Modélisation d’un système d’acquisition

Afin de proposer des solutions originales et de valider notre approche, nous avons besoin d’un modèle bio-physiologique de fibres ayant des vitesses de propagation différentes. La validité du modèle dépend de sa justesse à décrire les variations des potentiels extra-cellulaires pendant la conduction de l’influx nerveux, mais il est aussi important d’avoir un modèle assez simple et générique pour établir facilement des comparaisons entre différents contextes. Dans notre étude, nous avons considéré un modèle homogène et isotrope du milieu composant le nerf. Ce modèle sera ensuite couplé au modèle d’un système électronique d’acquisition de bio-signaux.

La modélisation complète de la chaîne d’acquisition comporte quatre parties   que nous allons détailler dans les sections suivantes :

Le Modèle de la fibre qui se focalise sur les fibres myélinisées. Pour ce type de fibre la conduction est une conduction saltatoire à l’opposé de la conduction continue des fibres non-myélénisées. Le modèle de fibre proposé permet de simuler les courants transmembranaires en tenant compte de ce mode de conduction particulier qui permet de conduire les influx nerveux plus rapidement.
Le Modèle du milieu extra-cellulaire permettant de calculer le potentiel extra cellulaire induit par les courants transmembranaires. Afin de faciliter le calcul, on considère un modèle qui repose sur un milieu supposé infini et de conductivité constante.
Le Modèle d’électrode Ce modèle permet de prendre en compte des paramètres réalistes tels que la largeur et le nombre des contacts ainsi que la distance inter-pôle. Ces paramètres correspondent à ceux d’une électrode cuff multipolaire dimensionnée pour permettre la discrimination des vitesses de propagation dans le fibres nerveuses. Ces paramètres sont généralement contraints pour des raisons anatomiques et d’amplitude attendue du signal [3].
Le Modèle du préamplificateur qui permet le pré-traitement tripolaire ou dipolaire. Ce prétraitement est nécessaire pour dissocier le signal ENG du signal EMG.

Modèle bio-physiologique

La modélisation de la chaîne d’acquisition complète se décompose en plusieurs blocs. Dans cette section, nous nous intéressons à la génération du potentiel extra cellulaire en se basant sur les courants transmembranaires générés par les fibres nerveuses. Le cas d’étude des fibres nerveuses myélinisées implique la modélisation de la conduction saltatoire des potentiels d’action qui ne peuvent se déclencher qu’aux nœuds de Ranvier.

Modélisation des courants membranaires des fibres nerveuses myélinisées 

Ce Modèle est extrait de la publication de Warman et al. [88] lui même basé sur le modèle de Hodgkin-Huxley [27]. Il se présente sous la forme d’un modèle de réseau d’éléments passifs et actifs. Ga représente la conductance axoplasmique séparant deux NDR (Noeud De Ranvier). Chaque partie active présente un nœud de Ranvier. Cette partie active est composée de la capacité de membrane et des conductances de canaux ioniques. Rappelons que la distance internodale Lmyel est proportionnelle au diamètre de la fibre D et au diamètre du noeud de Ranvier (diamètre de l’axone) [88].

Ce modèle est généralement utilisé pour étudier l’activation de différents types de fibres sous une stimulation électrique donnée. Même si nous ne sommes pas dans le même contexte, ce modèle peut nous permettre d’extraire les courants transmembranaires. Ce modèle décrit qu’une stimulation extra-cellulaire peut être vue comme une stimulation en courant intranodal . Les champs électriques appliqués à une fibre sont équivalents à un ensemble de sources de courant appliqués de manière intracellulaire.

Validité du modèle sur la vitesse de propagation des fibres nerveuses 

Des résultats d’études présents dans la littérature indiquent que la vitesse de propagation des fibres nerveuses peut être proportionnelle au diamètre de la fibre, en particulier pour les fibres myélinisées présentant une similarité structurale [71, 18]. Nous considèrerons dans notre modèle que la distance entre les nœuds varie de façon linéaire avec le diamètre des fibres. Pour comparer nos résultats, nous déterminons la vitesse de propagation des fibres modélisées. Ce calcul se fait en divisant la distance séparant deux nœuds de Ranvier consécutifs par le temps (δt) qui sépare l’enregistrement des potentiels correspondants. La distance entre deux nœuds de Ranvier correspond à la longueur de myéline (Lmyel).Le temps qui sépare deux potentiels δt peut être estimée égal à 24µs. Dans ce contexte, la vitesse de propagation, d’une fibre ayant une longueur de myéline égale à 500µm sera égale à 20,8 m/s.  on obtient 20.8, 41.6, 62.5 et 83.3 m/s. Nous sommes bien dans la gamme de vitesse de propagation mesurée sur les fibres nerveuses myélinisées qui est généralement comprise entre 20 m/s et 90 m/s. Dans notre modèle il existe bien une relation linéaire entre la vitesse de propagation et le diamètre de la fibre. Les simulations ont montrés que le rapport est de 4.22 , il est légèrement inférieur à celui de la littérature [41] (qui et de 6) mais reste dans le même ordre de grandeur. D’une manière générale on peut noter que la dynamique des signaux est identique quelque soit le type de fibre (même délai δt d’un NDR à un autre).

Il existe différents modèles pour le calcul des potentiels extra-cellulaire. Certains modèles nécessitent des calculs importants, comme les modèles à éléments finis (FEM). Ce type de modèle utilise un maillage volumique en 3D et permet de prendre en compte des morphologies réalistes, les paramètres électriques comme la conductivité et la permittivité diélectrique [93, 47, 6, 22], et enfin les configurations et les géométries des électrodes [63, 7, 102, 26]. On trouve de même dans la littérature la méthode des éléments finis de frontière (BEM) qui est dérivée des méthodes de modélisations classiques en éléments finis. Ce type de modélisation est particulièrement adapté à la modélisation dans des milieux infinis. Cette méthode utilise aussi des maillages, mais uniquement en surface (mailles triangulaires). La précision de la méthode BEM et le taux de convergence peuvent être plus élevés dans certains cas que la méthode classique d’éléments finis [Kybic05].

Les modèles cités ci-dessus sont des modèles fiables mais extrêmement gourmands en calculs. En dehors de ces techniques à éléments finis on peut trouver des méthodes alternatives comme les méthodes analytiques qui peuvent permettre des estimations précises en maintenant des temps de calcul raisonnables. Dans ce contexte, pour calculer le potentiel présent sur l’électrode nous utilisons les équations analytiques d’un modèle homogène infini en considérant chaque nœud de Ranvier comme une source de courant ponctuelle. Cette approximation se justifie par la taille du nœud de Ranvier qui est négligeable par rapport aux dimensions de l’électrode de mesure.

L’estimation du potentiel extra-cellulaire créé au point M à la surface du nerf nécessite la détermination de la résistance de transfert liant le potentiel aux courants générés par chaque NDR. Nous avons considéré pour ce calcul que le milieu est homogène et isotrope dans un volume infini [99]. Dans ces conditions, le champ électrique généré par un axone possède tout naturellement une symétrie de révolution autour de l’axone.

Table des matières

Introduction
1 État de l’art
1.1 Contexte
1.2 Recueil ENG
1.2.1 Notions de base sur le système nerveux
1.2.1.1 Organisation du système nerveux
1.2.1.2 Axones : structures et fonctions
1.2.1.3 Propagation du potentiel d’action
1.2.1.4 Vitesse de propagation du potentiel d’action
1.2.2 Acquisition des signaux ENG
1.2.2.1 Électrodes intra-neurales
1.2.2.2 Électrodes extra-neurales
1.3 Augmentation de la Sélectivité des signaux ENG
1.3.1 Réjection des signaux EMG
1.3.2 Sélectivité spatiale
1.3.3 Sélectivité par vitesse de propagation
1.4 Conclusion
2 Modélisation d’un système d’acquisition
2.1 Motivations
2.2 Modèle bio-physiologique
2.2.1 Modélisation des courants membranaires des fibres nerveuses myélinisées
2.2.1.1 Courants nodaux simulés
2.2.1.2 Validité du modèle sur la vitesse de propagation des fibres nerveuses
2.2.2 Calcul du potentiel extra-cellulaire à la surface du nerf
2.3 Modélisation d’une électrode
2.3.1 Paramètres de l’électrode
2.4 Étage préamplificateur
2.4.1 Potentiel extra-cellulaire mesuré à partir d’électrode modélisée
2.5 Conclusion
3 Sélectivité de vitesse
3.1 Représentation spatio-temporelle du signal extra-cellulaire
3.2 Étude spectrale mono-dimensionnelle
3.2.1 Spectre temporel
3.2.2 Spectre spatial
3.3 Étude spectrale bi-dimensionnelle
3.3.1 Un peu de théorie
3.3.2 Visions spectrales
3.4 Des filtres idéaux
3.5 Un peu plus de réalisme
3.6 Conclusion
Conclusion

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