MUTATIONS POLITIQUES ET SOCIALES AU FULADU
Dynamiques migratoires et peuplement en Haute Casamance
Le processus d’implantation des populations en Haute Casamance, à l’image des autres régions de la Sénégambie, s’est fait par vagues migratoires successives. L’objectif principal pour ces populations migrantes était de trouver une terre d’accueil répondant à leur besoin de sécurité et au développement de leurs activités économiques. Ces déplacements étaient donc pour la plupart dictés, par des impératifs économiques et sécuritaires. A la suite du déclin des empires du Mali et du Songhaï aux XVéme et XVIéme siècles et de l’insécurité généralisée engendrée par la traite négrière, les mouvements de population s’intensifient dans l’espace sénégambien, bouleversant la carte de la population de cette vaste région. C’est le début d’une longue période de recomposition politique et sociale dans cet 55 Fanchette, S., « Colonisation des terres sylvo-pastorales et conflits fonciers en Haute Casamance », Tenures foncières pastorales, n°13, 1999, p. 4 56 Au sujet des conflits fonciers et des enjeux de la décentralisation en Haute Casamance, Sylvie Fanchette a réalisé, dans le cadre de l’IRD, d’intéressantes études sur cette question. Lire entre autres « Densité de population et intensification agropastorale en Haute Casamance », Espaces, Populations, Sociétés, n°1, 1999 et « Désengagement de l’Etat et recomposition d’un espace d’échange transfrontalier : la Haute Casamance et ses voisins », espace guinéo-gambien59. Se dessinent ainsi en direction de la Haute Casamance, des dynamiques migratoires de populations ouest-africaines à forte composante peul. 1. Les Bainouk : un peuplement ancien. Les Bainouk furent le premier groupement humain à s’installer en Haute Casamance60. Ils constituent vraisemblablement la population autochtone en Casamance et seraient venus de l’Est (Roche, 1985 : 25). Jean Girard présente les Bainouk comme les premiers occupants nomades de la Haute Casamance. Bertrand Bocandé, s’appuyant sur les récits des premiers voyageurs portugais tels Cada Mosto et Almada, signale que « Brikam était l’ancienne capitale du roy des Cassas ou Cassangues. C’est dans la cour du Mansa, ou roi des Cassas (d’où le nom des rivières cassa-mansa), que les portugais faisaient du commerce61 . » Les populations Bainouk s’étaient installées le long des rives de la Casamance et entretenaient d’excellentes relations commerciales avec les Portugais. Les Bainouk sont présentés comme « naturellement pacifiques et n’ayant jamais songé à se défendre contre qui ce soit, ils vivent dans des villages autonomes : Bajaar, Baakum ». Bertrand Bocandé ajoute que « Almada raconte que le roi Batimansa (le roi Bati) qui régnait en 1585, traitait fort bien avec les Portugais…Les rois du Portugal envoyèrent plusieurs présents aux rois de Brikam63 ». Riziculteurs incontestables, les Bainouk sont de grands propriétaires fonciers en Casamance. Ils sont aussi des pratiquants de la religion traditionnelle. Les Bainouk croyaient en un dieu unique appelé « Djino » qui prenait l’apparence du « Kumpo ». Ces pratiques culturelles sont encore aujourd’hui présentes dans les sociétés Manding et Peul de la Haute et Moyenne Casamance. Avant la domination Manding et Joola, les Bainouk étaient organisés en entités politiques situées dans l’axe compris entre la Gambie, la Casamance et le Rio Cachéo. Les minuscules états Bainouk du Bichangor, Jase et Fogni occupaient une position stratégique dans les transactions commerciales64. Jadis détenteurs du pouvoir économique et politique, les Bainouk furent relégués au bas de la hiérarchie sociale à partir du XVIIIème siècle, avec 59 L’expression empruntée à Sékéné Mody Cissokho désigne l’espace manding compris entre le fleuve Gambie et le Rio Corubal correspondant à l’ancien empire du Kaabu. 60 Peu de renseignements existent sur l’histoire des Bainouk, Le récent travail de Idrissa Mané : « Les Bainun de Casamance : histoire d’un peuple à l’épreuve des contacts extérieurs (1828- 1901) », mem. de maîtrise : Histoire : Fac. des L. et Sc. hum. Ucad de Dakar, 2010 : 142 p. reste fort appréciable sur ce sujet. 61 Bocandé, B., « Note sur la Guinée portugaise ou Sénégambie méridionale » in : Bulletin de la société de géographie de Paris, 3 ème série, T.XI (Mai-Juin 1849), pp. 165-350 62 Diallo, A. R., « Le fort de Seju dans le Buje : sa fonction dans l’expansion coloniale en moyenne Casamance au XIXème siècle, mém. de maitrîse : l’arrivée des conquérants Manding venus de l’est, des Joola à l’ouest et des Balant au sud. Le royaume Bainouk aurait ainsi été détruit par les envahisseurs manding vers 1830. Les Bainouk non soumis à l’esclavage, se retiraient dans des endroits enclavés pour échapper à l’oppression. Les différentes invasions dont ils furent victimes renforcèrent les liens entre les communautés bainouk établies en Casamance. En raison de l’importance des brassages des peuples, les Bainouk se confondent aujourd’hui avec les populations Manding et Joolas de la Moyenne et Basse Casamance. On les rencontre, de nos jours, surtout en Basse et Moyenne Casamance65 . Le long de la « route du Sud » entre les villages de de Kaour et de Djifaghor-Boutouk, d’une part, dans le Kalounaye, de l’autre côté du fleuve. Aujourd’hui, les relations de cousinage entretenues par les Bainouk avec les autres ethnies participent au maintien de l’équilibre socioethnique de la Casamance. Toutefois, il existe des frontières ethnoculturelles qui jusque-là ne favorisent pas les mariages avec les Bainouk et leurs voisins. D’autres minorités ethniques coexistèrent avec les Bainouk. Il s’agit des groupes Manjacques, Papels, Balant, Mancagnes…Ces minorités, à l’image des Bainouk, auraient été refoulées par les conquérants Manding à partir du XVIIIème siècle. Elles sont surtout localisées à la lisière de la frontière avec la Guinée Bissau et constituent une forte colonie dans ce pays. Ces minorités restent encore très attachées aux valeurs culturelles traditionnelles de leur terroir. De religion généralement traditionnelle, elles forment de petits groupes homogènes socialement bien structurés. Cependant, elles ont été, la plupart du temps, mises à l’écart de la construction des grands ensembles politiques de la région. Par la suite, elles ont été victimes de l’impérialisme Manding.
Les Manding, un peuple conquérant en Haute Casamance
L’immigration Manding en direction de la Casamance daterait du XIVéme siècle. Selon la tradition, les Manding viendraient de la partie orientale du Mali. Les Manding se disent euxmêmes originaires du Tilibo66. Pourtant, ils ne forment pas un groupe ethnique homogène : on y retrouve des Sarakollé, des Jaxanké, des Bambara, etc. 65 Les Bainouk constituent une communauté homogène dans les communautés rurales de Tobor, Adéane dans la région de Ziguinchor. 66 Tilibo désigne les populations venant de l’Est. 40 Il semble que les premiers Manding qui se sont installés en Casamance étaient des musulmans munis du coran et de chapelets et professant la parole d’Allah67 . Ils se sont implantés précisément dans le Pakao68. Cette vague résulte du développement du commerce transsaharien69. Par le biais de ce trafic, ce groupe Manding était déjà en contact avec les commerçants musulmans qui avaient, à cette époque, le monopole des activités commerciales dans cette région. Le second groupe de Manding résulte de l’expédition punitive de Tiramaghan Traoré au XIVème siècle. En tout état de cause, ce sont des Manding, politiquement bien organisés, qui essaimèrent, en Casamance sous la conduite de Tiramaghan Traoré dans les régions comprises entre les fleuves Gambie au nord et le Rio Geba au sud70. Ces populations occupèrent le Jimara, le Pathiana, le Tumana et le Sama. Il s’agit principalement des provinces septentrionales et méridionales du Fuladou. R. Arnaud ne se trompe – t- il pas en situant la provenance de la première vague manding du Fouta Djallon ? En effet, « les mandingues venus jadis du Fouta Djallon paraissent avoir refoulé de bonne heure les populations fétichistes vers la région des grandes forêts et les îles à palétuviers de la côte71 ». Dans son rapport, il confond le premier groupe de peuplement Manding avec le troisième qui semble venir du Fouta Djallon à la suite des troubles politiques et religieux engendrés par l’instauration de la théocratie peule du Fouta Djallon. Force est de reconnaître que ces Manding « avaient été chassés eux-mêmes du Soudan occidental par des mouvements de peuples dus à des guerres d’origine religieuse, ils s’étaient convertis de bonne heure à l’islamisme et appartenaient à la grande confrérie des Qadria .» L’immigration de ces peuples vers le Kaabu avait été facilitée par le climat de paix et de prospérité instauré par les souverains de l’empire manding. Le troisième mouvement de population Manding est à mettre en relation avec l’avènement d’un pouvoir islamique au Fouta Djallon résultant d’un exode de populations Manding et 67 En revanche pour Paul Pélissier, « Il est impossible de fixer dans le temps l’arrivée des Socé, mais il est certain que leurs premières vagues sont extrêmement anciennes, de beaucoup antérieures à l’Empire du Mali et qu’elles ne connaissaient pas l’islam » décembre 2004. 69 C’est avec beaucoup de réserve que nous avançons cette hypothèse. En raison de leur hostilité, les Mandingues du Pakao, muslmans, n’ont jamais été des « citoyens » de l’empire du Kaabu. 70 Cissé N, « La fin du Kaabu et l’émergence du Fouladou », mém. de maîtrise : Histoire : Université de Dakar, Fac. Des L. et Sc. Hum. : 1978 : p33 71 ANS, 13G379 : Mission Arnaud en Casamance, 1907 72 Cette théocratie Peule du Fouta Djallon est née en 1725 à la suite d’une révolte des Peul musulmans contre les royaumes animistes jallonké. Voir T. Diallo. Les institutions politiques du Fouta Djallon au XIXème siècle, Dakar, IFAN, 1972, 276p. 73 ANS, 13G379 : Mission Arnaud en Casamance, 1907 41 jallonké en direction du Kaabu. Dès lors, cet empire apparut comme le dernier refuge des populations animistes en provenance du Fouta Djallon. Le Kaabu devint aux yeux des nouveaux souverains musulmans du Fouta Djallon l’obstacle à franchir pour parachever la conquête musulmane en Sénégambie méridionale et pour entrer en contact avec les puissances occidentales présentes le long des côtes. Jusque-là, au Kaabu, se dessinait une timide pénétration de l’islam au sein de la société. Ces Manding s’implantèrent dans les provinces méridionales du Sankolla, du Pakisse et du Niampaio au Fuladu, puis envahirent progressivement les autres régions du centre et de l’ouest. Au cours du XIXème siècle jusqu’aux années 1960, le peuplement manding de la région s’est fait à la faveur des soubresauts politiques internes au Kaabu et à l’affirmation des puissances occidentales dans la région. Une immigration interne à direction nord vers le sud et inversement, ensuite d’est en ouest se développa. Toutefois, la dislocation de l’empire manding conjuguée aux troubles sociopolitiques, contribua à donner un nouvel élan aux dynamiques migratoires. Les groupes de populations, qui fuyaient l’insécurité politique consécutive à la disparition du Kaabu, trouvèrent un lieu de refuge vers les provinces occidentales du Pakao et du Souna et dans les régions limitrophes de la Gambie comme celles du Kian, du Combo et du Jara. C’est de la volonté de reconstituer un nouvel empire à la dimension de celui du Kaabu qui poussa Fodé Kaba et ses compagnons à créer une nouvelle entité politique inspirée de la religion musulmane. En effet, l’action de Fodé Kaba soutenu par Maba Diakhou Ba du Rip, associée à celle du Fouta Djallon, s’inscrit dans le vaste mouvement de triomphe de l’islam en Sénégambie méridionale au XIXème siècle. L’aspect religieux de la lutte contre les Manding du Kaabu efface la dimension ethnique attribuée à cette guerre. Loin d’être une guerre entre Peul et Manding, la lutte du Fouta Djallon contre les souverains animistes du Kaabu au XIXème siècle s’est transformée en un combat politique aux motivations économiques et religieuses. Les Manding qui restèrent au Kaabu, malgré les humiliations de la déroute, cautionnèrent la domination des nouveaux maîtres des lieux et jouèrent un rôle politique discret. L’implantation manding dans l’espace guinéo-gambien a été le fait des dioulas musulmans et des guerriers mandingues du Mali. Les Manding ont imprimé dans cet espace un cachet ethnique et linguistique à toutes les populations qu’ils ont trouvées sur place. 42 Au moment où ils s’installaient et exerçaient leur domination, les Manding laissaient des espaces ouverts aux populations migrantes. C’est dans ces intervalles que les Peuls installèrent leur habitat, avec l’autorisation des chefs manding. 3. Les Peul en Haute Casamance, histoire d’une infiltration. L’origine des Peuls a fait, jusque-là, l’objet de beaucoup de controverses. On leur a toujours attribué une origine « orientale » ou judéo-chrétienne. Parmi ceux qui ont étudié l’origine des fulbé de la Haute Casamance, figurent en bonne place les administrateurs coloniaux parmi lesquels Gilbert Vieillard74, Maurice Delafosse75, Louis Tauxier76… Mais leurs études sont souvent entachées d’arrières-pensées racistes, ce qui contredit les sources orales riches en propos élogieux sur les Peul. « Quoi qu’il en soit, et c’est là l’originalité profonde des Peul à travers les migrations, les métissages, les apports extérieurs et les inévitables adaptations aux milieux environnants, ils ont su rester eux-mêmes et préserver leur langue, leur fonds culturel très riche et, jusqu’à leur islamisation, leurs traditions religieuses et initiatiques propres, le tout lié à un sentiment aigu de leur identité et de leur noblesse.77 ». Cependant cette assertion est, aujourd’hui, à relativiser en raison du développement de la modrnité et des métissages de plus en plus importants entre les Peul et les autres groupes ethniques. Il faut noter, par ailleurs, que leur légendaire mobilité a pour cause les multiples vexations et tribulations administratives et politiques (pressions fiscales et démembrement territorial), et surtout la recherche permanente de d’eau et de pâturages. D’une manière générale, les Peul forment un groupe ethnique un peu disséminé en Afrique de l’ouest. Leur diaspora reste la plus perceptible dans les mouvements migratoires en Sénégambie. Malgré cette dispersion, les Peul ont été impliqués directement ou indirectement dans la création des grandes entités politiques de la région. Toutefois, la faiblesse de cette implication traduit largement la position secondaire et discrète qu’ils occupèrent dans ces Etats comme celui du Kaabu. En dehors du Fouta Djallon et du Fouta Tooro, où ils furent les acteurs principaux de la construction de ces vastes ensembles politiques, les Peul ont été sous la domination des Manding dans l’empire du Kaabu. Pourtant, les Peul ne forment pas un groupe ethnique réellement homogène. Suivant le milieu habité et les conditions géographiques, politiques et sociales, les Peul présentent une 74 Vieillard G. « les Peuls dans notre Afrique » Le Monde colonial illustré, n°174, 1937 : pp. 288-289. 75 Delafosse M., Haut Sénégal Niger : les pays, les peuples, les langues, l’histoire et les civilisations, Paris, Larose, 1911, 3 vol. réédité en 1972. 76 Tauxier L., Mœurs et historiques des Peuls, Paris, Payot, 1937: 422 p. 77 Ba, A. H. Amkoullel, l’Enfant peul, Mémoires, Paris, Flammarion, 2003 : p. 19 43 remarquable hétérogénéité. En effet, on distingue en Haute Casamance plusieurs mouvements successifs de population Peul : La première vague serait celle qui se confond avec le groupe des Manding venus de l’est au temps de l’Empire du Mali. Les traditions locales, aussi bien Manding que Peul, soulignent avec insistance l’ancienneté de la cohabitation des uns avec les autres. C’est ce qui justifie l’affirmation : « Là où le Mandingue séjourne, il est rejoint le soir par un Peul78 ». Cette longue cohabitation révèle dans une large mesure la complémentarité qui existe entre les deux communautés. En effet, ces Peul « originaires du Kassounké (Soudan) se sont installés dans le Patim entre Kandia et Banenkourou 79 ». Certaines sources orales80 affirment que l’expédition de Tiramaghan Traoré vers l’ouest comprenait une forte colonie de Peul. La deuxième vague de migration est à mettre en rapport avec le vaste mouvement de populations sous la direction de Kolli Tenguella au XVème siècle. En effet, l’action de ce dernier a largement contribué à la dispersion des Peul en Sénégambie. Toutes les traditions recueillies font état de l’ampleur de ce mouvement de populations auquel la Haute Casamance doit son peuplement81 . Quant à Louis Tauxier, dont les propos nous ont été rapportés par Oumar Kane, écrit au sujet des Fulakunda qu’ils “sont venus du nord au sud en 1534 avec Koli Tenguella fils d’un chef Peul battu et tué dans le cercle de Nioro en 1512 par les armées du second Empire Songhoy. Son fils se rejeta sur le Fouta Tooro où il établit sa domination, puis descendant jusqu’en Guinée Française et la Haute-Gambie où il établit ses contingents peul. Ce sont là des Toucouleurs Foulakonda plus cultivateurs que les peul de l’invasion du Macina82”. Ce témoignage de Louis Tauxier établit un lien logique entre le mouvement de Koli Tenguella et le peuplement du Fuladu. Même si l’on peut toujours émettre des réserves à propos de cette migration, il demeure que les traditions orales sont encore vivantes sur le passage de Koli Tenguelle au Fuladu et l’impact économique et social engendré par sa migration. Toujours sensible au faible impact des migrations Peul sur la stabilité politique de l’Empire du Kaabu, Joyce Bowmans Hawkins soutient: « There were a series of fulbe invasions beginning in the fifteenth century, led by Temala and Coli, which brought the fulbe into Guinea-Bissau had 78 Entretien avec Yéro Pira Baldé, Kolda 22 janvier 2004. 79 ANS, 10D5/2, Monographie du cercle de Casamance (s.d) 80 Entretien avec Yéro Pira Baldé, Kolda 22 janvier 2004. 81 Entretien avec Yéro Pira Baldé, Kolda 22 janvier 2004 82 Kane O., La première hégémonie peule. Le Fuuta tooro de Koli Tenella à Almaami Abdul, Paris, Karthal-Presses Universitaires de Dakar, 2004 : p. 137. 44 little effect on the political stability of the mandinka state of Kaabu, but it did result in the migration of fulbe large numbers who stayed in this area…The number of fulbe in the area continue to increase throughout the sixteenth and seventeenth centuries, but not throught warfar83 ”. Ces Peul au cours de leurs migrations en Guinée portugaise ont sans doute fait halte en Haute Casamance où ils auraient séjourné. Ce mouvement eut de profondes répercussions sociopolitiques en Afrique de l’ouest, car les populations biafades, papels, mankagnes étaient majoritairement hostiles aux Peul. Cette hostilité manifeste à leur encontre dans le Kaabu portugais provoqua une émigration des Fulbé vers la Haute Casamance. Par ailleurs, les Peul venus particulièrement du NordSénégal et de la boucle du Niger, peuplèrent à leur tour les parties septentrionales et orientales du Fuladu. Ainsi le mouvement de Tenguella s’inscrit dans un large cadre de restructuration sociopolitique et économique de la Sénégambie au cours des XVème et XVIIème siècles. L’insécurité aurait été un élément déterminant des mouvements de populations peules au cours de cette période. « Fuyant les persécutions de l’empereur Sonni Ali Ber, les Dicko auraient quitté les régions du Macina dans le courant du XVème siècle pour des régions plus propices à leur existence84 ». Il faudra distinguer cette seconde vague de la première. Le mouvement de Koli serait quantitativement beaucoup plus important. Et ces groupements de Peul se sont surtout implantés dans les provinces du Kantora et du Jimara (Quinn, 1971 :428). Alamada, cité par Texeira Da Mota affirme : « A l’origine d’une telle migration se trouvent les luttes et persécutions faites aux Fula par Sonni Ali, l’empereur songhai85 ». Ainsi, le grand mouvement de population peul qui secoua la Sénégambie et l’Afrique de l’ouest de façon générale date de cette époque. Donc, dès le XVIème siècle et au fil des migrations, une grande communauté peule se constitua en Haute Casamance
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