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Effets indésirables (EI) des traitements anticancéreux
Pour prendre en charge correctement les malades, il est important de prêter attention aux conséquences ravageuses que pourraient induire les thérapies anticancéreuses. Leurs effets indésirables sont multiples et presque inévitables [39].Notons que la toxicité des médicaments anticancéreux est très variable d’un patient à un autre. Cette variabilité de la réponse individuelle est multifactorielle et pourrait dépendre de l’âge du patient, de son sexe, de la comorbidité, de l’histoire de la maladie, des traitements associés et du polymorphisme génétique [40]. En effet, le rôle de la pharmacogénétique s’est avéré crucial dans le choix de la thérapeutique médicamenteuse et la variation entre les phénotypes peut modifier la toxicité des traitements entre les patients. Ces traitements aussi variables qu’ils le soient peuvent causer des effets délétères qui sont fonction de l’activité cinétique et métabolique des tissus sains de l’organisme, des doses utilisées, de la toxicité spécifique de chaque cytotoxique et de leur toxicité cumulative [7]. Par conséquent, nous pouvons classer les EI selon : l’organe atteint par la maladie, le système touché par l’EI [39], le traitement qui l’a induit, les effets spécifiques ou non spécifiques à une classe ou à une molécule donnée, la gravité de l’effet et ses répercussions sur la qualité de vie de la personne, le temps et la durée d’apparition de l’EI. On pourrait donc faire la distinction entre une toxicité aiguë et chronique et les EI à long termes et les EI latents.
Toxicité hématologique
Le tissu hématopoïétique est situé principalement au niveau de la moelle osseuse. Il assure la fabrication des cellules du sang (globules rouges, globules blancs et les plaquettes). L’aplasie médullaire est définie comme une diminution importante du nombre de ces cellules qui se traduit par une leucopénie, une anémie et/ou une thrombopénie. Chez un patient atteint d’un cancer, la toxicité hématologique découle de la maladie elle-même ou des traitements anti cancéreux [41]. Elle apparait généralement après 7 à 10 jours d’une exposition à la chimiothérapie et sa sévérité varie selon l’agent qui l’a induit, la dose administrée et la durée totale du traitement [42]. Cette toxicité est le plus souvent réversible, non cumulative et dose dépendante sauf pour le Nitrosourée, la Mitomycine C, le Busulfan et le Carboplatine qui présentent des toxicités cumulatives, retardées et durables [43].
Les cellules du sang sont les premières à être agressées par la chimiothérapie et ceci s’explique par le mode d’action de ces molécules cytotoxiques. Cette cytotoxicité sera d’autant plus efficace que la vitesse de division est élevée ce qui est le cas des cellules cancéreuses mais malheureusement aussi celui de toutes les lignées hématopoïétiques. La différence entre les délais d’apparition de la leucopénie, la thrombopénie et l’anémie découle principalement de l’écart qui existe entre la durée de vie des globules blancs (4-5 jours), des plaquettes (8-12 jours) et des globules rouges (120 jours). C’est ce qui explique que l’effet antimitotique affecte successivement les globules blancs, puis les plaquettes et les globules rouges en dernier [7]. D’autre part, on a trouvé que l’association de la radiothérapie à la chimiothérapie accentue le risque d’apparition de la toxicité hématologique. En effet, le résultat de l’étude de Wang et al. [44] a démontré après une analyse rétrospective comparative d’une population de femmes âgées de plus de 70 ans et atteintes d’un cancer du col de l’utérus, traitées par une chimio-radiothérapie concomitante ou radiothérapie uniquement, que l’incidence de la toxicité hématologique est respectivement de 62,5 % contre 16,3 %.
Une leucopénie correspond à une diminution du nombre total de globule blancs (GB). La leucopénie est confirmée lorsque le nombre total de GB est inférieur à 4×109/L [45]. Entre les cures et à la suite d’un traitement par chimio ou la radiothérapie, la baisse des GB est un événement prévisible et attendu [7]. Cette leucopénie apparait généralement au bout de 7 à 10 jours après la chimiothérapie, pour devenir minimale (le nadir) entre le 14ème et le 18ème jour avant d’augmenter et revenir à la normale au bout de 3 à 4 semaines [42, 39]. L’effondrement du nombre des PNN ou neutropénie est quasi-systématique après une chimiothérapie et peut parfois s’associer à une baisse des lymphocytes. La lymphopénie s’observe par exemple à la suite d’un traitement par l’Alemtuzumab, un anticorps monoclonal, qui provoque la lyse des lymphocytes B et les lymphocytes T normaux et malin en se liant à la glycoprotéine CD52 [30, 39]. Etant donné que les leucocytes ont pour rôle de défendre l’organisme contre les agressions, la leucopénie expose le patient aux infections opportunistes, risque de réactiver les infections virales préexistantes et augmente le risque de la colonisation par certaines espèces faisant parties du microbiote de l’homme (comme le Candida) qui deviennent invasives [39].
La thrombopénie est définie par une numérotation plaquettaire inférieure à 150000/mm3 indépendamment de l’âge et du sexe [46]. Elle peut survenir peu après le début de la chimiothérapie, mais en général, elle apparait au bout de 10 à 14 jours après la première séance de chimiothérapie et expose le patient au risque hémorragique. Sa sévérité dépend de l’agent anticancéreux, la dose et la fréquence d’administration [47].
L’anémie est définie par un taux d’Hémoglobines (Hb) <13g/dl chez l’homme et (Hb) <12g/dl chez la femme [45]. L’Hb est contenue dans les globules rouges, fabriquée par la moelle osseuse et assure le transport de l’oxygène vers tous les organes du corps. L’anémie est une complication relativement fréquente chez les patients atteints de cancer [42]. Ceci a été confirmé par une étude épidémiologique, observationnelle, rétrospective et multicentrique réalisée en Espagne par Muñoz-Langa et al. [48]. Elle a démontré que sur 349 patients atteints d’un cancer du poumon 64 souffraient d’une anémie avec une prévalence de 18,3% et que l’incidence de l’anémie pour le reste de la population ayant un taux normal d’Hb avant le début de la chimiothérapie était de 80,7 % [48]. Chez un patient atteint d’un cancer les étiologies de l’anémie sont multiples. Elle peut être due à : une infiltration de la moelle osseuse par des cellules malignes, une diminution de la production de l’Hb secondaire au traitement, une insuffisance rénale, une radiothérapie, une carence en fer ou un faible niveau d’érythropoïétine [42, 49]. Certes, les conséquences d’une anémie sont moins graves que celles d’une neutropénie. En revanche, les signes cliniques telles que la fatigue, les essoufflements, la diminution de l’attention et les troubles de la mémoire affectent potentiellement la qualité de vie de la personne et ne doivent pas être négligés [48-51].
Toxicité digestive
Le tractus gastro-intestinal, qui s’étend de la bouche à l’anus, est un organe vital indispensable. Il est non seulement essentiel pour la nutrition mais aussi pour la protection contre les agents pathogènes ingérés, les allergènes et les toxines [52]. La plupart des patients atteints de cancer reçoivent une chimiothérapie avant ou après la chirurgie combinée ou non à la radiothérapie. Bien que la survie des patients se soit nettement améliorée ces dernières années, les effets indésirables gastro-intestinaux exposent le patient à des altérations qui affectent sa qualité de vie. Les nausées et les vomissements sont parmi les EI les plus pénibles et les plus redoutés par les patients atteints de cancer [53]. Ils peuvent constituer un obstacle majeur dans la prise en charge de la maladie en entrainant un retard, une réduction de la dose ou même un arrêt du traitement [39, 42, 53]. La survenue de ces symptômes est très souvent multifactorielle. Elle dépend d’abord du potentiel émétisant de l’agent anticancéreux. Le « National Comprehensive Cancer Network » propose une classification des agents anticancéreux selon le pouvoir émétisant [41]. La Gemcitabine, le Methotrexate et le Paclitaxel sont considérés comme des agents faiblement émétisants. Le Carboplatine, le Cyclophosphamide et l’Irinotecan ont un effet modéré alors que le Cisplatine (>50mg/m2), la Doxorubicine (Doxo) (>60mg/m2) et la Dacarbazine ont un pouvoir fortement émétisant [42]. Le deuxième facteur à prendre en compte est la variabilité de la réaction des patients face aux traitements. En effet, la femme, le sujet <50 ans, les malades anxieux, les patients avec des antécédents de nausées gravidiques ou de mal de transport sont plus susceptibles de développer des nausées et vomissements [50]. Cependant, en cancérologie il est habituel de classer les différents types de vomissements en : aigus (surviennent dans les 24h post-chimiothérapie), retardés (débutent au moins 24h post-chimiothérapie et peuvent persister jusqu’à 5 jours post-chimiothérapie) ou anticipés (apparaissent avant le début de la cure) [39, 42, 50].
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES SUR LE CANCER ET LES TRAITEMENTS ANTICANCEREUX
1. CANCER
1.1. Définition
1.2. Classification
1.3. Physiopathologie
1.3.1. Rappels sur le cycle cellulaire normal
1.3.2. Cancérogenèse
1.4. Causes
1.5. Épidémiologie
2. TRAITEMENT ANTICANCEREUX
2.1. Traitements conventionnels
2.1.1. Chirurgie
2.1.2. Radiothérapie
2.1.3. Chimiothérapie
2.2. Autres types de traitement
2.2.1. Immunothérapie
2.2.2. Phytothérapie
2.2.3. Homéopathie
2.1.4. Bactériothérapie et virothérapie
2.1.4.1. Bactériothérapie
2.1.4.2. Virothérapie
2.3. Effets indésirables (EI) des traitements anticancéreux
2.3.2. Toxicité digestive
2.3.3. Les mucites et autres atteintes buccales
2.3.4. Atteintes de la peau et des phanères
2.3.5. Toxicité organique spécifique
2.3.6. Troubles généraux
2.3.7. Autres effets indésirables
DEUXIEME PARTIE : INTERET DE LA PHYTOTHERAPIE DANS LES SOINS PALLIATIFS DU CANCER
1. DEFINITIONS DES SOINS PALLIATIFS ET MEDECINES NON CONVENTIONNELLES
1.1. Soins palliatifs
1.2. Médecines non conventionnelles et complémentaires
2. MONOGRAPHIES DE PLANTES UTILISEES DANS LES SOINS PALLIATIFS EN ONCOLOGIE
2.1. Gingembre
2.2. Desmodium
2.3. Chardon Marie
2.4. Ginseng
2.5. Safran
2.6. Thé vert
2.7. Graviola
3. EFFETS THERAPEUTIQUES DES PLANTES UTILISABLES DANS LES SOINS PALLIATIFS
3.1. Réduction des nausées et des vomissements
3.2. Néphroprotection
3.3. Hépatoprotection
3.4. Cardioprotection
3.5. Radioprotection
3.6. Immunostimulation
3.7. Réduction de la toxicité hématologique
CONCLUSION
REFERENCES