MODÉLISATIONS ET DE SIMULATIONS URBAINES

 MODÉLISATIONS ET DE SIMULATIONS URBAINES

Problématiques liées à la modélisation des dynamiques urbaines

La prise de conscience des effets néfastes de l’utilisation non maîtrisée de l’espace et l’émergence du concept de développement durable ont fait évoluer l’appréhension des problématiques urbaines. Désormais les aménageurs doivent reconsidérer ces problèmes dans toute leur globalité. Il est alors devenu évident, pour les acteurs de la gestion du territoire, que la maîtrise de cette tâche complexe [Laaribi, 2000] nécessite l’utilisation d’une quantité d’informations plus grande sur le territoire ainsi que des méthodes et outils d’analyse, de modélisation et d’aide à la décision plus puissants et mieux adaptés. Au nombre des préoccupations de l’aménagement du territoire, figurent les problématiques de mobilité urbaine [Derycke et al., 1996 ; Sanders, 2006 ; Pumain et Mattei, 1998, 2003 ; Pumain et Saint-Julien, 1997 ; Pumain et Godard, 1996] et particulièrement, la mobilité résidentielle [Baumont, 1993 ; Weber, 1999 ; Frankhauser et al., 1998 ; Frankhauser et al., 1995 ; Frankhauser et al., 1997], objet de notre recherche. En effet, les questions de mobilité résidentielle se posent en termes de choix du ou des meilleur(s) emplacement(s) pour l’installation résidentielle pour un ménage selon un arbitrage relatif à l’importance des caractéristiques des sites en concurrence. Joerin et Bordin notent à ce sujet que l’étude de la localisation amène à prendre une décision très importante par le fait qu’elle étendra ses effets à long terme [Joerin, 1995 ; Bordin, 2002] autant pour la collectivité que pour les individus. Il est donc primordial que les méthodes choisies pour modéliser cette question soient rigoureuses et fiables. La ville et les interactions [Frankhauser, 1993, 1996 ; Frankhauser et al., 1995, op. cit. ; Pumain et Saint-Julien, 2001] qui s’y observent constituent un système éminemment complexe. On peut étudier ce dernier à une échelle microscopique selon le comportement de ses habitants, des acteurs individuels ou collectifs, ou bien à un niveau macroscopique en s’interrogeant par exemple sur les raisons de sa croissance ou de son déclin. De ce fait, la nécessité de maîtriser les pratiques de mobilités urbaines devient un enjeu important de la recherche urbaine appliquée. Mais ce besoin en termes de connaissances varie au cours du temps, en fonction de l’émergence de nouveaux problèmes et de nouvelles pratiques urbaines. Il s’agit maintenant essentiellement de pouvoir gérer au mieux l’aménagement urbain et cerner les liens d’articulation entre échelles microscopiques et macroscopiques tout en favorisant la mobilité des ménages  et des entreprises à l’intérieur des agglomérations et l’accès aux services et aux équipements. Pour parvenir à cette fin, la loi relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbain dite loi SRU propose aux collectivités locales d’harmoniser, à l’échelle des aires urbaines, leurs politiques d’aménagement et de développement grâce aux schémas de cohérence territoriaux (SCoT). Dans le but de construire un projet d’aménagement conforme aux directives de la loi SRU répondant aux objectifs du développement durable, il pourrait être utile de développer des scénarios prospectifs visant à simuler diverses dynamiques urbaines. Ainsi, des simulations assez vastes et variées des idées de développement urbain devront être testées afin de mettre en évidence les conséquences d’une politique spatiale et d’un aménagement stratégique. Les résultats de simulation aideront les décideurs dans leurs choix. Ceci suppose que les collectivités doivent se doter d’un outil intégré d’aide à la décision afin de simuler les impacts des projets d’aménagement. Mais la modélisation d’un système complexe comme la ville est un exercice difficile et épineux. Cette difficulté de modélisation peut être attribuée à un certain nombre de contraintes. 

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1- La prise en compte des échelles d’articulation 

il est nécessaire de pouvoir distinguer les niveaux d’agrégation adaptés dans l’analyse de phénomènes se déroulant sur plusieurs niveaux d’organisation. Par exemple, il est très difficile (voire impossible dans une démarche non asynchrone) de relier la taille d’un effectif aux prises de décisions par les individus d’un système [Winder, 1999]. On peut dire que ces niveaux d’analyse sont ‘‘rigides’’ entre eux puisqu’il n’est pas aisé de faire correspondre des comportements observés à l’échelle microscopique à des variables globales mesurées à l’échelle macroscopique. Or la compréhension des structures spatiales nécessite une analyse systématique et complète du domaine de validité des paramètres afin d’évaluer l’impact des différents processus sur les structures émergentes et mesurées au niveau globale [Cocu et Caruso, 2002].

2- Le réalisme des paramètres : pour des raisons d’utilisation pratique et de prise en compte effective de la réalité, le modélisateur introduit dans les équations un grand nombre de paramètres relativement difficile à estimer. Ce qui affaiblit le degré de prédiction du modèle. 

Les données qualitatives :

de par leur nature même, et en raison du point précédent (c’est-à-dire la sélectivité des variables et paramètres indispensables à l’interprétation et au calibrage du modèle), il devient nécessaire d’intégrer des variables qualitatives dans les modèles, même si on n’a pas toujours la possibilité de réaliser des scénarii de simulation pour faire varier leurs valeurs extrêmes afin d’appréhender l’ensemble des trajectoires possibles du modèle. Toutefois, les acquis de la théorie des sous ensembles flous [Rolland-May, 2000 ; Tannier, 2000 ; Nicot, 2007, op. cit.] permettent de contourner cette contrainte. 

La prise en compte de la dimension cognitive 

la représentation du comportement humain, des connaissances explicites et/ou implicites ainsi que la subjectivité relative à l’objet d’étude aussi bien au plan socio-économique qu’au plan spatio-temporel s’avère une contrainte sine qua non pour une véritable simulation de la dynamique urbaine. Les formalismes issus de l’intelligence artificielle (IA) de l’intelligence artificielle distribuée (IAD) constituent d’ores et déjà des outils [Frankhauser et al., 1998 ; Dauce, 2002] mieux adaptés à ce type de modélisation. Fort de ces contraintes, et s’appuyant sur quelques travaux fondateurs de modélisation et de simulation des phénomènes urbains [Antoni, 2003 ; Caruso, 2003, op. cit. ; Cocu et Caruso 2002, op. cit. ; Frankhauser et al., 1995, op. cit. ; Frankhauser et al., 1997, op. cit. ; Frankhauser et al., 1998, op. cit. ; Treuil et al., 2001 ; Vanbergue, 2003 ; Weber, 1999, op. cit. ; etc.], nous proposons dans cette thèse de réaliser un modèle de simulation de la mobilité résidentielle. Ce modèle sera issu du couplage d’un modèle multi agent et d’un modèle d’automate cellulaire (cf. Chapitre 6). En effet, les systèmes multi agent apportent une solution radicalement nouvelle [Drogoul et al., 2004 ; Guessoum, 2002] au concept même de modèle et de simulation dans les sciences humaines et sociales. En l’occurrence dans les applications géographiques et d’aménagement du territoire, ils offrent la possibilité de représenter directement les individus ou groupes d’individus (agents), leur comportement dans le temps et leur interaction à l’échelle spatiale (par le biais des automates cellulaires) et organisationnelle.

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