Neurodata : Suivi prospectif à un an d’une cohorte de traumatisés crâniens
Nature des lésions formant un traumatisme crânien
Lésions primaires
Les lésions primaires surviennent au moment ou dans les minutes suivant le traumatisme. Les mécanismes connus sont le choc direct avec la boite crânienne, les lésions d’accélération/décélération, la plaie pénétrante, les lésions de blast. Elles peuvent donc être focales ou diffuses. Les lésions focales sont les plus fréquentes. a- Hématomes intra-parenchymateux Ces lésions sont retrouvées dans les régions frontales et temporales le plus souvent et sont dû à une rupture vasculaire. b- Lésions extra-axiales – Hémorragie sous-arachnoïdienne post-traumatique Elle est plus fréquente dans les sillons frontaux et des citernes interpédonculaires. Elle est imputable à des micro-lésions vasculaires mais peut-être une extension d’une hémorragie intra-ventriculaire ou intra-parenchymateuse.
Hématome sous-dural
Ce type d’hématome est dû à une rupture de veine au sein de la dure-mère. Il apparait sous la forme d’une collection spontanément hyperdense, falciforme, hémisphérique, aux contours mal définis et apposé sur l’os. Il existe souvent des lésions corticales sous-jacentes. L’hématome sous-dural est le plus fréquent des hématomes intracrâniens. Il est diagnostiqué chez environ 25 % des patients. Son pronostic est globalement plus grave que celui de l’hématome extradural car il est souvent associé à d’autres lésions intracrâniennes. Il est préconisé d’évacuer tout hématome sous-dural d’épaisseur > 5 mm avec déviation de la ligne médiane > 5 mm (7). – Hématome extra-dural Ce type d’hématome est quasiment toujours associé à une fracture de la boîte crânienne. Il est dû à une rupture de l’artère méningée moyenne et a une forme biconvexe. C’est une urgence chirurgicale. L’hématome extradural est présent chez 6 à 20 % des traumatisés crâniens dont le GCS est ≤ 8. Il est, le plus souvent, associé à une fracture et résulte d’une plaie d’un vaisseau duremérien, mais n’est pas nécessairement accompagné d’autres lésions cérébrales. Un tiers des patients est comateux après un intervalle libre, un tiers est comateux depuis l’accident et un tiers est conscient. Il existe une anisocorie chez 41 % des patients présentant un hématome intracrânien (7). c- Lésions diffuses – Pétéchies hémorragiques – Lésions axonales diffuses Figure 1 – Hématome sous dural Figure 2 – Hématome extra dural
Lésions secondaires
La lésion primaire va initier un ensemble de mécanismes immunologiques et biochimiques, responsable de lésions secondaires, évoluant pour leur propre compte. Elles sont favorisées par les ACSOS (cf. ci-dessous). Ces lésions surviennent après un intervalle de temps, ce qui constitue une fenêtre thérapeutique possible (7). – Œdème cérébral L’œdème peut être de nature vasogénique, cytotoxique (lié à l’ischémie) ou osmotique. Celui-ci est la conséquence d’un gradient osmotique entre le cerveau et le plasma, lié à la nature des capillaires cérébraux. L’œdème cérébral peut conduire à une augmentation de la pression intracrânienne, pouvant conduire à d’autres lésions secondaires liées à l’hypertension intra crânienne. – Ischémie cérébrale et apoptose cellulaire retardée La mort cellulaire peut survenir par nécrose ischémique consécutive à une privation brutale et totale d’énergie ou par apoptose. L’apoptose, ou mort cellulaire programmée, a été reconnue après un traumatisme cérébral.
Agressions cérébrales systémiques d’origine secondaire (ACSOS)
Les paramètres suivants sont considérés comme ACSOS après seulement 5 minutes d’apparition, hormis pour la température (1 heure) (8). • Hypotension (PAS < 90 mmHg) et hypertension artérielle (PAS > 160 mm Hg, ou PAM > 110 mm Hg) • Hypoxémie (PaO2 < 60 mmHg, SaO2 <90 %) • Hypocapnie (PaCO2 < 35 mm Hg) et hypercapnie (PaCO2 > 45 mm Hg) • Anémie (Hémoglobine < 10 g/dL, ou hématocrite < 30 %) • Hyponatrémie (Na < 142 mEq/L) • Hyperglycémie (Glycémie > 10 mmol/L) et hypoglycémie (Glycémie < 4.6 mmol/L) 6 • Hypo-osmolarité (osmolarité plasmatique < 290 mOsm/Kg H2O) • Déséquilibre acido-basique (pH < 7.35; pH > 7.45) • Hyperthermie (température > 36.5°C) ou hypothermie (température < 35.5°C) pendant 1 heure Le diagnostic et le traitement des ACSOS est primordial à chaque étape de la prise en charge. L’hypotension artérielle et l’hypoxémie représentent un facteur de risque indépendant de mortalité au même titre que le score de Glasgow initial ou les modifications pupillaires. Elles sont également associées à un pronostic défavorable à 6 mois, selon l’échelle de GOS-E. Il est montré que l’hypoxémie et l’hypotension artérielle sont des facteurs de mortalité reconnus lorsque qu’ils sont associés (jusqu’à 75 % de mortalité dans certaines cohortes de patients) (9). E. Principes de la prise en charge médicale Plusieurs recommandations ont été publiées depuis 1996 dans le monde entier, via la Brain Trauma Foundation (9). Les éditions ultérieures datent de 2000, 2003, 2007 et 2017. Les recommandations formalisées d’expert de la société française d’anesthésie-réalisation (SFAR) ont été éditées en 1999 et 2016 (10). La prise en charge médicale doit être initiée dès la phase préhospitalière. Les patients sont ensuite accueillis en salle de déchocage au bloc des urgences chirurgicales afin de faire un bilan lésionnel et d’orienter le patient vers des soins adaptés. Ils sont ensuite transférés en réanimation afin de poursuivre les thérapeutiques. 1 – Préhospitalière Les recommandations stipulent que « Le traumatisé crânien grave doit être pris en charge par une équipe médicale préhospitalière, régulée par le SAMU, et adressée dès que possible dans un centre spécialisé avec un plateau technique neurochirurgical (accord fort 1+). » Afin de diminuer la mortalité, la mise en place d’une sédation et 7 d’une ventilation mécanique précoce est recommandée. Ces mesures vont permettre de stabiliser l’état respiratoire et hémodynamique du patient et donc d’influer sur les mécanismes d’auto-régulation cérébrale. 2 – Dans les 24h La prise en charge précoce des patients est d’une importance majeure car elle va avoir pour objectifs : – le diagnostic et le traitement des lésions primaires après une concertation pluridisciplinaire entre anesthésistes-réanimateurs et neurochirurgiens. – le diagnostic et le traitement des paramètres vecteurs d’ACSOS.
– En réanimation
L’HTIC et le sepsis font partie des complications fréquentes et redoutées. Il faut souligner l’importance de la surveillance clinique multimodale et pluriquotidienne à ce sujet. Le doppler transcrânien est un outil de choix dans le monitorage du traumatisé crânien. Il permet de mesurer plusieurs paramètres tel que la vélocité diastolique ou l’index de pulsatilité de l’artère cérébrale moyenne. Il existe effectivement une association entre l’IP et la pression de perfusion cérébrale. Une hypertension intracrânienne va se manifester par une diminution du débit sanguin cérébral et donc de la pression de perfusion cérébrale, correspondant à une augmentation de l’IP et une diminution des vitesses diastoliques. L’absence de flux ou « back flow » est en faveur d’une mort encéphalique. L’hypertension intracrânienne est responsable d’une diminution de la pression de perfusion cérébrale pouvant conduire à une ischémie cérébrale mais aussi à un engagement cérébral. L’existence d’un protocole de traitement de l’hypertension intracrânienne dans chaque service est primordiale. Le New England Journal of Médicine (NEJM) avait proposé une approche fondée sur la physiopathologie de l’HTIC (12).
I. Introduction |