Modes de transmission des parasites intestinaux généralités
La majorité des parasitoses intestinales sont des pathologies liées au « péril fécal », c’est-à-dire qu’elles sont directement associées aux excréments, avec comme vecteur de transmission une contamination dite oro-fécale. Celle-ci peut être « directe », de personne à personne (mains souillées) ou « indirecte » (eau ou aliments souillés par les excréments). Certaines vont avoir un mode de transmission différent, en particulier pour les helminthiases. C’est par exemple le cas de l’anguillule (Strongyloïdes stercoralis), les bilharzioses (Schistosoma mansoni) l’ankylostome (Ancylostoma duodenale, Necator americanus) qui vont pénétrer dans l’organisme humain par voie transcutanée lors d’un contact avec un sol contaminé ou lors de baignade en eau douce (bilharziose). Si les protozoaires se développent très rapidement après la contamination dans l’intestin, de nombreux helminthes effectuent un cycle de développement dans l’organisme et ne se retrouvent dans l’intestin que plusieurs semaines après la contamination. Les protozoaires sont des êtres unicellulaires, capables de se déplacer grâce à des pseudopodes, des flagelles, une membrane ondulante, des cils ou des mouvements de torsion du cytosquelette. Au cours de leur cycle de vie, ils existent sous deux stades différents : une forme végétative ou « trophozoïte » dotée de mobilité et capable de se diviser et une forme kystique, forme de dissémination et de résistance dans le milieu extérieur. Les helminthes sont des êtres pluricellulaires qui effectuent un cycle de développement pouvant être complexe au cours duquel ils évoluent de l’œuf, œufs embryonnaire, larves aux vers adultes. Dans les selles, selon les espèces en cause, ils seront observables à ces différents stades de développement.
Principaux signes cliniques
La symptomatologie est variée mais dominée par les diarrhées, survenant sur un mode aigu, sub aiguë ou chronique. Les diarrhées sont définies par l’émission d’une quantité anormale de selles et d’eau (plus de 300 grammes ou 3 selles molles par 24heures). On parle de caractère aigu lorsque la durée des symptômes est inférieure à 2 semaines, et chronique lorsque la durée des symptômes est supérieure à 4 semaines. Ces selles peuvent prendre différents aspects, avec des formes sanglantes, glaireuses, aqueuses. L’échelle de Bristol est utilisée pour les classer de manière standardisée en fonction de leur consistance (Annexe 1). Parmi les autres signes digestifs, on peut retrouver des douleurs abdominales à type de crampe, en barre, des nausées et des vomissements. Concernant les signes généraux, une altération de l’état général (AEG) avec fièvre, asthénie, anorexie et perte de poids (liée à l’anorexie et/ou aux diarrhées) peuvent venir compléter le tableau clinique. Les formes de diarrhées aiguë de type dysentérique sont surtout rencontrés avec E. histolytica, Giardia intestinalis, Cryptosporidium spp et Balantidium coli (beaucoup plus rare en terme de fréquence). Des formes asymptomatiques sont possibles, elles sont même majoritaires dans certaines infections telles que Ascaris lumbricoides, Cyclospora cayetanensis, Dientamoeba fragilis, Balantidium coli, Enterobius vermicularis, Fasciolopsis buski, Heterophyes heterophyes Taenia spp et Diphyllobothrium spp. Il peut être important dans certaines populations de pouvoir cibler la détection de ces formes asymptomatiques, dans un souci de recueil de données épidémiologiques (screening de populations) avec comme, principal objectif l’organisation de campagne de déparasitage. Par exemple, il a été montré que chez l’enfant d’âge pré-scolaire, les helminthiases peuvent être sources de carence alimentaire, avec pour conséquence des retards sur le plan cognitif et physique.4 Certains parasites comme Blastocystis spp et Dientamoeba fragilis ont un rôle en pathologie humaine encore débattu, mais semblent être témoin d’une dysbiose intestinale et d’un contact avec le péril fécal. La médecine leur apporte de plus en plus d’intérêts dans le diagnostic des troubles intestinaux. Des signes cutanés peuvent être observés. Par exemple dans l’oxyurose (due à Enterobius vermicularis), un prurit anal vespéral est classique, pouvant s’accompagner de lésions de grattage surinfectées. D’autres parasites (S.stercoralis, A. duodenale, N. americanus, Schistosoma spp…) vont causer des éruptions cutanées prurigineuses maculo-papuleuses (urticaire), localisées, parfois généralisées (Schistosoma spp.). Ces manifestations cutanées vont être en lien avec le cycle parasitaire (pénétration et migration dans l’organisme par voie cutanée). Le signe de Larva currens est un symptôme lié à la migration S. stercoralis à travers les tissus sous-cutanés et se présente comme une dermite rampante associant des stries rouges serpigineuses, prurigineuses, et en relief (Annexe 2). Le syndrome de Loeffler correspond à une pneumopathie avec la présence d’éosinophiles. Cliniquement, une toux sèche, de la fièvre sont retrouvées. Ascaris lumbricoides est la principale cause du syndrome de Loeffler. Parmi les autres étiologies, nous pouvons citer S. stercoralis, A. duodenale, N. americanus, Schistosoma spp. Des tableaux de pleuropneumopathies sont décrits pour E. histolytica dans sa forme extra intestinale, associant de la toux, de la fièvre, une altération de l’état général. Certaines parasitoses vont entrainer des lésions au niveau du parenchyme hépatique. C’est le cas par exemple de l’amibiase hépatique (due à E. histolytica) à l’origine d’un abcès tissulaire, qui fait suite à la localisation colique de l’amibe (clinique ou asymptomatique). Cependant il peut arriver qu’au stade tissulaire aucun parasites ne soient retrouvés dans le tube digestif (TD). Dans la bilharziose (Schistosoma spp.), des atteintes hépatiques à type de fibrose des espaces péri-portaux ont été décrits. Cela va conduire à un tableau typique d’hypertension portale avec hépatosplénomégalie, varices œsophagiennes et hémorragies digestives. Fasciola hepatica est susceptible de donner un tableau d’hépatite toxi-infectieuse avec fièvre, AEG, douleurs à l’hypochondre droit, hépatomégalie sensible, parfois ictère. En l’absence de prise en charge, des complications mécaniques liées à la présence des douves dans les voies biliaires surviennent (ictère, crise de colique hépatique, accès d’angiocholite, cholécystite). Les distomatoses hépatiques dues à Clonorchis simensis, Opistorchis spp sont souvent asymptomatiques, sauf quand la charge parasitaire est importante : le tableau principal est la cholestase. Au niveau neurologique, la principale entité à noter est la cysticercose due à Taenia solium (stade larvaire). Elle est souvent révélée par une crise convulsive (en cas de localisation parenchymateuse), ou alors par une hypertension intra-crânienne (en cas de localisation sousarachnoïdienne). La bilharziose peut également entrainer des lésions neurologiques (myélite transverse, compression médullaire, hypertension intra-crânienne) dans sa forme chronique.