Modélisation, simulation et fiabilité des matériaux à changement de phase pour l’automobile et l’aéronautique
Investigation numérique des systèmes de refroidissement à base des MCP
Ce chapitre présente une étude numérique ecace d’un dissipateur thermique à base de MCP. Ceci an de déterminer sa conguration optimale qui garantit une meilleure gestion thermique. L’ecacité du modèle proposé est vériée en se basant sur des données expérimentales disponibles dans la littérature. Une comparaison entre un dissipateur thermique avec et sans matériau à changement de phase a été réalisée. En outre, une analyse détaillée de l’eet des diérents paramètres liée principalement à la géométrie, aux conditions aux limites et aux propriétés du matériau est proposée. L’étude paramétrique permet nalement à dénir une conception optimale avec une performance thermique ecace, tant pour les phases de charge que de décharge.
Description du problème
Au cours de ces dernières décennies, la gestion thermique, notamment dans le domaine de la mécatronique, pose un problème complexe qui a retenu l’attention des chercheurs dans plusieurs domaines, tels que les ordinateurs portables [33], les smartphones [34, 35], caméras vidéo numériques, automobiles et même avions [21, 36, 37] etc. L’augmentation du développement de la technologie implique une diminution de la taille des composants électroniques. Par conséquent, plusieurs problèmes peuvent apparaitre liée principalement à des raisons thermiques. En fait, un ux thermique élevé généré par les composants électroniques peut conduire à une panne ou un mal-fonctionnement. Pour éviter ces problèmes, une gestion thermique ecace est nécessaire. Dans la littérature, plusieurs méthodes de dissipation thermique des dispositifs actifs ont été développées [3840]. Certains de ces systèmes de refroidissement sont basés sur les matériaux à changement de phase [4147] . En fait, il a été démontré que cette nouvelle technologie est plus ecace, en particulier dans le cas d’appareils qui fonctionnent par intermittence pendant de courtes périodes [42]. La sélection des MCP pour une application spécique est basée sur la température de fonctionnement maximale de l’appareil. C’est-à-dire que la température de fusion du MCP doit être inférieure à la température de fonctionnement maximale du composant. En général, la température globale maximale autorisée d’un tel composant ne doit pas dépasser 85◦C à 120◦C [48]. Généralement, le cuivre et l’aluminium sont les métaux les plus utilisés pour améliorer la gestion thermique globale du dissipateur thermique. Malgré le fait que la valeur de la conductivité thermique de l’aluminium soit inférieure à celle du cuivre, son utilisation est plus favorable. En eet, il se caractérise par sa faible densité, sa résistance à la corrosion et aussi sa facilité de fabrication. Une étude permettant d’évaluer le taux de stockage thermique d’un MCP par rapport à celui d’un composite MCP-mousse métallique a été présenté par Xu et al. [49]. Une application sur les dispositifs de stockage thermique multicouche à plaques parallèles a été proposé. Cette étude montre que l’utilisation des composites MCP-mousse métallique est requise pour le processus de stockage thermique. De plus ,Xi H.J [50] a étudié le transport thermique dans des microcanaux partiellement remplis de milieux microporeux en considérant l’inertie d’écoulement, l’écoulement/glissements thermiques, le non-équilibre thermique et l’asymétrie thermique. Nazzi Ehms et al. [51] présentent une revue des modèles numériques à grille xe pour la solidication et la fusion des MCP. Cette étude démontre que le modèle enthalpie porosité est le modèle numérique le plus recommandé pour étudier les MCP. De plus, une nouvelle approche a été proposée an de déterminer les performances de calcul dans les simulations numériques transitoires. Également, dans [52], les auteurs présentent une analyse numérique des matériaux à changement de phase (MCP) où le processus de solidication de l’érythritol dans les sphères a été étudié. Pour vérier les performances de transfert thermique d’un dissipateur de chaleur à base de MCP, sous forme d’une matrice à ailettes à plaques, Baby et Balaji [42] ont mené une étude expérimentale pour diérents cas avec des ux de chaleurs constants et cyclique. Une comparaison sur des systèmes de refroidissement sans et avec MCP à diérents niveaux de chargement a été proposée. L’objectif de ce chapitre est de proposer une conception optimale, en se basant sur une étude numérique du système de refroidissement à base du MCP étudié. L’ecacité du modèle proposé est vériée numériquement en les comparant avec des données expérimentales présentées par Baby et Balaji [42]. Le système de refroidissement étudié est composé d’un dissipateur thermique sous forme d’une matrice à ailettes en aluminium. D’autre part, le n-Eicosane est utilisé comme MCP pour améliorer le comportement de stockage thermique du modèle proposé. Ainsi, pour avoir une meilleure précision des résultats, tous les côtés du système de refroidissement sont supposés adiabatiques. Une étude paramétrique est ensuite proposée, où quatre cas sont étudiés. L’objectif principal est donc de comparer les performances thermiques lors du changement (i) du matériau MCP (ii) du niveau de ux thermique (iii) de la fraction volumique et (iv) de la géométrie du dissipateur thermique. Pour chaque cas, la comparaison des performances thermiques est basée sur l’étude de deux phases d’excitation du ux thermique : phase de charge et phase de décharge. Une conception optimale d’un système de refroidissement est alors proposée. Cette conception présente une gestion thermique ecace.
Analyse par éléments nis des systèmes de refroidissement à base des MCP
Formulation mathématique du comportement des MCP
La chaleur générée par le composant électronique est transférée à toutes les surfaces du dissipateur thermique par conduction. Une partie de la chaleur stockée dans le dissipateur thermique est évacuée dans l’air ambiant par convection naturelle et rayonnement. D’autre part, l’absorption de l’énergie par le MCP provoque sa transformation de solide en liquide, et la dissipation de l’énergie provoque sa transformation du liquide en solide. • Conservation de l’énergie : On suppose que les propriétés thermo-physiques du MCP sont indépendantes de la température et uniquement l’équation de conduction est prise en considération comme présentée dans l’équation (2.1) : ρCp( ∂T ∂t + u ∂T ∂x + v ∂T ∂y + w ∂T ∂z ) = λ( ∂ 2T ∂x2 + ∂ 2T ∂y2 + ∂ 2T ∂z2 ) + Sh (2.1) Où u, v et w présentent les composantes de vitesse respectivement dans les directions x, y et z. Notant que λ, Cp et ρ sont respectivement la conductivité thermique, la chaleur spécique de fusion et la densité de l’aluminium. Le stockage de chaleur latente, dû à la fusion, est déterminé à partir du terme de source d’énergie Sh et il peut s’écrire comme suit : Sh = − ∂ ∂t(ρ∆H) (2.2) L’enthalpie totale du MCP est calculée comme la somme de l’enthalpie spécique hs et la chaleur latente ∆H. H = hs + ∆H (2.3) L’enthalpie spécique hs peut être calculée comme présentée par l’équation (2.4) : hs = Z T Tref Cp dT + hs,ref (2.4) De plus, la chaleur latente ∆H peut être déterminée par : ∆H = ξLf (2.5) Comme présenté dans l’équation (2.5), ξ et Lf se réfèrent respectivement à la fraction liquide et à la chaleur latente de fusion du MCP. Bessem DEBICH 34 Chapitre 2. Investigation numérique des systèmes de refroidissement à base des MCP Le paramètre ξ présente la quantité liquide par rapport au volume total de MCP. Il varie de 0 à 1 selon l’état du MCP et il est déni comme présenté dans l’équation (2.6) : ξ = 0 if T ≤ Ts T −Ts Tl−Ts if Ts < T < Tl 1 if T ≥ Tl (2.6) D’après les équations (2.3) à (2.5), l’enthalpie totale H de MCP peut être donnée comme présentée dans l’équation (2.7) : H = Z T Tref Cp dT + hs,ref + ξLf (2.7) Les équations régissant la quantité de mouvement et la conservation de la masse sont dénies comme suit : • Conservation du moment : ρ( ∂u ∂t + ∂(u 2 ) ∂x + ∂(uv) ∂y + ∂(uw) ∂z ) = − ∂P ∂x + µ[ ∂ 2u ∂x2 + ∂ 2u ∂y2 + ∂ 2u ∂z2 ] + S.u (2.8) ρ( ∂v ∂t + ∂(uv) ∂x + ∂(v 2 ) ∂y + ∂(vw) ∂z ) = − ∂P ∂y + µ[ ∂ 2 v ∂x2 + ∂ 2 v ∂y2 + ∂ 2 v ∂z2 ] + S.v (2.9) ρ( ∂w ∂t + ∂(uw) ∂x + ∂(vw) ∂y + ∂(w 2 ) ∂z ) = − ∂P ∂z + µ[ ∂ 2w ∂x2 + ∂ 2w ∂y2 + ∂ 2w ∂z2 ] − ρgαw(T − Ts) + S.w (2.10) Notant que : αw, µ, P et g présentent respectivement le coecient de dilatation thermique, la viscosité dynamique, la pression et l’accélération gravitationnelle. En raison de la direction de l’accélération gravitationnelle (direction z négative), l’approximation de Boussinesq est calculée en ajoutant le terme (ρgαw(T −Ts)) comme mentionné dans l’équation (2.10). Le terme source S dans les équations de conservation des moments est présenté par : S = (1 − ξ) 2 (ξ 3 + ε) Am (2.11) Dans l’équation (2.11), ε est un petit paramètre positif (ε = 10−10) utilisé pour éviter la division par zéro. La constante Am est le nombre consécutif dans la région pâteuse. Am est considérée égale à 105 comme montrée dans plusieurs études [5355]. • Conservation de masse : ∂ρ ∂t + ∂(ρu) ∂x + ∂(ρv) ∂y + ∂(ρw) ∂z = 0 (2.12) Bessem DEBICH 35 Chapitre 2. Investigation numérique des systèmes de refroidissement à base des MCP On peut considérer que le liquide du MCP est un uide newtonien incompressible du fait que la densité du MCP est invariable( ∂ρ ∂t = 0). L’équation (2.12) peut s’écrire comme suit : ∂(ρu) ∂x + ∂(ρv) ∂y + ∂(ρw) ∂z = 0 (2.13) Les démonstrations de ces formulations mathématiques peuvent être trouvées dans des nombreux ouvrages dont ceux de Wang et Yang [53, 54], Shatikian et al. [55] et Nayak et al. [56]. 2.3.2 Description du modèle Le dissipateur thermique étudié a été proposé par Baby et Balaji dans [42]. La gure 2.1 présente le modèle étudié du dissipateur thermique à base d’aluminium et composé d’une matrice d’ailettes. Il y a 4×4 cavités remplis avec n-Eicosane en tant que MCP. Figure 2.1 Dissipateur thermique étudié (a) : photo réelle [42] et (b) : modèle 3D Tous les côtés du dissipateur de chaleur sont isolés avec du liège, à l’exception de la face supérieure, comme le montré dans la gure 2.2. Une feuille de plexiglas est placée sur cette face ainsi qu’une garniture en caoutchouc pour l’étanchéité. An de reproduire la chaleur générée par le composant électronique, une plaque chauante a été placée à la base du dissipateur thermique. Figure 2.2 (a) : photo réelle de l’assemblage [42] et (b) : Coupe du modèle de l’assemblage Bessem DEBICH 36 Chapitre 2. Investigation numérique des systèmes de refroidissement à base des MCP 2.3.3 Géométrie et conditions aux limites La géométrie détaillée du dissipateur de chaleur est présentée dans la gure 2.3. Le dissipateur de chaleur à ailettes à plaques est en aluminium de dimensions 80×62mm2 et de hauteur de 25 mm. L’épaisseur de paroi latérale de 7 mm. Les cavités sont remplies du MCP d’une hauteur de 20 mm. Les propriétés des matériaux de chaque composant de l’assemblage sont mentionnées dans le tableau 2.1. Figure 2.3 Géométrie du dissipateur thermique Tableau 2.1 Propriétés thermo-physiques des matériaux Matériau conductivité thermique chaleur spécique chaleur latente point de solidication point de fusion densité (W/m.K) (kJ/kgK) (kJ/kg) (◦C ) (◦C ) (kg/m3) Aluminum 202.4 0.87 – – 606.4 2719 Liège 0.045 0.35 – – – 120 Caoutchouc 0,16 0.001 – – – 1190 Plexiglass 0,19 1.47 – – – 1190 n-Eicosane 0.39 (s) 1.9 (s) 237.4 35.5 36.5 810 (s) 0.157 (l) 2.2 (l) 770 (l) Pour modéliser l’eet de changement de phase dans le dissipateur thermique à base du MCP, la méthode enthalpie-porosité est adoptée. Les hypothèses suivantes ont été prises dans la présente étude : – Le matériau du dissipateur thermique est isotrope et homogène. – Il existe un équilibre thermique local entre le MCP liquide et les ailettes. – En supposant que les propriétés thermo-physiques des ailettes et du MCP restent constantes quelles que soient la phase et la température. Bessem DEBICH 37 Chapitre 2. Investigation numérique des systèmes de refroidissement à base des MCP Notant que seule la valeur de la température de fusion du n-Eicosane a été identiée dans [42]. Cependant, pour des raisons liées à la modélisation numérique, une plage de températures de la phase de chaleur latente a été considérée ∆T = Tliq − Tsol = 1◦C [57]. Ici, Tsol et Tliq représentent respectivement la température de solidication et de fusion du MCP (voir tableau 2.1). Pour résoudre les équations qui régissent dans ce cas, les conditions aux limites prises en compte sont les suivantes : – t=0, T=Tamb= 27◦C, ξ= 0. Autrement dit, à t = 0 l’assemblage est exposé à une température ambiante Tamb et le MCP est à l’état solide. – Flux thermique à la base du dissipateur thermique : −λ ∂T ∂x x = 10 → 70 y = 10 → 52 z = 2 = −λ ∂T ∂y x = 10 → 70 y = 10 → 52 z = 2 = Q 2.3.4 Résultats préliminaires et discussions Pour étudier le dissipateur thermique basé sur les MCP, ANSYS Workbench v17.2 est utilisé comme logiciel de calcul par éléments nis (FE). Le modèle par éléments nis du dissipateur thermique est présenté sur la gure 2.4. Le système de refroidissement étudié (sans MCP) a été discrétisé en un nombre total de 49449 éléments thermiques tétraédriques à 10 n÷uds (gure 2.4 (a)). Figure 2.4 Maillage du dissipateur thermique (a) : sans MCP et (b) : avec MCP Six diérents maillages ont été étudiés. La gure 2.5 présente une étude de convergence en considérant la température maximale atteinte (courbe bleue). Le temps de simulation pour chaque conguration de maillage est présenté par la courbe rouge. À partir de ces résultats, et pour un meilleur compromis entre précision et coût, le maillage de 49449 éléments est sélectionné dans cette étude.
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