MORPHOANATOMIE, PREVALENCE ET DIVERSITE GENETIQUE DES CESTODES (ANOPLOCEPHALIDAE) PARASITES DES OVINS
Caractères morpho-anatomiques des cestodes
Morphologie
Les Cestodes sont des vers plats à corps segmenté et d’aspect rubané. Ils sont dépourvus de tube digestif et se nourrissent par osmose à travers leur tégument. Leur corps est de taille variable. Certains peuvent atteindre 4 à 5 mètres (Moniezia benedeni, Thysaniezia ovilla), alors que d’autres ne dépassent pas le mètre (Stilesia globipunctata) (Abassa, 1975). Il comprend trois parties : l’extrémité antérieure ou scolex, suivi ou non d’un cou et de la chaîne des proglottis du strobile. (Figure 1) – Le scolex présente les organes de fixations: ventouses, pseudobothridies et crochets. Les ventouses ou acétabulums, au nombre de quatre, sont à ouverture circulaire et caractéristiques de l’ordre des Cyclophyllidea, contrairement aux pseudobothridies, au nombre de deux, qui présentent une ouverture linéaire et caractérisent l’ordre des Pseudophyllidea. Les crochets, de forme très variable (poignard, fourche, aiguillon), s’ils sont présents, sont disposés en une ou plusieurs couronnes. – Le cou est la partie la plus étroite du corps, il suit le scolex. C’est la zone de prolifération qui engendre le strobile. Il porte ou non des épines et/ou des organes sensoriels (Sène, 1998). – Le strobile est constitué d’une succession de segments appelés proglottis (ou anneaux), en nombre variable et de forme différente. Cette différence dépend d’une part de l’espèce parasite et d’autre part de l’état de maturité sexuelle des proglottis (immature, sexués, gravides). En partant du cou, on rencontre successivement des proglottis immatures matures et gravides ou cucurbitains. Le strobile peut être, suivant l’espèce parasite, de type craspédote (le bord antérieur de chaque proglottis s’emboite dans le bord postérieur du proglottis qui le précède) ou de type acraspédote (deux proglottis successifs ont la même largeur) (Justine, 1998). 4 Figure 1: Morphologie externe d’un cestode (exemple: Glossobothrium nipponicum) (Bâ, 2000)
Anatomie
Les cestodes sont des métazoaires triploblastiques acœlomates. Leur corps est formé de l’extérieur vers l’intérieur par un tégument périphérique, perméable, munie de papilles et de microtriches. Ces dernières jouent un rôle dans l’absorption des substances nutritives. Sous le tégument, on note la présence d’une membrane basale qui repose sur un système musculaire composé de deux couches concentriques (une couche externe à fibres circulaires et une couche interne à fibres longitudinales). Ce système musculaire entoure un parenchyme central, qui est un tissu lâche remplissant le corps du parasite et renfermant les appareils et organes internes. Ces derniers sont organisés en différents appareils: – L’appareil osmo-régulateur ou excréteur composé de cellules flamme et de deux paires de canaux longitudinaux (deux ventraux et deux dorsaux) s’ouvrant sur le bord extérieur du dernier anneau. – L’appareil reproducteur formé d’organes génitaux simples comme chez les Thysaniezia ou doubles comme chez les Moniezia. Les segments antérieurs étant immatures, l’appareil reproducteur n’est visible qu’au niveau des anneaux moyens et postérieurs. Les anneaux sont hermaphrodites et il s’agit d’un hermaphrodisme protérandre, par contre certains cas de protogynies ont été signalé par Euzéby (1966) chez des cestodes d’oiseaux. L’appareil reproducteur mâle comprend un nombre variable de testicules (jusqu’à plusieurs centaines) sphériques ou ovoïdes, répartis dans tout le proglottis ou groupés en champs. Des testicules partent de petits canaux efférents qui confluent en un seul canal déférent qui se dilate pour former la vésicule séminal externe. Ce canal pénètre dans la poche 5 du cirre se dilate de nouveau donnant ainsi la vésicule séminale interne puis se prolonge par un canal éjaculateur terminé par un organe copulateur appelé cirre. La poche du cirre débouche dans l’atrium génital, à côté de l’orifice sexuel femelle. L’appareil génital femelle comprend un ovaire bilobé, prolongé par un oviducte qui se dilate en un ootype entouré de la glande de Mehlis (ou glande coquillère). Cet ootype reçoit le vitelloducte qui amène les secrétions des glandes vitéllogènes. Le vagin part de l’atrium génital et se dilate en un réceptacle séminal, puis il se rétrécit pour se jeter dans l’ootype. L’utérus peut prendre des dispositions différentes: tubulaire ou remplacé par un, deux ou plusieurs organes parutérins dans les anneaux gravides.
Famille des Anoplocephalidae
Les Anoplocephalidae sont parasites de l’intestin grêle et des canaux biliaires de Reptiles, d’Oiseaux et de Mammifères. Leur étude est très importante pour la médecine vétérinaire, car ils sont parasites d’herbivores en général (Bâ, 1989) et de petits ruminants en particulier (Nadège, 2006). Les Anoplocephalidae sont caractérisés par la présence d’un scolex inerme, dépourvu de rostre et de crochets, mais pourvu de quatre ventouses bien développées. Les proglottis sont plus larges que longs. Le strobile est craspédote ou acraspédote. Les organes reproducteurs sont uniques ou doubles. L’utérus peut être tubulaire, lobulaire ou subdivisé en plusieurs organes parutérins au niveau des anneaux gravides. Les œufs sont sphériques avec ou non un appareil piriforme (l’embryophore forme deux appendices effilés qui se croisent à leurs extrémités). 6 La famille des Anoplocephalidae comprend quatre sous-familles, les Anoplocephalinae Furman, 1907, les Inermicapsiferminae Lopez-Neyra, 1943, les Linstowiinae Fuhrmann, 1907 et les Thysanosomatinae Blanchard, 1981 et trente genres (Beveridge, 1994). Cependant seules les Anoplocephalinae et les Thysanosomatinae sont rencontrés chez les petits ruminants.
Les Anoplocephalinae
Les Anaplocephalinae sont caractérisés par la persistance de l’utérus dans les anneaux mûrs et la présence d’œufs à appareil piriforme. L’utérus est de forme tubulaire devenant sacciforme dans les proglottis gravides. Les segments du strobile sont craspédotes, les organes génitaux sont doubles. Les ovaires sont situés latéralement à proximité immédiat des canaux latéraux et à égale distance des bords antérieurs et postérieurs de chaque proglottis. Ils présentent une structure lobulée en forme de fer à cheval. Les pores génitaux sont latéraux et sont placés juste derrière les poches des cirres. Les testicules sont nombreux et les glandes vitéllogènes sont compactes et situées dans la concavité des ovaires. Ils présentent habituellement des glandes interproglottidiennes sur le bord postérieur des proglottis. Dans cette sous-famille seul le genre Moniezia Blanchard, 1981 a été signalé chez les petits ruminants (Euzéby, 1966; Bâ, 1989). Il comprend de nombreuses espèces dont Moniezia expansa Rudolphi, 1810 et de Moniezia benedeni Moniez, 1879 (Euzéby, 1966). Moniezia expansa est une espèce parasite de l’intestin grêle des ruminants, plus particulièrement des ovins (Paploray, 2002). Elle est caractérisée par un scolex large pourvu de quatre ventouses saillantes. Les glandes interproglottidiennes sont globuleuses, au nombre de 4 à 20 groupes alignés parallèlement au bord postérieur des proglottis. Les testicules sont répartis en deux ou quatre champs entre les canaux latéraux. Les œufs ont une forme pyramidale (Euzéby, 1966; Bâ, 1989). Moniezia benedeni est plus fréquente chez les bovins (Paploray, 2002). Les glandes interproglottidiennes sont diffuses et forment une ligne parallèle au bord postérieur des segments dans leur partie médiane. Les testicules forment un seul champ. I. 2. 2. Les Thysanosomatinae Les Thysanosomatinae présentent des anneaux plus larges que longs et des ventouses bien développées. Leur utérus, tubulaire, pouvant devenir très long et ondulé, renferme un, deux ou plusieurs organes parutérins dans les anneaux gravides. Ils présentent aussi des pores génitaux 7 simples irrégulièrement alternés et des œufs sans appareil piriforme (Morel, 1953 ; Euzéby, 1966; Troncy et al., 1981; Graber & Perrotin, 1983; Bâ, 1994). On rencontre dans la sous famille les genres Thysaniezia Rivolta, 1978, Stilesia Railliet, 1893 et Avitellina Gough, 1911 chez les Ruminants (Morel, 1969; Abassa, 1975; Vassiliades, 1981). Les Avitellina sont des vers étroits pouvant atteindre une longueur importante. La segmentation est peu distincte, de type acraspédote sauf dans les segments postérieurs qui sont cylindriques. Les testicules, peu nombreux, sont disposés en deux champs latéraux, chaque champ divisé en deux par les vaisseaux excréteurs. L’utérus est tubulaire devenant sacciforme et remplacé finalement par un seul organe parutérin contenant plusieurs œufs. Ils ne présentent pas de glande vitéllogènes distinctes. La principale espèce décrite chez les petits ruminants est Avitellina centripunctata Rivolta, 1874. Les Stilesia sont étroit comme les Avitellina, mais sont moins longs et toujours très plissés. Les testicules, peu nombreux sont disposés en deux champs latéraux. Comme les Avitellina, ils ne présentent pas de glandes vitéllogènes distinctes. Les organes parutérins sont au nombre de deux par segments mûrs. La principale espèce décrite est Stilesia globipunatata Rivolta, 1874. Les Thysaniezia sont des vers de grande taille dont la morphologie rappelle celle des Moniezia. Les testicules forment deux champs latéraux disposés en dehors des vaisseaux excréteurs et les glandes vitéllogènes sont rudimentaires. Les organes parutérins sont très nombreux et contiennent chacun plusieurs œufs. Une seule espèce est décrite chez les petits ruminants (Thysaniezia ovilla Rivolta, 1878).
Le Cycle de développement des Anoplocephalidae
Le cycle de développement des Anoplocephalidae a fait l’objet de nombreuses études (Daubney, 1928) (Stunkard, 1937). Le cycle est dixène et débute par l’ingestion par un acarien, de la famille des Oribatidae, des œufs émis avec les fèces du ruminant parasité. Ces acariens vivent préférentiellement dans le sol des prairies acides, humides, riches en humus et pâturées en permanence. Ils sont essentiellement coprophages, ce qui facilite leur infestation. Les œufs embryonnés libèrent des embryons hexacanthes dans le tube digestif de l’hôte intermédiaire qu’ils traversent et gagnent la cavité générale où ils se transforment en larve cysticercoïde. La vitesse de développement du parasite dans l’oribate est variable, les larves deviennent mûres entre 15 et 16 semaines (Stunkard, 1938; Graber & Gruvel, 1964). Les herbivores s’infestent dans les pâturages en broutant de l’herbe sur lesquelles se trouve des oribates infestés. Les cysticercoïdes sont libérés dans le tube digestif des ruminants et le 8 scolex se fixe sur la muqueuse intestinale. La croissance des cestodes est relativement lente car selon Graber & Perrotin (1983) au bout de 8 jours la taille n’est que de 8,5 cm et elle n’est définitive qu’entre 35-55 jours. La durée de vie du parasite chez l’hôte définitif est estimée entre 65 à 70 jours (Seddon, 1931).
INTRODUCTION |