MODÉLISATION DES TRANSFERTS AÉRAULIQUES DANS LES BÂTIMENTS
MODÈLES MONO-ZONE
En utilisant un modèle mono-zone, on considère le bâtiment comme une enveloppe dont l’intérieur possède des propriétés uniformes (température, pression, concentration de polluant…). Ces modèles permettent une évaluation globale des débits d’air au niveau du bâtiment en entrant les caractéristiques de son enveloppe. Ils constituent une approche intéressante et permettent de se faire une bonne idée du fonctionnement global d’un bâtiment. [ALLARD & AL., 1998] répertorient les principaux modèles existants. Figure 3 Représentation du problème dans le cas d’une modélisation monozone Etant basés sur des hypothèses simplificatrices (sur la configuration du bâtiment et sur les paramètres influant les mouvements d’air), ils ne permettent pas de traiter de la problématique du confort ou l’efficacité de la ventilation pièce par pièce qui nécessitent le détail du fonctionnement interne du bâtiment. Ils permettent cependant la mise en place de calculs réglementaires forfaitaires, aisément mis en œuvre par l’industrie du bâtiment, et répondent ainsi aux besoins premiers d’optimisation. Dans ce premier chapitre, trois catégories de modèles mono-zone sont présentées. Dans un premier temps, il s’agit d’un modèle empirique où le renouvellement d’air à travers l’enveloppe est uniquement évalué en fonction de la perméabilité à l’air de l’enveloppe. Ensuite, le modèle du Laurence Berkeley National Laboratory introduit la prise en compte des phénomènes physiques moteurs. Enfin, le modèle d’évaluation des débits d’air à travers l’enveloppe de la Réglementation Thermique 2005 prend en compte les phénomènes physiques moteurs et amorce une distribution des défauts d’étanchéité et des entrées d’air sur l’ensemble de l’enveloppe.
ESTIMATION À PARTIR DE LA PERMÉABILITÉ À L’AIR DU BÂTIMENT
Pour déterminer les débits de renouvellement d’air d’un bâtiment, une première approche consiste à les déduire en fonction de la perméabilité globale de l’enveloppe. La méthode la plus simple est celle proposée par [DUBRUL, 1988] qui propose une estimation simplifiée du débit d’infiltration d’air à partir de la valeur de n50 (renouvellement d’air sous 50 Pa). 20 50 inf n QV = (1) Chapitre II – Modélisation des transferts aérauliques dans les bâtiments Aide aux choix de conception de bâtiments économes en énergie 19 Avec QV inf Débit d’infiltration d’air (vol.h-1) 50 n Renouvellement d’air sous 50 Pa (vol.h-1) S’il est évident que cette méthode néglige certains paramètres, son application permet cependant d’obtenir un ordre de grandeur correct sur le débit d’air provoqué par les infiltrations. Une variante de cette écriture est proposée dans la norme de calcul des déperditions calorifiques de base [NF EN 12831, 2004]. Le débit d’air d’infiltration, Vinf,i en m3 .h-1, pour l’espace chauffé i, induit par le vent et le tirage thermique sur l’enveloppe du bâtiment, y est calculé par : i i i i V V n e ε inf, 50 = 2 (2) Avec Vi Volume de l’espace chauffé i (m3 ) 50 n Taux horaire de renouvellement d’air (h-1), résultant d’une différence de pression de 50 Pa entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment (m3 .h-1) i e Coefficient d’exposition (-) i ε Facteur correctif de hauteur, prenant en compte l’augmentation de la vitesse du vent avec la hauteur de l’espace considéré au-dessus du niveau du sol (-) La valeur de 50 n étant donnée pour le bâtiment entier, un facteur 2 est introduit dans l’équation pour prendre en compte le cas le plus défavorable, dans lequel tout l’air d’infiltration entre sur une seule face du bâtiment. Des valeurs par défaut de 50 n sont données pour différents types de construction de bâtiments (cf. Tableau 2). n50 (h-1 ) Degré d’étanchéité à l’air de l’enveloppe du batiment (qualité des joints de fenêtre) Construction Elevé (joints des fenêtres et portes de haute qualité) Moyen (fenêtres à double vitrage, joints normaux) Bas (fenêtres à simple vitrage, pas de joints) Maisons individuelles < 4 4 – 10 > 10 Bâtiments, autres logements < 2 2 – 5 > 5 Tableau 2 Degré d’étanchéité à l’air du bâtiment [NF EN 12831, 2004] Les valeurs par défaut du coefficient d’exposition et du facteur de correction de hauteur sont données dans les tableaux de la page 20. Chapitre II – Modélisation des transferts aérauliques dans les bâtiments 20 Aide aux choix de conception de bâtiments économes en énergie i e Classe d’exposition Espaces chauffé sans ouvertures exposées Espace chauffé avec une ouverture exposée Espace chauffé avec plus d’une ouverture exposée Site non abrité (bâtiments en zone ventée, bâtiments de grande hauteur en centre ville) 0 0,03 0,05 Site modérément abrité (bâtiments en campagne protégés par des arbres ou par d’autres bâtiments, banlieues) 0 0,02 0,03 Site très abrité (bâtiments de taille moyenne en centre ville, bâtiments en forêt) 0 0,01 0,02 Tableau 3 Classe d’exposition du bâtiment [NF EN 12831, 2004] Hauteur de l’espace chauffé au dessus du sol (du centre du local au niveau du sol) i ε 0 – 10 m 1,0 > 10 – 30 m 1,2 > 30 m 1,5 Tableau 4 Hauteur de l’espace chauffé au dessus du sol Tableau [NF EN 12831, 2004] La perméabilité à l’air de l’enveloppe n’est qu’un des facteurs influençant le renouvellement d’air à travers l’enveloppe. Cette approche néglige les phénomènes physiques moteurs (vent et tirage thermique du à la différence de température) qui vont influer sur les mouvements d’air entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment. Des modèles théoriques simplifiés permettent de prendre en compte ces paramètres.
MODÈLES THÉORIQUES SIMPLIFIÉS
Le modèle du LBL, proposé par [SHERMAN & GRIMSRUD, 1980] repose sur l’évaluation du débit d’infiltration à travers l’enveloppe à partir de la valeur de la surface équivalente de fuite du bâtiment. Cette approche prend en compte la différence de température entre l’intérieur et l’extérieur ainsi que la vitesse du vent (auxquelles on affecte fs et fw, des coefficients dépendants des caractéristiques du bâtiment). On détermine le débit d’infiltration par la relation suivante : s w Uz Q ELA f T f 2 2 inf = ∆ + (3) 2/3 2/1 2 2 2( ) 1 3 1 2/ − − + = o s T gh R R X f (4) 3/1 f C 1(‘ R) w = − (5) ELA ELA ELA R toiture + plancher = (6) ELA ELA ELA X toiture − plancher = (7) Chapitre II – Modélisation des transferts aérauliques dans les bâtiments Aide aux choix de conception de bâtiments économes en énergie 21 Avec C’ Degré d’exposition au vent (-) Uz Vitesse du vent sur le site à l’altitude z (m.s-1) ∆T Différence de température l’intérieur et l’extérieur (K) To Température intérieure (K) ELA Surface équivalente de fuite du bâtiment (m²) (évaluée par une mesure sur le site) h Hauteur entre la fuite la plus haute et la plus basse (m) g Accélération de la pesanteur (m.s-2) Degré d’exposition I (Aucune) II (Faible) III (Modérée) IV (Importante) V (Très importante) C’ 0,34 0,3 0,25 0,19 0,11 Tableau 5 Degré d’exposition au vent du bâtiment [SHERMAN & GRIMSRUD, 1980] La vitesse du vent issue des données météorologique est ramenée à celle du site par une loi de puissance prenant en compte les caractéristiques du site (exposition au vent et rugosité du terrain) : ‘ ‘ (‘ 10/’ ) ( 10/ ) γ γ α α z z Uz = Uz (8) Avec Uz Vitesse du vent sur le site à l’altitude z (m.s-1) Uz’ Vitesse du vent sur le site à l’altitude z’ (m.s-1) α et γ Constantes dépendantes des conditions du terrain (-) α’ et γ ‘ Constantes dépendantes des conditions du terrain de la station météorologique (-) Description du terrain γ et γ’ α et α’ Périmètre dégagé de 5 km autour d’un plan d’eau 0,10 1,30 Terrain avec obstacles isolés (bâtiments ou arbres éloignés les uns des autres) 0,15 1,00 Espace rural (arbres, petits bâtiments…) 0,20 0,85 Espace urbain, industriel ou forestier 0,25 0,67 Centre urbain dense 0,35 0,47 Tableau 6 Paramètres de description du terrain [SHERMAN & GRIMSRUD, 1980] [ASHRAE, 2005] propose une reformulation simplifiée du modèle en prenant des hypothèses moyennes pour caractériser le bâtiment (conversion des données météorologiques relatives au vent pour un site de type ‘‘espace rural’’, la moitié des infiltrations a lieu au niveau des façades : R = 0,5, la répartition des défauts d’étanchéité entre le plancher haut et le plancher bas est égale : X = 0, la hauteur d’étage du bâtiment vaut 2,5 m). 2 1000 inf C T C U E Q = s∆ + w (9) Chapitre II – Modélisation des transferts aérauliques dans les bâtiments 22 Aide aux choix de conception de bâtiments économes en énergie Avec Qinf Débit d’infiltration (m3 .s -1) E Surface de fuite équivalente (cm²) Cs Coefficient de tirage thermique (L².s- ².cm-4.K-1) ∆T Différence moyenne de température sur l’intervalle de calcul (K) Cw Coefficient de pression du vent (L².s- ².cm-4 .m -2 .s -2) U Vitesse du vent à la station météorologique (m.s-1) Nombre d’étages 1 2 3 Cs 0,000 145 0,000 290 0,000 435 Tableau 7 Coefficient de tirage thermique en fonction du nombre d’étages [ASHRAE, 2005] Nombre d’étages Degré d’exposition 1 2 3 I 0,000 319 0,000 420 0,000 494 II 0,000 246 0,000 325 0,000 382 III 0,000 174 0,000 231 0,000 271 IV 0,000 104 0,000 137 0,000 161 V 0,000 032 0,000 042 0,000 049 Tableau 8 Coefficient de pression au vent pour différentes configurations [ASHRAE, 2005] Ce type de modèle permet d’obtenir des valeurs moyennes du renouvellement d’air pour le bâtiment dans son ensemble et pour des conditions météorologiques données. En revanche, l’influence de certains composants (entrées d’air, façade…) ne peut être définie ce qui se révèle limitant dans le cadre du développement d’un outil permettant d’évaluer l’influence de choix de conceptions. Dans cette optique, des modèles mono-zone détaillés ont été introduits.