Morphologie et diamètre des fibres
Morphologie et diamètre des fibres
L’observation de la surface des fibres à l’état brut de fabrication a mis en évidence des défauts différents : des entailles, des stries et des traces d’endommagements provoqués, vraisemblablement, par les différents outils de fabrication, notamment les filières ou le contact entre fibres, lors du bobinage. Il est impératif, avant de réaliser tout essai mécanique, d’observer la surface des fibres brutes et la présence éventuelle de défauts. Ceux-ci ne doivent pas en effet être attribués par erreur à la sollicitation mécanique. Pour chaque type de fibre, une importante dispersion du diamètre a été observée entre plusieurs monofilaments extraits de la même mèche. Le diamètre s’est avéré homogène le long d’un même monofilament et la section transversale des fibres reste circulaire, à l’exception de la fibre PET-A où un grand nombre de défauts sur sa surface induisent une dispersion beaucoup plus importante des mesures de diamètre.
Comportement en traction
De manière générale, les essais de traction ont mis en évidence une différence de comportement entre les fibres de polyamide et les fibres de polyester, notamment du point de vue de la rigidité : les fibres PET possèdent un module d’Young initial environ deux fois plus élevé que celui des fibres PA66 (10.2 contre 4.8 GPa). Cette différence s’explique par la rigidification de la structure moléculaire par les noyaux benzéniques du PET. Chapitre 6. Synthèse et discussion 134 Les fibres PA66-A et PA66-B ont montré un comportement en traction quasi-similaire, au moins jusqu’à 15% de déformation. Au-delà, il y a un léger écart entre les deux courbes, avec une rigidité, une déformation et une résistance à rupture supérieures pour la fibre PA66-B. Conformément aux résultats de la micro-spectroscopie Raman, discutés ci-après, les courbes de traction des fibres PA66 et PET correspondraient à la moyenne du comportement en traction de la peau, étant en compression, et du cœur, étant en traction (Fig. 6.1). Ainsi, les fibres se comportent comme des matériaux composites. Peau Coeur s (GPa) e (%) Courbe moyenne Fig. 6.1 Une courbe de traction d’une fibre thermoplastique est le résultat du comportement entre sa peau et son cœur. Couplée à ces observations, l’analyse des faciès de rupture des fibres obtenus en traction a révélé un mécanisme de rupture identique pour les deux types de fibres PA66 et les deux types de fibres PET : la fissure est amorcée sur ou près de la surface, ensuite elle se propage lentement jusqu’à arriver à la rupture finale. Les deux parties de rupture complémentaires présentent une zone de propagation lente de fissure sous forme de “V” et une zone de propagation rapide de fissure. 6.3 Comportement en fatigue. Pour provoquer un mécanisme de fatigue dans les fibres PA66 et PET, l’amplitude de charge cyclique doit être suffisamment grande, avec une charge minimale inférieure à un certain seuil (Fig. 6.2). En sollicitant les fibres avec une charge minimale supérieure à ce seuil, la fatigue disparaît. Chapitre 6. Synthèse et discussion 135 Fatigue Amplitude de charge Fnulle Fmin Seuil de charge minimale Charge Nombre de cycles Fmax Fig.
Conditions de sollicitation pour provoquer le phénomène de fatigue dans les fibres PA66 et PET
Les nombreux essais en sollicitation cyclique ont mis en évidence la coexistence des mécanismes de fatigue et de fluage en fonction des conditions de chargement appliquées. Selon le type de fibre et à partir de certains seuils de charges minimale et maximale, la fatigue est annihilée laissant place au fluage qui devient majoritaire. L’influence des conditions de chargement a été largement étudiée, démontrant qu’une augmentation de la charge maximale induit une diminution de la durée de vie médiane et une légère augmentation de la charge minimale conduit à une augmentation de cette durée de vie. 6.3.1 Critère de la charge maximale. Le tableau 6.1 compare les résultats de durée de vie médiane pour les quatre types de fibres analysés avec une charge minimale nulle. Durée de vie médiane en nombre de cycles Fibre 0-60% sR 0-65% sR 0-70% sR 0-75% sR 0-80% sR 0-85% sR 0-90% sR PA66-A 214 200 151 200 91 800 PA66-B 360 000 153 500 54 000 PET-A 433 800 106 200 PET -B 378 000 Tableau 6.1 Durée de vie médiane des quatre types de fibres pour différentes conditions de charge maximale. Seules les fibres ayant rompu avec un faciès de fatigue ont été comptabilisées. L’étude comparative du comportement en fatigue des fibres de polyamide (charge maximale et durée de vie) a démontré une meilleure résistance de la fibre PA66-A par rapport à la fibre PA66-B, en dépit d’un comportement en traction quasi-identique. L’évolution de la durée de vie médiane en fonction de la charge maximale appliquée (Fig. 6.3) laisse apparaître plusieurs différences entre les deux fibres PA66 : Chapitre 6. Synthèse et discussion 136 · La fibre PA66-A supporte des charges maximales supérieures à celles de la fibre PA66-B et possède donc une meilleure résistance à la fatigue. En effet, pour une même durée de vie médiane, la fibre PA66-A doit être sollicitée avec une charge maximale supérieure d’environ 20% à celle de la fibre PA66-B (80% contre 65% de la contrainte à rupture). · Les essais cycliques ont montré que les mécanismes d’endommagement par fluage et par fatigue coexistent lors de la sollicitation cyclique et qu’il y a toujours une compétition entre les deux mécanismes. Dans des conditions de charge maximale très élevée ou très basse, le processus de fluage prédomine. Par contre, pour des charges maximales intermédiaires, la fatigue devient le phénomène prédominant. La tendance asymptotique de la figure 6.3 justifie cet effet. Pour la fibre PA66-A soumise à des charges maximales supérieures à 85% de la contrainte à rupture, il a été observé une rupture des échantillons par fluage ou par traction. Une charge maximale au-dessous de 75% de la contrainte à rupture implique plutôt des ruptures en fluage ou dans le pire des cas, une rupture dans les mors résultante de l’application de plusieurs millions de cycles (jusqu’à 7.86×106 cycles pour une charge maximale de 65% de la contrainte à rupture). La fibre PA66-B a présenté le même type de comportement : avec des charges maximales au-dessus de 70% de la contrainte à rupture. La rupture est provoquée par un mécanisme de fluage ou de traction et pour des charges maximales inférieures à 60%, elle apparaît soit en fluage, soit dans les mors. 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500 50 60 70 80 90 100 PA66-A PA66-B % Charge maximale Durée de vie médiane (cycles x103 ) Fig. 6.3 Evolution de la durée de vie médiane en fonction du pourcentage de charge maximale pour les fibres PA66. Suite à ces observations, il est imaginable de tracer des “courbes de coexistence” entre les mécanismes de fatigue et de fluage. Prenons le cas de la fibre PA66-A (Fig. 6.4) : lors d’une sollicitation cyclique, par exemple avec une charge maximale de 70% de la contrainte à rupture, le mécanisme de fluage prédomine, alors qu’avec une charge maximale de 80% de la contrainte à rupture le mécanisme de fatigue est plus important. Pour des valeurs proches de la contrainte à rupture (100%), une distinction entre les mécanismes de fluage et de traction sera difficile à faire. Traction ? % Charge maximale Durée de vie médiane (cycles x103 ) Fluage Fatigue Fig. 6.4 “Courbes de coexistence” des processus de fatigue et de fluage dans la fibre PA66-A. Une étude similaire n’a pas pu être réalisée sur les fibres PET à cause du faible nombre d’échantillons ayant présenté une rupture en fatigue. 6.3.2 Critère de la charge minimale. Une légère augmentation de la charge minimale permet d’augmenter considérablement la durée de vie médiane des fibres. Par exemple, pour la fibre PA66-A (Fig. 6.5), le fait de passer d’une charge minimale de 0 à 5% de la contrainte à rupture, tout en conservant la même valeur de charge maximale, augmente la durée de vie médiane de 151000 à 2 millions de cycles. L’ajustement des courbes de la figure 6.5 montre une tendance asymptotique, ce qui signifie que pour des charges minimales supérieures, la fibre sollicitée ne présente plus un mécanisme de fatigue mais plutôt un mécanisme de fluage. Cette hypothèse se confirme par les tableaux 4.8 et 4.9. En plus, pour des échantillons sollicités dans des conditions n’entraînant pas de fatigue (10-80% sR), un s’est rompu en fluage après plus de 15 millions de cycles et un autre ne s’est pas rompu avant 25 millions de cycles (cf. §4.2.2.1).