiotiques.
UTILISATION DES ANTIBIOTIQUES DANS LES ELEVAGES AVICOLES
Définition et Généralités
Les antibiotiques représentent, de très loin, la classe des médicaments la plus employée à l’heure actuelle, en médecine humaine comme en médecine vétérinaire.
D’après la définition la plus couramment admise, un antibiotique est une substance chimique naturelle produit par un micro-organisme qui, à faible concentration, a le pouvoir d’inhiber la croissance ou de détruire certaines bactéries ou d’autres micro-organismes. Cette définition peut-être étendue aux produits obtenus par synthèses ou hémisynthèses doués d’une de ces propriétés. Les antibiotiques utilisés pour traiter les infections bactériennes sont ceux qui sont toxiques pour les cellules bactériennes de façon sélective et ne nuisent pas à l’hôte [12].
Types d’utilisation des antibiotiques en aviculture
L’utilisation des antibiotiques chez les animaux a permis l’évolution de l’élevage moderne, d’un point de vue, aussi bien économique que sanitaire.
Ainsi, en aviculture intensive, les antibiotiques ont deux types d’utilisations [9].
– Une utilisation thérapeutique, dans le but de combattre une infection présente (antibiothérapie curative) ou de prévenir une infection possible (antibiothérapie préventive ou prophylactique) ;
-Une utilisation zootechnique, propre à l’élevage qui vise à améliorer la croissance des animaux par l’incorporation de faibles quantités d’antibiotiques dans l’alimentation.
Actuellement, en Europe, plus de 50% de la production d’antibiotiques sert à traiter les animaux malades, à promouvoir la croissance du bétail et de la volaille.
Néanmoins, en Afrique et particulièrement au Sénégal, les données concernant les quantités d’antibiotiques utilisées en aviculture sont parcellaires et ne sont pas toujours précises. En effet, selon la DIREL [26], l’essor incontrôlé du marché illicite de médicaments vétérinaires est avéré. Par ailleurs, les antibiotiques utilisés dans le secteur avicole sont nombreux et de nature très variée. Les différents principes actifs, ainsi, utilisés au Sénégal sont : la fluméquine l’oxytétracycline, le sulfadiazine, le streptomycine, la colistine, la néomycine, la furaltadone, le triméthoprime, l’érythromycine et les sulfamides [4].
Ainsi, certains principes actifs comme le chloramphénicol et les nitrofuranes, interdits en Europe pour la protection de la santé du consommateur sont utilisés de manière courante au Sénégal [8]. Du reste, beaucoup d’éleveurs utilisent des antibiotiques à large spectre, sans l’avis d’un vétérinaire et certains ne respectent pas le délai d’attente des médicaments [4]. Tous ces facteurs peuvent avoir des conséquences majeures en matière de santé publique et animale.
Conséquences
L’utilisation abusive et/ou inappropriée des antibiotiques ne saurait être sans conséquences sur l a santé humaine et animale. En effet, des risques toxiques et allergiques peuvent être encourus par la santé du consommateur du fait de la persistance des résidus dans les denrées d’origine animale [7].
D’autre part, ces facteurs peuvent amplifier le pool génétique de la résistance bactérienne à de s antibiotiques d’importance stratégique en médecine humaine et vétérinaire [8] [22].
RESISTANCE BACTERIENNE AUX ANTIBIOTIQUES ET CONSEQUENCES
Généralités sur l’antibiorésistance
La résistance bactérienne est un problème majeur en santé publique et vétérinaire dans le monde entier, et en particulier dans les pays en développement. A ce titre, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l’a décrétée comme l’un des
trois plus importants problèmes de santé du 21e siècle [10]. Ainsi pour tout antibiotique, certaines souches ou e spèces bactériennes sont ou pe uvent devenir insensibles à l’action anti-bactérienne. La résistance des bactéries aux antibiotiques peut-être naturelle ou acquise. C’est au deuxième type de résistance que s’applique la définition suivante inspirée de celle de l’ OMS [10] : Une souche bactérienne est dite résistance à un antibiotique lorsqu’une modification de son capital génétique lui permet de tolérer une concentration d’antibiotique nettement plus élevée que celle qui inhibe la croissance in vitro de la majorité des autres souches de la même espèces. Cette résistance se manifeste au niveau cellulaire par quatre grands mécanismes biochimiques [24]:
– Le blindage est la réduction ou la non pénétration de l’antibiotique au sein de la cellule bactérienne par une modification de ses voies d’accès
(porines) ;
– L’élimination est obtenue soit par la dégradation enzymatique de l’antibiotique, soit par une augmentation de son élimination ;
– Le brouillage, l’antibiotique est moins actif car sa capacité de fixation à la protéine cible est réduite;
– L’échappement consiste en l’élaboration d’une nouvelle voie de synthèse de la cible bactérienne.
Les supports génétiques de la résistance acquise sont soit le chromosome définissant une résistance chromosomique (ou mutation) soit du matériel génétique étranger, on parle d e résistance extrachromosomique. Cette dernière est la plus fréquente et la plus importante et concerne des structures chromosomiques homogènes, formées d’ADN bicatenaire dénommées les plasmides
Résistance par acquisition de plasmides
Les plasmides de résistance aux antibiotiques (dits plasmides R) sont les plus importants et les plus étudiés en pathologie infectieuse, humaine et vétérinaire en raison de leur aptitude à transférer rapidement la résistance aux antibiotiques aux bactéries pathogènes [3].
Cette résistance plasmidique est contagieuse et s’exerce dans 90% des cas de résistance en s’accompagnant le plus souvent de la résistance à d’autres produits comme les métaux lourds et les désinfectants [10].
L’étude des plasmides a contribué largement à la découverte d’autres gènes porteurs de caractères de résistance à savoir les transposons et les intégrons.
Résistance par acquisition de transposons et d’intégrons
Les transposons sont des séquences d’ADN capables de changer de localisation dans le génome sans jamais apparaître à l’état libre [23].
Quant aux intégrons, ils constituent un système de capture et d’expression de gènes sous forme de ca ssettes jouant un rôle important dans l’acquisition et la dissémination des gènes de résistance aux antibiotiques chez les bactéries [18]
Les mécanismes génétiques de la résistance acquise, ainsi décrits, expliquent le caractère épidémique que peut parfois revêtir la résistance aux antibiotiques.
Epidémiologie et évolution de l’antibiorésistance
L’introduction progressive en t hérapeutique, d’antibiotiques nombreux et puissants, l’extension puis la généralisation de leur emploi en pratique hospitalière comme en médecine vétérinaire, ont pour corollaire une augmentation progressive du nombre de bactéries antibiorésistantes.
Par évolution vers la résistance, on e ntend généralement l’augmentation du pourcentage des souches de la même famille entre lesquelles il y a h abituellement résistance croisée [2]. En médecine humaine, le cas le mieux connu est l’évolution de la résistance des staphylocoques [17].
En médecine vétérinaire, on note ces dernières années la résistance des enterocoques à l a vancomyocine et l’émergence des souches de Campylobacter résistantes en particulier aux quinolones et à la tétracycline [1].
Cependant, l’un des problèmes principaux est la résistance multiple des Salmonella spp et des E. coli dont le monde animal constitue le principal réservoir. Ces deux germes, de par leur importance en santé publique et animale, font l’objet de notre présente étude.